- Harry Potter = Le Roi Arthur Pendragon = Royaume de Logres (ou Loegrie) - Capitale Camelot
- Draco Malfoy = La Reine Elsa Camlann = La Reine des Neiges = Royaume d'Avalon (ou Royaume d'Été / l'Île Fortunée) - Capitale Arendelle
- Neville Londubat = Le Chevalier Lancelot Du Lac (origine inconnue) = vassal et bras droit du Roi Arthur (amoureux de la Reine Guenièvre)
- Blaise Zabini = Le Capitaine Sinbad (originaire d'Arabia) = Pirate devenu Corsaire au service d'Avalon et de la Reine Elsa (à bord de la goélette "Djinn's Revenge")
Chevaliers de la Table Ronde : Perceval (amoureux de la Reine) / Galahad (fils de Lancelot) / Tristan / Érec / Caradoc / Bohort / Yvain / Gauvain / Gliglois / Girflet / Claudin
Pirates (nommés dans l'histoire) : Hindbad (quartier-maître et second du capitaine) / Haroun / Amin (jeune mousse d'une dizaine d'années)
Nobles d'Avalon (nommés dans l'histoire) : la Princesse Anna Camlann (sœur de la reine) / la Duchesse Gerda de Monmouth (Grande Chambellan) / Iseut et Énide (Dames d'Honneur de la Reine) / Ysengrin = Remus Lupin (loup-garou qui se maîtrise, camelot du pays Fabliau, accueilli à Arendelle par la Reine)
Vus précédemment : Theodore Nott = le Nain Tracassin / Zacharias Smith = Kay (anciennement Duc de Glastonbury et ex-époux de la Princesse Anna)
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¤¤¤¤ - Chapitre 6 - ¤¤¤¤
=== Le Vaillant Petit Tailleur ===
Draco fut réveillé par un mouvement dans ses draps de soie. Son lit était immense et le matelas, très épais, mais cela ne l'empêchait pas de sentir la moindre perturbation dans son sanctuaire nocturne, ce qui le sortait immanquablement du sommeil. Il soupira… Ce n'était pas la première fois que l'événement se produisait. Depuis deux semaines qu'ils étaient installés au château d'Arendelle, l'incident était devenu habituel.
« Blaise… maugréa-t-il, encore engourdi. Je dormais…
- Mais ça fait trois jours, gémit la voix sous la couverture.
- Je suis fatigué…
- Tu es toujours fatigué… grommela le pirate en rampant vers son ami avant de s'affaler sur ses hanches. Et vu tes journées, c'est pas près de s'arranger.
- Je suis la reine… Je dois…
- Tu dois surtout te détendre, et je te propose de bénéficier de mes services. Sois reconnaissant : je suis un expert, mes talents sont très demandés.
- Pourquoi ne vas-tu pas en faire profiter des plus réceptives ? Je t'ai vu séduire une de mes dames de compagnie, elle avait l'air ravie. Vous avez ma bénédiction.
- Tes jolies jambes me manquent…
- Blaise… souffla le blond en soulevant les draps pour le regarder. On couche ensemble presque toutes les nuits. Je me lève tous les jours avant six heures du matin, et m'endors après minuit. Je suis épuisé !
- Trois jours, répéta le mulâtre en bougonnant. T'as une idée de l'état dans lequel je suis ? Et tu dois pas être mieux, je suis sûr. C'est la frustration qui te rend si grognon. Tu verras, si tu me laisses faire, tu seras beaucoup plus efficace demain.
- Parce que maintenant, tu veux me faire croire que tu agis pour le bien du Royaume ?
- Mais c'est vrai ! C'est un service que je te rends.
- Quel dévouement… Un exemple d'altruisme !
- Draco… Je crève d'envie de te baiser…
- N'espère même pas me convaincre que je suis ton seul partenaire sexuel…
- Mais c'est toi que je veux. »
Elsa retomba mollement sur ses oreillers en soupirant, las. C'était trop tard à présent, il était bien réveillé. Un coup d'œil vers l'horloge lui apprit qu'il était seulement deux heures du matin, et les effluves d'alcool parvenant jusqu'à ses narines l'informèrent sur la soirée arrosée de son invité impromptu. Pourquoi ne parvenait-il jamais à le mettre à la porte ? Il finissait toujours par céder à ses avances… Les premières nuits, ses attentions étaient très appréciables, et l'aidaient effectivement à se soulager du stress. De plus, cela lui rappelait agréablement le temps de Poudlard, où ils se faufilaient l'un dans le lit de l'autre pour une partie de jambes en l'air. Mais le manque de sommeil et l'accumulation de fatigue avaient eu raison de ses besoins charnels. Et Blaise devenait de plus en plus insistant…
En réalité, Draco se demandait surtout pourquoi le flibustier se trouvait encore au palais. Certes, il était heureux d'avoir son ami près de lui, sa présence lui étant d'un grand réconfort. Cependant, il demeurait un pirate libre, avide d'aventures et de pillages… Ses hommes, d'abord satisfaits de pouvoir jouir de l'hospitalité royale sous le titre de "Protecteurs du Royaume", ce dont ils avaient très largement profité, semblaient à présent plus irrités de jour en jour de devoir rester cloués au plancher des vaches. Et parfois, il surprenait Blaise, le regard perdu au loin sur l'océan, comme à regrets… C'était à n'y rien comprendre.
« Pourquoi tu ne reprends pas la mer ? demanda-t-il tout à coup, les yeux fixés au plafond.
- T'en as marre de moi à ce point ?
- Non !... C'est juste… Ton équipage va organiser une mutinerie si tu persistes à rester. Bien sûr, je suis content que tu sois là, avec moi. Mais je vous ai donné vos pièces d'or et ta lettre de commission. Je vous offre le gîte, le couvert, les loisirs et même les plaisirs de nos maisons closes. Certains de tes marins ont eu besoin d'être remis dans le droit chemin, mais rien de bien grave. Vous serez toujours les bienvenus à Avalon. Tu peux revenir quand tu veux, alors pourquoi abandonner si longtemps ta vie de pirate ? Tu ne veux plus profiter de cette année dans le monde des Contes et Légendes en partant à l'aventure ?
- Et toi ? Tu veux vraiment passer un an le cul vissé sur ton trône ?
- Ne me dis pas que tu m'attends ? s'étonna Draco en relevant la tête pour observer son ami.
- J'ai l'impression que Potter aussi, t'attend, sourit vicieusement Sinbad en mordillant la hanche pâle.
- Ce n'est pas pareil, souffla le blond en retombant à nouveau sur ses coussins, retenant de justesse un gémissement. Il a promis de m'aider à maîtriser mes pouvoirs pour lever la malédiction.
- C'est sûr que s'occuper des cultures, des échanges commerciaux et des traités diplomatiques vont vachement t'aider, grommela le noir en plantant plus durement ses dents à un endroit bien précis, avant de lécher la peau douce, récoltant le petit cri de plaisir qu'il recherchait.
- Je n'ai pas le choix ! Il est de mon devoir de…
- De rien du tout ! compléta Zabini, agacé. Comme d'habitude, tu te noies dans le travail pour éviter de penser aux vrais problèmes. Tu fais que repousser l'échéance en croyant que tout va s'arranger tout seul. Mais ça marche pas comme ça, et tu le sais. Si tu laisses couler trop longtemps, au bout d'un moment c'est trop tard. Tu as dix mois, bordel ! C'est que dalle ! On passe sept ans à Poudlard, avec des professeurs diplômés et certifiés, avant de pouvoir être considérés comme des sorciers aptes à utiliser la magie. Alors t'attends quoi ?
- Tu le dis toi-même : à Poudlard, nous avions des enseignants ! protesta Draco en se redressant sur ses coudes, énervé. Et ici, j'ai quoi ? Qui va m'apprendre à contrôler ma glace ? Personne !
- Tu joues l'imbécile, râla Blaise en lui griffant le flanc. Il y a plein de sorciers, dans les contes ! Pas besoin qu'ils fassent joujou avec le froid comme toi pour t'apprendre des trucs !
- Je ne peux pas laisser mon Royaume ! On a bien vu ce que ça a donné, la dernière fois !
- Ça y est : le retour de Malfoy et sa mauvaise foi légendaire, ricana le pirate en remontant lentement le corps à peine vêtu, l'écrasant pour le forcer à se rallonger. Tu sais ce que ça veut dire, "déléguer" ?
- Et qui ?! contra le blond en cédant sous le poids de son amant. Tu vois quelqu'un capable de reprendre les rênes en mon absence ?
- À t'écouter, tu serais la seule personne compétente du pays, s'amusa-t-il en se frottant lascivement contre lui. Tu les recrutes comment, tes ministres ?
- Ils sont… gémit la reine avant de s'arrêter quelques secondes afin de reprendre une voix plus assurée. Ils sont chacun doués dans leur domaine, mais n'ont pas de vision d'ensemble…
- Et toi seul peut l'avoir, cette "vue" ? lui susurra-t-il à l'oreille, jouant avec son lobe pour le faire frémir. T'as jamais pris la peine de former quelqu'un, au cas où il t'arriverait quelque chose ?
- Anna… frissonna Elsa en se mordant les lèvres, fermant les yeux sous la douce torture. Mais elle est encore trop jeune… trop immature…
- Normal si tu lui laisses pas l'occasion de faire ses preuves, chuchota Blaise en lui malaxant les fesses et l'embrassant dans le cou. Tu es toujours en train de la surprotéger. Lâche lui un peu la bride. Je suis sûr qu'elle pourrait te surprendre.
- Je… haleta le blond, se cambrant violemment à une caresse plus intime. Je ne peux pas l'abandonner…
- C'est pas un abandon, c'est de la confiance, poursuivit le noir avant de lui faire un suçon.
- Je… »
Draco ne parvenait plus à réfléchir. Les attentions de plus en plus poussées de son partenaire lui embrumaient le cerveau. Il sentait une résistance flancher en lui, comme un barrage sur le point de céder. Le plaisir qui accélérait son cœur ne l'aidait pas à le consolider, bien au contraire. Il ne pouvait pas se laisser aller, il lui fallait rationaliser. Il devait trouver d'autres arguments, il devait lui faire comprendre… Il ne pouvait pas partir. Il avait encore tellement à faire. Trop de réunions à présider. Trop de discours à donner. Trop de conflits à gérer. Trop de négociations à mener. Trop de planifications à établir. Ordonner. Parlementer. Débattre. Guider. Commander. Diriger. Contrôler… Toujours parfait. Toujours bien mis. Jamais fatigué. Jamais émotif.
Un sanglot remonta dans sa gorge sans qu'il puisse le retenir. Zabini, à présent bien installé entre ses cuisses, s'immobilisa. Le blond se cacha le visage entre les mains pour masquer ses larmes qui menaçaient de couler, mortifié. Il ne pouvait pas craquer ! Il n'en avait pas le droit ! Pas en étant un Malfoy ! Encore moins en tant que reine ! Comment pouvait-il donner de telles responsabilités à sa frêle petite sœur, alors que lui-même avait du mal à en supporter le poids ? Si lui était à deux doigts de s'écrouler, Anna ne tiendrait pas une journée !
Doucement, Blaise lui écarta les bras, mais il détourna le regard, honteux. Il tentait d'endiguer ses pleurs sans succès, et se remit à maudire la stupide reine qu'il incarnait, comme lorsqu'il se trouvait encore prisonnier de son château de glace. Elle n'avait pas vécu sa vie. Elle n'avait pas eu un père qui l'obligeait à rester de marbre en toutes circonstances, depuis la plus tendre enfance. Elle n'avait pas eu à vivre dans la peur dans sa propre maison, alors que des gens hurlaient sous la torture toutes les nuits. Elle était faible ! Elle…
« Je suis là… »
La surprise le calma instantanément, et il se tourna vers son ami… Ses yeux limes l'observaient avec insistance, et une tristesse à peine voilée…
« Pour combien de temps ?
- Toute la vie, murmura Blaise en retirant une mèche devant son visage, séchant ses larmes au passage. Je sais que j'ai pas été un très bon ami ces dernières années, mais je compte bien me rattraper. Je te laisserai plus tomber. Tu n'es plus seul, maintenant.
- Je n'ai jamais attendu de toi que tu te sacrifies pour moi, fit le blond en détournant le regard, mal à l'aise. Tu as ta propre vie. Tes propres problèmes à gérer… Je ne te demande rien.
- Moi, si, répondit le mulâtre en enlaçant son ami, le nez dans ses cheveux. Je t'ai traité comme un simple plan cul… alors que tu es tellement plus que ça, pour moi. Je venais te voir seulement pour mon plaisir personnel, en prétextant que t'en avais besoin. Ça soulageait ma conscience. J'ai vraiment été merdique, comme ami… Pardon…
- Mais ça me faisait effectivement beaucoup de bien. Arrête de jouer les Poufsouffles, ça ne te va pas du tout. Tu fais pitié.
- Hey ! s'insurgea-t-il en se redressant. Je suis en train de t'ouvrir mon cœur, et c'est comme ça que tu me remercies ?
- Cesse de me prendre pour une petite chose fragile ! grogna Draco en lui tapant sur le crâne. Je reconnais que ça n'allait pas fort, mais tu ne pouvais rien y faire ! Et je vais bien maintenant, alors tes élans affectifs n'ont aucun sens, à part celui de t'apitoyer.
- Je sais, je sais, sourit le pirate, rieur. Alors ? Ça va mieux ? Je veux dire, par rapport à ta petite crise de larmes. »
Toujours dans ses coussins, le blond regardait son ami avec des yeux ronds. Cet…
« Enfoiré ! Tu t'es foutu de moi ?!
- Pas tout à fait : je ne t'ai pas menti, seulement un peu joué avec la vérité…
- Et quelle réaction désirais-tu ? Que je te tombe dans les bras ou que je me moque de toi ?
- À ton avis ? sourit largement Zabini, en se rallongeant de tout son long sur son ami. Mais l'important, c'était que tu te détendes. Mission accomplie ! N'empêche, ça fait plaisir de te voir pleurer un peu. Enfin, je veux dire… C'est mieux que l'espèce de larve toute sèche que t'étais dans le vrai monde.
- Une "larve" ? Vraiment ?
- Sérieusement, Draco… T'es plus seul, maintenant. Je suis là. Et, même si ça me fait franchement chier de l'admettre, Potter aussi est là.
- Que vient faire ce Gryffondor dans cette conversation… ? fit la reine en roulant des yeux.
- Il t'attend. Comme moi. On te laisse remettre ton pays sur les rails et puis on se casse : toi, moi, lui, ses chevaliers et mes pirates.
- Vraiment ? grommela Malfoy, levant son fameux sourcil fin. Et vous avez déjà planifié la route ? Vous connaissez notre destination ?
- Disons que… hésita le pirate en entortillant une mèche de cheveux blonds autour de son doigt. J'en ai pas encore parlé à Potter.
- Étonnant…
- C'est des détails, insista-t-il, l'air plus grave. Draco, tu peux pas rester ici. Tu dois apprendre à maîtriser ton pouvoir, et c'est pas en passant tout ton temps à gouverner que t'y arriveras. »
Le blond détourna les yeux, agacé… Il n'aimait pas reconnaître que son ami avait raison. Pourtant, il avait réellement beaucoup à faire pour son pays ! Il avait planifié tant de stratégies sur le long terme ! Qui allait pouvoir surveiller la bonne marche de ses manœuvres politiques ? Et puis… Il déglutit, ses yeux se remettant à piquer. Il se mordit les lèvres, une boule d'angoisse dans la gorge.
« Draco… Tu…
- J'ai peur » coupa Draco en braquant soudainement ses yeux sur le mulâtre.
Il l'avait dit… Ce qu'il ressentait tout au fond de lui, ce qu'il souhaitait cacher, ce qu'il ne voulait même pas s'avouer lui-même. Ce qui lui donnait tant envie de pleurer, ce qui lui faisait trouver autant d'arguments pour justifier ses actions… ou sa "non-action"... Il n'avait juste pas envie. Parce que c'était terrifiant !
« C'est… Ce n'est pas moi, le "héros", bredouilla-t-il, trouvant difficilement ses mots pour s'expliquer. Je n'en ai jamais eu la vocation… Ni l'envie ou le besoin… Je n'en ai pas l'étoffe. Alors… partir comme ça… vers l'inconnu… Je n'ai jamais voulu vivre une aventure, moi ! Je suis conscient de ce que je suis, et surtout de ce que je ne suis pas. Je ne suis pas courageux, je n'aime pas les défis, je veux juste vivre une vie tranquille et manipuler les gens aisément manipulables pour parvenir à mes fins. Je ne prends pas de risque. J'aime la facilité. Alors… tout ça…
- Draco… Il y a des moments dans la vie où on n'a pas le choix. Soit on fait le grand saut pour vivre, soit on reste immobile et on meurt. C'est là où tu es. En fait, ça fait dix ans que t'en es là. Mais aujourd'hui, t'es plus seul, répéta encore Blaise, insistant bien sur ses derniers mots. On est là pour toi. Tu veux pas de risque ? Parfait ! Moi non plus : laissons ça aux chevaliers, ils seront ravis en plus. Peut-être qu'on est pas courageux comme eux, mais on est des Serpentards. Alors utilisons les vrais héros pour aller là où on veut ! Pour ça, on est des experts ! »
Le pirate sourit, fier de sa tirade, et le blond ne put s'empêcher de ricaner. Cela le détendit efficacement : il se sentait moins crispé, la boule dans sa gorge rapetissait, son mal de tête constant se dissipait enfin… Il était toujours effrayé à l'idée de se lancer dans une quête impossible. Rien n'avait changé… Et pourtant… S'il était avec lui, alors… peut-être…
« Tu m'as manqué, fit-il à son ami, l'air tendre.
- Je sais. Mais je suis de retour maintenant, et je te lâche plus !
- Il me faudra encore régler beaucoup de détails, réfléchit la reine, reprenant ses habitudes méthodiques et rationnelles. Je dois organiser un…
- Demain, trancha Zabini. Pour le moment, je vais m'occuper de soulager cette tension qui te reste. »
D'un coup, il se redressa, emportant dans le même mouvement le pantalon de pyjama en soie blanche de son ami qui couina.
« Beaucoup mieux, s'amusa-t-il en se rallongeant sur le corps pâle à présent nu.
- Tu ne perds pas le Nord…
- Jamais pour un sujet aussi important, susurra-t-il en reprenant ses caresses et ses baisers. Et puis… je suis un pirate. »
Draco se laissa aller en souriant. Il entoura la taille de son amant de ses longues jambes fines, et enlaça les épaules larges et musclées. Blaise n'avait pas tort : il avait amplement le temps de penser plus tard. Actuellement, il avait besoin d'apaiser son esprit bousculé par toutes ses émotions. Quoi de mieux pour cela que de malmener sa chair en la brisant sous le plaisir ? Et son ami était très bon à ce jeu. Celui-ci n'avait pas l'air d'avoir compris que ces dix dernières années, subir ses talents lubriques étaient les seuls délices qui le faisaient encore se sentir vivant. Et pour cela, il lui en serait éternellement reconnaissant… mais ne le lui confesserait jamais.
Et pendant qu'il se faisait durement pénétrer, sa langue partit combattre sa consœur dans une danse effrénée.
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Par la fenêtre de sa chambre, Harry observait le ballet incessant et discret des serviteurs, évitant de croiser les courtisans qu'ils ne devaient surtout pas déranger. Il n'avait jamais aimé cette séparation des êtres humains en deux classes distinctes… Et pourtant, ses souvenirs en tant qu'Arthur lui montraient que son propre château obéissait aux mêmes règles… voir même plus sévères. Ici, les domestiques pouvaient parfois converser aimablement avec un noble. Ils étaient bien traités, bien payés, jamais surmenés, et même salués poliment. Ce qui n'était pas toujours le cas chez lui…
« Prends-en de la graine, Arthur ! » pensa-t-il fortement.
Cela faisait deux semaines qu'ils croupissaient à Avalon. Le roi s'était montré vague lorsqu'il avait dû raconter à ses chevaliers les événements de la nuit de la reprise d'Arendelle. Pour passer la présence du Nain Tracassin sous silence, il avait inventé une histoire de sortilège défensif installé par le Gouverneur Kay, et qui les aurait plongés dans l'inconscience. Seul Blaise eut le droit au récit presque complet de l'épisode, et s'était montré "déçu" de ne pas avoir pu voir son ami Theo. Le pirate, comme tous les autres, n'avait gardé aucun souvenir de "l'autre côté du miroir". Mais Harry le soupçonnait de leur cacher quelque chose… Pour le moment, il préférait attendre de voir ce qu'il allait faire, et espérait qu'il finisse par parler… au moins à Malfoy. Malgré tout, il comptait bien lui faire cracher le morceau avant que leur chemin se sépare. Il était étonné que le flibustier se trouve encore au palais… Peut-être y avait-il là un indice sur ce qu'il taisait… ?
« Harry ? »
Le brun se retourna pour voir Neville, sur le seuil de la porte de sa chambre. La reine ne s'était pas moqué de lui : sa suite était somptueuse, digne d'un roi… ce qu'il était. De riches meubles en bois laqué, ornés d'argent ; une garde-robe excessivement fournie d'habits luxueux à sa taille, de pur style "Avalon" ; une salle-de-bain privée géante, toute de marbre blanc ; un lit si moelleux qu'Arthur avait l'impression de dormir sur un nuage… et aussi une petite bibliothèque, un salon, un bureau… Il disposait d'un appartement princier pour lui seul ! Et assis sur le balcon, à regarder les gens passer, il n'avait pas entendu Lancelot toquer à l'entrée, deux salles plus loin.
« Installe-toi, l'invita-t-il en montrant les fauteuils de velours face à lui. Tu veux quelque chose à boire ?
- Ne dérange pas tes servants personnels pour moi, sourit son ami en s'asseyant. Alors ? C'est bien, la vie de château ?
- Pas mal, oui. C'est mieux que les campements dans la neige. Je préfère aussi porter les tenues d'ici : on dirait des vêtements modernes moldus haut-de-gamme. Même leurs costumes sont confortables. Au début, j'ai presque cru qu'il y aurait l'eau courante tant j'ai l'impression de me trouver dans un palais du vrai monde…
- N'exagérons rien : as-tu déjà vu une architecture pareille ? Il y a du vrai, mais j'ai plutôt la sensation d'être au beau milieu d'un conte de fée… enfin, je veux dire… On est dans un "conte de fée", mais…
- Je vois ce que tu veux dire… C'est très… féérique. J'adore cet endroit : tout respire l'opulence et la majesté sans être trop ostentatoire… Sauf l'aile de la Salle du Trône, mais c'est plutôt normal. Si je pouvais rester toute l'année, je ne me priverai pas.
- Justement : je venais te demander ce que tu avais prévu pour la suite. Les chevaliers ne tiennent plus en place, ils n'arrêtent pas de me réclamer la date de notre départ… Je ne sais plus quoi leur dire pour les faire patienter. Harry… Tu dois leur expliquer pour la malédiction. »
Le roi soupira… Il avait préféré ne mettre dans la confidence qu'un minimum de personne, afin d'éviter les fuites. Ce n'était pas qu'il ne faisait pas confiance à ses hommes, mais un mot de travers était si vite arrivé… Si le peuple d'Avalon apprenait que leur reine ne les avait finalement pas sauvés de l'Hiver Éternel, et que celui-ci pouvait revenir dans dix mois… Mieux valait éviter une crise de panique.
