Bonjour,
Voilà le premier chapitre de cette fiction que je vous laisse découvrir ^^ Pour information, si je ne dis pas plus que ce qui est écrit c'est normal :3 Je vais mettre un lexique en fin de chapitre à chaque fois qu'il y a des mots inconnus car oui, j'ai utilisé des termes qui ne sont ni français, ni japonais comme je peux utiliser habituellement ! Enfin bref, je vous laisse découvrir tout ça !
Bonne lecture !
Zialema : Seules ceux qui le sont se reconnaissent :3 Et la suite, la voilà ^^
La pluie était une bénédiction sur l'île d'Oman. La chaleur en cette période de l'année pouvait être étouffantes et les pluies étaient toujours les bienvenues. Comme en ce jour où les enfants profitaient pour jouer sous les gouttes venues du ciel et où les hommes et les femmes remplissaient des tonneaux d'eau de pluie.
Il tendit la main pour les regarder s'écraser sur sa peau. Elles étaient chaudes. Il ne faisait jamais froid sur l'île d'Oman. Un sourire ourla ses lèvres quand il entendit un pépiement sur le rebord de sa terrasse. Un petit oiseau indigo sautillait pour le rejoindre et sauter dans sa main, se secouant sous la pluie qui semblait le rendre heureux.
-La chasse a été bonne ?
-Piii !
Il rit en le voyant faire et le laissa grimper sur son bras et s'installer dans ses cheveux blonds. L'homme sourit et laissa son regard retomber devant lui. La terrasse où il se trouvait dominait la cité d'Oman, qui portait le même nom que l'île. La vue donnait sur chaque quartier, permettant ainsi de pouvoir toujours l'observer. Cette terrasse possédait un escalier qui permettait de rejoindre des jardins verdoyants, les jardins d'un palais à la fois sobre et somptueux.
L'oiseau indigo marchait toujours sur sa tête pour trouver sa position. Il semblait lui aussi profiter de cette pluie qui serait sans doute la dernière pour les six mois à venir. Un sentiment de paix envahissait l'homme. Une paix intérieure qui l'accompagnait chaque jour de sa longue vie.
-Kshatriya ?
-Oui Ulhas ?
Il n'avait pas besoin de se retourner pour connaître celui qui s'approchait. La voix, le bruit des pas au sol, l'aura de la personne. Tout lui indiquait l'identité de celui qui venait le voir. Ulhas était son proche conseiller, celui qui venait lui apporter les demandes et les dernières informations, celui qui le secondait sur cette île. Tout ceux qui voulaient le voir pour une question importante devait passer par Ulhas.
Ce dernier était un jeune homme de vingt-cinq ans, son jeune âge ne voulait pas dire qu'il était incompétent. L'homme blond n'avait pas dix ans de plus que lui et il dirigeait tout un peuple. Il a été choisi parmi la population de la cité pour seconder l'homme blond. A l'origine il faisait des études dans le commerce et faisait partit de la guilde marchande de la cité. Il était grand et fin, mais autant ses connaissances commerciales étaient grandes, autant il savait gérer d'une main de fer ce qu'il se passait dans le palais.
Le choix de Ulhas a été un pur hasard. Il avait besoin de quelqu'un, quelqu'un de compétent mais aussi quelqu'un proche de la population. Une personne capable d'analyser et trouver des solutions, capable d'agir et prendre des décisions lorsque c'est nécessaire.
-Trois navires commerçants de Moresby demandent l'accès au port de notre ville.
Il tourna la tête vers le rivage, laissant sa contemplation de la pluie de côté. C'était la seule chose que l'homme blond ne laissait personne décider. Le passage des bateaux sur l'île d'Oman était très réglementé et pas toujours autorisé. Plus d'une fois i avait refusé un bateau de venir dans leur port car son instinct lui disait de ne pas les laisser passer. Mais aujourd'hui, son instinct était calme.
-Le passage leur est autorisé.
-Bien Kshatriya.
Il retourna à sa contemplation du ciel, la saison des pluies se terminait, on pouvait déjà sentir que les nuages donnaient leurs dernières averses avant le début de la saison chaude. Une saison qu'il espérait plus clémente que la précédente. La vie sur l'île d'Oman n'était pas contraignante pour ses habitants. Ils savaient que les cieux pleuraient six mois dans l'année et avaient appris à cultiver en fonction de cela pour assurer des réserves de nourritures en tout temps.
