Nous sommes dans le bureau du proviseur, ce mec et moi. Amori et ses frangins sont passés avant nous et vue les têtes qu'ils faisaient, ils ont dû en baver. C'est un point positif.

Le type qui est intervenu n'a pas pipé un mot depuis tout à l'heure. Il se contente de regarder le plafond, l'air las. Après avoir mis un coup pareil à un mec, n'importe qui serait dingue avec l'adrénaline post-baston mais lui il ne bronche pas. Il s'en fout.

Il m'intrigue. Je ne l'ai jamais croisé dans les couloirs. C'est un inconnu total pour moi et pourtant je ressens quelque chose quand je le regarde. Pas de l'attirance non, un sentiment plus bizarre.

C'est comme ci ce type émettait une sorte de chaleur, un genre de feu qui ne brûle pas. Chaud mais agréable. C'est une sensation à laquelle je ne suis pas familier alors je préfère garder mes distances pour l'instant.

« -Eh bien vous deux...S'il y'a bien deux personnes dans ce lycée que je ne m'attendais pas à voir ici c'est bien vous. » Souffle Mr Netero en se pinçant l'arrête du nez.

Il rajeunit pas le vieux. Sa longue barbe et ses cheveux sont déjà d'un blanc éclatant et ses rides sont de plus en plus marqué. Pourtant il a l'air de péter la forme.

« -Je ne vais pas passer par quatre chemins. Gon et Kirua vous êtes collés jusqu'à la fin du trimestre. » Déclare-t-il.

Ainsi, il s'appelle Gon.

Mais plus important encore: est ce que ce vieux fossile vient vraiment de nous coller un mois et demi !?

« -Oui, je sais que ça semble injuste. Mais c'est mérité croyez moi. Vous savez, je mets un point d'honneur à faire en sorte que les élèves de mon lycée évoluent dans un cadre social agréable. J'ai exclu vos camarades quelques temps pour s'en être pris à la petite Ponzu. Et vous je vous punis pour avoir user de la violence d'abord mais également pour ne pas avoir fait plus de dégâts... »

On ne peut que l'observer, abasourdis. Mieux vaut ne pas ajouter quoique ce soit. Ça ne servirait à rien.

"-Votre punition prend effet demain. Juste après les activités de clubs. »

Il nous congédie ensuite et on quitte son bureau sans un mot.

Là on erre dans les couloirs en attendant la fin des cours. La flemme d'y retourner pour ma part mais pour Gon, je ne sais pas. Il est plutôt bizarre.

« -Du coup, tu retournes pas en cours...? » Je me risque à demander, sortant de ma zone de confort pour combler ce silence gênant qui nous sépare.

Son regard ambré croise le mien. J'avais jamais vu une telle couleur emprisonnée dans un regard, c'est beau...

« -La flemme et toi ?

-Idem. »

Il sourit et me propose d'aller zoner quelque part pour attendre la dernière sonnerie. J'accepte et le suis sans y réfléchir plus que ça.

Il me mène jusqu'à une cage d'escalier déserte et en état de délabrement avancé. Elle donne sur un cul de sac. Drôle d'endroit.

Gon m'invite à m'assoir avec lui en haut des marches. Encore une fois, je m'exécute sans broncher.

« -On est dans la même classe depuis un mois et demi et c'est à peine si on s'est adressé la parole. » Commence le brun en s'étirant comme un ours.

Je ne savais même pas qu'il était dans ma classe...

Après, je ne fais pas attention aux gens que je ne connais pas. Je les classe au même niveau que les tables ou les chaises, ce sont des éléments de décor. J'ai la fâcheuse tendance de ne m'intéresser qu'aux gens avec qui j'interagis régulièrement. C'est pour ça que mon cercle d'amis ne se limite qu'à deux personnes.

« -C'est à dire que... » Je tente une explication que j'espère cohérente.

« -Laisse moi deviner. Tu le savais pas ?» Il m'a interrompu ce con.

« -Ouais. »

Je ne peux m'empêcher de rougir, un peu gêné. Le mec se donne la peine d'être sympa avec moi depuis tout à l'heure et moi j'ai pas été fichu de le calculer pendant presque deux mois.

Il éclate de rire, un rire clair, aussi doux qu'un vent marin...Enfin, vous voyez quoi, je vais pas me perdre en niaiseries.

Ça me donne envie de me bider avec lui mais je suis trop subjugué pour.

Décidément ce Gon, me fait un peu trop d'effet.

« -Pas grave. Je te comprends, je me suis fait plutôt discret depuis que je suis arrivé ici. J'arrive pas encore à m'habituer à la ville... » Il semble nostalgique tout à coup.

« -Tu viens de loin ? » J'ose demander.

« -Ouais d'une île, dans le pacifique. L'île de la baleine. »

« -C'est drôlement loin. Et j'imagine que ça te manque. »

« -Parfois mais je m'y fais. J'y retournerais sûrement un jour mais j'ai mieux à faire ici. »

Je me disais bien que son teint hâlé ne pouvait pas venir d'une ville aussi ombragée que la nôtre.

« -T'as emménagé quand ? »

« -Pendant les vacances. »

C'est encore frais. Je le plains le pauvre. Ça a rien de marrant de passer d'un paysage à un autre comme ça en plus de devoir s'intégrer dans un nouvel environnement social.

Cependant j'ai encore quelques questions pour lui.

« -Ça fait un an que je suis dans ce bahut mais je ne connaissais pas cet endroit...Des escaliers menant à un cul-de-sac ? On se croirait à Poudlard. » Non mais je dis que de trucs débiles aujourd'hui.

Mon interlocuteur éclate à nouveau de rire. Ce rire si apaisant...

« -C'est une connaissance en terminal qui me l'a montré, pour me détacher un peu de la masse si j'en avais besoin. »

C'est logique, évidement.

« -Ça peut devenir notre base secrète. » Ajoute-il.

« -Hein ? » Je lui demande, perdu.

« -On va passer pas mal de temps en colle toi et moi. On devrait en profiter pour devenir amis. Je ne m'en suis pas fait tellement depuis que je suis ici et puis t'as l'air d'un type bien.»

La proposition est aussi illogique qu'alléchante. J'ai vraiment envie d'apprendre à le connaître et peut être plus encore.

Sa présence à elle seule suffit à me forcer à abaisser les murs que j'ai érigé autour de ma personne juste pour pouvoir l'observer.

Il défie l'idée que j'ai des autres. À part à Amane et Kanaria, je n'ai encore accorder ma confiance à personne. C'est comme si une fine membrane me séparait des autres, un cocon qui me protégeait de ce que les autres pourraient me faire.

« -C'est d'accord. »

Juste après la cloche sonne et nous sommes obligés de nous séparer.