« Ça m'étonnerait que Tristan et Érec désirent à ce point plier bagage, rit-il, l'air malicieux. Ils sont plutôt occupés à conter fleurette à ces deux dames de compagnie de la reine. Comment se nomment-elles, déjà ?
- Iseut et Énide… C'est vrai que ceux-là me fichent la paix… Perceval aussi : il ne sait pas encore qu'Elsa vient avec nous… D'ailleurs, ne trouves-tu pas son attrait pour lui inquiétant ?
- Pourquoi ? Ils sont reine et chevalier, et Malfoy n'a pas l'air de partager ses sentiments. Perceval sait qu'il n'y a aucun espoir. À part une peine de cœur, il ne risque pas grand-chose.
- Tu oublies un peu vite les élans chevaleresques de l'amour courtois… Je n'ai pas trop envie d'assister à quelques… "réactions extrêmes".
- Que veux-tu dire ?
- Rien… Espérons que tu aies raison. Tu ne m'as pas répondu : quand penses-tu que nous pourrons lever le camp ? »
Harry grimaça, peu enclin à répondre… Il n'avait pas envie de partir, mais il le devait. Sans vraiment savoir pourquoi, il se sentait chez lui à Arendelle… De plus, leur départ signifierait qu'il devrait se séparer de ses chevaliers. Il n'avait confessé à personne la teneur exacte de son marché avec Tracassin, y compris à Neville, encore moins à la reine : l'abandon de la quête du Graal au profit de Malfoy. Il ne pouvait en exiger de même à ses hommes, voués corps et âme à cette mission sacrée. Cependant, il n'avait plus le choix… Leurs chemins allaient donc se scinder…
Et puis, il y avait le blond. Au début, il était normal qu'il prenne le temps de remettre en ordre son Royaume. Mais au fur et à mesure, le Gryffondor s'était rendu compte qu'il était bien trop attaché à son pays. Étrange lorsqu'on savait qu'il y mettait les pieds pour la première fois. Beaucoup moins quand il remarquait qu'il songeait à Camelot avec nostalgie…
« Je vais parler à Malfoy, finit-il par dire à contrecœur. À tous les coups, il n'a pas saisi qu'il doit nous accompagner, et c'est pour ça qu'il met autant de jours à préparer son départ…
- Vous n'en avez pas discuté ? s'étonna Lancelot. Je croyais que vous vous voyez tous les soirs ?
- On partage un verre en débattant sur les difficultés de régenter un royaume, et sur ses différentes stratégies économiques internationales… Sur notre alliance, entre Loegrie et Avalon… En fait, c'est beaucoup de politique. C'est très intéressant, il faudra qu'on prévoit un entretien avec le Ministre de la Magie, à notre retour.
- Harry… Tu ne crois pas qu'il y a plus urgent ? Pourquoi tu traînes autant la patte ?
- Je vais aborder le sujet, répéta-t-il, morose. Il faut qu'il nomme un régent. Qu'il le prépare… Je crois qu'il pense à sa sœur pour ce rôle, mais elle ne s'en sortira jamais toute seule. J'ai quelques idées qui pourraient l'aider…
- Harry… insista Neville en se retenant de crier de frustration. Tu n'es pas "Arthur", et il n'est pas "Elsa"… D'ailleurs, tu pourrais le laisser se débrouiller : nous ne sommes là que pour une année. Même si l'hiver revient à Avalon, nous serons partis avant que la situation ne dégénère. S'il s'amuse autant en jouant à la souveraine, grand bien lui fasse ! Mais nous, nous avons un autre objectif… Pas vrai ? »
Il n'osa pas regarder son ami, aucun réel argument ne lui venant à l'esprit pour le contredire. S'il pensait encore comme "Harry Potter", il aurait reconnu la justesse de ses paroles. Cependant, il se plaisait de plus en plus dans la peau du Roi Arthur, et aimait agir à sa manière. Honneur, Justice, Équité… Qu'importe si cela était pour un an seulement, il avait un pays à défendre, des promesses à tenir et des personnes à protéger. Et il comptait bien respecter ses engagements, même s'ils avaient été pris avec un mage noir.
« À quoi sert de vivre dans ce monde si ce n'est pas pour tenir le rôle qu'on nous a attribué ? rétorqua-t-il d'un ton accusateur. Tu étais si fier de revêtir l'armure de Lancelot ! Vas-tu trahir son personnage pour te simplifier la tâche ?
- Non… Mais…
- J'ai juré d'aider la Reine Elsa d'Avalon à maîtriser ses pouvoirs et sauver son Royaume. Parce que c'est ce que ferait le "Roi Arthur de Loegrie". Et parce qu'il est moi. Aurais-tu oublié qu'ici, nous ne pouvons qu'agir en accord avec notre vraie nature ? Voici la mienne. Si elle ne te plait pas, je ne te retiens pas.
- Ce n'est pas ce que je voulais dire… Bien sûr que je viens avec toi ! Mais… Et le Graal ?
- Tu crois qu'on le trouvera en un an ? ricana Potter, légèrement nauséeux de mentir ainsi à son ami. La Légende Arthurienne se déroule sur plusieurs années, et je meurs avant sa découverte. Je préfère me concentrer sur une quête… à "durée limitée".
- Très bien… De mon côté, j'ai réfléchi par où on pourrait commencer pour aider "la reine", sourit Neville, un peu plus confiant. Que dis-tu de Merlin ?
- J'ai eu la même idée, avoua Harry, heureux de revenir à un sujet moins sensible. J'ai repensé à ce qu'a dit la Princesse Anna, le soir où nous l'avons rencontrée. Au milieu de son flot d'informations, elle a glissé que notre cher magicien de la Cour aurait proposé d'aider la reine à contrôler sa magie.
- Elsa n'aurait jamais dû refuser…
- Certes… Ce qui est fait, est fait. Je crois me souvenir qu'il partait régulièrement Merlin sait où… Ou plutôt devrais-je dire "Dieu sait où".
- Harry…
- Nous devrions rentrer à Camelot… Cela nous fera un bon point de départ pour commencer les rech…
- Harry !
- Quoi ?!
- C'est pas un Serdaigle ? »
Potter cligna des yeux avant de regarder vers l'endroit que pointait son ami… Un jeune homme discutait joyeusement avec Ysengrin, le "Remus Lupin" local. Ils parlaient à renfort de grands gestes expressifs, comme deux vieux amis se remémorant d'anciennes anecdotes, tout en se promenant dans les vastes jardins luxuriants. L'homme devait avoir leur âge, et avait des touffes de cheveux blond cendré partant dans tous les sens sous son chapeau Porkpie vert à bande jaune et plume orange. Ses vêtements rouges ne passaient pas inaperçus, et étaient même de mauvais goût à côté de l'élégance "avalonesque", et sa large ceinture de cuir blanc lui donnait l'impression d'être coupé en deux. Cela ne l'empêchait pas de sautiller, jovial, inconscient ou ignorant les regards choqués autour de lui.
« Je ne sais plus comment il s'appelle, hésita-t-il en plissant les yeux, comme si cela allait lui rafraîchir la mémoire. Michel ? Mickaël ?
- Carmichael ! s'exclama Londubat en tapant dans ses mains. C'est ça ! Eddie Carmichael !
- Que fait-il ici ? Il n'a visiblement pas l'air d'être originaire de l'Île Fortunée… »
Sans se concerter, ils se levèrent d'un même mouvement pour descendre à sa rencontre.
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« Un "tailleur" ? »
Draco leva les yeux vers sa sœur surexcitée, et laissa momentanément les divers comptes-rendus de ses Ministres. Il reposa lentement ses papiers et son stylo, et s'adossa à son fauteuil en plaçant les mains bien à plat sur le bureau, s'obligeant au calme. « Ce n'est jamais bon quand elle est comme ça » se dit-il en serrant les dents.
« Et d'où vient-il ? demanda la reine après une longue expiration.
- Aucune idée ! Il ne s'en souvient pas. Mais ses habits sont… singuliers ! Et il raconte des histoires extraordinaires ! Figure-toi qu'il est arrivé à dos de renne !
- De "renne" ?
- Il l'appelle "Sven". Il dit l'avoir trouvé après avoir vaincu un géant !
- Un "géant"…
- Oui ! Et à sa ceinture, il y a écrit "Sept d'un coup" ! Tu crois qu'il a battu sept géants ?
- Et qui t'a raconté ces balivernes ?
- Ce ne sont pas des "balivernes", grommela la jeune rousse en s'affalant dans un fauteuil en face de sa sœur. J'étais sûre que tu dirais ça ! En fait, j'ai entendu les pirates parler entre eux…
- Tu es encore allée à la taverne ?! s'emporta Elsa, griffant ses appuis-bras en se redressant. Je t'ai déjà demandé de ne plus faire ça ! Tout le monde te reconnaît sous ta capuche, tu n'es pas le summum de la discrétion ! Que vont dire les gens si leur princesse prend des habitudes d'ivrogne !
- Je ne bois jamais d'alcool, tu sais bien ! Et puis il y a tellement d'histoires intéressantes qui circulent, là-bas. Tu devrais venir une fois ! Tu verras que…
- Ça ne va pas ?! Vas-tu me forcer à t'expliquer pourquoi la reine ne peut pas aller picoler ?!
- Ce que tu peux être coincée des fois… marmonna Anna en croisant les bras d'un air boudeur. Mais là n'est pas le sujet. Je veux inviter ce tailleur au château.
- Hors de question.
- Mais pourquoi ?!
- Nous avons déjà beaucoup d'hôtes à loger, actuellement. Et…
- Les pirates sont tous à l'auberge principale, il n'y a que Sinbad qui est resté ! Beaucoup de chambres se sont libérées ! On…
- Et ! coupa à son tour Draco en faisant traîner sa voix. Pour accueillir une personne au palais royal, je vais avoir besoin de bien plus qu'une simple rumeur.
- Rencontre-le, au moins !
- Pourquoi ferais-je cela ? Je ne vais pas aller saluer toutes les personnes de passage en ville.
- Je veux lui parler…
- Anna… soupira le blond en frottant ses yeux fatigués. Tu ne m'aides pas beaucoup… Si je t'ai fait venir dans mon bureau, ce n'est pas pour parler de ce… "tailleur". Mais t'entendre faire des caprices ne m'encourage pas à te laisser la gestion du Royaume.
- Attends… Quoi ?! hoqueta l'adolescente. De quoi parles-tu ? Comment ça ?
- Je vais partir, commença-t-il à expliquer en se triturant les doigts sans la regarder.
- Pourquoi ?! Où ça ? Quand ? Comment ? Avec qui ? »
Draco souffla, à la fois exaspéré et anxieux. Il n'avait raconté à personne le marché que Potter avait passé avec Tracassin, et qui avait octroyé un sursis à Avalon. En tant que Princesse du Royaume, Anna méritait de savoir. Plus encore si elle prenait la lourde fonction de régente… Et il lui devait de connaître la véritable raison de son départ.
Calmement, pesant soigneusement chacun de ses mots, il lui narra alors sa rencontre avec le Nain Tracassin, passant sous silence le fait qu'ils étaient amis, au risque d'être obligé soit de mentir, soit d'évoquer Poudlard… Dans le second cas, leur conversation durerait jusqu'à la nuit tombée, et il n'avait aucune envie de révéler aux gens de cet univers qu'il venait d'un autre monde…
Sa jeune sœur, d'abord choquée, devint peu à peu angoissée. Elle avait parfaitement saisi le sérieux de la situation, et prit bien garde à ne pas le couper malgré son envie. Et plus elle réfléchissait aux tenants et aboutissants de l'affaire, plus la panique grimpait en elle… La malédiction n'était pas levée, juste arrêtée ? Elsa devait partir ? Partir ?! Celle sur qui le peuple entier se reposait, elle y compris ? Celle qui portait tout sur ses épaules sans demander l'aide de personne ?! Celle qui était toujours si parfaite, si intelligente, si confiante, si patiente… Et elle allait devoir la remplacer ? Elle ?! Anna ?! La "petite princesse naïve et oisive" ?!
« Elsa… fit-elle la voix tremblante une fois que le blond eut terminé. Tu… J'imagine que ce doit être stressant pour toi… Savoir que le danger est toujours là et que tout dépend de toi… Devoir partir chercher quelqu'un pour t'apprendre ta propre magie… Celle avec laquelle tu es née…
- Je ne serai pas seul, si c'est cela qui t'inquiète, tenta-t-il de la rassurer d'une voix douce. Le Roi Arthur et le Capitaine Sinbad m'accompagneront. Ils attendent que je sois prêt, c'est pour cela qu'ils sont toujours là.
- Tant mieux… souffla la rousse sans pour autant lever les yeux. C'est une bonne chose… Pourtant… Tu… Tu n'es pas sérieuse, Elsa ! s'écria-t-elle finalement, à bout. Tu ne peux pas me choisir pour prendre ta place ! »
Elle le regardait enfin. Draco la connaissait, il s'était douté qu'elle aurait les larmes aux yeux, mais pas que cela lui causerait autant de peine. Cependant, il ne devait pas céder. S'il souhaitait lui confier le trône, il devait la traiter en fonction, et non la prendre dans ses bras comme il l'aurait fait pour sa très chère petite sœur.
« Tu vois ! sanglota la jeune femme. Je ne peux même pas m'empêcher de pleurer, alors qu'il n'y a aucune raison ! Personne n'est mort, tu ne t'en vas pas pour toujours, tu n'as pas été méchante envers moi, au contraire… Je n'ai juste pas le cran, Elsa… Je ne peux pas faire ça… Je ne suis pas comme toi, je ne peux pas supporter toute cette pression ! Je suis…
- Quand j'étais seul dans mon château de glace, je n'arrivais pas à m'arrêter de pleurer, raconta tout à coup Draco, un léger sourire sur les lèvres. Je ne suis pas aussi fort que tu le crois. L'important est seulement d'en avoir l'air aux yeux des autres. »
Le blond observa avec attention les changements d'expressions faciales de l'adolescente, fasciné de pouvoir lire si clairement ses pensées. Le "pourquoi elle me dit ça" : incrédulité, stupeur, méfiance, consternation, incrédulité à nouveau… Puis, le "ça veut dire que moi aussi" : la prise de conscience, l'étonnement, encore l'incrédulité, le déni, le doute… Mais jamais ne venait cette résolution et cette confiance qu'il attendait.
« Évidemment, tu ne seras pas laissée à l'abandon, lâcha-t-il après un long moment à la faire mijoter. L'Archiduc d'Évalac aura la lourde charge d'aiguiller la moindre de tes décisions politiques.
- Le vieux boiteux qui a toujours la goutte ?! s'exclama la rousse, surprise. Pourquoi lui ? J'ai l'impression de ne jamais l'avoir vu en bonne santé… Il a toujours quelque chose : une arthrite, des maux de ventre, des migraines, une grippe… À se demander comment il arrive à sortir de son lit !
- Ne sois pas médisante, sourit-il, amusé malgré lui par la description. Il est un savant stratège, et celui en qui j'ai le plus confiance. Lorsque j'ai un doute, c'est toujours vers lui que je me tourne. Même si je dois aller le tirer de sa chambre à coucher, plaisanta-t-il, complice. N'oublies pas qu'il était le conseiller de notre père durant de nombreuses années, ajouta-t-il ensuite, plus sérieux. Tente une fois de débattre avec lui, et tu comprendras pourquoi. Cet homme est sage et perspicace, et surtout, conscient des réalités. De plus, il possède un réseau d'espionnage très efficace.
- Est-ce légal ? Je veux dire… Ne devrait-il pas te donner ses sources ? En tant que reine, tu n'as droit qu'au meilleur !
- Cela ne fonctionne pas ainsi. Il y a une relation de confiance durement éprouvée entre lui et ses gens. Lien qu'ils n'ont pas avec moi. En parlant de cela, j'ai écrit une lettre à mon contact pour tout ce qui concerne les renseignements extérieurs. Celui par qui transitent mes propres "agents secrets" : je ne connais pas son vrai nom, mais il aime se faire appeler "Le Chat Botté".
- Un chat ?
- Il n'est pas vraiment un animal… Et je ne l'ai jamais rencontré. Cependant, ses informations sont toujours fiables, et d'une grande utilité. Je l'ai mis au courant de ta régence en mon absence, et que tu auras besoin de son aide jusqu'à mon retour. Il ne sera peut-être pas très… "coopératif" au début. Mais tu peux croire en lui : il te transmettra toujours ce que tu dois savoir. Après tout, il a tout à y perdre, et je le récompense grassement pour ses services. Dans les comptes, il est renseigné en tant que "frais de compagnie", en référence à l'animal dont il a pris le nom.
- J'ai l'impression que tu ne me laisses pas les personnes les plus conciliantes pour m'aider… ne put s'empêcher de faire remarquer Anna en prenant la feuille de comptes que lui tendait la reine. L'espace d'un instant, j'ai cru que tu allais me confier aux Ministres pour gérer les affaires de l'Etat.
- Surtout pas, ricana Elsa. Au contraire, ton rôle sera de les remettre dans les rangs : si tu les laisses décider à ta place, ils n'en feront qu'à leur tête, ne s'occupant que de leurs propres domaines d'expertises sans penser à celui des autres. Si on doit user de comparaison, ils sont chacun de brillants solistes sur leur instrument attitré. Tu dois être le meilleur des chefs d'orchestre pour les faire œuvrer ensemble, afin de jouer la plus belle des interprétations, voire même créer leur propre mélodie. Et pour batailler avec eux et les unir, tu dois avoir toutes les partitions en main.
« C'est justement pour cela que je t'ai fait venir : je veux t'expliquer en détails le plan sur l'avenir que j'ai élaboré pour notre pays. Basé sur des prévisions, nos finances, nos alliances, nos capacités… Nous allons passer les prochains jours dans ce bureau, à passer en revue tes futures obligations journalières, les bilans mensuels, les aléas occasionnels, les demandes soudaines, les décisions à prendre, ou les avis à trancher… Tout ce qu'il peut se produire lorsqu'on est à la tête d'une nation. »
La tête d'Anna se mit à tourner : elle ne pouvait pas faire cela ! C'était beaucoup trop de responsabilités ! Le tableau dépeint par sa sœur était loin d'être idyllique… Au contraire, sa vie de simple Princesse lui manquait déjà. L'époque bénie où elle n'avait pas à penser plus loin que ses occupations du lendemain, et n'avait de compte à rendre à personne… ou presque. Elle qui croyait ne pas être suffisamment libre de faire ce qu'elle désirait… Il lui tardait déjà le retour de la vraie reine !
« Autre chose, asséna Elsa, comme le coup de grâce. La vie politique n'est pas faite que de traités ou de comptes-rendus. La Grande Chambellan, la Duchesse Gerda de Monmouth, te supervisera pour tout ce qui à trait aux apparitions publiques, le paraître, le protocole, la Cour… Ce qu'il faut dire ou faire, les bonnes personnes à connaître, les conversations à mener, les événements à fêter… Sans elle, j'aurais été perdu durant mes jeunes années. Elle te sera d'un grand secours, comme elle l'a été pour moi.
- Mais tu n'as plus besoin d'elle… protesta la rousse, mécontente d'être traitée comme une enfant en devant s'encombrer d'une gouvernante trop envahissante. Tu étais une petite fille, à l'époque. Ce qui n'est plus mon cas aujourd'hui. Je sais me tenir quand il faut !
- J'étais surtout une très jeune reine, contra Draco. Du moins, en devenir. Je n'avais que six ans à l'époque où Gerda m'a prise sous son aile pour me préparer au trône, et je n'avais aucune idée à quel point toutes mes actions pouvaient être épiées. Tu verras qu'un seul mot irréfléchi peut entraîner des répercussions dantesques… J'ai été beaucoup trop gentil avec toi, elle va se charger de corriger ce manquement dans ton éducation. Avec elle, je n'ai plus à craindre ton caractère spontané. Écoute-la, obéis-lui, même si cela t'ennuie, même si elle te met en colère… Tu n'as pas le droit à l'erreur. »
Elsa jeta un regard si intense à sa sœur que celle-ci se ratatina dans son fauteuil. Il n'avait jamais voulu éteindre cette flamme qui faisait le charme de la jeune fille, mais cela n'était pas compatible avec la gouvernance. Peut-être était-ce pour cela qu'il n'avait jamais voulu pousser trop loin sa formation de membre de la famille royale.
« J'ai octroyé plus de pouvoir à ces trois personnes afin qu'elles puissent t'assister efficacement dans tes nouvelles fonctions, poursuivit-il une fois certain qu'Anna avait bien compris son message. L'Archiduc d'Évalac viendra s'installer au château à partir de la semaine prochaine, et restera près de toi en tant que bras droit et conseiller officiel, comme il l'a été auprès de notre père. Il n'était pas très heureux d'être ainsi tiré de sa retraite bien méritée, mais n'a pas rouspété longtemps : je pense qu'il a hâte de reprendre du service, cela lui rappelle sa jeunesse.
« La Grande Chambellan aura toute autorité sur la gestion de ton emploi du temps. Elle choisira tes tenues, décidera des événements à organiser, sélectionnera les convives… Naturellement, tu auras ton mot à dire, mais la décision finale lui reviendra. À toi de la convaincre si tu désires quelque chose en particulier, comme inviter un tailleur étranger à la cour… Tu ne pourras plus faire n'importe quoi. Autant dire que tes escapades à la taverne sont terminées.
« Quant au "Chat Botté", je lui donne le droit de déterminer lui-même sur quel sujet d'enquête il doit se concentrer. Il a vite compris mes objectifs d'évolution pour le pays, et il lui arrivait déjà parfois de prendre des initiatives fort appréciables. Tu n'auras pas à t'occuper de lui, ses lettres viendront à toi d'elles-mêmes pour te fournir le résultat de ses investigations. Et avec les espions d'Évalac en plus, tu auras toutes les cartes en main afin de prendre les bonnes décisions.
- Et si j'ai besoin d'un renseignement précis qu'il ne me donne pas ? demanda Anna, frustrée.
- Tu pourras toujours lui soumettre l'idée, hésita Elsa. Cependant, s'il n'a pas envie d'y répondre favorablement, tu ne pourras pas l'obliger. Cela a toujours été un peu particulier de traiter avec lui : il n'est pas un sujet du Royaume, nous n'avons donc aucun droit de lui donner des ordres. Certes, il est bien payé, mais il n'existe aucun contrat entre nous, uniquement un accord tacite… Et puisqu'il n'a jamais travaillé avec toi, il est probable qu'il te faille d'abord gagner sa confiance.
- Comment l'as-tu trouvé ? fit la jeune fille, intriguée par le personnage. Comment en es-tu venu à engager un homme que tu n'as jamais vu, et sur lequel tu n'as aucune autorité ?
- Cela remonte à loin… réfléchit le blond, également déconcerté par les agissements de la reine, mais n'ayant pas encore retrouvé les souvenirs correspondant. Je te raconterai une prochaine fois : pour l'heure, concentrons-nous sur les affaires du Royaume. Même si je te laisse entre les mains expertes de personnes compétentes, c'est tout de même toi qui sera à la tête de l'État. Tes agissements et décisions prévaudront sur tout, et je ne partirai pas tant que je ne te jugerai pas prête. »
Malfoy tira vers lui sa pile de dossiers et indiqua à Anna de prendre place à ses côtés. Après cette introduction en la matière, il était le moment de passer à l'application concrète, et il comptait bien la garder près de lui jusqu'à son départ, afin de s'assurer qu'elle assimile bien son enseignement.