Le commerce se faisait avec les îles environnantes et des expéditions étaient menée pour découvrir le reste du monde. Mais globalement l'île était fermée et l'accès très difficile à obtenir. Quelque chose dans ses tripes disait qu'il ne devait pas laisser un libre accès à ses terres et à son peuple.
-Pi !
-Oui, nous allons aller en ville.
L'homme blond rentra dans ses appartements. Des appartements qui ne ressemblait à nul autre. Il n'y avait pas de fenêtre, tout était exposé au temps. Parfois quand la saison des pluies amenait de grands vents forts ou que le soleil de la saison chaude brûlait même la peau, des panneaux pouvaient se fermer pour abriter les lieux.
Il attrapa une serviette pour essuyer son corps et changea son pantalon de toile pour un autre blanc ceinturé d'une chaine en or serti de turquoise et une simple chaine d'or autour de son cou. C'était la marque de son rang, sa marque de Kshatriya. Il n'était pas avide de bijoux et de luxe, il préférait des marques plus simples et discrètes au quotidien. Certains habitant de l'île, plus fortuné que d'autres étaient même plus extravagant que lui sur ce sujet.
L'homme entreprit ensuite de rejoindre la cité et d'aller vers le port. Les bateaux commerçants devaient être à quai et près à décharger leurs contenus. Il ne s'y rendait pas toujours, laissant ses hommes gérer la venue des étrangers mais pour ces bateaux-là, il était toujours présent.
-Marco le Phénix ! C'est un plaisir de te voir !
Ledit Marco eut un sourire franc et s'approcha de son visiteur. Celui-ci portait une tenue complètement différente, un bermuda et un tee-shirt, un bandeau maintenant ses cheveux longs en arrière, preuve que le peuple de son île n'avait pas les mêmes saisons ni la même culture. Il lui fit une accolade et un signe aux marins qui venaient de débarquer.
-Comment te portes-tu Noah ? Le voyage s'est bien passé ?
-Comme toujours, d'un calme agréable !
L'équipage dans le dos de Noah commença à soupirer, leur capitaine avait tendance à toujours trouver simple le fait de traverser une tempête, d'être confronté à une ou deux créatures de la mer. Marco rit doucement en voyant leurs expressions, son ami était toujours le même.
Ami.
Une petite chaleur se développa dans sa poitrine à cette idée. Marco avait peu d'ami. Parmi son peuple il était proche de tout le monde, mais il n'avait pas vraiment d'amis avec qui partager son quotidien. Son statut de Kshatriya, de chef ou de roi comment certains des autres îles disaient, ne lui permettaient pas d'avoir ce plaisir. Entre autres choses.
Alors oui, Noah de l'île de Moresby était ce qui pouvait s'apparenter à un ami.
-Laisse ta cargaison au port, les hommes vont s'en occuper. Que ton équipage s'installe dans l'auberge de la place. Tu connais les règles ?
-Ne t'inquiète pas, rit Noah. Pas de grabuges, pas de gestes ou mots déplacés et ils finiront tous en vie.
Si son ami prenait les choses autant à la légère, lors de sa première venue ce n'était pas du tout le cas. Marco dirige un peuple pacifique, il veillait à la bonne santé des siens et quand un équipage venu d'une autre île pour convenir d'un contrat de commerce faisait le bordel forcément, il avait vite été mis au courant.
Ce jour-là, Marco fit vite comprendre que sur son île il fallait respecter son peuple. Et Noah, jeune capitaine qui faisait son premier voyage commercial avait vite fait les frais de celui qui s'appelait le Phénix. Le blond l'avait attrapé par la gorge, des serres transperçant doucement la peau alors qu'il gardait son air détaché, les mains dans les poches de son pantalon de toile.
Le capitaine s'était excusé de son comportement auprès de la jeune femme qu'il essayait de draguer, un peu trop jeune et un peu trop fiancée, en promettant de ne jamais recommencer. Et Marco avait convenu que les réparations demandées par le fiancé et par la famille avaient été réglée.
