Prologue


Regina soupira inlassablement. Elle avait pris tellement d'avance pour son rendez-vous que lorsque l'homme se montra, elle attendait depuis une trentaine de minutes. Cette stupide angoisse lui collait à la peau…

Cela ne s'arrangea pas quand elle entra dans le bureau du directeur de Storybrooke, son tout nouveau supérieur. Des dizaines de trophées et médailles ornaient les murs et les étagères, le bureau impeccablement rangé lui signifiait clairement qu'elle ne pouvait réclamer quoi que ce soit.

Néanmoins quand il la laissa s'asseoir devant son bureau, la jeune professeure relâcha la pression. Elle réalisa qu'elle n'était pas encore tout à fait habituée à porter des talons, ses pieds la soulagèrent d'un poids énorme.

– Madame Mills, j'aimerais que cela soit clair. Vous vous apprêtez à intégrer la plus grande et la plus prestigieuse école de la côte depuis presque une décennie. Storybrooke n'est pas à prendre à la légère. Vous allez vite devoir acquérir l'expérience qu'il vous manque.

Avec cet air assuré qui ne la quittait jamais, elle lui garantit qu'il n'avait pas de soucis à se faire.

– Nous allons rapidement voir si vous vous adaptez au corps enseignant.

Regina ressentait une immense fierté. Elle n'était encore qu'une novice dans son métier, avec seulement deux années d'expérience et malgré ça, son début de carrière fracassant lui avait permis de se faire remarquer très tôt et très fort.

– Je me suis toujours très vite adapté monsieur.

Malgré sa témérité, entrer à Storybrooke, cette fameuse école que sa mère avait repérée pour elle depuis de longues années, l'avait toujours impressionnée. Mais aujourd'hui, elle était plus que prête. Le directeur de Storybrooke ne l'intimidait pas le moins du monde. Elle avait aucun doute qu'elle allait s'en sortir, bien qu'elle admettait que cela ne s'annonçait pas tâche facile.

– Très bien. Vous savez que l'établissement se montre très souvent impitoyable, surtout à l'égard des nouveaux. Je n'apprécierais pas perdre un élément aussi précieux que vous dans mon équipe.

Regina croisa le regard de monsieur Williams qui la mettait clairement en garde.

Elle connaissait la réputation de l'école solide, cet homme assurait toutes les décisions dans le but de la protéger. C'était vraiment pas le genre de personne à prendre à la légère.

Regina soutint son regard et le directeur sembla enfin vouloir la laisser respirer.

Quelque temps plus tard, au moment de sa rencontre avec les étudiants de Storybrooke, Regina était confiante, même s'il s'agissait sans aucun doute de la journée la plus importante de sa carrière.

Face à l'entrée imposante de Storybrooke, Emma trépignait d'impatience.

– T'imagine, il nous reste trois ans ici… On n'a même pas fait la moitié, lui fit remarquer Ruby à côté d'elle.

Visiblement, Emma était plus parée à affronter les prochaines épreuves que son amie. Elle devait avouer qu'entre leur première année et la longue période qui l'avait précédée, elles avaient parcouru un chemin difficile pour en arriver là. Mais avec leurs quelques années en plus par rapport aux autres étudiants, elles avaient de l'expérience et leur détermination était sans faille.

Comme elle l'avait toujours fait, Emma s'occupa à soutenir son amie du mieux qu'elle pouvait.

Durant ce premier jour de cette nouvelle période de cours, Emma rencontra la professeure dont beaucoup parlaient et dont beaucoup ne savaient rien. Certains disaient qu'elle était la professeure la plus jeune à avoir rejoint Storybrooke, d'autres relataient qu'elle avait un air sévère comme ils n'en avaient jamais vu. Mais lorsque Emma la vit pour la première fois, ce ne fut pas la réflexion qui lui vint à l'esprit.