Le cœur lourd, il l'observa s'installer, les yeux emplis de peurs et de doutes. Son adorable petite sœur qu'il aimait plus que tout au monde semblait déjà perdre cette étincelle d'insouciance propre aux enfants. Cela lui faisait mal, mais il savait ne pas faire d'erreur : le temps de l'innocence finissait pas prendre fin pour tout le monde. Elsa l'avait bien trop protégée de la dureté de la vie, la rendant vulnérable à ses aléas. Draco se faisait donc un devoir de la faire entrer dans le monde des adultes, et lui confier des armes pour se défendre. Seule.
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De près, la tenue du Serdaigle était encore plus loufoque. Il ressemblait à un Robin des Bois rouge, avec collants, manches bouffantes, grosses bottes usées et courte cape entourant uniquement ses épaules. Mais le plus étonnant était sa ceinture blanche sur laquelle était pyrogravé "Sept d'un coup"... Ce qui n'avait aucun sens.
L'homme était assis sur un banc, conversant joyeusement avec Ysengrin et deux dames de la Cour. Derrière eux, Harry et Neville s'approchaient sans savoir comment l'aborder… Ils ne pouvaient décemment pas l'appeler par son véritable nom, ou s'exclamer sur leurs retrouvailles après Poudlard devant des habitants de cet univers… Cependant, ils étaient bien trop curieux pour attendre qu'il soit seul, et se demandaient quel était le sujet de son discours pour parler avec tant d'emphase.
Le vieux camelot arborait un visage enchanté, comme distrait par une bonne plaisanterie. Celui-ci avait troqué ses anciens habits surannés pour adopter la mode d'Arendelle, et portait à présent un riche costume de flanelle en laine bleu turquin, avec boutons de manchettes en or et saphir, et fine cravate de soie pervenche : Remus Lupin n'avait jamais été aussi distingué. Harry en était ému, et remerciait silencieusement Malfoy de lui offrir la chance de voir cet homme habituellement si fatigué avoir si belle allure.
« N'aviez-vous donc pas eu peur ? minauda l'une des deux femmes, se penchant un peu trop pour mettre en avant le décolleté échancré de son fin pull en cachemire framboise.
- Pourquoi l'aurais-je été ? répondit l'homme rouge en bombant le torse, fier comme un paon, les yeux partant se perdre sur la peau ainsi découverte de son interlocutrice audacieuse. Ils sont si bêtes qu'on pourrait leur vendre des vessies pour des lanternes. Je n'ai jamais rien eu à craindre d'eux : n'en ai-je pas déjà tué sept d'un coup ?
- Vous êtes si brave, sourit aimablement la seconde noble en agitant un évantail devant son visage pour cacher son amusement, lissant des plis imaginaires sur sa jupe cloche jaune mimosa. Nous avons besoin d'hommes comme vous, à Avalon. Je suis certaine que notre aimable reine elle-même serait ravie d'entendre vos charmantes histoires. Vous êtes si brillant conteur qu'elle vous engagerait sur le champ.
- Cela tombe bien : je venais justement la voir. J'ai eu vent de vos récents déboires… Une malédiction d'hiver, si ma mémoire est bonne ? Je souhaitais offrir mes talents à votre monarque, mais me voici à peine arrivé que le printemps est déjà de retour ! Ce n'est pas de chance pour moi, même si bienheureux pour vous. À présent, je meurs d'envie de connaître les dessous de cette affaire !
- Vous n'êtes point le seul, s'exclama la première, croisant ses longues jambes serrées dans un jean rose pâle pour attirer le regard de son public très réceptif. Notre bien-aimée souveraine et sa sœur s'étaient seulement absentées quelques jours pour raison politique que son horrible beau-frère, l'ancien époux de la Princesse Anna, a eu l'outrecuidance de fomenter un coup d'État pour prendre le pouvoir !
- Quel malandrin !
- N'est-ce pas ? fit-elle, coquette, balançant son pied gracieux décoré d'une luxueuse sandale à talon aiguille et scintillante de strass. Mais rassurez-vous, il en a été bien puni. Une puissante magie de protection du Royaume avait été mise en place par notre si ingénieuse dirigeante. Elle a toujours été si clairvoyante, nous avons tellement de chance de pouvoir compter sur elle. Cet hiver n'était donc point une malédiction, comme le stipule la rumeur, mais plutôt un subtile sortilège visant à figer l'Île Fortunée en attendant le retour de notre reine légitime. De même, nous avons tous été… "endormis", pour ne point avoir à souffrir de cette ère glaciaire. Heureusement, tout est vite rentré dans l'ordre : dès le retour de notre chère monarque, la glace a fondu et les jardins se sont refleuris. Notre pays est redevenu ce paradis terrestre que tous nous envie.
- Et surtout, ce traître de Duc de Glastonbury a été châtié, ajouta la plus âgée en réajustant son chemisier de mousseline garance à motifs floraux. Son mariage avec la Princesse Anna a été dissous, ses titres de noblesse lui ont été retirés, et il a été durement jugé lors d'un tribunal impartial. Je ne sais pas comment sa Majesté a pu supporter cette infâmie et ordonner ensuite un procès équitable. Personne ne lui aurait tenu rigueur de condamner ce renégat sans passer par une audience : il aurait mérité la peine capitale !
- Il n'a pas été exécuté ? demanda l'étranger vêtu de rouge, étonné.
- La douce Elsa peut paraître dure et froide au premier abord, mais elle cache en réalité un cœur en or, répondit Ysengrin sans masquer son admiration. Je ne suis qu'un humble marchand ayant croisé sa route, et elle me traite pourtant comme si j'étais prince. »
Harry retint difficilement son rire jaune, content qu'ils ne les aient pas encore vu pour pouvoir entendre ce discours. Le blond n'avait fait preuve d'aucune clémence : Zacharias, alias Kay, était retenu prisonnier "à perpétuité" dans un donjon froid et humide en pleine mer, afin de bien profiter d'une vie misérable durant cette année dans les Contes et Légendes. La mort aurait été trop indulgente, et l'aurait simplement réveillé dans la Grande Salle de Poudlard. Malfoy voulait lui faire payer les actions de son personnage, et s'y employait cruellement. Même si l'homme l'avait profondément énervé, il trouvait la sanction un peu dure. Un garde était même chargé de le surveiller pour l'empêcher de mettre fin à ses jours. Il était déconcertant de constater comment des décisions prises avec de mauvaises intentions pouvaient paraître pleines de bonté aux yeux des autres.
« Vous n'êtes point un simple commerçant, messire ! protesta la noble en chemisier, posant une main délicate sur son bras. Vous faites partie de ces hommes qui ont vaillamment combattu pour aider notre aimée souveraine à reprendre le trône ! Je ne peux vous laisser vous dévaloriser ainsi.
- Je n'ai point bataillé, gente dame. Je me suis contenté de suivre ces preux chevaliers qui ont porté assistance à votre ravissante reine.
- Mais vous ne pouvez nier avoir sauvé la Princesse Anna de la faim et du froid, sans même savoir qui elle était réellement. »
Potter avait finalement décidé d'interrompre les jeux de séduction des deux couples en devenir, en rappelant à l'homme sa rencontre avec la jeune rousse inconsciente. Celle-ci avait cru pouvoir braver les montagnes enneigées sans penser à prendre de quoi se vêtir ou se nourrir. Sans lui, nulle doute qu'elle aurait été morte… Et jamais ils n'auraient retrouvé son cadavre.
Les deux femmes se levèrent d'un bond en le reconnaissant, et exécutèrent une parfaite révérence. Si le Gryffondor oubliait par moment son statut de roi, les gens autour de lui ne cessaient de le lui rappeler… "Remus" les imita sans attendre, avec beaucoup moins d'habileté cependant. L'homme en rouge, par contre, observait les deux nouveaux arrivants avec de grands yeux ébahis.
« Potter ?! Londubat ?! »
Sa familiarité choqua les dames et le camelot, encore penchés par leur courbette, et Harry grimaça : il s'était attendu à cette réaction…
« Monsieur ! s'offusqua la femme en jupe mimosa, redressant seulement la tête pour fusiller l'impudent du regard. Vous vous trouvez en présence du Grand Roi Arthur Pendragon du Royaume de Loegrie, éminent invité de Notre Altesse Royale, et Sauveur d'Avalon ! Inclinez-vous immédiatement avant qu'il ne décide en toute légalité de vous faire fouetter pour votre insolence !
- "Arthur" ?!
- N'allons pas jusque là, temporisa le monarque en esquissant un sourire gêné vers le Serdaigle qui se baissa maladroitement. Relevez-vous, mesdames, Ysengrin… Le Seigneur Lancelot et moi-même désirons nous entretenir avec cet homme… Si vous voulez bien nous excuser ? »
Les trois mentionnés ne se firent pas prier, et courbèrent une seconde fois le dos en s'éloignant, soucieux de ne pas froisser un puissant allié de la Couronne. De son côté, l'homme en rouge suivait la scène sans savoir où poser son regard : vers les deux Gryffondors souriant, vers son nouvel ami et ancien professeur le camelot, ou vers la jeune fille en fleur qui venait de s'échapper de ses filets.
« Le Roi Arthur et Lancelot Du Lac, hein ? soupira-t-il enfin, à regret. Je suis même pas étonné, en plus… Putain mais les gars ! C'est pas cool ! Vous m'avez pourri mon coup ! Elle était mignonne…
- Désolé, fit Harry en haussant les épaules, pas du tout repentant. Tu en trouveras d'autres : il y a beaucoup de très belles femmes à Avalon, tu verras.
- Tu parles en connaisseur ? sourit Eddie, amusé. Avec ton personnage et ta belle gueule, ça doit défiler dans ton lit !
- N'exagérons rien…
- Si tu te présentes comme un ami du Roi Arthur, elles te tomberont toutes dans les bras, rit Neville, sachant que son roi avait effectivement plus d'une fois profité des beautés de la Cour, et pas uniquement dans des draps. Il te faudra par contre apprendre à respecter le protocole : il n'est pas poli d'interpeller un roi si familièrement en public…
- Il n'y avait que trois témoins, et il ne s'agissait pas d'une rencontre officielle : cela devrait aller, sourit Potter. Nous le ferons passer pour un proche perdu de vue il y a longtemps, et l'incident sera clos. Nous avons été surpris de t'apercevoir, Carmichael. Que fais-tu là ? Et qui es-tu ?
- Bonne question : j'en sais fichtrement rien… soupira-t-il en s'affalant à nouveau sur le banc. Je me suis réveillé dans la cité, et tout le monde autour de moi avait l'air de sortir du sommeil aussi… Je reconnaissais personne, et ils pouvaient pas tous avoir été envoyés avec le sortilège des Contes et Légendes : une ville entière, bon sang ! La Grande Salle est peut-être immense, elle n'aurait jamais pu contenir autant de monde ! Alors j'ai mené l'enquête : je crois qu'à mon arrivée dans ce monde, j'ai été pris dans la fameuse magie qui a endormi le Royaume en attendant le retour de la reine.
- Je vois… hésita Harry en regardant son ami : ni l'un ni l'autre ne souhaitait révéler la vérité à Eddie.
- Ouais… pas fameux comme démarrage. Mais vu que personne n'avait l'air de me connaître, et me regardait bizarrement à cause de mes frusques, j'ai compris que j'étais pas d'ici…
- N'as-tu pas encore récupéré quelques souvenirs de ton personnage ? demanda Neville.
- Quelques trucs idiots… Je sais que je suis tailleur, et ça m'amuse de laisser tout le monde croire que je fabrique des vêtements, alors qu'en fait, c'est la pierre et la glace que je découpe. Non mais visez mes sapes : est-ce qu'un vrai couturier aurait aussi mauvais goût ? Et devinez quoi : j'ai décidé de partir à l'aventure le jour où j'ai réussi à tuer sept mouches d'un coup de torchon… Des mouches ! C'est pitoyable ! C'est pour ça, les mots à ma ceinture. Et là encore, j'adore me moquer des gens en les laissant imaginer que les "sept" en question seraient des géants. Il y en a qui sont tellement stupides ! Regardez-moi : tout gringalet que je suis, fringant dans mes collants rouges écarlates ! Qui serait assez idiot pour penser que je suis capable de tuer sept géants… en un seul coup !
- Quelle histoire… souffla Potter en se retenant de rire. Mais ne te souviens-tu pas de ce que tu fais ici, à Arendelle ?
- Du tout ! Un aubergiste a même dû me rappeler que j'avais un renne dans son écurie. Un renne, vous vous rendez compte ?! J'ai totalement inventé une histoire à dormir debout comme quoi je serais venu aider ce pays, après avoir entendu parler de la malédiction. Et ça fait deux semaines que j'essaie de glaner des informations pour comprendre ce que je fous ici et qui je suis. Je ne sais même pas quoi répondre quand on me demande mon nom ! Alors quand j'ai vu Lupin… Le Professeur Lupin en personne ! J'y ai vu un signe du destin. Il m'a pas reconnu, et n'a pas l'air de se souvenir de Poudlard et du monde réel… En même temps, c'est normal : il est censé être mort. Mais il est aussi sympathique que l'était le vrai lui. On a beaucoup causé de tout et de rien, et j'ai pas mal brodé en me faisant passer pour un certain "Marquis de Carabas"… Un nom à coucher dehors, si vous voulez mon avis. C'est le seul qui m'est venu à l'esprit à ce moment-là. Et serviable comme il est, il m'a fait entrer dans le château. Puis on a rencontré ces deux dames, et vous connaissez la suite.
- C'est fou… fit Neville, stupéfait. Ça doit être frustrant de ne même pas savoir qui tu es.
- M'en parle pas… Je dois être un de ces crétins dans les contes qui partent avec seulement deux sous en poche et n'arrivent à s'en sortir que par la ruse… Mais c'est bizarre, parce que ça ne me ressemble pas : d'accord pour les entourloupes, j'en ai plus d'une à mon actif. Malgré tout, je suis quelqu'un de prudent et j'assure toujours mes arrières… Je suis forcément venu ici pour une raison.
- "Carabas"… réfléchit Harry en plissant les yeux. Ça me dit quelque chose. Ce n'est pas un hasard si c'est ce nom que tu as donné. Je ne me souviens plus du conte en question… Ça va me revenir. En attendant, nous allons t'introduire auprès de la reine pour que tu restes avec nous. Nous n'allons tout de même pas te laisser chercher tout seul.
- Vous pouvez faire ça ?! s'écria-t-il, des étoiles plein les yeux, avant de se rembrunir. Je suis con… Évidemment que le Roi Arthur peut demander un service à la Reine d'Avalon ! C'est franchement pas juste : t'es déjà un héros dans le vrai monde, pourquoi tu dois l'être ici aussi ? Tu pouvais pas être un paysan lambda, comme tout le monde ?
- Il faut croire que c'est dans ma nature, sourit Potter en haussant les épaules. Tu verras, tu n'es pas au bout de tes surprises : nous ne sommes pas les seules personnes du monde réel dans ce palais. Nous allons te laisser le plaisir de le découvrir par toi-même. »
Suspicieux, Eddie regarda le Gryffondor. De quoi parlait-il ?... Et surtout : de qui ?
[===]
Blaise regardait le renne mâchouiller. Appuyé contre la barrière de l'enclos, tapant du pied sur la paille, il se demandait comment ce fichu ruminant pouvait avoir atterri sur une île au climat tempéré telle qu'Avalon. Et que faisait-il au milieu des chevaux des clients de la taverne ?! Quel illuminé pouvait utiliser ceci en tant que monture ! « Encore un original », se dit-il, pestant.
Le souci étant que "original" était souvent synonyme de "problèmes" dans les contes. Et à tous les coups, le propriétaire de la bête devait également être celui de l'oiseau. En effet, un corbeau dévisageait Sinbad comme s'il était un malotru. De temps en temps, le pirate lui jetait des coups d'œil, vérifiant s'il ne lui prendrait pas l'envie de venir picorer ses yeux… Et puis il y avait l'écureuil… Celui-ci couinait comme s'il riait, ébouriffant les plumes du volatile qui croassait alors de mécontentement, ou sautillant sur le dos du cervidé qui mâchouillait sa paille, blasé. « Cette étable est devenue une ménagerie ! » grommela-t-il intérieurement.
« Chef ! »
Le capitaine se retourna pour voir un de ses hommes arriver, essoufflé.
« On l'a r'trouvé ! annonça-t-il, fier de lui. Amin l'a vu avec l'vieux camelot. Y sont entrés dans l'pipé.
- Es-tu en train de me dire, qu'après avoir attendu trois jours pour m'apprendre l'existence d'un type louche qui rôde en ville, il a déjà réussi à embobiner un crédule pour entrer dans le palais ?
- Mais patron… Y fait rien d'mal. C'est juste un agité qui bat la campagne… Y fait rire avec ses bobards moisis. C'pas un méchant.
- T'en connais beaucoup qui se baladent avec un zoo ?! Et qui parviennent à s'introduire dans une forteresse surprotégée, en plus ?! C'est peut-être un assassin ou un espion, et vous le laissez se rapprocher de la reine sans moufter ?!
- Mais boss… gémit piteusement le pirate en se ratatinant. Z'allez pas un peu loin ? Au pire, c't'un arsouille comme nous. Et un pas bon. Haroun lui a déjà chipé un bout d'bois sans qu'il mire que dalle. Et même s'il bat comtois, un capahut tout rouge, c'pas malin.
- Rouge ?
- Une vraie betterave, ricana le pirate, ragaillardi. Ça s'prend pour un coq, mais ça ressemble à rien. Il aura pas les pieds blancs au milieu de tout l'gratin. Il va vite s'faire choper.
- Je vais prévenir Elsa, décida Blaise, de plus en plus inquiet. Toi, surveille ces bestiaux. Si quelqu'un vient les chercher, je veux que tu envoies Amin les filer et que tu viennes me prévenir.
- Mais meg…
- C'est un ordre, moussaillon ! J'ai enfin réussi à convaincre la reine de reprendre la mer avec nous, c'est pas pour voir tout mon boulot salopé par un hurluberlu qui se prend pour une tomate ! »
Zabini enfila son caban et s'apprêtait à partir quand il se souvint d'un détail.
« Au fait… C'est quoi le "bout de bois" que vous lui avez volé ? »
[===]
Se prélassant dans son bain, Draco soupira pour la énième fois. Il n'avait pas pu avancer aussi vite qu'il l'aurait souhaité dans son travail, trop occupé à enseigner les rudiments de la gouvernance à sa jeune sœur. Celle-ci avait tout à apprendre, même si elle montrait les signes d'une grande vivacité d'esprit. Avec un peu de pratique, nul doute qu'Anna saurait gérer le Royaume d'une main de maître. Dommage qu'il ait peu de jours à passer avec elle, il ne pourrait pas pousser son apprentissage aussi loin qu'il l'aurait souhaité. Le temps lui manquait, et il ne pouvait pas repousser son départ indéfiniment. Le seul point positif était l'arrivée prochaine d'Évalac : le vieil homme allait pouvoir poursuivre son éducation, peut-être même mieux que lui.
Le soleil commençait à décliner dans le ciel, et il se décida à sortir de la baignoire. Ce soir, il recevait des représentants du commerce de l'Empire du Huaxia à dîner, et le blond s'étonnait encore d'avoir compris qu'il s'agissait de l'équivalent de la Chine, dans cet univers.
« Avez-vous terminé, Votre Altesse ? »
Malfoy se mordit les lèvres, reconnaissant la voix d'Énide. Ses dames de compagnie s'étaient évidemment rendues compte de son soudain changement de sexe, et se montraient timides en sa présence. Quoi de plus normal ? Il n'était pas convenable de laver un homme et de l'aider à s'habiller pour une femme de la noblesse… Cependant, personne n'avait soufflé mot.
Même si la magie était omniprésente dans cet univers, ses gens n'en connaissaient pas les rouages, et devaient soupçonner un sortilège ou une autre malédiction quelconque dont leur souveraine serait la victime. Peut-être même songeaient-ils à un effet secondaire de l'Hiver Éternel et du printemps revenu, comme si leur monarque avait "sacrifié" sa féminité pour le bien du Royaume… Qu'en savait-il ? Il n'avait pas osé leur poser la question, ni voulu clarifier la situation… Qu'aurait-il pu leur raconter ? Il était déjà heureux de ne pas avoir été considéré comme un usurpateur. Inutile de prendre des risques en inventant une histoire peu crédible pouvant le rendre suspect. Tant qu'il n'était pas remis en question, il prenait grand soin de tous les laisser dans le flou, à tirer leurs propres conclusions…
Le fait revêtait à présent le statut de Secret d'État, et la Grande Chambellan prenait à cœur qu'aucune rumeur ne circule à ce sujet. Le peuple ne devait surtout pas savoir… Et puisqu'Elsa n'était pas femme à mettre ses atouts physiques en valeur, particulièrement avec sa minuscule poitrine et ses hanches étroites, il n'était pas bien difficile de cacher ce mystère. Et son style vestimentaire pouvait convenir à un homme sans trop de retouches : Merlin soit loué, elle portait rarement des robes !
Et puis, tout le monde rappelait assez à Draco son apparence androgyne… Cela l'agaçait. Particulièrement depuis qu'il avait vu ses yeux d'argent pur… La première fois qu'il avait aperçu son reflet dans un miroir, il avait été choqué : il ressemblait réellement à une fille ! Bien plus que dans la vraie vie ! Ses épaules étaient plus étroites, sa taille plus fine… En observant les détails, ce n'était pas flagrant. Son visage et son corps demeuraient identiques : il avait même gardé les cicatrices restantes des blessures infligées par Potter, lorsque celui-ci l'avait attaqué en sixième année, dans les toilettes de Mimi Geignarde. Cependant, si on l'observait en globalité, l'impression était très différente de son vrai lui… Il était la caricature de la "noble dame" comme on pourrait la décrire dans les romans de chevalerie, ou de la "jeune fille" des contes de fées… « La plus belle d'entre toutes »… Et la longueur de sa chevelure, associée aux bijoux et vêtements de la reine, renforçait indubitablement son hermaphrodisme. Il comprenait un peu mieux les réactions de Potter et Londubat, ou des autres chevaliers, la première fois qu'ils l'avaient vu… C'en était vexant ! Il n'était pas sûr de pouvoir se remettre un jour de ce traumatisme…
« Vous pouvez entrer » dit-il après avoir enfilé un peignoir pour cacher sa nudité.
La porte s'ouvrit et quatre de ses dames arrivèrent. Bien qu'il ait passé les deux dernières semaines à bénéficier de leurs mains délicates deux à trois fois par jour, il était toujours mal à l'aise d'être pomponné… Il avait l'impression d'être la poupée préférée d'un groupe de petites filles !
Iseut s'appliqua à lui passer une crème sur le corps, pendant qu'Angharad lui brossait les cheveux. Audhild oignait ses mains, limant et frottant ses ongles, et Énide s'occupait de mélanger des onguents avant de les étaler délicatement sur son visage… Le procédé aurait dû le détendre, pourtant la situation demeurait gênante. Il avait le vague souvenir qu'Elsa n'avait jamais totalement réussi à s'habituer à toutes ces attentions, mais cela ne le rassura pas pour autant : il était contraint de s'y plier.
Les soins terminés, les jeunes femmes le guidèrent vers la chambre pour l'aider à revêtir sa toilette pour la soirée. Là encore, son changement de genre lui offrait l'une de ses rares libertés : enfiler son sous-vêtement lui-même. Mais une fois fait, ses dames prenaient le relais, et il n'avait plus qu'à lever une jambe après l'autre pour glisser dans son pantalon en brocart de soie blanc et argent, ou à tendre les bras pour passer une veste assortie sur une chemise de mousseline. Iseut ajusta une large ceinture en organdie plissée argentée qui vint marquer sa minceur. Le tout était parfaitement taillé, afin de mettre en valeur la sveltesse de son corps délié.