C'était la seule et unique fois que Marco donna un avertissement. Généralement il prenait la vie de l'homme ou expédiait sans attendre l'équipage sur son bateau avec une voile en moins. Oui. Marco, souvent appelé le Phénix, n'était pas un homme à prendre à la légère.
L'île d'Oman était réputée pour être pacifiste, pour être une île calme et plutôt fermée du monde. Mais le Kshatriya de l'île pouvait être un homme cruel envers ses ennemis.
Marco et Noah circulaient tranquillement en ville. La pluie était plus rare et mouillait à peine leurs peaux. Ils marchaient en silence, ils n'avaient pas besoin de tout le temps parler pour se comprendre. C'était une des raisons pour lesquelles Marco l'appréciait.
Le duo se dirigeait vers l'un des temples du l'île, le peuple local croyant en plusieurs Dieux. Dans les îles alentours, certains peuples avaient des Dieux en communs mais plus loin, hors de la ceinture du monde, il en était parfois tout autre.
-Comment va la vie dans l'Océan de l'Est ? s'enquit Marco.
-Plutôt calme à vrai dire. Certains rois et dirigeants ont décidés de se mettre ensemble pour gouverner, la Longue Paix les ennuis je crois, soupira Noah.
-Du moment que tout se passe bien pour toi et ton peuple c'est le principal.
Noah lui répondit d'un sourire et ils s'arrêtèrent devant leur point de destination. Le commerçant lui avait demandé d'aller dans un temple bien précis, Marco ne savait pas pourquoi. Il en était même étonné que son ami lui fasse cette demande car il le savait non-croyant à n'importe quelle religion.
-Pourquoi souhaites-tu te rendre dans le temple de Durga ?
-Tu verras, sourit Noah.
Ils entrèrent en silence et Marco se déchaussa comme il le faisait toujours à l'entrée d'un temple. Son ami le regarda faire et l'imita. Noah suivait ses faits et gestes pour les reproduire, venant à s'agenouiller devant une statue représentant l'une des entités de l'île d'Oman.
L'homme blond lui fit ainsi signe de commencer et l'observa attentivement. Par habitude il arrivait à comprendre les intentions d'autrui mais là il nageait en plein inconnu et son ami ne semblait pas vouloir l'éclairer.
-Durga, hum. Déesse de la protection et de la force, de la maternité et de la paix.
Marco haussa un sourcil. Il était semble-t-il bien renseigné pour une personne qui ignorait tout de sa religion. Ou alors ses voyages réguliers à Oman lui avaient finalement servit à retenir quelques trucs.
-Je sais que je ne suis pas croyant mais si vous êtes réelle, alors je vous implore votre soutien. Je suis un commerçant qui navigue sur les eaux de ce monde. Je ne suis pas souvent chez moi, auprès des miens. Alors je vous implore protection et force pour ma femme. Et pour mon enfant à naître. Protégez mon équipage pour nous permettre de finir notre voyage et de rejoindre mon épouse et mon fils, de pouvoir assister à sa naissance. Je vous remercie Durga, Déesse de la protection et de la force.
Le brun déposa des graines dans une coupelle devant la statue et ferma les yeux un instant comme il avait déjà vu Marco le faire, joignant ses mains. Puis se tourna vers lui pour lui signifier qu'il avait fini. Le natif de l'île ne se serait jamais attendu à cela. Une prière. Son ami qui ne jurait par rien sauf la vie, venait de faire une prière. Et plus que cela, une prière pour sa femme et son enfant. Rare étaient les étrangers à l'île d'Oman qui priaient pour autrui et non pour eux-mêmes.
-Brâhmane ?
-Oui Kshatriya ? s'approcha un homme qui était quelques pas plus loin.
-Ce soir une belle offrande sera faite à Durga, sourit Marco. Des fruits sauvages et des graines de notre îles et des nouvelles cargaisons. Un étranger à prié la Déesse, nous allons l'aider à transmettre son message.
-Bien Kshatriya, c'est un honneur pour nous de faire cette offrande.
L'homme s'inclina devant Marco puis devant Noah qui s'étaient tous deux relevés. Ils le regardèrent partir par une porte adjacente et Marco posa sa main sur son épaule.