La femme dressée bien droite devant le bureau gagna immédiatement son attention. Contemplant l'immense salle avec un orgueil assez spécial, elle semblait hors du commun. Sans la lâcher des yeux, elle s'avança, ne pouvant ignorer qu'elle lui trouvait quelque chose de particulier.

La femme aperçut rapidement Emma lorsqu'elle figurait parmi les derniers à circuler en direction des sièges. Quand l'étudiante croisa son regard, par habitude d'orpheline, elle détourna son attention. Mais cela parut déplaire à la professeure qui réalisa deux pas vers elle, provoquant le résonnement de ses talons de façon assurée et intimidante.

Plus elle se rapprochait, plus Emma découvrait comment cette femme se révélait unique en son genre.

Elle s'arrêta à moins d'un mètre devant elle, lui coupant la route et Emma osa l'observer en face en se redressant. Elle la détailla de bas en haut, ce qui rendit l'étudiante légèrement mal à l'aise. Mais elle évita toute remarque comme elle en avait l'habitude.

– Comment vous appelez-vous ? questionna l'inconnue en levant un sourcil et en croisant les bras.

– Emma Swan.

– Mademoiselle Swan.

La professeure lui sourit et Emma arriva difficilement à détacher les yeux d'elle. Ce n'était qu'un sourire de façade, aucun souci pour elle de le repérer, mais il n'en était pas moins ravissant.

Sans attendre l'autorisation de quiconque, Emma passa à côté d'elle pour atteindre sa rangée, manquant de peu de la bousculer.

La brune sonda son regard jusqu'à ce qu'elle s'assoie, puis elle attira l'attention de l'assemblée. Elle entreprit sa présentation et Emma garda les yeux rivés sur elle. Elle était soulagée qu'elle ne semblait plus trop la remarquer, car parfois la manière dont elle la scrutait l'amenait à s'interroger.

Durant tout ce premier cours, Regina jeta plusieurs petits coups d'œil en direction de cette Emma qui s'était fait distinguer dès son entrée. Elle n'avait eu que peu de temps pour l'observer, mais elle devait avouer qu'elle lui trouvait un quelque chose hors du commun… sans réussir à débusquer la moindre chose sur laquelle elle souhaitait s'attarder.

Son intérêt fut surtout porté sur l'attention de cette jeune femme qu'elle semblait avoir attirée, celle-ci la scrutait d'une manière dont aucun étudiant ne l'avait déjà dévisagée. La fin du cours arriva très vite, Regina contempla à la dérobée Mademoiselle Swan sortir de la pièce, assez pensive.

Une fois hors de la vue de Madame Mills, Emma relâcha toute la pression qu'elle ne savait pas avoir accumulée. Cette professeure était remarquable et elle était impatiente de la retrouver.

Au fil des mois, Emma découvrit de loin cette immense personnalité qui l'épata et la dérouta à plusieurs reprises. C'était une femme clairement brillante mais aussi cruelle, hautaine, arrogante et gravement ironique.

Tout le monde partageait son avis. Ils devaient tous lui obéir au risque de finir sévèrement châtié. La plupart en étaient fatigués et en étaient même venus à la surnommer la Méchante Reine. Malgré tout, cette femme n'était pas considérée comme la pire professeure de Storybrooke. Elle ne manifestait pas toujours de respect envers les étudiants, mais certains professeurs n'en présentaient qu'à peine. Elle avait également le mérite de faire partie de ceux qui leur apprenaient beaucoup à chaque cours, ceux qui voulaient vraiment suivre ses enseignements semblaient les plus privilégiés auprès d'elle. Et quelques fois, Emma l'avait vue passionnée par ce qu'elle entreprenait.