Angharad le fit s'asseoir devant sa coiffeuse, et se mit à tresser ses longs cheveux d'or blanc, mêlant épingles en perles ou en diamants. En même temps, Énide prit un peu de poudre pour farder son visage et commença à le maquiller… Dans ces moments-là, il se répétait encore et encore qu'il devait se présenter comme une femme aux yeux de sa Cour, et se faisait violence pour ne pas hurler de rage. Certes, le résultat était toujours superbe, sa dame de compagnie avait la main légère et le doigté délicat… Mais il était un homme, bon sang ! Son apparence étant déjà féminine de prime abord, il n'avait plus une once de masculinité après être passé entre leurs mains.
Vint les bijoux, tous plus magnifiques les uns que les autres, toujours en or blanc et diamants, la pierre précieuse qui "convenait le mieux à sa personne royale", pour reprendre les mots d'Audhild. Collier fin et léger autour du cou, bracelets en chaînette entourant plusieurs fois ses poignets au-dessus des manches, la chevalière du Royaume au majeure et une simple perle à l'annulaire, quelques pinces et broches scintillantes pour orner sa ceinture… La pièce maîtresse était toujours ses boucles d'oreille : des trésors valant certainement plus cher que le manoir Malfoy. Et ce soir-là, il portait des rivières de gemmes blanches entrelacées subtilement, tombant jusqu'à ses épaules.
La touche finale fût apportée à sa coiffure complexe quand Angharad releva ses lourdes nattes sur sa nuque. Elle accrocha la couronne royale sur sa tête, l'obligeant à maintenir une posture droite pour ne pas ployer sous son poids. Comme d'habitude, il avait l'impression de ne plus pouvoir bouger tant il était chargé et engoncé dans toute cette opulence. Iseut arriva à ce moment-là pour lui présenter ses chaussures : des bottines en cuir blanc et petites talonnettes argentées. Il avait vu la quantité de souliers de la reine, et ses dames avaient remarqué la pâleur soudaine de son visage devant tous ces talons vertigineux. Heureusement, il leur avait suffit de voir une fois sa démarche claudiquante en escarpins pour comprendre qu'elles ne devaient plus jamais le chausser d'échasses. Elles n'avaient fait aucun commentaire sur sa maladresse soudaine, et il leur en était extrêmement reconnaissant…
« Nous avons terminé, Majesté. »
Le résultat devait être sensationnel pour autrui, mais Draco ne pouvait que retenir un soupir de lassitude. Il craignait de bouger les bras tant sa veste était cintrée. Le simple fait de se lever du siège l'inquiétait, de peur de froisser sa mise. Tourner la tête devenait un calvaire, risquant à tout instant de briser son cou sous la charge… Il était la reine. Et cette fonction ne devenait jamais aussi concrète que lorsqu'il revêtait ses atours mondains. En regardant dans le miroir, il ne se reconnaissait pas… "Draco Malfoy" n'existait plus.
« Merci. C'est parfait, comme toujours. »
Lentement, il se dirigea vers la porte de ses appartements, et inspira un grand coup pour reprendre courage. Il avait des dignitaires étrangers à impressionner.
[===]
Harry n'avait jamais aimé les réceptions. Tout était fait de faux semblants, de sourires crispés, d'amabilités forcées… Et en tant que roi, il n'en pouvait plus de voir défiler cette brochette de courtisans endimanchés, tous plus obséquieux les uns que les autres. Heureusement, il n'était pas obligé de prendre part à ces mises en scène, n'étant pas le monarque du royaume où il résidait, et avait réussi à esquiver toutes les invitations jusqu'à présent. Il préférait largement attendre la fin de ces parades avant de rejoindre Draco dans son petit salon privé pour discuter autour d'un verre.
Il se demandait comment son ancien ennemi parvenait à gérer ces représentations quotidiennes. Peut-être s'y sentait-il à l'aise, étant noble de naissance même dans le monde réel ? Il avait toujours apprécié être le centre de l'attention : ici, il était servi ! Personne n'était plus important que la souveraine, plus aimé que la reine, plus recherché que la Grande Elsa Camlann d'Avalon. L'argent et le pouvoir, le but ultime des Malfoy se trouvait en ces lieux. Lucius aurait été au comble du bonheur de voir son fils ainsi vénéré.
Reprenant un verre de vin sur le plateau d'un serviteur qui déambulait, il écoutait distraitement l'éloge de son interlocuteur sur l'alliance bienheureuse que le Roi Arthur avait eu l'intelligence de contracter avec l'Île Fortunée. À l'entendre, le Royaume de Loegrie n'était qu'une misérable sangsue suçant le sang providentiel de cette terre promise. Le tout à mots couverts, jouant subtilement sur les tournures de phrase pour que le roi en lui ne puisse s'offusquer de ces paroles qu'il pourrait avoir "mal interprétées"...
Habilement, il réussit à s'esquiver pour rejoindre Neville et Eddie, un peu plus loin. Il n'était pas pressé de vivre ce calvaire en tant que souverain. Et s'ils devaient se rendre à Camelot, c'était exactement ce qui allait se produire.
« Je te jure que c'est ce qu'il m'a dit, expliqua Carmichael à Londubat en riant. Pourtant, la boutique de Farces pour Sorciers Facétieux des jumeaux Weasley était déjà connue à l'époque ! Mais non : il a cru que j'étais l'inventeur du "Rêve Éveillé" ! »
Même s'il n'avait pas écouté l'histoire, entendre des mots ne pouvant provenir que du vrai monde lui fit du bien. Cela lui rappelait d'où il venait et qui il était réellement, ce qu'il commençait à oublier de plus en plus souvent. Il était terrifiant de constater à quelle vitesse et avec quelle facilité "Harry Potter" s'effaçait au profit d'"Arthur Pendragon".
Cependant, il prit le temps d'apprécier la présence d'esprit de Neville en fournissant une tenue convenable au Serdaigle : même si le rouge demeurait sa teinte favorite, il était devenu présentable face à la haute société d'Avalon, avec son costume de lin brodé sang de bœuf. Lui-même revêtait un smoking de soie noire avec chemise verte émeraude pour rappeler la couleur de ses yeux. Et Neville arborait fièrement un complet-veston cæruleum, le bleu de son blason familial.
Ils n'avaient jamais autant été sur leur trente-et-un de toute leur vie, et Harry avait été impressionné par l'adresse de sa femme de chambre pour avoir réussi à dompter sa crinière de sauvage. Il était certes appréciable de se sentir beau, il préférait néanmoins revêtir un autre type de "tenue de combat", moins politique et plus martial : il n'aurait jamais pensé qu'un jour, sa lourde et encombrante armure de plates lui manquerait à ce point.
« Le Capitaine Sinbad d'Arabia » annonça le maître de cérémonie, comme à chaque fois qu'un invité entrait dans l'immense salon.
Potter ne jeta pas même un regard vers le métis qui passait la porte, préférant fixer Carmichael. La réaction ne se fit pas attendre : le Serdaigle plissa les yeux en avançant la tête au-dessus de son verre de vin, fouillant sa mémoire.
« Son visage me dit quelque chose… murmura-t-il, concentré. C'est pas le coureur de jupons de Poudlard ?
- Bien vu, ricana Neville en vérifiant pour la dixième fois que personne ne pouvait entendre leur conversation. Blaise Zabini, un Serpentard de notre promotion.
- Qu'est-ce qu'il fait ici ? "Sinbad"… C'est pas un pirate normalement ?
- Dans le conte, il est simplement marchand, précisa Harry en invitant le capitaine à les rejoindre d'un signe de main. Mais ici, il est effectivement flibustier, avec tout un équipage à ses ordres. Te souviens-tu que nous t'avons conté avoir rencontré la reine dès notre arrivée ? Et bien sur la route pour Avalon, nous avons croisé le navire de Zabini, pris dans la glace. Il nous a aidé à reprendre la forteresse. Depuis, il est considéré comme un invité de marque, et porte le titre de "Protecteur du Royaume".
- Vous avez vraiment vécu des trucs de dingue… souffla le tailleur en observant le grand et élégant pirate s'approcher, la mine sévère.
- T'es qui ? dit celui-ci sans préambule, une fois près d'eux.
- Zabini… grommela Lancelot en jetant des coups d'œil inquiets autour d'eux. Nous sommes en public, et tu te trouves devant le Roi Arthur… Ton attitude est au-delà de l'impolitesse. »
Blaise grogna, mais s'exécuta : il recula d'un pas en se tournant vers le monarque, et réalisa la plus complexe et flagorneuse révérence de son cru. Une telle exagération aurait pu paraître injurieuse. Cependant, Harry avait beaucoup de mal à retenir son rire, et lui fit signe de se redresser en lui tapant amicalement l'épaule. Cette réaction rassura les observateurs de la scène qui avaient craint un scandale : la simple présence d'un pirate à la Cour était étrange, le fait qu'il aille directement vers un grand roi était stupéfiant, qu'il se montre aussi insolent était inimaginable… alors que ledit souverain le traite en ami… Puis il y avait ce parfait inconnu en leur compagnie… L'assistance n'était plus à une surprise près. Et après tout, les convenances avaient été "respectées".
« Tu pourrais faire un effort… maugréa le chevalier.
- Alors ? l'ignora le métis, mécontent. Je te connais, toi. T'es de Poudlard. T'es qui comme personnage ? Qu'est-ce que tu fous ici ? Pourquoi on t'a pas vu avant ?
- Calme-toi… temporisa Potter, étonné par son agressivité. C'est Eddie Carmichael, tu te souviens ? Il était à Serdaigle, une année au-dessus de nous. On l'a trouvé ce matin dans les jardins, avec Ysengrin.
- Le camelot ? Attends… Tu serais pas ce fameux branquignol en rouge qui raconte des salades tous les soirs à la taverne ?
- "Branquignol" ? s'offusqua Eddie.
- Tous les soirs ? retint Neville.
- Je crois que nous avons beaucoup de choses à se dire… » soupira Harry.
Londubat résuma la situation au pirate, qui enchaîna sur ses récentes trouvailles, se gardant bien de révéler ses soupçons et l'objet subtilisé par ses hommes.
« Un corbeau ? hoqueta Carmichael, surpris. Et un écureuil ? C'est quoi ce bordel ?...
- Ça te dit rien ? interrogea Blaise, de plus en plus suspicieux. C'est bizarre, tu devrais avoir plus de souvenirs. Rien qu'en parler aurait dû te donner des images.
- Peut-être le fait d'avoir été… "endormi" en même temps que le peuple d'Avalon dès son arrivée dans ce monde, aurait altéré son regain de mémoire ? proposa Lancelot, hésitant.
- Et bien… J'ai toujours adoré les animaux, mais je n'ai que le classique "chat, chien et hibou" chez moi… D'accord, j'ai toujours voulu avoir un perroquet, pourtant… Une seconde, s'arrêta-t-il brusquement, les yeux dans le vague. On t'a dit comment s'appelait le corbeau ? Ça serait pas… "Munin" ?
- Qu'est-ce que j'en ai à battre.
- Et l'écureuil… "Ratatosk". C'est un emmerdeur, pas vrai ?
- Tu te souviens de quelque chose ? demanda Harry.
- Peut-être… Mais c'est bizarre… En fait, je crois que… »
Il fût coupé par le bâton du maître de cérémonie frappant trois fois le sol, attirant l'attention de tous les convives. Le silence se fit instantanément.
« Son Altesse Royale Elsa Viviana Morgana Camlann, Reine d'Avalon, Duchesse d'Arendelle, Protectrice du Royaume d'Été, Gardienne de l'Île Fortunée, Seigneure des Neuf Sœurs, et Prêtresse des Vents et Marées. »
La porte à double battants en bois de Santal s'ouvrit sans bruit, et le cœur de Harry manqua un battement : Draco était magnifique ! Tout en majesté, digne et fier, portant merveilleusement bien la couronne qui ceignait sa tête. Il illuminait la pièce comme une pleine lune dans la nuit noire, éclipsant toutes les étoiles. Les plus belles tournures faisaient pâle figure à côté de la sienne. Le Gryffondor n'en revenait pas. Il ne l'avait encore jamais vu ainsi apprêté, et cette image resterait pour toujours gravée dans sa mémoire : c'était une vraie reine qui se trouvait devant lui.
« Malfoy ?! »
Par pur instinct, Zabini frappa l'arrière de la tête de l'insolent et le força à courber l'échine comme toute l'assistance. Mais le mal était fait : tous les regards se tournèrent vers eux, dont celui du blond. Ses grands yeux d'argent se posèrent sur le malotru, puis sur Sinbad, et enfin vers Arthur…
Durant ces interminables secondes de silence tendu, la souveraine gardait un visage impassible. Cependant, maintenant l'inclination respectueuse de rigueur entre monarques, le roi pouvait voir et comprendre le cheminement de ses pensées : le choc d'entendre son nom crié dans ces circonstances, la surprise de reconnaître le Serdaigle, l'interrogation sur ce qu'il faisait là, la frustration de ne pouvoir poser la question, et enfin le reproche à ses compatriotes de Poudlard pour avoir provoqué cette situation gênante. Harry lui fit un sourire d'excuses, amusé malgré tout, et le blond leva son royal sourcil d'un air consterné.
Tout se passa très vite. Potter n'eut pas même le temps de se demander comment il parvenait à si bien comprendre le Serpentard que celui-ci se détourna d'eux, les ignorant pour se concentrer sur ses invités de la soirée. La reprise des conversations permit à Eddie de respirer à nouveau, conscient d'avoir été à deux doigts de l'incident diplomatique. Mais autour d'eux, les nobles leur jetaient encore des regards courroucés ou scandalisés, atténués par la présence du Roi Arthur qu'ils craignaient d'offenser.
« Vous auriez pu me prévenir, grommela Carmichael, plus pâle qu'un mort.
- Cela aurait été beaucoup moins drôle, ricana Harry, pressé de pouvoir raconter l'anecdote à Ron et Hermione quand il les reverrait.
- T'es complètement con ! grogna Zabini, rouge de colère. T'as de la chance d'être l'invité du putain de Roi Arthur, sinon Draco aurait pas eu d'autre choix que de te jeter aux cachots pour sauver les apparences ! T'as intérêt à te rattraper en faisant encore plus de courbettes, et en le suppliant de te pardonner si jamais il vient te voir dans la soirée !
- J'ai juste crié son nom ! s'indigna Eddie, un peu tremblant.
- En présence de hauts-dignitaires et représentants du commerce du Huaxia, précisa Lancelot, dépité. Je t'avais prévenu. Politiquement parlant, même si ce nom ne veut rien dire pour eux, c'est un outrage. Surtout de la part d'un noble si bas dans l'échelle sociale, ne faisant pas partie de sa Cour, et qui ne lui a même pas été présenté… Zabini a raison : s'il ne te punit pas, il montre à ces étrangers venus signer des traités qu'ils peuvent l'apostropher de n'importe quelle manière sans craindre de représailles. Mais rassure-toi, il ne peut pas châtier l'hôte d'un autre roi, plus encore un allié. Finalement, c'est à Arthur qu'il va demander de rendre des comptes : il est responsable du comportement de ses invités…
- Ça valait le coup, rit encore le monarque. Je trouverai bien un cadeau à lui offrir publiquement pour laver l'affront. Il a l'air d'aimer les diamants… N'en avons-nous pas une mine quelque part, dans la colonie de Sakha ?
- Une "mine de diamants" ? hoqueta le Serdaigle, les yeux manquant de sortir de leurs orbites. Les présents des souverains… L'époque où j'offrais des chocogrenouilles pour me faire pardonner une bêtise me semble bien loin…
- Je pensais plutôt à un pourcentage du rendement… réfléchit sérieusement le roi, oubliant qu'il ne l'était que pour un an. Cela pourrait renforcer nos échanges commerciaux, et je pourrais même en profiter pour lui vendre les mérites de nos tailleurs de diamants et nos orfèvres…
- Redescends sur terre, Potter, cracha Blaise, méprisant. T'auras jamais le temps de concrétiser ce projet. Contente-toi de lui filer tes cailloux, qu'on n'en parle plus. Quant à toi, l'idiot, poursuivit-il en se tournant vers le Serdaigle. Si t'es pas capable de te tenir en société, retourne à la taverne ! Je comprends toujours pas ce que tu fous ici !
- Calmez-vous donc, pirate, s'interposa Neville dont l'instinct de protection faisait ressortir le chevalier en lui. Heureusement que personne ne nous entend où vous auriez également à rendre des comptes pour parler ainsi à un roi ! Eddie est notre ami et notre invité ! Étant une personne du vrai monde comme nous, il ne peut pas s'être incarné dans la peau d'un simple roturier. Sa présence à Arendelle doit avoir un sens, il l'a juste oubliée.
- Comment vous pouvez être assez crétins pour faire entrer un étranger au cœur du palais ! Il pourrait être n'importe quel personnage : un voleur, un assassin, un méchant…
- Comme toi, tu veux dire ? coupa Harry, l'air accusateur. Pourtant, nous t'avons fait confiance dès le début, parce que tu es le meilleur ami de Malfoy. C'est pareil pour lui : il est ce Serdaigle farceur qui voulait m'escroquer de douze Gallions en échange d'un faux élixir cérébral de Baruffio. Il n'est pas un inconnu, et ne nous a jamais causé de tort.
- Mais moi, je savais déjà qui je suis quand on s'est retrouvé ! contra le capitaine. Je savais que j'avais pas une mission ou un objectif qui allait à l'encontre des vôtres. Je savais que je pouvais vous aider !
- Moyennant finances, précisa Potter. Je me souviens, oui. Mais pourquoi es-tu aussi méfiant envers lui ? Je comprends que tu veuilles protéger Malfoy en tant qu'ami ou corsaire lié à sa reine… Pourtant, malgré sa bourde et ses manières rustiques, il n'a pas montré signe de mauvaises intentions.
- Je le sens pas ce type, c'est tout. Et on sait se reconnaître entre arnaqueurs : il est louche.
- Je suis toujours là, vous savez ? fit timidement Carmichael, un peu blessé qu'on parle de lui en ces termes et en sa présence.
- Quand mes hommes m'ont décrit son comportement, j'ai tout de suite compris qu'il était pas net, l'ignora Blaise. Il ment comme il respire, exagère tout, joue au grandiloquent pour endormir la méfiance… Ses habits écarlates ridicules, sa monture loufoque, ses deux bestiaux complètement déjantés… C'est trop. Tout fait faux, chez lui. Et tant que j'ai pas le fin mot de cette histoire, je refuse qu'il s'approche de Draco ! »
Les deux Gryffondors se renfrognèrent, agacés. Cependant, Harry était obligé de reconnaître qu'il n'avait pas tort : Eddie était effectivement suspect. Pas méchamment, il ne le pensait pas capable de faire du mal, mais assez pour être un charlatan profiteur près à tout pour arriver à ses fins. Si au moins il savait à quel conte il appartenait…
« Dites… fit tout à coup le Serdaigle, regardant intensément la souveraine un peu plus loin. Malfoy est vraiment devenu une femme ?
- C'est un homme, crétin ! cracha Blaise alors que Harry et Neville se cachaient le visage pour pouffer de rire.
- Un "homme-reine" ? demanda Eddie, sincèrement curieux et curieusement sincère. C'est possible, ça ? Personne n'a rien remarqué ? Je veux dire… Il a toujours été un "garçon délicat", il passait pas inaperçu… surtout avec son caractère de petit merdeux… Mais j'aurais jamais pensé le voir un jour si… bah… "reine". Et super belle, en plus.
- T'essayerais pas plutôt de changer de sujet ?
- Quand je parlais aux gens du coin, ils étaient tous en totale admiration pour leur souveraine, continua-t-il sans prendre la peine de répondre. Elle est très aimée… ou "il"... C'est assez surprenant de la part du petit con prétentieux dont je me souviens. Je suis le seul à trouver ça bizarre ?
- C'est moins étrange quand on apprend à le connaître, sourit Harry en observant Blaise fulminer. Surtout quand on se rappelle la manière dont les autres Serpentards le regardaient avec respect… Je dirai que les gens changent, même si je ne suis pas certain que cela soit tout à fait le cas…
- Elle vient par ici ! chuchota brusquement Carmichael en se cachant derrière Arthur, peureux. Qu'est-ce que je lui dis ? Comment je dois m'excuser ?! Je connais pas l'étiquette de la Cour !
- Alors ferme-la et incline-toi » pesta Zabini en levant les yeux au ciel.
Lancelot tira vers lui le tailleur intimidé : le laisser se cacher derrière quelqu'un en face de la reine pourrait également passer pour une insulte, et ils avaient déjà eu assez de problèmes. Il lui fit signe de l'imiter, et s'inclina en une parfaite révérence qu'il maintint très bas, tel un Seigneur invité à la Cour d'un autre Royaume que le sien. Tête toujours penchée, il appuya sur celle du Serdaigle pour lui signifier de ne pas lever le visage… Blaise mit genoux à terre, à la manière d'un vassal qu'il avait appris à être depuis qu'il était devenu le corsaire attitré de la reine. Et Harry hocha simplement la tête, comme il était de rigueur entre personnes de même rang. Tous les regards étaient tournés vers eux, et plusieurs curieux s'étaient même approchés pour écouter leur échange.
« Reine Elsa, le salua-t-il en souriant, ravi de pouvoir admirer sa superbe toilette de plus près.
- Quel plaisir de vous compter parmi mes convives ce soir, Roi Arthur, fit aimablement Draco, jouant à la perfection son rôle d'hôte royal. Je n'ai pas eu le privilège de pouvoir vous accueillir convenablement depuis votre arrivée dans mon Royaume, malgré mes nombreuses invitations. Je vous en prie, laissez-moi corriger ce manquement au plus vite.
- Ne vous donnez point cette peine, s'amusa Harry en comprenant le reproche à peine dissimulé. Votre hospitalité ne souffre d'aucun défaut, et c'est moins pour vous faire honneur que pour mon propre bonheur que j'ai décidé de venir. Car même si votre présence emplit toujours mon cœur de joie, si j'avais eu connaissance plus tôt du mirifique spectacle que vous offrez ainsi paré, je n'aurai manqué vos réceptions pour rien au monde.
- Toujours aussi flatteur, répondit le blond en levant son fier sourcil, agacé par la flagornerie. On aurait pu croire que vos absences répétées étaient dûes à une quelconque gêne de paraître à ma Cour, mais il me plaît de constater qu'au contraire, vous évoluez avec aisance parmi mes courtisans. Comme si vous aviez fait cela toute votre vie.
- En tant que monarques, nous savons ce qu'il en est réellement, répliqua le brun, conscient du message caché de "Malfoy" à "Potter" : son ancien ennemi l'insultait souvent en prétendant qu'il paradait et profitait de son statut de "Survivant" alors qu'il n'en était rien. Cependant, vous ne pouvez nier que deux souverains de deux Royaumes différents, perpétuellement présents à chaque dîner, pourraient causer quelques complications : je ne peux accaparer vos sujets et leur voler ce précieux temps qu'ils devraient consacrer à votre personne. Et de même, je m'en voudrais que vous obliger à me tenir compagnie comme vous le faites actuellement, et ainsi vous soustraire à vos gens, si heureux d'avoir l'occasion de vous admirer. »
Harry observa avec satisfaction sa pique faire mouche : en clair, il lui disait qu'il n'aurait aucun problème à lui faire de l'ombre ou à lui mettre des bâtons dans les roues s'il lui en prenait l'envie. Et s'il n'était pas content, il n'avait qu'à aller voir ailleurs et lui ficher la paix. Cependant, il ne s'attendait pas à voir ses iris d'argent pétiller, ni ses lèvres rouges et charnues s'étirer en un sourire espiègle.