-Pour une première prière, tu t'en es bien tiré.
-Je pense que je t'ai vu assez de fois faire cela, rit Noah. Je ne sais pas si ça va marcher mais bon.
Il haussa les épaules et ils sortirent du temple pour s'assoir sur un banc à proximité. Il n'était pas rare de voir des personnes flânées, se reposer ou simplement discuter aux abords des temples. Ce n'était pas qu'un lieu de culte, c'était un lieu vivant, un endroit du quotidien ouvert à tous et pas uniquement pour prier.
-Alors tu vas avoir un fils ?
-Oui. Tu as déjà rencontré Ana lors d'un de mes voyages. Avant de partir elle m'a appris qu'elle attendait un enfant. Normalement nous seront rentré juste avant la naissance si le temps le permet.
Le blond fit alors un geste auquel personne ne se serait attendue. Il prit son ami dans ses bras. Avant de s'écarter, ses mains sur ses épaules. La naissance d'un enfant était toujours bénie pour le peuple de Marco, un cadeau de la Nature et des Dieux.
-Je suis heureux pour toi ! C'est une bonne nouvelle.
-Et toi ? Toujours pas de femme ?
Marco rit avant de regarder le ciel. Question qui revenait toujours sur le tapis. Une femme. Il n'en a jamais eu besoin par le passé. Et qui serait-il pour imposer sa vie à une femme ?
Le festival de la saison chaude se tiendrait dans quelques jours et lors de cette journée, il était présenté au Kshatriya les femmes qui auraient la majorité dans la saison à venir. Généralement elles lui étaient présentées dans l'espoir qu'il en choisisse une pour l'épouser mais plus généralement cela mettait les futures femmes à marier sur le devant pour que de futurs maris puisse les rencontrer et les courtiser ou parfois plus simplement pour présenter de futures femmes et mères du peuple.
Le blond n'aimait pas tellement ce genre de chose mais le faisait pour le bonheur de son peuple. Il prenait le temps de parler avec chacune des jeunes filles pour apprendre à les connaitre mais ne faisait jamais aucune avance.
-Le Phénix n'est toujours pas prêt à se caser, pas vrai ? s'enquit Noah.
-Non. Je n'ai pas rencontré la personne que je souhaitais. Resteras-tu pour le festival ?
-Normalement oui, nous repartirons dès le lendemain.
Le ciel bleu était au rendez-vous pour la journée. L'air était déjà plus chaud que les précédents. La saison chaude promettait d'être au rendez-vous cette année. Marco était accompagné de son ami et se dirigeait vers le port. Aujourd'hui il devait repartir sur son île, dans son océan et le blond savait très bien qu'il ne le verrait pas avant longtemps.
Tout d'abord parce que les voyages en mer étaient un risque à prendre, surtout pour venir jusqu'à la Ceinture du Monde, cet océan qui faisait le tour du globe et qui était considéré comme le plus dangereux de tous. Mais aussi parce que Noah allait être père et Marco lui en aurait voulu de venir le voir en laissant sa femme seule avec un tout petit.
-Je te souhaites un bon voyage de retour, et accepte ce cadeau de ma part pour ton épouse et ton enfant.
Marco fit un signe et deux des hommes derrière lui apportèrent une caisse en bois fermée. Ils la montèrent aussitôt sur le navire où les marins la prirent en charge pour l'installer dans les cales. Il n'avait rien dit à son ami de ce qu'il avait prévu de faire. La décision lui était venue le soir, après avoir apprit qu'il allait être père.
-Qu'est-ce que c'est ?
-Tu verras à ton arrivée, sourit le blond.
-Tu sais que tu n'es pas obligé.
-Je le sais. C'est de coutume d'offrir un présent pour une future naissance à un ami, il me semble que ton peuple le pratique aussi, non ?
Leurs traditions étaient très différentes mais certains points se recoupaient. C'était peut-être pour cela que Marco acceptait que quelques navires étrangers passent leurs frontières maritimes pour venir accoster. Il aimait savoir qu'ailleurs dans le monde certains étaient comme eux.
-Ecoute Marco, je ne pense pas revenir pour le moment.
