Retour à la réalité
L'angoisse étreignait le cœur d'Eddie alors qu'il se précipitait dans le couloir de l'hôpital, ses pas résonnant sur le sol carrelé dans un rythme effréné. Quand il avait reçu l'appel, il n'avait pas réfléchi. Tout ce qu'il savait c'était que Buck avait retrouvé Maddie et qu'ils étaient à l'hôpital.
Il arriva dans le hall d'attente et scruta chaque visage. Ses yeux cherchaient frénétiquement des signes de vie, espérant apercevoir Buck et Maddie parmi la foule de patients et de médecins qui se pressaient autour de lui.
Son cœur manqua un battement quand il les vit enfin, assis sur un banc dans un coin du hall. Buck semblait anormalement calme, son visage pâle et marqué par la fatigue. Maddie était blottie contre lui, son visage toujours marqué par les traces des épreuves qu'elle avait traversées.
Ils étaient tous les deux couverts de sang et Eddie sentit son cœur se serrer.
Alors qu'il allait s'élancer vers eux, il fut retenu par Lars qui échangea un regard inquiet avec lui. Eddie ne savait pas grand-chose de lui, excepté que Buck était comme son petit frère et qu'il s'inquiétait pour lui.
– Il va avoir besoin de toi, le prévint-il.
– Qu'est-ce qui s'est passé ? s'inquiéta Eddie.
– Ce qui était prévisible qu'il se passe. On a limité les dégâts mais il est choqué, même s'il essaie de le cacher. Je te fais confiance.
– Je vais prendre soin de lui, promit-il.
Lars quitta la salle et Eddie salua d'un signe de tête les amis de Buck qui s'en allaient. Eddie était heureux que Buck n'ait pas été seul, que des professionnels aient été avec lui.
Il avait été un peu protégé.
Il se précipita vers eux, un mélange de soulagement et d'angoisse tourbillonnant dans son esprit.
Il avait eu peur de ce qu'il allait trouver, mais il était soulagé de les voir en vie.
– Buck, Maddie ! s'exclama-t-il en s'agenouillant à côté d'eux. Qu'est-ce qui s'est passé ?
– Mme Buckley ? l'interrompit une infirmière. Le médecin va vous voir.
Eddie l'aida à se redresser et l'accompagna jusqu'à l'infirmière qui prit le relai.
Puis, il revint vers son mari qui n'avait pas bougé d'un pouce mais dont le regard continuait de fixer Maddie jusqu'à ce qu'elle ait disparu de sa vue.
– Buck ? murmura-t-il. Querido ?
Buck leva les yeux vers lui, son regard empli de douleur et de culpabilité.
Eddie sentit un frisson lui parcourir l'échine en voyant l'expression sur le visage de son mari, une lueur de choc et de désespoir qui semblait le consumer de l'intérieur.
– Eddie..., murmura-t-il d'une voix brisée, les larmes perlant dans ses yeux fatigués. Je... je voulais le tuer. Je voulais tuer le connard. Je voulais tellement le tuer et maintenant il est mort.
Les mots tombèrent comme un coup de massue sur Eddie, son cœur se serrant douloureusement dans sa poitrine. Il avait craint que Buck ne soit sur le point de commettre l'irréparable, mais l'entendre le dire à voix haute était une toute autre chose.
– Dios, Buck..., souffla-t-il, ses propres yeux s'emplissant de larmes. Je suis tellement désolé. Je suis tellement désolé que tu aies dû vivre ça. Je suis si désolé de ne pas avoir pu te protéger de ça, mi amor.
Il voulait le prendre dans ses bras, le serrer contre lui et lui dire que tout irait bien, mais il sentait que Buck avait besoin de dire ce qu'il ressentait, qu'il avait besoin de vider son cœur de toute la douleur qui l'habitait, même si c'était ici sur le carrelage froid de cette salle d'attente.
Buck se passa une main tremblante sur le visage, semblant presque en état de choc.
– Je ne voulais pas devenir un meurtrier, Eddie. Je ne voulais pas... Mais je ne pouvais pas le laisser s'en sortir après tout ce qu'il a fait à Maddie. J'ai frappé, encore et encore et encore, ajouta-t-il en regardant ses mains. Si Lars et le chef ne m'avaient pas arrêté, je l'aurais frappé jusqu'à ce qu'il meure.