Draco s'avança d'un pas, se plaçant à quelques centimètres à peine du brun, et posa une main fraîche et délicate sur son bras crispé. Son cœur s'accéléra bruyamment dans sa poitrine : il avait en plus l'indécence de sentir délicieusement bon !
« Mais voyons, Arthur, susurra-t-il, démoniaque. Vous savez pourtant que votre présence m'est indispensable. Sans vous, je serai indubitablement perdu. Accordez-moi donc la dignité de vous retourner la faveur… Après tout : votre volonté est loi autant que la mienne. Je pourrais par exemple éloigner quelques opportunistes indésirables qui se terrent derrière votre prestance, trop heureux de pouvoir exploiter votre amabilité si vertueuse. »
Les douces effluves de rosée du matin embaumaient l'air, lui montant au cerveau. Il n'arrivait pas à réfléchir et ne savait pas quoi répondre… Il percevait une menace dans ses mots, mais ne parvenait pas à saisir laquelle. Ses doigts ne touchaient pas sa peau, et il sentait pourtant leurs caresses à travers le tissu de sa veste, chauffant son bras. Son visage d'albâtre pourrait rendre fous les sculpteurs, incapables d'en reproduire la finesse sur le marbre froid. Ses yeux étaient encore plus beaux de près, même les nombreuses brisures à l'intérieur ne pouvaient ternir leur éclat. Et ses lèvres… pulpeuses, rendues brillantes par le baume couleur cerise… tentatrices…
Draco se recula soudainement, et Harry déglutit. Après la surchauffe, il était à présent glacé d'effroi : il avait été à deux doigts de l'embrasser devant toute la Cour ! Certes, Malfoy était sublime, il s'en était rendu compte depuis qu'il l'avait revu dans son château de glace. Mais au point de lui faire perdre la raison ? Il savait pourtant se tenir !
Et une autre réalisation le figea : il n'avait pas répondu. Aux yeux de tous, il venait de perdre leur joute verbale, ce combat de salon, cette lutte de pouvoir déguisée qui déterminait l'ascendant d'un dirigeant sur l'autre et l'avenir d'un pays. Pour tous les convives, y compris les dignitaires étrangers, Elsa pouvait faire de lui ce qu'il voulait ! Ajouter à cela le fait connu de tous que la survie du Royaume de Logres dépendait entièrement d'Avalon… Son échec était total.
« Relevez-vous, mon cher ami Sinbad, fit fièrement la souveraine, clôturant définitivement sa victoire en délaissant le roi, mortifié. Vous également, Seigneur Du Lac. Et… à qui ai-je l'honneur ?
- Permettez-moi de vous présenter, se reprit Harry, soucieux de ne pas montrer à quel point sa déconvenue le touchait. Voici le Marquis de Carabas, un noble voyageur, tailleur à ses heures perdues, curieux du monde et ses diverses cultures. Et également le frère d'un de mes proches amis que je n'ai point vu depuis longtemps. Il a tant entendu d'éloges à votre encontre qu'il souhaitait vous rencontrer. Le Seigneur Lancelot et moi-même l'avons croisé dans les jardins du palais, en compagnie de notre aimable camelot Ysengrin. Son histoire nous a plu, et j'ai décidé de satisfaire son vœu.
- Un tailleur… »
Personne ne s'attendait à ce que cette information soit celle retenant l'attention de Draco. Eddie se tenait toujours plié en deux, apeuré. Il n'osait pas prononcer un mot, ni bouger le moindre cil : la reine ne l'avait pas encore autorisé à se redresser, et son dos commençait à le faire souffrir le martyr. Tout à coup, le blond lança un regard courroucé au roi, soudainement déstabilisé par cette réaction.
« Ma propre sœur a eu vent de votre existence, répondit tout à coup la souveraine à la question muette de Potter. D'après ses dires, vous avez oublié l'endroit d'où vous venez, et êtes arrivé en ville à dos de renne. Vous auriez également vaincu des géants… "Sept d'un coup", si ma mémoire est bonne ? »
Blaise, Neville et Harry échangèrent des œillades étonnées : la monarque en savait plus qu'ils le croyaient. Mais de son côté, Carmichael paniquait. Devait-il répondre ? Comment ? Pouvait-il se relever ? Il risqua un coup d'œil vers les Gryffondors, tentant de transmettre sa détresse comme un appel au secours.
« Ayant vécu plus souvent sur les routes que dans les riches palaces de la noblesse, il n'est point habitué aux us et coutumes de la Cour, expliqua Potter, craignant que son silence soit encore pris pour un outrage. Veuillez pardonner sa maladresse. Vous pouvez répondre, Marquis.
- C'est un immense honneur de vous rencontrer, Votre Altesse, fit Eddie, mal à l'aise. Je ne pensais pas que le jour viendrait, où je pourrais contempler votre beauté dont on m'a tant vanté les mérites. Vous vous révélez même être au-delà de mes espérances. »
Draco plissa les yeux… Il en faisait trop ! Blaise grinça des dents, retenant son envie de gifler l'importun : non seulement il ne répondait pas à ses questions, mais il lui parlait comme s'il était une "femme superficielle" qui agiterait son éventail en gloussant bêtement.
« Ne tendez point l'oreille aux différents ragots qui pourraient parvenir jusqu'à vous, poursuivit le Serdaigle, étrangement plus confiant. Les sources fiables sont rares, et une reine aussi avisée que vous l'êtes ne devrait réserver ses réflexions qu'aux plus sûres d'entre elles. Après tout, n'êtes-vous point l'exemple même qu'industrie et savoir-faire valent mieux que des biens acquis ? »
À ces derniers mots, il releva le visage pour planter un regard intense dans les yeux de la souveraine qui recula imperceptiblement, choqué. Harry s'interrogea… Il avait l'impression de manquer une donnée cruciale. Tout était là, devant lui, et pourtant… Il ne comprenait pas ce qui était en train de se produire. Et en observant les mines circonspectes de Londubat et Zabini, il n'était pas le seul dans le flou.
« Vous êtes le bienvenu au palais, annonça finalement la reine dans un total revirement de situation. Relevez-vous, Marquis. Si vous n'avez point d'endroit où loger, je serai ravi de vous accueillir dans l'une de nos chambres. Et mes palefreniers seraient enchantés d'avoir l'occasion de choyer votre renne… "Sven", si je ne m'abuse ?
- Votre écurie aurait-elle également une place pour mon écureuil ? demanda Eddie en se redressant lentement, soucieux de ménager son dos douloureux.
- Un écureuil ?
- Ratatosk. Il peut se débrouiller, mais un traitement royal lui ferait plaisir.
- Et bien… il faudra demander cela à mon majordome, fit Draco, dubitatif. Il tentera de satisfaire au mieux vos demandes. Quant à moi, j'espère pouvoir jouir de vos histoires prochainement. Si vous voulez bien m'en faire profiter.
- Avec un immense plaisir, ma reine, sourit Carmichael en s'inclinant. J'ai déjà de nombreux récits en tête qui pourraient vous satisfaire.
- Je suis impatiente. Mais pour l'heure, je dois vous laisser. D'autres obligations me retiennent. J'ai été ravi de pouvoir vous parler. Roi Arthur. Seigneur Du Lac. Marquis de Carabas. Capitaine Sinbad… Le devoir m'appelle. Passez tous une agréable soirée. »
Ils se courbèrent une nouvelle fois pour saluer son départ, plus ou moins sceptiques. Et une fois la monarque repartie vers les asiatiques du Huaxia, ils se tournèrent d'un même mouvement vers le Serdaigle souriant.
« Que vient-il de se passer ? demanda Harry, stupéfait. Qu'as-tu dit ?!
- Je me suis souvenu d'un truc quand vous avez mentionné mes animaux, tout à l'heure, s'amusa Eddie en faisant craquer ses doigts d'un air suffisant. Et un autre m'est revenu en parlant avec Elsa…
- "Elsa" ?! souleva Blaise, intrigué par la soudaine familiarité. De quoi tu parles ?!
- Ça, c'est un secret entre la reine et moi. C'est à elle… ou "lui", de décider de vous mettre dans la confidence ou non. Mais je crois comprendre ce que je fais ici, maintenant. Ou presque… Il y a encore un détail qui me chiffonne… C'est pas logique…
- Tu ne vas rien nous dire, n'est-ce pas ? soupira Neville, désabusé. Ce n'est pas très juste, après tout ce qu'on a fait pour toi…
- Si je le pouvais, je vous raconterai, hésita le tailleur. Mais il faut d'abord qu'on en discute, elle et moi… ou plutôt, "lui" et moi… Je vais jamais m'habituer à son "nouveau genre", c'est trop dingue.
- Sa Majesté Anna Morgen Thiton Camlann, Princesse d'Avalon, Duchesse de Glastonbury, Ambassadrice des Arts, Ordonnatrice de la Médecine et Bienfaitrice de la Flore. »
Potter se retourna à l'entente des titres de la jeune rousse, incapable de comprendre ce qu'ils signifiaient réellement. Comme d'habitude, il la trouva adorable dans sa jolie robe bouton d'or en taffetas, organza et dentelles. Elle était bien moins ornée qu'Elsa, ce qui lui permettait sûrement de déambuler d'un pas aussi léger, sautillante à la manière d'un petit elfe. Elle arborait son éternel sourire joyeux, les joues roses, ses grands yeux verts pétillants de bonheur. Cette jeune femme était une bouffée d'air frais.
Reportant son attention sur ses interlocuteurs, il fut surpris de voir Eddie bouche bée, le regard braqué sur la Princesse partant rejoindre sa grande sœur.
« Ce n'est pas bon » pensa Harry en son for intérieur.
[===]
Le soleil était couché depuis une bonne heure, et Eddie eut à peine le temps de passer la clôture de l'étable que Sven redressa la tête pour le regarder, la bouche pleine de paille. Ratatosk, comme d'habitude, semblait se moquer de lui du haut de sa poutre. Munin s'envola en croassant pour se poser sur son épaule, et lui pinça l'oreille en signe de protestation.
« T'étais où ? demanda-t-il à son volatile en lui donnant un morceau de viande crue qu'il avait chipé dans les cuisines du palais. Je t'ai pas vu depuis qu'on s'est fait embringuer dans la malédiction qui nous a tous endormi… Et il est où, Hugin ? »
Le corvidé fixa le tailleur, ses petits yeux noirs brillant de reproches. Il lui piqua une dernière fois l'oreille jusqu'au sang, lui faisant pousser un petit cri de douleur, avant de daigner prendre la nourriture dans son bec et se renvoler sur son perchoir.
« Hey ! s'écria Carmichael en se frottant la blessure. C'est pas ma faute ! Je vous ai "oublié", okay ? C'est vrai, c'est pas sympa de ma part… Mais j'y peux rien ! Ça m'est revenu qu'aujourd'hui ! Par contre, j'ai paumé le pipeau… C'est pour ça que j'ai pas pu vous appeler dès que j'ai su… C'est fou ça ! Je vois pas du tout où j'ai pu le perdre… » réfléchit-il en se grattant la tête.
Une fois qu'il fut assez proche de la barrière du box, son renne mordit dans sa tignasse pour le tirer à lui, faisant rire Eddie : c'était ainsi que Sven réclamait des câlins.
« Mais oui, mon grand ! susurra-t-il en lui flattant l'encolure. Ça y est, je suis de retour. Et non, je ne vais pas repartir de sitôt. J'ai même une petite surprise pour vous : la reine vous accueille dans ses écuries royales ! Si c'est pas la classe, ça ! »
Il hurla de stupeur quand Ratatosk lui sauta sur la tête, griffant son crâne sur lequel il n'avait pas eu la présence d'esprit de remettre son chapeau : il savait pourtant que l'écureuil prenait un malin plaisir à jouer dans ses cheveux qu'il avait décrété être son nid, quitte à l'écorcher au passage.
« Sale bête ! grogna-t-il en l'attrapant d'une main pour l'éloigner de son visage. Avoue, c'est de ta faute si Hugin n'est plus là ! T'as toujours été un emmerdeur de première… Sans déconner : il est où ? demanda-t-il à ses familiers comme s'ils pouvaient lui répondre. J'ai plus le sifflet pour l'appeler ! Il faut qu'on le retrouve ! Comment il va savoir où on est ? »
Sven lui souffla au visage, et poussa la porte de l'enclos verrouillé du museau.
« T'es pressé de partir, je vois… Je te comprends : t'es pas sorti depuis deux semaines à cause de moi… T'inquiète pas, ils vont te bichonner au palais ! Ils voient pas souvent de montures comme toi, ici. Tu vas être la star !
- Monseigneur ? »
Eddie se retourna, se demandant qui parlait à qui… Un garçon d'écurie le regardait avec de grands yeux ronds, la bride d'un palefroi gris pommelé à la main… Et il comprit : le jeunot conduisait le cheval d'un nouveau client dans un enclos vide, et l'avait surpris en pleine conversation avec… des animaux. Portant encore le riche costume prêté par Lancelot, il l'avait probablement pris pour un noble de la Cour.
« Oh mais ! s'écria le drôle, des étoiles plein les yeux. J'vous r'connais ! Z'êtes le monsieur des "Sept d'un coup" ! Mazette ! Z'êtes tout pimpant dans ces nippes ! J'vous ai pris pour un gars d'la haute.
- Il se trouve qu'on m'accueille au château, petit, déclara fièrement le tailleur en bombant le torse. Je vous avais dit que la reine aurait besoin de mes services. Que cela serve de leçon à tous les larrons qui ne m'ont pas cru !
- Bah dites donc, siffla le môme, impressionné. J'imagine qu'vous voulez récupérer vos chéris… ? ajouta-t-il, tout triste. L'patron sera content. Mais moi, j'les aimais bien…
- Si t'es vaillant, je te ferais rentrer en douce de temps en temps pour les voir. Ça te tente ?
- Oh oui ! sautilla le momignard en lâchant la bride, oubliant totalement le canasson dont il devait s'occuper. Z'êtes un vrai gentilhomme, m'sieur !
- Alors c'est conclu, sourit Eddie en ignorant le croassement outré de Munin et le souffle agacé de Sven. En passant, tu n'aurais pas vu mon autre oiseau ? C'est un corbeau, comme Munin, mais tout blanc. Ça fait un moment que je l'ai pas vu…
- J'm'en souviens ! Z'êtes venu avec, l'premier jour. Mais vot'e rongeur arrêtait pas d'lui fouiner dans les plumes, alors l'est parti. J'lai p'us r'vu.
- Je m'en doutais… grogna Carmichael en jetant un regard noir à Ratatosk qui se débattait dans sa poigne. Si tu le vois revenir, dis-lui qu'on est au château. Il comprendra. J'ai perdu mon appeau pour les appeler… Tu l'aurais pas trouvé, par hasard ?
- Non, m'sieur. Mais j'vais ouvrir l'œil ! J'vous l'ferai parvenir si j'le déniche, promis !
- Bon garçon. Bien, je vais donc vous quitter. Mais nous nous reverrons, cher compère. Je reviendrai te saluer de temps en temps.
- Avec d'autres histoires ?!
- Bien sûr ! Et si t'es sage, je te ramènerai même quelques gâteaux des cuisines du palais. Tu verras : ils sont délicieux !
- Z'êtes tellement chic ! sourit le moucheron, aux anges. Si vous avez b'soin de quoi qu'ce soit, j'suis votre homme !
- Je m'en souviendrai, répondit Eddie en ouvrant la porte de la stalle de Sven, qui se dépêcha d'en sortir. J'enverrai le règlement à l'aubergiste pour ses services plus tard. »
Le galopin rattrapa le cheval dont il devait s'occuper, se rendant enfin compte que celui-ci s'éloignait, fatigué d'attendre. Le tailleur jeta Ratatosk dans un sac de la selle, le fermant vigoureusement pour l'empêcher de s'enfuir, et équipa son renne pour le départ. Il était encore en train de vérifier qu'il n'avait rien oublié quand Munin s'envola soudainement et s'éloigna dans la nuit… « Quelle mouche l'a piqué, celui-là ? » se demanda-t-il, curieux.
« Au fait, m'sieur ! appela le gavalo en tirant son tréteau. Z'avez pas vu l'arsouille ? L'est p'us là ?
- Un "arsouille" ?
- Un des pirates du cap'taine Sinbad. Y sont sympas mais y font trop d'bruit, ça fait fuir les réguliers, et y vident les bouteilles d'la patronne. Elle est pas jouasse… Y en avait un qui voulait pas quitter la gailleterie, aujourd'hui. »
Carmichael fronça les sourcils… Vu la méfiance de Zabini à son égard, il n'aurait pas été étonnant qu'il ordonne à un de ses hommes de surveiller ses compagnons. Le plus surprenant, par contre, était de ne pas l'avoir vu.
Il se tourna vers Sven en haussant les sourcils. Ils échangèrent un long regard avant que son cervidé ne souffle et daigne indiquer une direction du museau, l'air désabusé. Eddie se dirigea vers le coin de l'étable indiqué, contourna une brouette… Là, sous ses yeux, un pirate dormait dans la paille fraîche.
Un flash de plusieurs souvenirs remontèrent brusquement à sa mémoire, et il retint un rire. Voilà pourquoi il n'avait jamais chassé Ratatosk malgré son caractère insupportable ! Cette fripouille avait un flair excellent, reniflant les embrouilles et les indices plus facilement qu'un limier ! Il savait non seulement faire les poches comme le plus habile des escamoteurs, mais avait l'art de verser discrètement du somnifère dans les boissons. Et effectivement, il en gardait toujours quelques flacons dans les sacoches de Sven. Le petit malin n'avait pas eu l'air d'apprécier la compagnie du flibustier.
« Offre un verre de rhum à ce pauvre homme quand il se réveillera, ricana Carmichael en lançant une pièce d'or au marmouset. Il se fera suffisamment souffler dans les bronches par son capitaine pour ne pas en rajouter une couche. Garde la monnaie pour toi, tu l'as bien méritée. »
Le petiot ouvrit de grands yeux ronds en observant l'écu, n'en ayant jamais vu de sa vie. Ce qui resterait de ce trésor après avoir payé l'alcool allait lui permettre de s'acheter assez de vêtements pour en changer tous les jours pendant deux semaines !
Il tendit le cou vers son bienfaiteur, les larmes aux yeux et à court de mot, quand celui-ci lui fit un clin d'œil et posa l'index devant sa bouche. Il hocha alors vivement la tête plusieurs fois : il garderait le secret de celui qu'il considérait déjà comme son seigneur et maître !
Ce fût guilleret qu'Eddie s'en alla vers le château, sur le dos du brave Sven, satisfait de cet échange : il venait de fidéliser son premier agent en tant qu'Eddie !
[===]
Draco s'affala dans un fauteuil de son salon privé, épuisé. Démaquillé, lavé, et vêtu de son simple pyjama de soie blanche et robe de chambre pourpre, il pouvait enfin souffler. Tout s'était bien passé : les hauts-dignitaires et représentants du commerce du Huaxia avaient été impressionnés par la richesse de son Royaume et par l'accueil princier qu'il leur avait réservé. Les négociations du lendemain, en compagnie de tous les Ministres, se présentaient sous de bons augures. Un instant, il avait craint que la présence d'Arthur et de son "invité" mystère causent des soucis. Mais finalement, il n'avait entendu aucune remarque désobligeante ou sous-entendu acrimonieux. Un miracle après un début si chaotique. Il n'aurait pu rêver mieux !
On toqua à la porte, et Malfoy se redressa plus convenablement dans ses coussins. Il servit deux verres de vin dans des coupes en cristal déjà préparées sur la petite table basse en acajou.
« Entre »
Il savait qu'il s'agissait de Potter. Leur rencontre tard le soir n'était plus un secret pour personne et était même devenu un de ses rituels préférés : il aimait discuter avec lui et débattre sur l'avenir de leurs pays. C'était le brun qui avait suggéré l'idée d'un repas typique d'Avalon, au lieu de l'initial dîner de pure tradition Xia. Alors qu'Elsa pensait montrer son intérêt pour leur culture en la respectant scrupuleusement, Arthur l'avait mis en garde sur la moindre erreur ou différence que les habitants du Huaxia ne manqueraient pas de remarquer. Au contraire, leur faire découvrir la gastronomie de l'Île Fortunée, pour laquelle ils faisaient justement le déplacement, ne pouvait que les ravir et leur donner un aperçu de ce que son Royaume avait à offrir. Draco avait ragé de ne pas avoir eu l'idée lui-même…
« T'es un enfoiré, tu sais ? »
Harry venait à peine de refermer la porte qu'il l'attaqua, le visage marqué par la colère. Le blond s'y attendait et lui offrit son plus beau sourire enjôleur.
« C'est toi qui a commencé.
- Comment ça ?! J'ai été poli, j'ai complimenté ta tenue… vraiment superbe, au passage… et toi ! Tu m'as tout de suite asticoté sur le fait que je n'étais pas venu à tes soirées, ou que j'avais l'air "tellement à l'aise" dans toutes ces… ces conneries ! Pourtant tu sais que je déteste ça !
- Pourquoi es-tu venu ce soir ?! Pourquoi tout à coup ?! Tu n'imagines même pas les rumeurs qui ont commencé à circuler à cause de ton absence lors des réceptions ! D'un monarque à un autre, cela pourrait être pris pour une injure ! D'après Gerda, certains soupçonnaient une rupture entre nous ! Une "rupture", tu te rends compte ?!
- Alors qu'on passe nos soirées ensemble ?
- C'est la seule raison qui a permis d'étouffer ce bruit de couloir horripilant… pour le remplacer par un autre. Mais celui-là, je peux le gérer.
- Tu aurais dû m'en parler avant… soupira Harry en allant s'asseoir face à Draco. Était-ce une raison pour m'humilier publiquement ?
- Non… grimaça le blond en lui tendant sa boisson. Je sais que tu détestes les mondanités, je ne voulais pas te forcer… Bien que tu aurais été obligé de faire une apparition, à un moment ou un autre, pour clouer le bec de tous ces médisants. C'est chose faite ! Et ce n'était pas vraiment une humiliation, tu exagères. Juste une petite victoire de ma part dans un duel de souverains. Tu en auras d'autres pour te rattraper. C'était pour faire passer l'impolitesse de ton invité surprise : on n'apostrophe pas une reine devant tout le gratin politique ! Je devais agir. Alors j'ai rusé un peu pour reprendre l'ascendant.
- Je comptais t'offrir des diamants de mes mines pour me faire pardonner, grogna le brun en trempant ses lèvres dans le vin. Maintenant, tu peux toujours courir !
- Arrête de bouder, Potter, fit dédaigneusement Malfoy en repliant les jambes sous lui, se mettant à l'aise. Tu es le Roi Arthur : tu auras largement l'occasion de soigner ton égo blessé. En attendant, venir à mon dîner t'a permis de discuter avec les représentants du Huaxia pour le compte du Royaume de Loegrie. Tu dois être content. Et ne le nie pas : je t'ai vu commencer à placer tes pions.
- Pourquoi me serais-je privé ? Mais comment as-tu su que je ne pourrais pas te répondre ? demanda-t-il, gêné par le comportement qu'il avait eu. Je veux dire… C'était bien le but recherché ?