-Je comprend et je m'en doute, ta famille est très importante, c'est un cadeau de la nature.
Lui-même n'avait pas de femme ou d'enfant. Il n'en voulait pas, il n'en ressentait pas le besoin. Comme tout être humain il avait des besoins et des désirs qu'il comblait quand il le souhaitait mais l'engagement n'était pas fait pour lui. Pas avec son peuple qui dépendait de lui, et qui serait-il pour infliger cela à une personne ? Et à lui-même ? Il ne pouvait pas prendre le risque de détruire son cœur pour l'éternité de sa vie s'il prenait une femme. Ou un homme par ailleurs.
-Tu peux dire à ton chef que celui qui te remplaceras sera accueillit avec le même égard que toi tant qu'il respectera mon peuple et nos lois.
-Je ferais passer le message.
L'île de Moresby était une île amie, il était normal si Noah ne pouvait venir que Marco accueille son remplaçant avec les mêmes égards. Si tout c'était bien passé pendant ces années, alors cela ne pourrait que bien se passer avec les prochaines visites.
Ils se firent une dernière accolade et le brun monta dans son navire, s'assurant que tous les membres de son équipage étaient bien montés à bord avant de lever l'encre. Le blond se tenait bien droit sur le port, restant jusqu'à ce que les navires ne soient plus en vue.
Cela était toujours étrange pour lui. Marco n'avait que rarement quitté son île pour aller aussi loin. Pour la première raison qu'il ne pouvait se soustraire à ses devoirs de dirigeant, il avait des responsabilités envers son peuple. Mais aussi parce qu'il s'était déjà confronté à la nature humaine qui n'était pas toujours chaleureuse. La plupart de ses voyages consistaient à aller dans les îles alentours de l'île d'Oman et pour de courtes durées.
Comme tout dirigeant d'un peuple, Marco avait des responsabilités administratives. Oh, il aurait pu les refourguer à son proche conseiller ou un autre chef de caste. Mais depuis son arrivée à ce titre, il ne voulait négliger rien ni personne. Et il se savait avoir le temps pour penser aux autres choses.
-Ulhas ?
-Oui Kshatriya ?
-Où en sont les travaux de la nouvelle école du village de Kadmat ?
La population de l'île de d'Oman était en telle croissance que les villages s'agrandissaient de plus en plus. Kadmat en était à sa deuxième école et pouvait enseigner aux enfants dès l'âge de trois ans jusqu'à la fin de l'adolescence, soit considérée à seize ans sur l'île. A ce rythme-là, Marco allait devoir trouver un nouveau moyen d'étendre la surface de son territoire.
-La saison des pluies a permis de travailler sur les plans et le planning des travaux. Dès les premiers jours assurés de la saison chaude, les ouvriers pourront commencer le chantier.
-Que penses-tu d'utiliser les îles vierges ?
-Pardon ?
Ulhas ne comprenait pas très bien le virement de sujet de son dirigeant et croisa les bras, se mettant à réfléchir.
-Que veux-tu dire par là Kshatriya ?
-Kadmat en est à sa deuxième école. Les villages de Surate et Chennai ont étendu leurs surfaces de presque la moitié en trois ans. Si l'on continue ainsi, il n'y aura bientôt plus assez de place sur l'île.
-Et tu voudrais utiliser les îles vierges pour y installer des villages. C'est dangereux.
Le blond comprenait ce qu'il voulait dire par là. Les îles vierges étaient un petit archipel pas très loin d'ici, en réalité il était même visible depuis la face Nord de l'île. Ces petits îlots inhabités pouvaient accueillir l'équivalent d'un village plutôt immense ainsi que des cultures, un petit port. Le danger se faisait que les étrangers refusés au port de la cité d'Oman débarquaient sur ce petit îlot le temps de se reposer avant de repartir.
-C'est réalisable, soutenu le blond.
-Cela veut dire que tu devras accepter plus d'étrangers sur l'île, contrecarra le plus jeune.
Marco soupira et repoussa son fauteuil pour se lever. Son bureau se trouvait au-dessus de ses appartements, plutôt immense, il permettait une vue complète et panoramique de l'île pour toujours avoir un œil dessus. Enfant, cet espace avait été ses appartements, sa prison dorée. Chargée de mauvais souvenir, il avait tout fait pour en créer de nouveau et pour toujours avoir un œil protecteur sur son peuple.