Emma l'appréciait plus ou moins. Elle remplissait ses fonctions de professeur à merveille, et les quelques occasions où elles avaient échangé quelques mots avaient été des moments plutôt sympathiques, autant que pouvait l'être une conversation avec un professeur à Storybrooke. Cependant elle ne pensait pas qu'elle pourrait réussir à s'entendre avec elle, loin de là. En fin de compte, elle était comme tous les autres professeurs de cette école, trop superficielle, trop hautaine, trop condescendante, trop, trop, toujours trop…

En bref, malgré son jeune âge qui ne se ressentait pas dans son comportement, la professeure trouvait parfaitement sa place dans la prestigieuse école.

De son côté, Emma aimait assister à ses cours, croiser de temps à autre son regard provocant et arrogant. Elle se faisait souvent la réflexion qu'elle s'avérait être une magnifique femme. Elle n'avait jamais connu de femme plus surprenante et plus séduisante, tout cela contribuait à une attirance curieusement charnelle entre son corps et le sien qui troublait si fort Emma.

Son charme raffiné l'avait coincée dans ses filets, mais l'étudiante évitait d'y penser. C'était une personne inaccessible, leur monde était trop différent, et elle n'était pas vraiment son genre. Elle n'était vraiment pas commode, pourtant, Emma paraissait bénéficier d'un traitement de faveur. Mais cela ne restait qu'une vague impression. Elles semblaient véritablement trop dissemblables pour que ce soit autre chose qu'une simple sensation. Elle doutait d'avoir quoi que ce soit en commun avec sa professeure, à commencer par son attirance pour les femmes.

Et d'un autre côté, Madame Mills déclenchait des tremblements dans tout son corps. Parfois il s'agissait de frémissements de peur, mais plus souvent cela concernait d'autres émotions qu'elle ne nommait pas vraiment. Elle n'avait aucune idée de ce dont elle était capable, et chaque fois qu'elle avait pensé en avoir, elle avait pu voir qu'elle se trompait. Elle semblait ne rien craindre, son audace et son aisance étaient impressionnantes. Elle paraissait même à certains moments jouer avec le feu, mais jamais Emma ne l'aperçut se brûler. Elle était constamment en plein contrôle de tout, rien ni personne ne lui échappait.

L'étudiante n'avait jamais été opposée à ce côté vraiment particulier de Madame Mills. Elle imaginait ne pas mériter ce mauvais sort, bien qu'elle l'avait accordé à certains s'étant révélés dans une déplaisante situation équivalente à la sienne, faisant s'interroger Emma.

Pour rien au monde elle ne l'avouerait, mais cette femme l'intimidait autant qu'elle lui plaisait. Et peut-être que cette intimidation contribuait à son attirance pour elle…

Puis la troisième année d'Emma à Storybrooke démarra. Elle fut contente à l'instant où elle retrouva sa professeure favorite pour les prochains mois. Ce début d'année de cours ressembla à celui de la deuxième année, cependant elle devinait qu'il y avait quelque chose de nouveau chez Madame Mills qui éveillait tant sa curiosité. Elle semblait souvent sur les nerfs, et elle paraissait parfois perdue. Cela représentait un infime changement dans son comportement, mais Emma avait toujours été attentive. Elle se demandait régulièrement ce à quoi elle pensait lorsqu'elle la regardait, la surprenant le faire plutôt fréquemment. Rien de remarquable dans son regard, mais elle semblait ne pas totalement omettre son existence.

Cette femme était très secrète, Emma ne savait strictement rien d'elle, comme le reste de Storybrooke.

Pour Regina, cela ne s'avérait pas différent. Après quelques mois, cette étudiante s'était démarquée des autres à ses yeux, et elle n'arrivait pas à dire si cela était intentionnel de sa part.

Elle était simplement… particulière, plus réelle et définitivement plus attrayante que tous les étudiants arrogants et idiots de cette école. Regina n'était pas le genre de personne à se retourner au passage d'une jolie femme, mais celle-ci suscitait vraiment des réactions chez elle.

Elle n'observait pas chez elle le comportement typique prétentieux des étudiants. Elle ne lui semblait même pas si extravertie que ça, contrairement à l'ensemble de cette école. C'était aussi intrigant qu'inquiétant.