- Je ne le savais pas, j'ai improvisé, expliqua Draco sans comprendre où il voulait en venir. Je voulais seulement avoir le dernier mot. J'ai pensé que flatter ton orgueil de "Sauveur" t'empêcherait d'être trop vindicatif dans tes réponses. Ajouté à cela ta phrase fétiche et une petite menace envers le nouveau venu sous ta protection… Ça a marché. »
Harry regarda le blond sans y croire : ainsi il n'avait pas saisi la réelle raison de son mutisme ! Il avait craint d'avoir été trop transparent et prévisible : si la reine se mettait à flirter avec lui à chaque fois qu'il souhaitait le plier à ses désirs, sa vie allait devenir un enfer ! Sa libido, également… Il avait déjà commencé à prévoir de coucher plus souvent avec des femmes avant d'entendre cette réponse si pleine d'une candeur dont il ne l'aurait jamais cru capable… Était-il à ce point ignorant de son potentiel de séduction, ou croyait-il impossible que le brun puisse être attiré charnellement par lui ? Il préférait ne pas le savoir… Et surtout, que Malfoy ne sache pas !
Pour le moment, il n'avait pas envie de rebondir sur le sujet. Rien que l'idée de "flatter son orgueil de Sauveur" le mettait mal à l'aise. Car après coup, il se souvenait parfaitement de ce qu'il lui avait dit, et il n'était pas certain du sens qu'il avait souhaité donner à ses phrases. Que "Draco puisse être perdu sans lui" faisait-il référence à son aide pour la reprise d'Avalon ? À la Reine des Neiges incapable de quitter son palais de glace sans lui ? Ou à Draco Malfoy qui n'avait pas eu l'air au "meilleur de sa forme" avant son arrivée dans le monde des Contes et Légendes, d'après ce qu'il avait pu comprendre… Mais là encore, il n'était pas sûr de vouloir savoir. Et l'idée faisait douloureusement écho aux paroles de Tracassin, clamant que le blond n'était qu'une poupée sans volonté si personne ne venait la manipuler.
« Tu te rappelles d'Eddie, pas vrai ? préféra-t-il demander à la place.
- C'est un Serdaigle, c'est bien ça ? Difficile de l'oublier : il a voulu me faire payer des cours du soir pour m'aider à passer mes BUSE. Il est parti en courant quand je lui ai envoyé Crabbe et Goyle. Je ne lui avais rien demandé ! Il s'est senti pousser des ailes avec ses "Optimal" en poche et a cru pouvoir profiter de la richesse de ma famille. L'idiot ! Mes notes ont toujours été excellentes !
- Moins que celles de Hermione.
- Très bien, Potter. Tu as gagné. Tu es content ? Ton amie avait les meilleures notes de Poudlard, bravo à elle. Mais tu n'as pas à être aussi satisfait quand on sait que tu étais loin de l'égaler.
- Je ne me suis pas trop mal débrouillé, je n'ai pas à en rougir, rit Harry, heureux de cette parenthèse sur l'époque de Poudlard avant de revenir au sujet qui l'intéressait. Mais le personnage qu'incarne Eddie… Tu le connais, n'est-ce pas ? »
Ce fût au tour de Draco d'être mal à l'aise. Le brun le voyait se tortiller sur son fauteuil, cherchant quoi répondre. Cependant, ils avaient convenu d'une règle pendant leurs échanges privés : pas de mensonges. Ils pouvaient ne rien dire, ou avouer ne pas le pouvoir, mais jamais ils ne devaient se mentir. Cette franchise devait être un pilier pour leur nouvelle relation, en vue de leur longue collaboration future. S'ils ne pouvaient pas se faire confiance, autant arrêter l'aventure de suite, et la reine avait beaucoup à y perdre… C'était pour cette raison qu'ils avaient commencé à organiser leur verre en tête à tête, tard le soir. Ils souhaitaient éprouver cette honnêteté, curieux de voir s'ils pouvaient s'entendre… Et pour le moment, ils appréciaient autant l'un que l'autre leurs échanges, même si leurs sujets avaient toujours été centrés autour de la politique. C'était la première fois où ils abordaient d'autres thèmes.
« C'est compliqué… souffla finalement Malfoy en passant une main las dans ses cheveux. Je ne suis même pas certain que ce soit lui… Mais ce qu'il a dit… »
Harry gardait le silence, laissant le temps au blond de peser ses mots. Leur sincérité fonctionnait dans les deux sens : croire les paroles de l'autre, et respecter son envie de se taire. Il ne voulait donc pas le brusquer, et attendait de savoir ce qu'il voudrait bien lui révéler.
« Il y a quelqu'un… avec qui la Reine Elsa échange régulièrement. Ils ne se sont jamais rencontrés. Et une phrase d'Eddie était mot pour mot ce que cette personne écrivait de temps en temps. Mais c'est un peu léger pour affirmer qu'il s'agit de lui…
- Je pense que si : il nous a dit quelque chose d'assez similaire. Comme quoi vous auriez un secret, tous les deux, mais qu'il ne lui appartient pas de le révéler. Que c'est à toi de décider. »
Draco ouvrit de grands yeux étonnés, et plaça vivement sa main devant sa bouche. Alors c'était lui ! C'était bel et bien lui ! Mais alors… alors…
« C'est la merde ! s'exclama-t-il, pâle comme un linge, faisant sursauter son vis-à-vis.
- Hein ?
- Potter… C'est vraiment la merde… Je sais que je ne devrais pas t'en parler, parce que tu es le roi d'un pays et moi la reine d'un autre… Mais nous ne sommes là que pour un an, alors il ne risque pas d'y avoir d'incidence… Et je sais que tu es trop noble pour divulguer mes secrets… Et puis de toute façon, il est ce putain de foutu connard qui fout tout en l'air ! Merde !
- Malfoy… calme-toi…
- C'est mon espion ! »
Harry s'immobilisa, incapable de réagir. Quoi ?
« Je me disais bien que c'était étrange de ne pas recevoir de réponse ! continua Draco en se prenant la tête entre les mains. Je voulais le rassurer au sujet de la malédiction, le premier jour de ma reprise de fonction. D'habitude, il me répond en moins de trois jours ! Et là, en deux semaines, rien ! J'espérais avoir de ses nouvelles avant d'abandonner Anna pour la régence… Je lui ai parlé de lui aujourd'hui même, en l'assurant de sa perspicacité et de la justesse de ses informations ! Je comptais sur lui, bordel ! Comment elle va faire s'il se retrouve incapable de mener des enquêtes, parce qu'il ne se souvient plus de qui il est !
- Attends… Attends, attends, attends… essaya de temporiser Harry, la tête surchargée. Déjà… Comment tu sais qu'il ne se rappelle de rien ?
- Je ne suis pas stupide, Potter ! cracha le blond, à bout de nerfs. Un tailleur qui ne sait pas d'où il vient ? Un espion qui se fait introduire à la Cour de la reine pour laquelle il travaille ? Depuis presque dix ans qu'il œuvre pour moi, il n'a pas émis l'hypothèse de souhaiter un jour venir à Arendelle pour me rencontrer ! Et c'est Carmichael ! Une personne du vrai monde ! Évidemment qu'il a perdu la mémoire ! Comment je vais faire, moi ?! C'est par lui que tout mon réseau transite ! Ses renseignements sont primordiaux pour la suite de mes plans ! Et Anna ? Elle va se retrouver incapable de faire des prévisions ou de rebondir sur les événements à venir !
- Alors tu laisses la gouvernance à ta sœur ? Tu t'es finalement décidé à partir ?
- Ce n'est pas le sujet, Potter ! Tu es bien placé pour savoir que l'espionnage est capital dans la gestion d'un État ! Sans cela, comment être au courant avant tout le monde des prémices d'un changement de régime ? Des décisions politiques ? Des lubies soudaines d'untel ou des découvertes d'un autre ? Comment trouver le moment parfait pour poser ses pions et proposer des contrats ? Quand et comment graisser la patte de l'un, amadouer ou faire du chantage à l'autre ? Négocier le plus avantageux des échanges en sachant ce que l'autre possède réellement ?
- Oui, oui, j'ai compris… Mais il va retrouver la mémoire, et…
- Quand ?! C'est maintenant que j'ai besoin de lui ! Il est un peu tard pour reformer un nouveau réseau avant mon départ ! Je peux toujours compter sur celui d'Évalac, mais le "Chat Botté" était le seul à si bien comprendre là où je voulais all…
- "Le Chat Botté" ! »
Harry ne put retenir son fou rire. Mais bien sûr ! Le "Marquis de Carabas" ! Ces grosses bottes hideuses dont il ne voulait pas se séparer ! Tout venait de ce conte ! Cela n'expliquait pas ses animaux, sa ceinture étrange, ou son métier de tailleur, mais ses flagorneries et ses mensonges à répétition pour grimper l'échelle sociale prenaient tous leurs sens !
« Je peux savoir ce qu'il te prend ? La situation est sérieuse !
- Le "Chat Botté" est l'espion de la "Reine des Neiges" ! s'exclama-t-il, hilare.
- Es-tu en train de te moquer de moi ?!
- Pardon… tenta-t-il de se calmer, essuyant ses larmes. C'est juste… J'ai du mal à y croire. Tu ne peux pas comprendre, tu ne connais pas les contes moldus : cette histoire est très connue.
- Merveilleux : mon espion est une célébrité, fit Draco, méprisant. Potter, je n'ai peut-être pas été assez clair, mais je suis désespéré !
- Ça va aller, ne t'en fais pas, sourit Harry en réprimant ses sanglots de rire. On ne va pas partir demain, et Eddie semble enfin commencer à récupérer les souvenirs de son personnage. Nous avons le temps de voir et d'aviser en conséquence. Je vais t'aider, rassure-toi. Moi non plus je n'ai pas intérêt à ce qu'Avalon soit livrée à elle-même. D'ailleurs, je voulais te proposer les services de deux de mes chevaliers pour épauler Anna : Érec et Tristan. Ils resteraient en tant qu'Ambassadeurs de Loegrie, et rappelleraient par leur présence à toute ta Cour notre alliance et le soutien inconditionnel de mon Royaume au tien. Ils sont plutôt savants en termes de stratégie martiale, et m'ont souvent été de bons conseils lors de négociations internationales un peu houleuses. Ils seront habilités à parler officiellement en mon nom, et même à puiser dans les ressources de mon pays si besoin.
- C'est très généreux de ta part… souffla Malfoy, sincèrement touché.
- En réalité, c'est un geste intéressé : sans l'Île Fortunée, Loegrie pourrait s'enfoncer dans la famine et la misère… Nous dépendons beaucoup trop de toi. En t'offrant si concrètement mon aide, tu deviens mon débiteur. Cela renforcera notre lien, et équilibrera la relation de pouvoir entre nous.
- En plus d'implanter deux de tes feudataires des plus influents au sein de ma Cour, sourit le blond, rassuré d'avoir affaire à une intrigue et non à de la philanthropie. C'est malin. Je ne peux même pas refuser, puisque j'y gagne. J'imagine qu'ils resteront sur place même après mon retour, n'est-ce pas ?
- Évidemment, rit Arthur. Je m'en voudrais d'enlever mes chevaliers à la famille qu'ils ne manqueront pas de fonder ici. Ce n'est pas un hasard si j'ai choisi ces deux hommes : ils sont chacun très épris de deux de tes demoiselles d'honneur.
- Iseut et Énide, j'avais remarqué aussi, soupira Draco en tendant sa coupe vide à Potter. Elles ne sont pas indifférentes à leurs galanteries, et seront ravies de les voir rester. Anna devra peut-être présider à deux mariages en mon absence. Donc, mes propres caméristes quitteront mon giron pour devenir tes sujets par alliance… Tout en préservant leur fonction à ma Cour.
- Probablement, fit Harry en leur resservant à boire. Dans tous les cas, nos Royaumes seront encore plus attachés l'un à l'autre, et ces deux ménages œuvreront sans relâche pour une parfaite union entre nous. N'est-ce pas merveilleux ?
- Je vois surtout que tu assures brillamment l'avenir de ta nation en m'enchaînant à toi, rétorqua Elsa sans animosité, sirotant son vin avec élégance. En plus de me voler mes dames de compagnie, tu me laisseras quatre de tes vassaux sur les bras qui agiront dans ton intérêt.
- Dans "notre" intérêt, précisa Potter en s'enfonçant dans son fauteuil, satisfait. Loegrie et Avalon fonctionnent en duo depuis des siècles, c'est un fait reconnu dans le monde entier. Cela ne fera que fortifier notre couple et le rendre plus puissant. Cela te dérange ? Comptais-tu rompre avec moi ?
- Sans parler de rupture, j'appréciais la liberté de notre lien. Ce que tu me proposes s'apparente presque à un contrat de mariage : il va m'être de plus en plus difficile d'œuvrer en politique sans devoir prendre en compte la position de ton pays.
- De même pour moi. Mais est-ce un mal ? Nous avons toujours pris soin l'un de l'autre, cela ne fera pas de grande différence.
- Dans les faits, pas tellement, concéda Draco, pensif. Dans les apparences, énormément !
- Justement ! appuya Harry en se penchant vers lui, le regard intense. Vois le bon côté des choses : la présence de deux de mes meilleurs chevaliers à ta Cour, bien installés sur tes terres, mariés à deux de tes plus proches compagnes… N'importe qui comprendra en un instant que mon armée répondra présent au moindre signe de menace contre toi. Et je possède la plus grande puissance militaire qui soit. Les États y réfléchiront à deux fois avant de te déplaire. C'était déjà un peu le cas, mais ce n'était que "sous-entendu". Cela deviendra bien plus évident de cette manière. C'est un message que nous ferons passer au monde entier : je te protègerai toujours.
- C'est tentant… avoua la reine, séduit par l'idée. Même si je devrais t'en faire profiter, je pourrais asseoir plus de pouvoir dans mes négociations…
- Et tu n'auras plus à craindre un Coup d'État, asséna le roi, abattant son ultime carte pour taire les dernières réticences de son collègue. Mes hommes sont réputés pour leur fidélité et leur honneur. Même s'ils restent mes vassaux, ils auront à cœur de te défendre coûte que coûte. Avec eux parmi tes courtisans, tu n'auras pas à revivre la traîtrise de tes proches, comme cela s'est produit avec Kay. Ils le verront venir. Et jamais ils ne le permettront. »
Malfoy l'observa longuement, secrètement admiratif : était-ce "Potter" ou "Arthur" le fin diplomate ? Il savait appuyer sur les faiblesses d'autrui afin d'obtenir l'arrangement qu'il désirait, à ses conditions. Et le pire étant que le blond ne trouvait rien à y redire. Le roi avait bien préparé son discours : sans nier ses réserves, il trouvait à chaque fois la parfaite parade pour transformer ses critiques en faveurs. Avalon allait perdre son autonomie dans le processus, en plus de deux femmes de la haute noblesse, issues de familles influentes, et allait devoir s'encombrer de deux puissants chevaliers attentifs au moindre de leurs faits et gestes. Loegrie n'aurait à déplorer que l'absence de ces derniers. Les points négatifs étaient clairement du côté du Royaume d'Été…
Et pourtant, Draco y gagnait énormément. Particulièrement quand il s'apprêtait à abandonner l'Île Fortunée à sa petite sœur inexpérimentée. Savoir les deux soldats probes et surentraînés à ses côtés l'aidait à mieux respirer, plus encore en sachant qu'ils amenaient avec eux le soutien entier et total de Loegrie. Si en prime, leur suzerain lui promettait un engagement si étroit et soudé pour l'avenir… Il n'avait plus qu'à ratifier leur liaison ! Pourquoi Potter n'avait-il pas été envoyé à Serpentard ?!
« Ne profite pas de notre nouvelle accointance pour faire baisser les prix de nos échanges commerciaux, précisa Elsa, donnant par là même son accord.
- Je n'oserai pas, le rassura Arthur, le sourire si grand qu'il allait jusqu'aux oreilles. Nous devrions officialiser notre union au plus vite. Cette fois-ci, je te promets d'assister aux festivités.
- Ne va pas trop vite en besogne, nous devons d'abord rédiger un contrat. Et si je dois loger tes nouveaux Ambassadeurs, ils le seront à tes frais… J'en ferais de même pour les miens.
- Que veux-tu dire ? demanda le brun, soupçonneux.
- Comment ? Croyais-tu sincèrement que je n'enverrai pas moi aussi des représentants de haut lignage de mon Royaume à Camelot ? badina le blond en se dandinant dans son fauteuil, fier de lui. Si nous devons signer une telle interdépendance, il est normal d'équilibrer notre échiquier.
- Je vois, sourit le roi en se retenant de rire : il aurait dû s'y attendre. Nous allons donc peaufiner les détails dès maintenant, si tu veux bien.
- Je suis fatigué, soupira la reine en feignant de bâiller. Cela peut attendre un peu. N'as-tu pas dit plus tôt que nous ne partirons pas demain ?
- Très bien, consentit Harry en plissant les yeux, prenant un air de roublard. C'est dommage : j'ai pris rendez-vous une bonne partie de la journée de demain avec plusieurs des représentants du commerce du Huaxia. Je pensais que déclarer publiquement notre enchaînement l'un à l'autre aurait permis d'organiser cette réunion ensemble.
- Tu n'as pas fait ça… ? pâlit Draco.
- Tu m'as cherché.
- Ce n'était qu'une joute verbale, mauvais perdant ! Tu voudrais me voler les traités commerciaux du Huaxia juste pour te venger ?!
- Sauf si on célèbre notre mariage politique avant. »
Malfoy fulminait : c'était du chantage ! Arthur désirait officialiser leur lien avant le lendemain uniquement pour profiter de son incontestable savoir-faire en pourparler ! Il s'incrustait dans ses transactions ! Mais il ne pouvait pas l'avoir prévu… ? Pourtant, l'expression diabolique qu'il arborait ne laissait pas de place au doute. Le blond souffla, se massant les temps du bout des doigts, contrarié… Il avait bataillé si dur pour faire venir le Huaxia jusqu'à lui ! Il s'était plié en quatre pour les éblouir et les satisfaire ! Et il allait échouer si près du but ? À cause de Potter ?!
« T'es un enfoiré ! »
Le fusillant du regard, il alla prendre des parchemins vierges, et un stylo pour rédiger leur accord. Il voulait le faire dès ce soir ? Très bien ! Tant pis pour son sommeil, il ne lui lâcherait rien, même s'ils devaient y passer la nuit ! Ce Gryffondor prétentieux allait regretter d'avoir énervé un Serpentard accompli comme lui. Il y mettait un point d'honneur !
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Blaise adorait ces fauteuils de velours amarante, savamment positionnés autour d'une grande table basse en verre sur le balcon de sa suite. Il pouvait boire son verre de rhum à la belle étoile, tout en contemplant la magnificence des jardins royaux de nuit. Çà et là, des lanternes étaient allumées dans les allées, conférant un air féérique aux lauriers, fusains, troènes et autres buissons. La silhouette des orangers, pommiers, figuiers ou vignes se découpaient sous le clair de lune. De magnifiques onagres, cereus, orchidées et fleurs nocturnes inconnues imprimaient leurs couleurs malgré le gris anthracite de l'obscurité, et l'air embaumait de leur senteur délicate. L'immense roseraie s'endormait, et au loin, des nénuphars tanguaient paresseusement sur la surface d'un large étang scintillant. Sublime !
Ce délice du soir était un si grand plaisir qu'il regrettait déjà de devoir partir… Plus encore en sachant qu'il n'avait qu'un an pour en profiter. Cet appartement allait lui manquer… Ces pièces spacieuses, ces meubles à la richesse subtile, ce goût sûr et fin qu'on pouvait retrouver jusque dans les latrines. Cet endroit était paradisiaque !
Pourtant, il était agacé. Depuis sa terrasse, il pouvait voir la lumière encore allumée dans les appartements de la reine : Draco ne dormait toujours pas. C'était bien la peine de l'avoir sermonné au sujet de sa fatigue accumulée ! En plus, il avait aperçu Potter avec lui avant qu'ils ne ferment les rideaux. Que pouvaient-ils bien faire à cette heure-ci ? Cela l'étonnerait beaucoup que le nigaud Gryffondor ait réussi à séduire son si fier Serpentard pour une partie de jambes en l'air… Leur sujet politique devait être particulièrement passionnant pour les tenir éveillés si tard.
Zabini soupira. Il s'ennuyait… Et il avait envie de baiser. Cependant, il allait devoir faire une croix sur son beau blond pour cette nuit. Il n'était pas certain de pouvoir se glisser dans le lit d'Audhild non plus : malgré leurs précédents ébats plus que satisfaisants, la belle brune demeurait une dame de la noblesse soucieuse des bonnes manières, et n'apprécierait pas plus que la reine d'être réveillée tard dans la nuit… S'il souhaitait poursuivre leurs rapports, mieux valait choisir une heure décente. Peut-être devrait-il faire un saut à la taverne pour y dénicher quelques frivoles jouvencelles ?
Il commençait à se motiver quand un mouvement lui rappela un objet dans sa poche : le "bout de bois" volé par ses pirates à Carmichael. Il le sortit et se mit à l'analyser. C'était une simple petite flûte, sans trous pour les doigts, taillée grossièrement dans un bois clair. L'embouchure au niveau du bec était étroite, et une tige coulissait à l'extrémité inférieure… Il n'avait pas encore pris la peine de la tester : c'était l'occasion !
Curieux, il la porta à ses lèvres et souffla…
…
Aucun son. Il renouvela l'expérience, expulsant l'air de ses poumons de plus en plus fort à chaque essai. Rien.
« C'est quoi cette camelote de merde ?! » jura-t-il intérieurement.
Il allait s'en débarrasser quand un croassement attira son attention : un gros oiseau blanc, les yeux rubis luisant dans l'obscurité, s'était posé sur la corniche au-dessus de lui… Était-ce un corbeau ? Il n'en avait pas le plumage, mais son allure ne laissait pas de place au doute.
« Je savais pas qu'ils en avaient des albinos comme toi dans la volière du palais… dit-il au volatile qui l'observait sereinement. Tu veux quoi ? J'ai rien à bouffer pour toi. »
Soudain, un bruit d'ailes, et quelque chose lui griffa l'arrière du crâne. Il sursauta en poussant un cri de frayeur, se tournant en tous sens pour repérer son attaquant, quand un mouvement le fit à nouveau lever les yeux. Un second corvidé, noir, venait de se poser à côté de son cousin. Et il avait l'air très énervé !
« Un corbeau noir… » réfléchit-il à voix haute, plissant des yeux.
Puis, il regarda le court flûteau dans sa main, subtilisé au tailleur vêtu de rouge… Cela ne pouvait pas être une coïncidence !
« C'est un putain de sifflet pour appeler ses piafs ?! »
Deux croassements indignés lui répondirent, et l'oiseau noir s'envola pour à nouveau le labourer de ses serres, son collègue se contentant de les regarder, dédaigneux.
« Lâche-moi, saloperie ! hurla-t-il en tentant de l'esquiver. Merde ! Mais vous êtes deux en plus ?! Casse-toi ! »
Harcelé sans relâche, il courut se réfugier à l'intérieur, fermant précipitamment la porte fenêtre. Le corbeau couleur de nuit cria de colère en râclant les carreaux, coincé dehors, et Blaise pesta en portant les doigts à son visage : il saignait ! Cette saleté lui avait blessé le visage !
Flap flap flap…
Le pirate se retourna, le cœur battant. Non… Ce…
L'oiseau blanc venait de s'installer sur un bras en cuivre du lustre à pampilles, son regard intense braqué sur lui. L'enflure avait réussi à s'introduire in extremis dans son salon ! Mais comment avait-il fait ?!