-Est-ce qu'il ne serait pas temps de le faire ? Demanda-t-il dans une question rhétorique.
-La fermeture de l'île a été ta propre décision. Nous ne pouvons juger la décision de notre Kshatriya à l'ouvrir à nouveau.
-Mais vous pouvez me conseiller.
Ulhas se leva à son tour pour le rejoindre. Il n'était pas habitué à voir un Marco nostalgique, ou un Marco indécis. Depuis qu'il le connaissait et qu'il travaillait pour lui, il ne l'avait jamais vu hésiter sur une seule décision. Sauf celle-ci.
-J'ignore quoi te conseiller sur le sujet Marco. Je n'ai que vingt-cinq ans, je n'ai pas connu toutes ces années dont les anciens parlent. Même eux ne les ont jamais connues. Il n'y a que toi pour te souvenir. Et encore, tout dépend…
Le jeune homme ne finit pas sa phrase, secoua doucement la tête en soupirant et partit s'assoir sur un des canapés. Marco n'avait pas besoin qu'il en dise plus. Son peuple n'était pas idiot, ils savaient tous que cette ancienne loi de ne pas laisser entrer quiconque sur l'île n'était pas là pour rien. Ils savaient aussi que leur dirigeant, leur Kshatriya n'était pas un homme sans faiblesses. Des faiblesses venant du passé.
La population de la cité d'Oman se faisait discrète et calme, s'écartant sur le passage Marco, suivit de prêt par Ulhas et Devdas, le général armé de l'île. L'air glacial qui suivait le trio malgré la chaleur de la journée semblait dire qu'une chose grave allait se passer.
S'il y a bien une chose que détestait le blond était les agressions envers autrui. La vie n'était pas forcément des plus simples et il a fallu des dizaines de décennies à Marco pour que son peuple soit pacifiste, que la population de l'île d'Oman arrête de se détruire. Les prédécesseurs de Marco, enfin tout du moins un, avait failli entrainer l'île dans les Enfer et il avait été donné au blond de redresser la barre. Pas sans difficulté.
Alors qu'on vienne le déranger en pleine réunion avec les différents chefs des villages de l'île car une femme s'était fait violer et séquestrée depuis la nuit précédente, forcément, cela ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout.
-C'est ici qu'il vit Kshatriya, indiqua Devdas. Plusieurs soldats se sont assurés qu'il n'essayerait pas de s'échapper et veillent à la sécurité de la demoiselle.
Il ne lui répondit pas, il se contenait. Il empêchait l'animal en lui de sortir pour faire une justice impartiale. Le trio entra dans la petite maison pour arriver dans un grand séjour. Une jeune femme assise sur une chaise avec un soldat debout derrière elle et à l'opposée un jeune homme furieux, encadré par deux autres soldats.
Sur le chemin, le général avait brieffé Marco. Le coupable était un de ses soldats et ses camarades étaient venu le chercher le matin même car il ne s'était pas présenté sur le terrain d'entrainement. L'un d'entre eux était tout de suite partit prévenir Marco de ce qu'ils avaient vu.
-Cette catin à tout fait pour que je couche avec elle, siffla l'homme en pointant la femme du doigt. Et maintenant elle m'accuse !
La jeune femme, complètement apeurée de la situation, autant par la colère de l'homme mais aussi par la présence de Marco, n'arrivait pas à répondre. Elle se recroquevillait sur sa chaise et l'air impassible et dur du blond ne devait sans doute pas l'aider.
-Silence Amshat ! Siffla Devdas. Ton comportement à assez duré. Ce n'est pas la première fois que tu causes des ennuis aux soldats mais là tu as dépassé les bornes ! Il est temps pour toi de payer pour tes actes.
-Je n'ai rien fait ! J'ai simplement couché avec elle ! Elle n'est pas mariée et moi non plus, ce n'est pas un crime que je sache ! Ce n'est qu'une catin qui joue avec le feu !
Amshat, l'accusé, tenta de s'approcher de la femme mais le blond l'intercepta aussitôt. Retenant son poignet, il le foudroya du regard avant de se détourner de lui. La jeune femme a tenté de se lever pour s'éloigner par reflexe, s'emmêlant les pieds et chutant au sol.