La détresse dans sa voix brisa le cœur d'Eddie en mille morceaux.
Il voulait tellement apaiser la douleur de Buck, lui offrir un peu de réconfort dans cette mer de tourments.
– Oh mi amor..., murmura-t-il doucement, glissant ses mains entre les siennes. Tu n'es pas un meurtrier. Tu as arrêté.
– Mais je voulais le tuer Eddie, je voulais le faire disparaitre de la planète. J'en avais l'intention avant même de partir à sa poursuite. Je veux le tuer depuis des années déjà…
– Et tu ne l'as pas fait, le coupa-t-il. Tu voulais le faire mais tu ne l'as pas fait.
Buck le regarda intensément, les mots perçant l'épaisseur de son crâne.
Eddie voulait qu'il comprenne qu'il n'avait rien fait de mal, qu'il avait agit par pur instinct mais qu'il n'avait pas été jusqu'au bout.
Il n'avait pas franchi la ligne.
– Tu as fait ce qu'il fallait pour protéger Maddie, poursuivit-il. Pour protéger notre famille. C'est tout ce qui compte.
Les paroles d'Eddie semblaient flotter dans l'air, apportant un peu de soulagement à l'âme tourmentée de Buck. Il leva les yeux vers lui, une lueur de gratitude et d'émotion dans son regard fatigué.
– Merci, Eds..., murmura-t-il, sa voix à peine plus qu'un souffle. Merci d'être là pour moi.
Eddie lui adressa un sourire tremblant, ses propres émotions menaçant de le submerger. Il se pencha et embrassa sa tâche de naissance, comme pour lui prouver que même ce qu'il trouvait le plus laid en lui-même, méritait d'être aimé correctement.
Buck lui avait parler plus d'une fois de ce qu'il appelait la marque de la honte mais Eddie aimait lui rappeler que c'était sans nul doute ce qui le rendait spécial. Et depuis qu'il avait vu Athena et Maddie l'embrasser là pour le rassurer, il avait pris l'habitude de faire la même chose.
– Toujours, mi amor. Toujours.
Ils restèrent là, ensemble, dans un silence réconfortant, se tenant mutuellement dans leur douleur et leur chagrin. Mais malgré tout, une lueur d'espoir brillait dans leurs cœurs, une promesse de jours meilleurs à venir.
C'est alors qu'un médecin s'approcha d'eux, son expression sérieuse mais rassurante.
– M. Diaz ? demanda-t-il alors qu'ils relevaient tous les deux la tête vers lui.
Buck se redressa et Eddie l'aida à tenir debout sur ses jambes flageolantes.
Il était encore en état de choc et Eddie était inquiet aussi à cause du sang mais Buck n'était pas assez cohérent pour répondre à ses questions sur son état physique.
– Vous êtes le frère de Mme Buckley ?
– Oui, je… Buck… c'est moi. Est-ce qu'elle… ?
– J'ai de bonnes nouvelles, M. Diaz. Votre sœur va s'en remettre totalement. Elle va avoir besoin de repos mais elle est hors de danger.
Les mots du médecin furent comme une délivrance pour Buck, une bouffée d'air frais dans un océan de tourments. Il s'effondra en larmes dans les bras d'Eddie, laissant échapper tout le poids de son chagrin et de sa peur.
– Maddie..., sanglota-t-il, sa voix étouffée par les larmes. Oh mon Dieu, Maddie...
Eddie le serra contre lui, le berçant doucement alors qu'il laissait aller toute sa douleur.
Il savait que cela prendrait du temps pour que les blessures de Buck guérissent, mais il serait là à chaque étape du chemin, prêt à le soutenir et à l'aimer à travers tout.
– Tout ira bien, querido. Maddie va bien et Chimney sera opérationnel d'ici quelques jours.
– Mon Dieu, je n'ai même plus pensé à lui. Je suis le pire frère du monde.
– Bien sûr que non, le rassura-t-il. Tout va bien, Buck. Tout le monde ira bien. Je te le promets.
Buck se pressa contre lui et Eddie le serra entre ses bras.
En cet instant, dans les bras de l'homme qu'il aimait, Buck semblait se sentir enfin en paix, prêt à affronter l'avenir avec courage et détermination. Et Eddie savait qu'il pourrait surmonter n'importe quoi, temps qu'ils seraient ensemble.