« T'es un petit malin, toi… fit-il sur la défensive, des sueurs froides derrière la nuque. Mais tu vas faire quoi, maintenant ? Tu peux plus sortir retrouver ton maître ! Ha ! T'es baisé ! »
Zabini eut la désagréable impression que le corvidé comprenait ses paroles en le voyant étirer ses petits yeux rouges inquiétants. Et de l'autre côté des vitres, le noir croassait toujours de son insupportable voix rocailleuse. C'était lui qui était pris au piège !
Comme attendu, le messager de mort à la robe immaculée étira ses longues ailes soignées et cria en brassant l'air, menaçant. Il battait si vigoureusement ses plumes que le luminaire oscillait de plus en plus, les flammes des bougies vacillant dangereusement.
« Arrête ça ! s'énerva Sinbad, inquiet de voir son canapé juste en dessous. Tu vas foutre le feu, triple buse ! Ça va finir en poulet rôti cette histoire ! »
Mais que cherchait-il ?! Ce butor allait réussir à faire tomber le chandelier en continuant ainsi, il devait l'arrêter ! Le capitaine chercha autour de lui, et prit le premier objet venu pour lui lancer dessus… Mauvaise idée : le charognard apprécia encore moins le traitement, et décida d'accélérer la cadence. La cire commençait à goûter sur la soie du divan lie de vin… Désespéré, Zabini agit à l'instinct. Il reprit l'appeau et souffla de toutes ses forces.
Il ne s'était pas attendu à une telle efficacité : le silence revint aussitôt. D'abord figé dans l'expectative, craignant qu'un geste de sa part ne re-déclenche un cataclysme, il finit par lever timidement le regard.
Les yeux du porteur de malheur opalin n'étaient plus que deux fines lignes de feu, cherchant à l'immoler vivant par sa colère. S'il avait pu grogner à la manière des félins, les murs auraient tremblés. Et à la lumière du luminaire, le calme revenu, Blaise remarqua qu'un papier était attaché à sa patte… Un message !
« Viens ici, petit, ordonna le pirate en tendant le bras, peu confiant. Minou minou minou… »
Naturellement, le volatile ne bougea pas une rémige… Il ne savait pas trop à quoi s'attendre… Fixant le pipeau dans sa main, il hésita… et souffla dedans une énième fois en épiant son ennemi mortel.
Un croassement frustré retentit, et le héraut funeste s'envola jusqu'à lui, se posant délicatement sur son poignet, plantant ses ergots profondément dans sa peau pour lui faire payer l'affront. Sinbad serra les dents et se dépêcha de dénouer le parchemin. Dès qu'il récupéra son butin, il chassa la bête qui en profita pour lui mordre les doigts, et il sortit dans le couloir à la hâte : il en avait plus qu'assez de se faire voler dans les plumes ! Qu'il reste enfermé, ce stupide moineau !
Ricanant, le visage éraflé, le poignet mutilé, et les doigts meurtris, il déplia la lettre en s'appuyant contre la porte de ses appartements, impatient d'enfin découvrir le secret de ce braque de faux tailleur à la manque ! Dans un sourire démoniaque, un rire de pur méchant prêt à surgir de sa gorge, il commença à lire…
[===]
Neville attendait à l'angle du couloir… C'était bientôt l'heure où il venait, il n'allait sans doute plus tarder. Pensif, il se rappela l'idée brillante qu'il avait eu en le suivant, le soir du deuxième jour après leur reprise d'Arendelle. Cet inconscient ne pouvait pas avoir abandonné, ce n'était pas digne de la légende à laquelle il appartenait… Il avait pourtant tenté de prévenir Harry, mais…
Enfin, il entendit ses pas. Une démarche altière mais légère, celle d'un homme fier et conscient qu'il n'avait rien à faire dans cette aile du château. Un Seigneur qui avait connu moult batailles et remporté de grandes victoires. Un militaire dans l'âme, fidèle à son roi, attaché à ses compagnons d'arme, et pour qui l'honneur prévalait sur tout… Et qui pourtant, se glissait en catimini dans les quartiers royaux, soucieux de ne pas se faire remarquer. Le Gryffondor se pencha discrètement derrière son mur, et l'observa…
Comme d'habitude, Perceval se tenait devant l'entrée des appartements de la reine, le visage douloureux. Il posa une main sur la surface en bois, et porta à ses lèvres la fleur qu'il tenait, y déposant un doux baiser. Puis, religieusement, il déposa ses présents sur le tapis devant la porte, se redressa pour regarder une dernière fois l'ultime rempart entre lui et l'élu de son cœur, et s'en alla à pas feutrés, la tête courbée sous le poids de sa peine…
Londubat patienta jusqu'à ce qu'il soit hors de vue, et se dirigea tout aussi silencieusement vers l'endroit où s'était tenu le chevalier. Il soupira… Sous ses yeux, comme chaque soir, une magnifique hellebore blanche tâchée de rouge, de rose et de bleu, presque identique à celle qu'il avait offerte à la "Reine des Neiges", le jour de leur rencontre. Il se demandait où il parvenait à se fournir pour en trouver une nouvelle si souvent. Et à côté, un petit paquet enveloppé dans un riche tissu de soie blanche, fermé par un joli ruban bleu roi. Sans doute un autre bijou dans un écrin…
À regret, Lancelot ramassa ces offrandes et les mit dans sa poche… Il n'avait pas eu la force de demander à Perceval d'arrêter. Comment dire à un homme fou d'amour qu'il devait étouffer ses sentiments inconvenants pour éviter un scandale ? Il n'était qu'un simple chevalier, bon sang ! Un pauvre soupirant de la reine du plus puissant Royaume de ce monde… Si encore Elsa partageait son affection, mais il n'en était rien. Ses marques de tendresse pouvaient vite devenir gênantes. Malfoy ne devait jamais les découvrir, le risque était trop grand… Si ça se savait… Neville préférait ne pas y penser : les relations entre Loegrie et Avalon pourraient en pâtir…
Alors qu'il allait repartir, il entendit des éclats de voix… Était-ce son roi avec la reine ? Curieux, il posa l'oreille contre la porte…
« Tu n'abuseras pas de moi !
- Sois gentil. Tu me dois bien ça, après tout ce que j'ai fait pour toi.
- Tu m'avais promis !
- C'était avant que tu me jettes au pied du mur !
- Parce que tu n'as pas cherché à me prendre par derrière, peut-être ?
- Et j'ai eu raison : sans ça, tu aurais fait traîner notre liaison jusqu'au dernier moment, histoire de bien prendre tes dispositions pour que j'en profite le moins possible !
- C'est bon ? Tu "profites" bien ?
- Plutôt oui.
- Tant mieux. Parce que je ne baisserais pas le prix de notre blé pour toi ! »
Lancelot retint un éclat de rire in extremis. Un instant il avait cru… Mais non. Il ne savait pas ce qui se serait passé si jamais… Cela aurait été… tellement "bizarre" ! Et catastrophique !
Rassuré, et un peu perturbé, il s'éloigna retrouver sa propre chambre. Bientôt, ils partiraient. Bientôt, il n'aurait plus à ramasser le cœur brisé de son frère d'arme. Bientôt, Perceval allait enfin pouvoir tourner la page… Du moins, il l'espérait.
[===]
Mais où était donc passé cette oie de Munin ?! Après avoir laissé son brave Sven aux mains des palefreniers royaux, renne ravi des flatteries de ces sympathiques lads, Eddie était parti à la recherche des deux frères fugueurs… Il ne voulait pas s'installer dans sa chambre avant de les avoir retrouvés : sans son sifflet, comment allaient-ils savoir quelle fenêtre rejoindre ?
Carmichael se souvenait qu'il dormait toujours avec eux, alors que Ratatosk préférait rester avec le paisible ruminant. Lorsqu'il prenait une chambre dans une auberge, ses corbeaux entraient par la lucarne et se perchaient quelque part, non loin de lui… Ils lui étaient bien trop précieux ! Et ces deux coquets adoraient le confort d'un logement propre et bien entretenu. Il pensait qu'ils auraient été surexcités à la perspective de séjourner dans un palais, et l'auraient hâté d'y poser ses malles.
Triste et angoissé, il dut se résoudre à rebrousser chemin. Il était tard, et ne pourrait dormir que deux ou trois heures avant de devoir se lever pour espérer rencontrer la reine avant ses négociations avec le Huaxia… Il avait tant à lui dire en privé !
Il sursauta. Un homme attendait dans la cour du château, devant la porte menant à l'aile des logis. Et Eddie aurait reconnu cette silhouette entre mille : Blaise Zabini, alias le Capitaine Sinbad d'Arabia… Il grommela dans sa barbe inexistante, fatigué à l'avance de devoir supporter ses menaces alors qu'il était déjà épuisé et inquiet. Inspirant longuement, il s'avança en serrant les dents.
Le corsaire le vit, et se redressa. C'était donc bien lui qu'il attendait. Mais petit à petit, il ne put s'empêcher de remarquer quelques détails suspicieux : son visage portait des traces rouges, son poignet était bandé, et les doigts de son autre main semblaient abîmés… Et plus le Serdaigle s'approchait, plus il y vit les marques d'un combat contre ses chers volatiles, reconnaissables pour les avoir si souvent expérimentés lui-même. Il ne pouvait pas avoir pris Munin ou Hugin en otage ?!
Une fois à portée de voix sans avoir à crier, il allait exiger des explications, rouge de colère, quand le flibustier lui tendit une missive.
« Je crois que ceci t'appartient » lui dit-il calmement, l'œil inquisiteur.
Méfiant, le tailleur lui arracha le billet des mains, et le déplia en fixant le présumé coupable d'enlèvement… Une fois certain que celui-ci n'allait pas profiter d'un moment d'inattention pour l'attaquer, il posa les yeux sur la surface blanche… et reconnut l'élégante écriture de la reine.
Dans un sursaut, il dévisagea le voleur, partagé entre la rage et l'épouvante.
« T'aurais dû me dire que t'étais pas son ennemi, marmonna le Serpentard, agacé et honteux, détournant les yeux. Au moins me le faire comprendre. Je t'aurais foutu la paix.
- Et tu m'aurais cru ? contra Eddie, fulminant de colère.
- Non… avoua Blaise en se frottant le cuir chevelu, rendant plus visibles les entailles de serre sur son visage. Mais si t'avais été moins louche, aussi… Enfin bon… Maintenant je sais. Y a deux plis : le premier t'explique son absence, l'hiver, et sa reprise de fonction, le second te demande de l'aider pendant une absence prolongée… Tu t'en sens capable malgré ta perte de mémoire ?
- Ça te regarde pas ! Ce sont nos affaires ! Comment t'as fait pour récupérer ça ! Je vois que Hugin s'est bien défendu, mais t'aurais jamais pu lui prendre son courrier, normalement ! Mes oiseaux ne sont pas des corbeaux comme les autres : il faudrait les tuer pour s'accaparer leur trésor ! Ils ont déjà déjoué des complots, des tirs, des ruses, des pièges… Jamais ils ont échoué leur mission ! T'aurais dû perdre les deux yeux, avoir les lèvres en lambeaux, les oreilles arrachées, les mains en charpie… Il est impossible que t'aies pu leur faire du mal sans être atrocement mutilé, et encore ! Je suis même pas sûr que ce serait suffisant pour voler leur fret. Alors comment t'as fait ?!
- Je crois que ça aussi, c'est à toi. »
Le mulâtre lui tendit un bout de bois : son fifre. Eddie pâlit brusquement. Ces deux semaines sans souvenir avaient causé bien plus de dégâts que prévu. Il avait oublié ses corbeaux messagers ! Il s'était désintéressé de ce flûteau étrange pendu autour de son cou… et l'avait négligemment rangé dans sa poche. Habituellement, il vérifiait toujours qu'il l'avait sur lui, conscient de son importance.
Il s'empara de sa propriété avec violence, une haine féroce dans le regard. C'était donc lui qui lui avait volé son bien le plus précieux ?! L'artefact ultime qui avait fait de lui ce qu'il était ! Cet objet miraculeux qui lui avait offert ces deux familiers si exceptionnels, si inestimables qu'ils étaient devenus sa famille ?! Le "Chat Botté" en lui se mit à honnir profondément la stupidité d'"Eddie Carmichael" pour avoir négligé son ocarina. Et aussi sa propre imbécillité, qui l'avait fait venir à Arendelle et subir la malédiction de plein fouet. Sans cela, peut-être aurait-il récupéré sa mémoire plus tôt et évité cette situation mortifiante !
Car c'était ce qu'il ressentait : de la honte ! Il avait construit sa réputation d'espion grâce à ce sifflet et à Munin et Hugin. Il était censé être infaillible ! Personne ne pouvait découvrir ses mystères grâce à cette magie ! C'était tout ce qu'il avait ! Tout ce qui lui permettait d'acquérir autant de gloire et de richesses ! Et il adorait faire ce qu'il faisait !
« T'as aucune idée du mal que t'as fait en me volant… grinça-t-il entre ses dents, menaçant. Si ça se sait…
- Je dirai rien, promit le pirate en crachant sur le sol. Tu bosses pour Draco. Donc pour moi, en quelque sorte.
- Parce que tu crois que je vais te rendre service ?! siffla-t-il, de plus en plus malveillant.
- Pas pour moi, précisa Blaise en souriant, malicieux. Mais pour la reine d'Avalon. Je trime aussi pour elle. Tu crois que je suis cloué au plancher pour quoi ? Ma vie est sur la mer, au milieu de la houle et des embruns, pas au ras des pâquerettes. Et pourtant, ça fait des plombes que je poireaute pour ses beaux yeux. Et mes hommes commencent à s'impatienter.
- Alors qu'est-ce que tu fous encore là ? Même si vous êtes amis, j'imagine que tu as quelque chose à ramasser ?
- T'as pas besoin de le savoir, s'amusa le métis. Je te demande pas pourquoi tu turbines pour elle : toi aussi, t'y gagnes au change, je me trompe ? Par contre, je veux bien me servir de tes… "services animaliers". C'est plutôt intéressant, ton truc.
- Fais attention : t'as beau avoir profité de ma perte de mémoire momentanée, j'ai plus d'un tour dans mon sac. Je te ferai regretter ton chantage !
- Qui parle de "chantage" ? fit Zabini, l'air innocent. Je te fais simplement part de nos intérêts communs. Justement, je t'apprends que nous allons devenir les meilleurs amis du monde… tant que tu restes du côté de la reine, ajouta-t-il comme une mise en garde. Je te fais toujours pas confiance, mais je constate que pour le moment, nous œuvrons dans le même sens. Alors sache seulement que s'il te prend l'envie de faire la girouette, j'ai de quoi te le faire payer.
- Tu me fais pas peur, ricana Eddie. T'aurais pas oublié ce qu'est mon job ? T'es en train de te battre avec mes propres armes, et je suis un expert. Bientôt, ton moyen de pression sera réduit à peau de chagrin par rapport à la montagne d'infos compromettantes que je trouverai sur toi.
- Essaie. Je suis impatient de savoir ce que tu découvriras. Y a sans doute des trucs qui me sont sortis de l'esprit : ça sera un peu comme retrouver mon vieux journal intime d'ado.
- Tôt ou tard, tu flancheras. Et je serais aux premières loges pour te regarder chuter.
- Cessons ces amabilités, soupira Blaise en s'étirant, pas plus touché que s'il avait reçu la piqûre d'un moustique. Maintenant que tout est clair, tu liras dans la lettre d'Elsa qu'il va bientôt devoir partir… avec moi et Saint Potter. Et y aura plus que sa petite sœur novice pour lui garder le trône au chaud.
- La Princesse Anna ? hoqueta Carmichael, tout à coup plus réceptif. Comment ça ? Pourquoi doit-elle partir ?... Enfin, je veux dire, "il"... Pourquoi Malfoy doit-il lui confier le Royaume ?
- Ça, je te laisse le découvrir, répondit Blaise, intrigué par le changement de ton. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si tu te sens capable de gérer cette affaire… dans les "conditions actuelles", et de convenir d'un système avec tes piafs pour prévenir d'une urgence quelconque. Que ce soit du côté de notre périple, ou de celui d'Avalon. »
Le cœur d'Eddie se mit à battre la chamade. L'image du petit lutin marchant comme on danserait, sa robe bouton d'or voletant à chacun de ses pas pour révéler ses pieds gracieux chaussés de ballerines en soie, s'imposa dans son esprit. Sa frimousse d'ange avait illuminé le grand salon de réception par son sourire radieux. En se posant sur eux, ses yeux pétillants avaient désarmé chacun des convives, apportant une vraie joie dans leurs rictus factices. Sa simple présence avait adouci les plus revêches, et les regards hautains n'étaient plus que bienveillance et douceur en rencontrant ses prunelles d'un joli vert prairie. Elle était le printemps lui-même, l'air lui avait semblé plus frais depuis qu'elle était apparue. Et cette fragile nymphe des bois, plus claire et pur qu'un ruisseau de montagne, allait reprendre les rênes du Royaume ?
« Ça va la briser… ne put-il s'empêcher de souffler, glacé d'effroi.
- Toi, tu files un mauvais coton… gronda Sinbad en plissant les yeux. Va pas péter plus haut que ton cul parce que la reine t'a invité au palais : t'es un bouseux, mec. Reste à ta place.
- Je sais, crétin ! grommela Carmichael, agacé et rougissant de s'être montré trop transparent. Je suis pas stupide ! C'est juste inquiétant pour ce pays… Ça me fait chier de parler de Malfoy en bien, mais la Reine Elsa est plus que compétente : Avalon ne s'est jamais aussi bien porté depuis qu'elle a ceint la couronne… Enfin… Sauf pour l'"épisode hivernal", évidemment… L'Île Fortunée a gagné en puissance. Elle a mis les autres pays à genoux… Et ça plaît pas trop à certains.
- Tu crois que ces "certains" vont profiter de son absence ?
- Évidemment, abruti ! Heureusement que la malédiction n'a pas duré trop longtemps, sinon vous auriez retrouvé Arendelle occupée par une armée étrangère quelconque ! C'est pas les rois jaloux et ambitieux qui manquent, dans ce monde : c'était du pain béni pour toute cette bande de profiteurs. Alors si la reine se retire… La princesse n'a ni la force, ni la prestance pour tenir les autres Royaumes en respect. Non seulement elle n'est pas l'héritière légitime du trône, mais en plus, sa réputation est loin d'être celle d'une dirigeante charismatique à la poigne de fer comme Elsa. Elle va se faire dévorer en moins d'une semaine !
- Draco est pas bête : je suis sûr qu'il a tout prévu, et c'est pour ça qu'il fait appel à toi. Apparemment, tu as toute sa confiance, et tu bosses bien… Ce qui cessera pas de me surprendre… Mais ça va pas durer longtemps s'il apprend que tu veux forniquer avec sa très chère et précieuse petite sœur adorée qu'il aime tant.
- Je suis pas un pirate, moi ! s'empourpra à nouveau le tailleur. Mes intentions ne sont pas grivoises, j'ai beaucoup trop d'estime envers la famille royale d'Avalon pour savoir me tenir !... Mais à distance, j'aurais du mal à la prévenir de tous les complots qui vont pas manquer de mijoter autour d'elle… Elsa a l'art d'inspirer adoration et terreur, autant pour les étrangers qu'auprès de ses propres courtisans. Anna en sera incapable. Et si je dois en plus suivre le voyage de Malfoy pour le prévenir d'un danger potentiel à l'avance… Faut que je m'organise différemment.
- Avoue : tu veux juste rester près de ta belle, ricana le pirate, l'air graveleux.
- Je suis sérieux !
- Je me fous complètement de comment tu vas t'arranger, tu verras ça avec Draco directement. Ce qui m'intéresse, c'est la manière dont on va exploiter tes dindes pour notre périple. T'es un espion, si on te dit où on s'apprête à aller, tu pourras nous faire un topo de la situation actuelle là-bas, les gens à éviter ou le nom de tes contacts qui pourraient nous aider sur place. Tu pourras aussi tenir la reine au courant de ce qui se trame à Arendelle, ça le rassurera. Et de notre côté, on te filera des infos sur ce qu'on trouve… En gros, on sera tes taupes, nous aussi.
- J'avais déjà compris, pas besoin de toi pour voir tous les avantages qu'i en tirer, grogna Eddie, piqué. Au risque de me répéter : ce ne sont pas tes affaires ! C'est avec la souveraine que je vais m'arranger, pas un péquenaud comme toi ! T'avais pas à t'incruster dans nos échanges !
- Fallait bien ça pour être mis dans la confidence, sourit Blaise d'un air mesquin. T'apprendras vite que je peux devenir un vrai chieur si on me fait des cachotteries, surtout si ça me concerne : c'est mon navire qui va transporter la reine, mon équipage qui va la mener à bon port, mon sabre qui va la protéger… Et si je vois des pigeons tourner autour de mon bâtiment alors qu'ils ont rien à foutre là, je tire pour en faire un bon casse-croûte. Estime-toi heureux que j'ai eu vent de l'affaire avant de faire feu sur tes stupides moineaux.
- J'aurais bien aimé voir ça : t'aurais fini borgne. Ça aurait complété ta panoplie de pirate.
- Je vais devenir à la fois ton espion et le gardien de ton secret, et j'ai une foule de truands à mon service, alors change de ton. C'est un de mes hommes qu'a chopé ta rossignante, t'as de la chance qu'il lui a pas pris l'envie de jouer de la flûte. Et t'es encore plus veinard que ça soit pas un autre guignol qu'a profité de ton amnésie : t'aurais plus jamais revu tes deux pintades. Tu m'en dois une !
- Où ils sont, d'ailleurs ? Si tu veux disposer d'eux, j'espère que t'as pas froissé une seule de leurs plumes ! Tu le paierais très cher !
- Le blanc est dans ma chambre, en train de saccager le mobilier de la reine. Et le noir essaie de péter la fenêtre pour le libérer.
- T'as séquestré Hugin ?!
- Il s'est enfermé tout seul, le con ! Il avait qu'à pas me suivre comme un couillon.
- Tes pirates ont intérêt à m'être utiles pour rattraper tes conneries ! Parce que si tu tiens à utiliser mes talents pour ton propre compte, j'ai la ferme intention d'en faire de même !
- C'est de bonne guerre, rit Blaise, ravi du compromis. Mais si tu pouvais passer par chez moi avant d'aller pieuter, ça m'arrangerait : j'ai encore besoin de mes deux yeux pour viser au mousquet. »
Eddie retint difficilement la réplique cinglante qu'il avait sur le bout de la langue, et commença à marcher d'un pas rageur vers les couloirs du palais, cognant brutalement l'épaule du corsaire au passage. Celui-ci le suivit, goguenard. Sa bonne humeur énerva plus encore le tailleur, mais il était trop pressé de retrouver ses deux frères pour perdre du temps à le disputer.
« Au fait, fit tout à coup Blaise en indiquant le chemin vers ses appartements. Le "Tailleur" pour le commun, le "Chat Botté" pour la reine, le "Marquis de Carabas" pour la noblesse, "Eddie Carmichael" pour les gens de notre monde… Mais t'as bien un vrai nom ici, pas vrai ? »
Le Serdaigle lui jeta le regard le plus noir qu'il avait en réserve, et s'agaça de voir que Zabini était loin d'en être affecté. Au contraire, son sourire s'agrandit, dévoilant ses parfaites dents blanches. Heureusement, les plaies causées par Hugin et Munin atténuaient son air suffisant et lui mettaient du baume au cœur : il ne doutait pas que cet insupportable Serpentard en recevrait bien d'autres en côtoyant ses deux petits chéris.