-Comment t'appelles-tu ? Demanda doucement Marco en s'agenouillant prêt de la jeune femme.
-Anju, Kshatriya. Je m'appelle Anju.
-Bien Anju, peux-tu me raconter ton histoire.
Et la demoiselle commença à parler. D'abord en bégayant, complètement effrayée puis plus les mots sortaient de sa bouche, plus elle se sentait assurée. Marco apprit ainsi qu'elle était orpheline et venait d'un village à l'ouest de la cité, qu'elle était arrivée il y a peu de temps pour faire des études d'institutrice pour ensuite enseigner à l'école de son village. Qu'elle était fiancée depuis un an mais qu'ils n'avaient pas les moyens de se marier alors son fiancé partait dans les expéditions en mer pour gagner le plus d'argent possible, il était actuellement absent et ne devait pas revenir avant plusieurs semaines. Elle continua son récit, jusqu'à sa rencontre fortuite avec Amshat qui la courtisait fortement alors qu'elle le repoussait et de cette dernière nuit où, alcoolisé, il l'avait violé et enfermé chez lui.
Marco n'avait pas bougé de sa position, gardant toute son attention sur Anju du début à la fin. Mais intérieurement Ulhas et Devdas savaient ce qu'il se passait. Il n'était que fureur et attendait patiemment la fin de l'histoire avant de donner sa sentence. Le blond fini par se relever et aider la jeune femme à se redresser. Il demanda au soldat qui était à ses côtés lors de leur arrivée de l'emmener à l'hôpital se faire soigner.
-Mensonge et viol, commença Marco doucement.
-C'est elle la menteuse ! Siffla Amshat.
-Silence quand ton Kshatriya parle, le reprit Devdas.
La tension dans la pièce était telle que le poindre mot ou le moindre mouvement pourrait déclencher une situation en pire qu'elle ne l'était.
-Un bateau doit partir dans deux jours. Tu seras à son bord, reprit Marco. Tu auras toutes tes affaires avec toi, tout ce que tu laisseras ici sera offert à ceux dans le besoin.
-Quoi ? la voix d'Amshat avait blanchit.
-Tu es banni de cette île. Jusqu'à ton départ deux soldats auront la charge de surveiller tes faits et gestes. Un seul acte de violence, d'agression ou quoique ce soit d'autre et je ne serais pas aussi clément.
Marco le toisa une dernière fois avant de partir et rejoindre son palais. Il n'aimait pas devoir rendre ce genre de décisions. Il n'aimait pas voir les hommes et les femmes de son peuple se déchirer ainsi. Mais ses années vécues lui avaient appris qu'il n'avait pas toujours le choix. La paix parmi la population était quelque chose de bien trop précieux et important. Il ferait tout ce qu'il fallait pour ne pas revivre les troubles du passé qui ont marqué ses jeunes années.
La pleine lune était attendue avec impatience par Marco. Il sentait ses sens s'emballer à chaque fois qu'elle était là. Une partie de lui était toujours un peu agité, comme un enfant quand il voit un cadeau devant lui. Pourtant il n'en était plus un depuis très longtemps.
La pleine lune agissait sur lui comme un cycle récurrent, tout comme le début de chaque saison chaude. Ces cycles n'étaient pas dû à sa partie humaine, à Marco. Mais ils appartenaient à une partie plus sauvage de son corps, au Phénix.
Marco était allongé sur son lit, le drap de soie le couvrant à peine. Il pouvait sentir sous sa peau l'animal qui commençait à s'agiter de plus en plus. Il se détendit, laissant les plumes chaleureuses se glisser sous l'épiderme de sa peau. Il attendit pourtant que la Lune soit à son zénith avant de se relever.
-Pi ?
-Je reviens.
L'oiseau indigo se rendormit dans son nid de couverture et Marco sortit sur la terrasse de ses appartements. Il ferma les yeux en sentant les rayons lunaires sur sa peau et d'un mouvement vif il fit un saut qui le propulsa dans les airs. Avant que son corps ne retombe par gravité, ses bras se recouvrirent de plumes bleues, ses jambes se changèrent en serres. Une queue bleue et or poussa dans le bas de son dos et un bec à la place de sa bouche.