Dès le premier jour, Regina avait deviné que sous son regard, elle n'était pas totalement à sa place de professeure.

Et en retour, elle n'arrivait pas à la traiter à sa légitime position d'étudiante, au même niveau que tous les autres.

Quant à ces derniers, Regina avait rapidement compris quel comportement il fallait adopter auprès d'eux. Bien qu'elle doutait du mérite de la plupart, elle se jugeait correcte face à eux. Elle se montrait sévère, mais pas injuste en général, ne présentant pas de mauvais fond.

Elle avait toujours été ainsi, mais dans cette école, cela s'amplifiait. Et pour cause, elle avait simplement horreur des maladresses et de la négligence. Ces individus paraissaient presque habitués à commettre des fautes par manque de réflexion. Regina ne pouvait pas le tolérer, elle avait appris à y porter vigilance toute sa vie.

Mais au bout de quelques mois, Regina réalisait que de plus en plus de choses ne semblaient plus avoir de sens. Des tas et des tas de questions lui tournaient dans la tête et un sentiment de plus en plus étrange faisait surface depuis quelques semaines. C'était comme si le ciel lui tombait sur la tête ou que le monde se liguait contre elle. Elle se voyait passer de l'adulte qui avait parfois besoin d'aide et de soutien à une femme mature et responsable jugée trop âgée et expérimentée pour en bénéficier. Son univers changeait si vite et si fort sans qu'elle s'en rende compte. Rien ne semblait rester comme il devrait l'être et c'était un des pires sentiments que Regina avait connu…

La jeune professeure l'ignorait autant qu'elle le pouvait, mais tôt ou tard, plus rien ne serait comme il l'était avant.

Quelques semaines après le début de sa deuxième année d'enseignement à Storybrooke, Regina se laissa tenter à lâcher prise, rien qu'un instant. Ce fut lorsqu'elle aperçut Mademoiselle Swan seule dans le couloir d'un bâtiment isolé, qu'elle ressentit l'envie irrésistible de l'approcher, d'admirer d'un peu plus près ses prunelles vertes captivantes qui lui criaient parfois des choses inavouables.

Elle établit un ridicule plan en quelques secondes en guise de tentative. Son idée n'était pas très solide ni réfléchie, mais Regina rangea vite cette remarque de côté. Cela ne lui ressemblait pas vraiment, mais elle ne prit pas le temps d'y réfléchir… Voilà qu'elle s'avançait déjà dans sa direction.

Elles étaient toutes les deux en avance pour le cours qu'elle donnait dans une quinzaine de minutes. Personne n'arriverait avant un moment.

Regina passa à côté d'elle en feignant ne pas l'avoir repérée. Puis elle simula une petite perte d'équilibre et se rattrapa très rapidement en s'appuyant sur le mur pour se remettre correctement sur pied. Cependant, plusieurs feuilles qu'elle portait lui glissèrent des bras et s'éparpillèrent au sol.

La professeure soupira et observa du coin de l'œil comment réagissait la blonde. Elle fut assez étonnée de voir qu'elle n'hésita pas un seul instant à se baisser pour rassembler les pages égarées. En l'imitant, elle remarqua aussi qu'elle évitait au maximum de croiser son regard. Elle en profita alors pour faire comme si elle comptait attraper la même feuille qu'elle, frôlant au passage sa main. Regina observa l'étudiante rougir tout en osant la regarder enfin.

– Désolée.

Baissant la tête, certainement pour se cacher, elle rassembla les documents pendant que Regina ajoutait doucement celles qu'elle avait ramassées au-dessus de son paquet. Elle se tourna ensuite, le corps droit, vers la jeune femme qui releva fièrement la tête.

– Merci Mademoiselle Swan, répondit Regina avec une voix exquise et en insistant sur son nom.

L'étudiante cligna des yeux comme pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. La professeure rit intérieurement lorsqu'elle découvrit l'expression de la blonde. Elle ne s'attendait pas à une telle réaction, mais elle n'était pas déçue.