« Kristoff… finit-il par répondre à regret. Kristoff Sturluson.
- Quel nom de merde. »
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NOTE DE L'AUTEUR :
Je risque de ne plus poster toutes les semaines à partir du chapitre 9 (le chap10 pour le site, puisqu'il compte l'intro et moi non). J'ai laborieusement mis deux semaines à écrire ce fameux chapitre 9… et je préfère essayer de fournir des chapitres longs et de qualité plutôt que de me dépêcher à fournir. Et puisque je construis mes chapitres pour qu'ils correspondent chacun à un conte, je peux difficilement les couper. Peut-être même vais-je dépasser les 40 pages pour certains…. nous verrons. En bref, le calcul est vite fait pour la régularité des parutions : après ce chapitre-ci, j'en ai 3 autres prêts à être livrés, donc de quoi publier sur trois semaines. D'ici là, il y en aura peut-être un quatrième, je peux donc tenir 1 mois à ce rythme. Mais cela ralentira après… Pas le choix.
Revenons à nos moutons : j'ai pensé que faire un petit récapitulatif des personnages au début du chapitre pouvait commencer à devenir intéressant à partir de maintenant. Parce que d'autres vont arriver au fur et à mesure, comme vous avez pu le voir dans ce chapitre. Dites-moi si c'est utile ou non, ou si vous avez besoin d'autres choses pour ne pas vous perdre dans les noms. Normalement, puisqu'ils arrivent petit à petit, ça devrait le faire. Mais sait-on jamais. J'ai mon petit tableau personnel avec tous les personnages et leurs caractéristiques (physique / langage / histoire / statut social / conte associé / origine du nom s'il y en à une, etc.) Mais je ne peux pas vous le partager au risque de gravement spoiler, et renseigner toutes les infos à chaque fois pourrait être un peu lourd.
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D'ailleurs, je me suis dit que je pouvais vous faire une rapide synthèse des origines des noms que j'ai choisi de donner. ATTENTION, ces explications sont très longues.
Pas besoin de parler d'Avalon ou d'Arendelle, je pense que si vous connaissez la base de la légende arthurienne et que vous avez vu le dessin animé de Disney de la reine des neiges, il est inutile de revenir dessus. Par contre, pour le nom de famille d'Elsa et Anna, sachez que Camlann est le nom de l'endroit où se déroule la bataille où Arthur est mortellement blessé. Il est ensuite emmené à Avalon pour mourir. Je vous laisse tirer vos conclusions. Monmouth (pour Gerda la Grande Chambellan, dont j'ai déjà expliqué le prénom), est le nom de l'auteur (Geoffroy de Monmouth) qui a mentionné l'île d'Avalon pour la première fois. Glastonbury est le nom d'une abbaye dans laquelle les moines ont "affirmé" après recherches qu'Avalon serait en réalité "chez eux" (sûrement pour encourager des pélerinages chez eux). Je vous renvoie au wikipédia sur Avalon pour plus d'informations, j'ai eu un ou deux nœuds au cerveau pour ma part.
D'ailleurs, en parlant d'Avalon, je l'ai nommé au début "Royaume d'Été" pour faire un giga parallèle plus qu'explicite avec la malédiction d'Hiver Éternel lancé par Elsa. Pour signifier aussi qu'il s'agit d'un endroit où il fait bon vivre, où la terre est riche et nourricière (le printemps c'est les fleurs et la renaissance de la nature, mais l'été c'est les fruits bien juteux et la fertilité). Le terme d'Île Fortunée n'est pas non plus un hasard, c'est ainsi que la décrit Geoffroy de Monmouth. Normalement, il est surtout question de pommes, mais j'ai pas voulu m'appesantir sur ce détail (ce n'est pas vraiment le sujet de l'histoire). Pourtant, je me garde une porte ouverte là-dessus, j'aurais peut-être besoin de faire un jour un parallèle entre Avalon = pomme = Adam et Eve… Une idée de fruit défendu qui est goûté et apporte pourtant la connaissance… je crois que tout le monde voit où je veux en venir. On verra si ce sera utile plus tard. J'hésite encore.
Pour les titres d'Elsa : "Reine d'Avalon, Duchesse d'Arendelle, Protectrice du Royaume d'Été, Gardienne de l'Île Fortunée, Seigneure des Neuf Sœurs, et Prêtresse des Vents et Marées."
Vous savez pour les 4 premiers termes. Pour les deux autres, je vous renvoie à nouveau au wikipédia d'Avalon. Les Neufs sœurs sont des habitantes de l'île, des prêtresses et/ou des magiciennes/sorcières. J'ai personnellement tendance à faire un rapprochement avec les muses… Dans ma tête, pour le récit, et même s'il y a peu de chance que j'en parle, je vois ces neufs personnes (femmes ou hommes, je sais pas si je mélangerais, mais probablement) comme les membres les plus importants de la Cour d'Arendelle qui auraient un titre et une fonction plus ou moins symbolique lié à chaque domaine de ces muses. Comme la médecine, les mathématiques, la botanique, etc. Oui, je pense plus à des sciences qu'a des arts, en fait. Et Elsa serait la cheffe des neufs (une dixième donc, au-dessus de toutes). Pour les Vents et Marées, cela vient de Pomponius Mela (merci wikipédia) qui parle de prêtresses vierges sur l'île de Sein. des Gallicènes ayant le pouvoir de "déchaîner les vents et soulever les mers". Monmouth s'en est inspiré pour parler de ses neuf sœurs, justement.
Pour les titres et prénoms d'Anna : "Anna Morgen Thiton Camlann, Princesse d'Avalon, Duchesse de Glastonbury, Ambassadrice des Arts, Ordonnatrice de la Médecine et Bienfaitrice de la Flore."
C'était plus laborieux à trouver….. Morgen et Thiton sont des prénoms des fameuses neufs sœurs dont j'ai parlé plus haut. Pour ce qui concerne la Médecine et la Flore, j'ai là encore pompé sur les fameuses Neufs Sœurs… Je dirai, pour l'histoire, que la Princesse Anna serait l'une des neufs, celle liée à la médecine et à l'aspect curatif des plantes. Quant aux Arts, je dirai qu'Anna est tout simplement la plus grande et riche mécène du Royaume, et s'intéresse particulièrement aux artistes de son époque. D'où pourquoi elle est très intriguée par le tailleur, le stylisme étant un art. Elle n'y pense pas vraiment et n'y fait pas attention, mais si tout le monde la laisse faire un peu ce qu'elle veut, c'est aussi et surtout parce que son intérêt a permis de faire venir à la Cour de Grands Artistes qui ont enrichi et embelli le Royaume et le Palais. Un peu à la manière de François Ier qui a fait venir Léonard de Vinci. Tous les rois et reines avaient grand intérêt à se préoccuper des arts, et on ne va pas dire que ce soit le sujet de prédilection d'Elsa. Du coup, c'est plutôt le rôle d'Anna. Je me suis cassée la tête plus d'une heure pour les titres d'Anna… alors que ça a été une vingtaine de minutes pour Elsa…
Pour les titres et prénoms d'Arthur : "Arthur Lucius Castus Pendragon, Roi de Loegrie, Duc de Camelot, Unificateur des peuples du Royaume de Logres, Parangon du monde chrétien, Vainqueur du Combat des Titans et Seigneur de Guerre du monde connu."
Et oui, lui aussi y a eu droit ! Je ne sais pas si vous l'aviez noté dans un précédent chapitre. (petite digression, mais j'ai bien ri quand j'ai lu que Morgause ou Morgane, censée être la sœur d'Arthur selon les versions, se fait aussi appeler Anna - mais je ne vais pas utiliser ce lien, ce serait compliquer encore les choses et je risque de m'embrouiller, en plus d'embrouiller les lecteurs…). J'ai longuement hésité à lui donner le second nom "Artio", de la déesse Ourse dans la mythologie celtique. Mais ce serait une répétition, puisque Arthur signifie déjà "ours". Je me garde la possibilité d'utiliser ce lien avec cet animal plus tard, il y a là une source presque infinie de rapprochements à faire avec des contes… J'y réfléchirai le moment venu, je ne suis pas encore certaine de ce que je vais en faire. J'ai préféré Lucius (le rapprochement avec le père de Draco était beaucoup trop tentant, même s'il n'y aura pas vraiment de lien à faire, ça me faisait juste rire) et Castus, en référence à Lucius Artorius Castus : un chevalier romain qui serait identifié au roi Arthur, même si le lien est très "fragile" (dixit wikipédia, mon meilleur ami). Roi de Loegrie, on sait. Duc de Camelot, c'est évident. Unificateur des Peuples du Royaume de Logres, c'est évidemment lié à la légende arthurienne, puisqu'il est celui qui a réuni les divers peuples de Grande-Bretagne et Bretagne sous une même bannière, construisant ainsi un empire. Parangon du monde chrétien, est également évident. Je ne vais pas vous faire l'affront de vous l'expliquer.
Vainqueur du Combat des Titans, ou Seigneur de Guerre du monde connu, c'est un peu plus compliqué… Le "vrai" Arthur n'aurait jamais été roi mais nommé dux bellorum qui signifie "chef de guerre". Il était aussi appelé amerauder, qui signifie "empereur"... Et puisqu'il "gouverne" les différents "rois bretons" après les avoir unis, c'est logique. Du coup, normalement, on ne devrait même pas l'appeler "Roi Arthur" mais "Empereur Arthur"... Mais ça ne collait plus avec la légende qu'on s'imagine dans l'inconscient collectif. Et avec les différents combats de sa légende, j'ai préféré insister un MAX sur son côté martial. J'ai donc fait de Loegrie la plus grande puissance militaire de cet univers (et c'est pas peu dire, je l'imagine vraiment comme une puissance qui ferait trembler tous les pays du monde à l'idée de se frotter à ces armées), à l'image d'Avalon qui est la plus riche et fertile. Je vous laisse imaginer le duo de choc qu'ils représentent ensemble. Séparés et juste alliés est déjà assez terrifiant pour le reste du monde, alors liés comme ils vont l'être après leur nouveau contrat… ça va faire des remous, et pas du tout être au goût de nombreuses autres contrées. En plus, j'adore le parallèle que ça donne entre Harry, le héros, le vainqueur, le survivant capable de lutter contre l'un des plus grands mages noirs de l'Histoire. Le putain de guerrier, un vrai héros de shônen ! Ça lui va comme un gant ! Pour Draco, le lien avec Elsa et Avalon est plus complexe, même si existant. C'est plus par rapport à l'image que je me fais du personnage et ce que j'ai voulu écrire pour lui… Mais en parler serait trop prématuré pour le moment. Bref ! Cela explique donc le "Seigneur de Guerre du monde connu". Pour le "Vainqueur du Combat des Titans"... c'est une pure invention de ma part. Et j'y reviendrai BEAUCOUP plus TARD dans l'histoire. C'est même encore un peu flou pour le moment… Disons que je me suis fait une ouverture pour la suite, la rangeant soigneusement dans un coin de ma tête pour la ressortir quand ça m'arrangera. Je fonctionne beaucoup comme ça en écrivant : j'ai une trame globale, mais je brode énormément en écrivant, au point de parfois créer des retournements de situation ou des liens quelconque au tout dernier moment, au point de m'appuyer sur ces inventions de dernier moment pour en faire finalement des événements très importants par la suite… Ouais… beaucoup de trucs sont pas du tout prévus. Je vous expliquerai plus bas.
Pour le nom Ysengrin, peut-être que certains ont reconnu le loup du "Roman de Renart" ? Normalement, il est son "ennemi", mais je n'ai pas voulu l'écrire ainsi. Un loup-garou et le parallèle avec un "méchant" d'une histoire est facile, et je souhaitais plutôt l'adoucir et lui donner plus de profondeur… Certes, le personnage ne va pas être très présent dans cette fiction, il est loin d'être un protagoniste principal. Et non, je n'ai pas oublié qu'Anna a été mordu, mais les pleines lunes arrivent tous les 29 jours… et nous n'avons pas encore atteint le 29ième ! Ysengrin va avoir son rôle à jouer sur ce sujet, évidemment, de même que pour d'autres événements (j'en dis pas plus, sinon je spoil). Cependant, il n'aura pas une grande place dans le récit, tout comme Anna : on suit Arthur et Elsa en priorité. Bref : normalement, "Ysengrin" est donc un loup dupé et ridiculisé, que Renart fait cocu en couchant avec sa femme louve… Charmant… En plus, il est l'oncle de Renart… Autant vous dire que j'ai pas du tout envie d'écrire ça. Mais je me laisse une ouverture, comme toujours. J'ai deux trois idées, à voir si elles servent le récit ou non… En fait, dans un sens, il y a grave moyen de faire une seconde histoire avec Ysengrin, Anna et un autre personnage, mais ça me ferait partir beaucoup trop loin, et j'ai déjà tellement à raconter que je ne vais pas prendre ce risque. Ce serait trop lourd à gérer pour une simple fanfiction. Je pars déjà assez loin comme ça…
"Fabliau" est évidemment un pays faisant référence aux Fables, comme les Fables de la Fontaine, où les personnages sont des animaux dont l'image qu'ils véhiculent rappelle des personnes ou des titres (lion = roi, par exemple). D'où le fait que là-bas, les habitants sont des métamorphes capables de contrôler leur forme animale. Je ne suis pas certaine de faire aller Harry et Draco là-bas… Ils n'y ont pas grand intérêt. Mais sait-on jamais… En tout cas, je n'ai pas d'idée particulière pour ça. Pour le moment, cette contrée lointaine est juste là pour enrichir le récit, et montrer que l'univers est étendu.
Passons aux pirates… Hindbad ! Il est un peu compliqué celui-là… Au début du récit de Shéhérazade, il est le pauvre livreur qui se plaint de sa pauvreté et que le riche Sinbad entend pour ensuite lui raconter son histoire et ses voyages. Hindbad est en fait un homonyme de Sinbad. Il pourrait y avoir un parallèle entre "Hindbad le terrien" et "Sinbad le marin", mais je n'ai pas voulu l'appliquer. Par contre, je compte bien en faire un personnage très lié à Sinbad ! J'ai déjà écrit ce lien dans un prochain chapitre. Il est le quartier-maître, le second, et le bras droit du Capitaine, mais également plus que cela encore. Hindbad est le seul qui tutoie Sinbad et le traite familièrement. Dans mon récit, Sinbad doit avoir environ 30 ou 35 ans (un peu plus ou un peu moins), et Hindbad serait plutôt âgé entre 50 et 60 ans… je dirais 55 ans, pour couper la poire en deux. Pour l'époque, c'est très vieux !
[[D'ailleurs ! petite digression sur les âges : Arthur aurait la petite trentaine (32/33 ans) / Elsa aurait un peu plus de 25 ans (environ 26, je dirais) / Lancelot aurait 38 ans / Sinbad 35 ans. Non, leur personnage n'a pas du tout le même âge que leur vrai eux de la vie réelle.
Autre digression pour le cas Lancelot / Elsa / Galahad / Perceval : Lancelot a environ 10 ans de plus qu'Elsa, comme il lui a dit quand il a parlé de leur enfance près du lac. Quand elle avait 5 ou 6 ans, il en avait environ 15. De même, je rappelle qu'il est le père de Galahad (j'expliquerai comment et avec qui bien plus tard), ce qui m'a posé de gros soucis… Je ne voulais pas que Neville ait 40 ans non plus, même si du coup, il s'en rapproche pas mal… Et Galahad étant chevalier de la Table Ronde, il ne pouvait pas avoir 10 ans… Et il faut savoir que Perceval est le plus jeune ! Donc Galahad devait être plus âgé… Du coup ! Après calculs, voilà ce à quoi j'ai abouti : Lancelot a eu Galahad à 18 ans. Lancelot a actuellement 38 ans. Donc, Galahad a 20 ans. Perceval, lui, a 18 ans. Et du coup, Lancelot a 12 ans de plus qu'Elsa (38 ans pour Lancelot, 26 ans pour Elsa). La jeunesse de Perceval est voulue, ça accentue sa candeur et sa naïveté, c'est l'âge où on tombe amoureux du premier regard sans problème (avec la maturité, on est plus réfléchi). Mais il reste un chevalier (pour l'époque, à 18 ans, c'est pas déconnant) qui a déjà remporté quelques victoires, mais dont le palmarès qui construira sa grande légende se fera plus tard. Du coup, je le décris quand même comme grand, musclé, barbu, jeune et beau (n'imaginez pas celui de Kaamelott la série, RIEN À VOIR. Mon côté "jeune fille qui fantasme sur les beaux mecs" - même si j'aurais dû avoir passé l'âge depuis longtemps - a envie de s'imaginer un jeune Brad Pitt brun. Mais c'est pas obligé, je vous laisse vous faire votre propre version avec sa description). Fin des digressions]]
Retournons aux pirates : Haroun et Amin. Je me suis contentée d'ouvrir la page wikipédia de Sinbad, pour chercher des prénoms. Zéro originalité, je l'avoue. Haroun est donc le calife de Bagdad, de l'époque de Sinbad, de la dynastie des Abbassides. Et Amin, qui est le fils d'Haroun… J'ai dû naviguer sur quelques pages wikipédia pour le trouver… Je n'ai pas voulu donner d'autres noms aux autres pirates pour le moment. Déjà, pour ne pas perdre le lecteur avec d'autres noms à retenir. Ensuite, parce que le wikipédia de Sinbad le marin est PAUVRE en prénoms ! Si je dois en donner d'autres, il va me falloir ouvrir une liste des prénoms arabes et piocher au hasard, et j'ai pas envie… Pour le moment, l'équipage n'est pas assez important pour que cela soit nécessaire, alors je vais rester ainsi autant que possible. Hindbad, le quartier-maître, personnage notable avec une certaine importance / Amin, le petit mousse roux (oui, je sais, sa couleur de cheveux est étonnante… j'y ai pensé après coup et c'était trop tard) qui est facilement identifiable et aura son petit rôle / et Haroun, qui finalement, est un peu celui qui représente tous les autres, mais qui est nommé car il est celui qui a eu le plus un coup de cœur pour Elsa (pas amoureux, juste admiratif).
Allons cette fois-ci faire un tour rapidement du côté du Nain Tracassin. Celui-là, c'est simple : il a énormément de noms différents ! Je lui en ai fait dire quelques exemples pendant ses dialogues au chapitre précédent, mais il y en a encore moult autres ! Si vous êtes curieux, allez voir le wikipédia le concernant ! C'est amusant. Et oui, certains ont bien reconnu Rumplestiltskin ! L'orthographe n'est pas facile, mais c'est bien comme cela que ça s'écrit. (bien joué AngeLunaBlack !) Vous vous en doutez, pas de surprise alors je ne vais pas faire de mystère : c'est son vrai nom ! Qu'il prend bien garde à ne pas donner. Certains doivent déjà se douter pourquoi. Et puis, c'est un peu la base de son conte, alors… Vous verrez au chapitre prochain. Dans tous les cas, vous pouvez être SÛRS qu'on va en re-entendre parler. Il est un personnage phare de ce récit qui aura une giga importance, comme on peut déjà le déduire avec ce qu'il dit et ce qu'il fait. En plus, il est extralucide, et il voit l'avenir, comme il l'a dit. Donc j'adorerai savoir si certains font quelques conclusions par rapport à son discours. Il y a des mots-clés qui annoncent jusqu'au dénouement de l'histoire. Il y a pas mal de suppositions à faire, ça me rend extrêmement curieuse de savoir ce que les gens en pensent et imaginent.
Je termine ce tour des noms avec le récent arrivé : le Chat Botté ! Celui-là, il est multiple, et mélange DEUX contes ! "Le Vaillant Petit Tailleur" et "Le Chat Botté". Deux récits fort similaires que j'ai combinés pour plus de praticité. Les deux réussissent grâce à la ruse et aux entourloupes, les deux finissent par épouser une princesse (même si c'est plutôt le maître du chat botté, nommé le marquis de carabas, mais je ne voulais pas écrire un chat qui parle, surtout si je voulais qu'il soit un personnage du vrai monde, donc j'ai combiné ces deux-là aussi). Et TADAM ! En vrai, il est donc le fameux Kristoff, du dessin animé Disney de la Reine des Neiges. Et son nom de famille Sturluson, m'a permis de faire le lien avec les animaux en sa compagnie ! Sven reste le renne du dessin animé, pas de surprise. Mais qui à reconnu Hugin, Munin et Ratatosk ? Ils font partie de la mythologie nordique. J'ai choisi cette mythologie par rapport au fait que la "Reine des Neiges" se situe plutôt au Nord de l'Europe, et est très proche de la mythologie celtique dont est issu Avalon et le Roi Arthur. Ça permettait de boucler la boucle, et le lien "Reine des Neiges" / "Légende Arthurienne".
Donc : Hugin et Munin sont les corbeaux d'Odin. Ils parcourent les Neuf Mondes de la mythologie nordique et rapportent ensuite ce qu'ils ont vu en chuchotant à l'oreille d'Odin le soir, sur ses épaules. Donc des messagers. Donc ceux qui vont livrer les messages de l'espion Chat Botté. (L'histoire du pipeau, j'y reviendrai bieeeeeeeeeeeeen plus tard. Mais là aussi, c'est pas un hasard). J'en ai fait un noir et un blanc pour qu'on les reconnaisse plus facilement. Évidemment, le blanc sera celui qui est le plus lié à Elsa, histoire de cohérence des gammes colorées. Ratatosk est l'écureuil d'Yggdrasil, qui entretient la discorde entre Nidhögg et Veðrfölnir (merci le copié collé). Donc l'emmerdeur numéro un ! Il y aura beaucoup à sur ces animaux, on commence à peine à les voir et à effleurer leur légende. Rassurez-vous, on va approfondir tout ça plus tard. Soyez patients, ça va prendre du temps. Et non, par contre, Kristoff / chat botté / vaillant petit tailleur ne sera PAS Odin… Faut pas pousser non plus.
Et donc, Sturluson : tout bêtement el famoso Snorri Sturluson ! L'homme qui a écrit l'Edda, rien que ça ! C'est lui qui a transcrit et compilé la culture orale de la mythologie nordique au XIIIième siècle. Un grand homme dont s'est inspiré des tas et des tas d'autres écrivains. Il fait partie de ceux qui ont posé les bases de la fantaisie. Tolkien lui-même s'en est inspiré pour son célébrissime "Seigneur des Anneaux", qui est à son tour devenu l'œuvre emblématique du genre. Bref, j'ai pas cherché longtemps pour trouver ce nom. Pour moi, pour le "maître" de Hugin, Munin et Ratatosk, ne pouvait être que lui.
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Je vais m'arrêter là, je pourrais continuer encore longtemps, mais cette note est devenue beaucoup trop longue. Je n'ai même pas pu aborder le sujet du protocole ultra rigide de la Cour, de ce qui passe ou non pour les insultes (j'ai mis du temps à travailler tout ça, essayant de faire expliquer par Neville le comment du pourquoi, essayer de ne pas rendre ça trop gros ou ridicule, et rester crédible… c'était pas facile, et j'ai beaucoup hésité). Et il y a aussi ce pauvre Perceval qui, personnellement, me fais mal au cœur… Mais voilà, il va bien falloir que je m'arrête un jour !
Guest : Je suis vraiment contente que tu aimes cette histoire ! J'espère que cette suite te plaira. C'est un petit moment de pause avant de redémarrer, mais il était nécessaire. A très bientôt j'espère !
À bientôt !
Ashu.
