Seconde période, cours de sport.
L'académie Hunter met l'accent sur les activités physiques avant tout. Un esprit sain ne peut être abrité que par un corps sain, c'est la devise de notre proviseur.
C'est pour ça que les activités de clubs sont importantes ici. Plus on appartient à plusieurs clubs, sportifs de préférence, plus on voit notre moyenne grimper.
Je gère bien les séances épuisantes de sprint de Mr Satotsu, notre prof de sport, un mec chelou aux cheveux gris et à l'imposante moustache qui peut faire du 70km/h en marchant.
Mais ce n'est pas le cas de tout le monde. C'est facile de lâcher prise ici surtout qu'après il y a encore les séances d'entraînement de clubs...
« -Alors t'as réfléchis ? » C'est Kanaria qui me le demande alors qu'elle court à ma droite.
Elle a troqué sa robe patineuse pour un short et un t-shirt qui mettent en avant sa silhouette,au goût des garçons de notre classe qui arrêtent pas de la siffler entre deux tours de terrain.
Je soupire en lui répondant que je n'ai pas encore de réponse . Cette histoire de lettre est devenu notre seul sujet de conversation depuis la première période. Elles m'ont soûlé avec pendant le déjeuner et continuent encore maintenant.
Le problème est que je ne vois aucun intérêt à rechercher mon mystérieux admirateur. J'ai été touché par son attention parce que c'est bien la première fois depuis que cette euphorie autour de ma personne a commencé que quelqu'un voit au delà de mon physique et s'intéresse réellement à ce que j'aime. Mais ça s'arrête là.
Je ne vais pas tomber amoureux de quelqu'un que je ne connais pas et de toute façon ce genre d'émotion est inutile. Aimer n'apporte que des problèmes. C'est une perte de temps en plus d'être une sacrée galère.
Du moins, ce sont les mots de frère...
« -Ça te dérange pas que ce soit un mec ? » Renchérit Amane juste devant nous.
Elle aussi a opté pour le short et le t-shirt. Elle est magnifique en plus avec ses longs cheveux noires remontés en queue de cheval haute. Mais, les mecs ont trop peur d'elle pour tenter quoique ce soit.
« -Non pas tant que ça... »
C'est vrai. Je m'en fiche que ce soit un mec un une meuf. Pour moi, peu importe la personne en face, l'amour s'il est mutuel est une émotion qui devrait transcender la barrière du genre. Gay, hétéro, bi, ça importe peu.
Mais bon, c'est pas pour moi. J'ai pas le temps pour ce genre de futilités. Y a encore trop de choses que je dois régler...
Alors que j'allais tenter de dévier la conversation, j'étends un bruit sourd, quelqu'un vient de tomber, du moins de faire pousser.
« -Bouge de là, tu vois pas que tu gênes ? C'est quoi ce sprint de mongole ? »
Ça vient de derrière moi.
J'ai pas besoin de me retourner pour comprendre ce qui se passe.
Le plus grand vice des gens ici c'est le harcèlement.
Vous voyez, qui dit académie d'excellence dit forcément exigences, perfections, rigueur mais surtout compétition. Écraser les autres, se surpasser et se déchaîner pour atteindre le sommet...Tel est le credo ici.
Alors bien sûr, les nerfs finissent par craquer et vu qu'on est déjà à la moitié du premier trimestre, les moins endurants passent à la moulinette.
Kanaria et Amane aussi ont entendu et n'attendent que mon signal pour qu'on bouge. On se prend pas pour des justiciers ou quoique ce soit, mais ce genre de connerie ça a tendance à me donner la gerbe.
On devient pas meilleur en écrasant les autres. Tout le mérite d'être fort doit venir de soi.
Et puis mes deux potes manqueront jamais une occasion de casser des mâchoires.
On arrête donc notre course et on repart dans le sens inverse, moi à l'avant.
C'est Ponzu leur cible, mauvaise idée. Elle fait partie du club audiovisuel auquel j'appartiens également. Et puis elle me fait bien marrer avec ses cheveux bleus et sa passion pour l'apiculture.
Ils sont trois contre elle. Je connais aussi ces mecs. Imori, Amori et Umori, ces trois boulets étaient titulaires de l'équipe de basket du bahut avant que je ne m'inscrive. Ils m'ont déjà vu à l'œuvre sur le terrain et je crois bien que ça suffit à ce que ces trois cons me craignent assez pour pas chercher à me contredire.
Je m'avance vers Ponzu pour l'aider à se relever, ces enflures l'ont poussé exprès, juste pour l'emmerder. Elle a pas l'air à l'aise, sûrement gêner de passer pour une minable qui a besoin d'être sauvée par quelqu'un d'autre.
Et c'est le cas, elle est faible et fragile. Mais, c'est pas une raison pour s'en prendre à elle.
« -Tu veux quoi toi ? » c'est Imori qui demande, le plus jeunes des trois. Il a toujours tendance à la ramener alors qu'il vaut pas un clou sans ces deux frangins.
« -Du calme c'est Zoldyck...Évites de trop le secouer ou les deux meufs qui lui collent au cul vont nous casser la gueule. Il est rien du tout sans ces deux copines. Tout juste bon à raser les murs.» Ajoute Amori, le plus grand. Fier comme à son habitude.
Ils ont beau jouer les gros durs, ils valent rien. Ce ne sont que des immondices parmi toutes celles qui traînent dans les recoins pourris de ce lycée de connards.
« -J'rase peut être les murs mais j'suis pas assez lâche pour m'en prendre à une fille. Vous n'avez aucune couille les gars. » C'est pourri mais c'est le seul truc qui m'est venu à l'esprit.
Ils se regardent entre eux et éclatent de rire, évidemment.
Ça me fait chier mais je préfère encore éviter la castagne. Mr Satotsu n'est pas loin, je voudrais pas qu'Amane, Kanaria ou moi, nous retrouvions dans une situation délicate. Ça pourrait influencer sur nos moyennes, ce qui nous vaudrait une correction en règle par nos familles respectives.
Je demande à Ponzu de se barrer, je vais gérer. Ça se joue donc entre les trois frères et moi.
« -Pile quand on se marrait. Tu fais chier Zoldyck, t'as rien d'autres à foutre ? » C'est encore Imori qui parle, décidément il se sent poussé des ailes avec son physique de fragile.
« -Si j'étais vous je dégagerais sans faire d'histoire. Vous n'avez pas le niveau, rien que d'la gueule. Les faiblards dans votre genre me donnent envie de vomir. Bande de déchets. » Là c'était stylé, je me reconnais un peu plus.
C'est Imori, forcément, qui craque en premier. Il s'avance, poing en l'air, dans le but de me mettre à terre. J'esquive et le balaie sans effort.
C'était le coup d'envoi. Les trois cherchent à me tomber dessus en même temps pour laver l'honneur de leur frère. Ça va je peux gérer.
Mais soudain, une silhouette. Il est un peu plus grand que moi, les cheveux noirs avec des reflets verts, en épis. Il est rapide, moins que moi mais rapide quand même. En une fraction de seconde, Imori est au seul, le nez en sang.
Kanaria et Amane ont même pas bougé. Le temps semble s'être arrêté.
Et ensuite...
« -Qu'est ce qui se passe là derrière !?»
Mr Satotsu vient de nous griller. Merde.