Tout son corps s'était métamorphosé en un magnifique oiseau de flammes bleues et or. Un Phénix. Il poussa son cri et s'envola encore plus haut vers le ciel pour se rapprocher au maximum de la Lune pour laquelle il se mit à danser dans les airs.
Le silence de la nuit à peine coupé par les bruits de la cité d'Oman était reposant pour Marco. Il aimait voler à cette heure tardive, explorant le ciel à sa portée, veillant à la sécurité de son peuple par les airs. Tous connaissaient son pouvoir sur Oman, il n'était pas rare que les habitants arrêtassent leurs activités pour l'observer voler dans les airs. Les enfants s'amusaient à l'imiter dans leurs jeux, les femmes bordaient des symboles de phénix sur les tentures des habitations. Tous l'admiraient et le vénérait.
Pourtant Marco n'était pas de ces hommes qui aimaient le statut de chef ou de roi, il n'était pas un homme avide de pouvoir ou de reconnaissance. Il a été nommé Kshatriya il y a bien longtemps, alors qu'il n'était qu'un jeune homme à peine sortit de l'adolescence après la mort de celui qui le précédait, de son géniteur. A ce moment-là, ni lui, ni son peuple n'auraient pu s'attendre à ce qu'il allait entreprendre.
-Piiiiii !
Marco baissa sa tête pour voir une petite boule indigo à peine perceptible voler à toute allure vers lui. Le petit oiseau entra en contact avec violence pour son petit corps contre les plumes de feu. Il se logea juste sur le haut de son dos, à la jonction de son cou et s'enfouit dans les douces plumes. Le Phénix poussa nu petit cri semblable à un rire et continua de voler autour de l'île.
Sa capacité à voler, il la devait à un étrange fruit qu'il avait mangé en étant enfant. Un fruit étrange qu'il avait vu dans la forêt, un fruit avec comme des flammes bleues sur la peau. Un fruit pas vraiment très bon par ailleurs. Il l'avait mangé et depuis il était capable de changer son corps en Phénix. C'était même plus que cela, son corps était à moitié humain et à moitié phénix. Cette capacité s'était accompagnée de bonnes et mauvaises choses, comme tout pouvoir quel qu'il soit.
Ces moments de solitude nocturne lui permettaient aussi d'observer le paysage. Il aimait cette île, ses forêts luxuriantes et tropicales. Sa cité et ses villages pleins de couleurs et de vie. Ses prés et ses champs, ainsi que la petite chaine de collines qui occupait le centre de l'île. Un paysage qu'il voyait changer et évoluer au fil des ans, sans doute le seul habitant de cette île à vraiment s'en rendre compte.
Le blond redescendit au sol après plusieurs heures de liberté sauvage. La Lune était redescendue depuis un moment et le soleil commençait à se lever au loin. Avec douceur il se posa sur la terrasse de ses appartements et se transforma, portant son petit oiseau indigo endormi dans ses mains, un sourire tendre sur les lèvres.
-C'est ça de vouloir voler avec un phénix, yoi.
Yoi. Une déformation de langage à chaque fois qu'il se transformait totalement en Phénix et qu'il laissait sa part sauvage prendre le contrôle de son corps. Un petit tic qui disparaissait au bout de quelques jours sans se transformer.
Il déposa l'oiseau dans son nid de couverture et s'habilla avant de sortir dans la cité d'Oman. Il voulait profiter encore un peu du calme avant le réveil des habitants et du bruit quotidien d'une cité pleine de vie.
Lexique hindou :
Kshatriya : c'est une caste qui regroupe les nobles, rois, soldats, ici je l'utilise dans le sens de chef/dirigeant/roi
Brâhmane/Brâhmana : c'est la caste des prêtres, religieux
Les noms propres de lieux et prénoms sont des noms réels et hindous. J'ai également essayé de suivre quelques trucs de la religion hindou mais celle-ci étant très complexe il y aura des erreurs donc pour les connaisseurs, pardonnez-moi ^^
J'espère que ce chapitre vous aura plus !
A très bientôt, votre chère Eva'