– Changez cette expression, je vous remercie seulement. Seriez-vous surprise que je sache le dire ? enchaîna Regina en s'approchant d'un petit pas pour mieux apercevoir ses prunelles éblouissantes parmi ses cheveux.

La professeure avait parfaitement compris que Mademoiselle Swan ne pensait pas vraiment à ça. Sa surprise n'était pas provoquée par son remerciement, elle le vit à son regard qui parcourut lentement son corps.

Et Regina vit l'évidence, l'envie puissante d'agir, de l'aborder d'une manière incorrecte pour leur relation.

La professeure ne voulut alors pas fouiller davantage. Elle ne souhaitait pas deviner tout ce qui lui passait par la tête. À la place, elle s'autorisa à son tour à détailler discrètement les bras musclés mis à découvert par un débardeur, sa poitrine dans ce soutien-gorge vert qui débordait très légèrement, et cet abdomen… De près, elle était encore plus attirante que de loin.

Comme brûlée mentalement, Regina s'écarta d'un bond. Elle ne devait pas s'attarder ou elle se ferait prendre en flagrant délit.

Elle s'occupa plutôt d'ouvrir la porte de la grande pièce sous le regard curieux de la blonde. Avant d'entrer, elle lui jeta un dernier coup d'œil et la surprit en train de se mordre la lèvre et de sourire discrètement.

La professeure disparut de sa vue et retrouva ses esprits uniquement lorsqu'elle fut à nouveau seule.

Maintenant elle savait.

Cette femme avait définitivement piqué son intérêt…

Mais Regina doutait que sa curiosité la pousse à davantage. Elle n'était pas du genre à se rapprocher d'une étudiante, ou même d'une personne qu'elle ne connaissait pas beaucoup. Cela s'avéra alors assez facile d'oublier cette innocente entrevue.

Quelques jours plus tard, Emma était nonchalamment assise parmi les autres étudiants écoutant le cours de Madame Mills. Depuis qu'elle avait aperçu la professeure dans une robe qu'elle qualifierait de trop moulante pour un corps aussi aguichant, ses jambes plus éclatantes que jamais et un décolleté soigné mais intéressant, sa concentration était perturbée.

Elle la trouvait attirante, très attirante.

Même si ce n'était pas la première fois qu'Emma le remarquait, elle en était encore troublée.

Cela contribuait à sa manière d'intimider son interlocuteur, mais sur elle, cela produisait un tout autre effet. Elle n'aurait pas pensé bénéficier d'une démonstration de ses charmes un jour, mais aujourd'hui semblait voir se profiler un évènement particulier… Ce fut plus exactement lorsque la fin du cours s'annonça. Emma se leva et soupira en rangeant ses affaires, cela avait été une longue journée…

– Mademoiselle Swan ?

Emma sursauta en se tournant vivement vers sa gauche. Elle découvrit sa professeure tout près, à seulement un petit mètre d'elle dans la rangée. Elle ne prononça pas un mot sur son sursaut, mais elle comprit grâce à son haussement de sourcils qu'il n'était pas passé inaperçu. Elle ne bougea pas en la dévisageant : c'était une des premières fois qu'elle voyait et sentait sa professeure aussi proche d'elle, et comme pour les autres, Emma avait besoin d'un instant.

– Je voudrais passer.

Regina indiqua plus loin le chargeur branché à la prise au mur à quelques mètres d'elle dans la rangée. Elle avança d'un petit pas, et l'étudiante resta sans voix de cette soudaine proximité anormale. Elle frissonna et la regarda dans les yeux. Elle s'étonna de découvrir que le regard de la professeure reflétait le sien. Mais Emma l'aperçut sourire et elle sut immédiatement qu'elle se jouait d'elle. Elle s'attendit à la pire raillerie sans parvenir à lâcher la femme de vue. Elle ne vint pas et Emma ne réussit pas à s'en préoccuper.

– Est-ce que… vous pouvez me laisser passer ? lui demanda la professeure avec un ton mi-moqueur, mi-impatient.

En fin de compte, elle semblait avoir opté pour quelques mots corrects. Lorsqu'elle circula enfin, Emma déglutit nerveusement. Son parfum lui parvint au nez en coup de vent et la troubla davantage.

Elle l'observa ensuite se pencher en avant pour atteindre la prise au sol. Avec des yeux de merlan frit, Emma l'aperçut lever la jambe droite en arrière pour mieux se baisser. À cet instant, l'étudiante aurait pu n'avoir qu'une seule pensée : tenir en équilibre sur un talon aiguille était une qualité qui n'échappait pas à la professeure. Elle avait rarement vu ça, c'était un nouveau domaine où elle l'impressionnait.

Mais elle remarqua aussi son corps exposé à ses yeux d'une manière encore inexplorée. La robe moulante et sa position mettaient son derrière en valeur et de la même manière, ses talons hauts sublimaient ses fines et longues jambes halées. C'était certain, le style de Madame Mills ne manquait de rien. Pendant un moment qui sembla lui durer des heures, elle la dévora du regard sans bouger.

Emma avait chaud depuis quelques minutes, mais face à ce nouveau spectacle, elle sentit une surprenante chaleur se loger dans le bas ventre. Elle écarquilla les yeux tant elle ne réalisait pas la vision de cette femme offerte à elle, comme si le hasard n'en était pas la cause.

Rapidement, Madame Mills se tourna vers elle en levant ses sourcils de façon légèrement angélique. Emma ne put empêcher un petit sursaut, prise sur le fait, son visage gagna des teintes écarlates et elle évita de la regarder à nouveau dans les yeux.

Son sourire lui prouva alors qu'elle avait agi dans un seul et unique but : la provoquer. L'affluence de question devint encore plus importante chez Emma au fur et à mesure que son corps entrait en alerte. L'étudiante subit le regard de Madame Mills sur elle, devinait son sourire prétentieux et ses yeux narquois…

Emma fourra rapidement toutes ses affaires dans son sac. Il était temps que ce massacre de sa dignité prenne fin mais sa professeure ne semblait pas être de son avis. Lorsqu'elle se dirigea vers la sortie, elle l'entendit, telle la pire des tortionnaires, emprunter un ton totalement innocent pour prononcer les derniers mots.

– Vous avez oublié votre… immonde veste, Mademoiselle Swan.

Emma se retourna lentement, son honneur touché, et la vit les bras croisés, le buste légèrement penché en avant, et son malin sourire. Elle avait l'air à cet instant non moins diabolique que terriblement attirante.

L'étudiante se reprochait de se montrer aussi vulnérable à sa professeure, qu'elle ne puisse contrôler ses émotions ainsi quand elle levait à peine le petit doigt…

Lorsqu'elle fut sortie devant le bâtiment, elle absorba un grand bol d'air frais pour calmer son corps un peu réchauffé.

Madame Mills semblait prendre un malin et étonnant plaisir à la torturer.

Emma fut alors surprise par ses pensées lui faisant prendre conscience qu'elle voulait réaliser avec elle des choses qu'elle n'avait jamais véritablement désirées. Elle voulait tellement en connaître davantage sur ce corps qui l'enchantait…

Si elle savait… elle lui préparerait la scène la plus scandaleuse qu'elle pourrait imaginer à l'entrée de Storybrooke à l'heure de pointe. Emma n'était pas du genre à avoir honte d'elle, mais elle connaissait la professeure capable du pire. Ou à l'inverse, elle profiterait de ce qu'elle pouvait lui offrir, mais elle ne parierait pas sur cette deuxième option. Elle n'avait de toute façon aucune envie de découvrir ce qu'elle en penserait, une année très importante l'attendait et lui demandait toute son attention.