Guest : Drago t'avait prévenu, pourtant : A Azkaban, pas d'espoir...
En passant : C'est adorable de souligner ça ^/^ Je suis pas sûre que ce soit ce que j'ai écrit de meilleur, mais j'aime bien quand on ne sait pas trop à quel point les choses sont vraies ou imaginées par les persos qui s'auto-convainquent de trucs
cattleyahana : "il me semble qu'on dit qu'il est plus difficile de pardonner à ceux qu'on aime" Tu as tout résumé ^^ Drago est un petit con traumatisé, et il a beau ne pas être stupide, il a énormément de mal à s'auto-analyser...
Aucun d'eux n'aurait parié une noise là-dessus, et pourtant, ils parvinrent à s'endormir.
Drago dormit même bien. Il se réveilla deux ou trois fois, étouffant à cause du souffle chaud de Harry sur son visage, mais se rendormit presqu'aussitôt, bercé et rassuré par le son de sa respiration. Lors de son véritable réveil, il refusa toutefois de laisser le sommeil le prendre à nouveau.
Le corps brulant de Harry était à demi affalé sur le sien, et son visage était caché dans le creux de son cou. Il n'aurait pas pu l'observer, de toute façon : Les torches du couloir n'étaient pas encore allumées. Il pouvait quand-même sentir son odeur, écouter son souffle, caresser ses cheveux, et profiter de cette chaleur presque excessive. C'était étonnant comme le corps de Harry pouvait être brûlant et ne produisait pourtant que du froid quand il se laissait aller. Drago ne se l'expliquait pas.
Au bout d'un moment, il se mit à se demander si le rythme de sa respiration n'avait pas changé, et se demanda s'il était possible que le Survivant soit réveillé mais fasse semblant que ce ne fusse pas le cas pour ne pas avoir à sortir du lit. Ça ne ressemblait pas à la façon de faire de Potter, qui affrontait les problèmes et assumait les conséquences de ses actions, mais c'est ce que Drago aurait fait, à sa place.
Et puis les torches s'allumèrent finalement, et Potter émit un grognement rageux avant d'enfouir encore d'avantage son visage dans son cou. Et Drago eut un pincement au cœur en réalisant que sa confiance en lui n'avait toujours rien de solide :
C'est Harry qui avait dormi contre lui, mais Potter qui se réveillait à ses côtés.
Il ne cessa pas ses caresses pour autant : Potter était tout de même quelqu'un de bien, quelqu'un qu'il appréciait. Mais quelqu'un qui lui faisait peur, et avec qui il ne pouvait pas s'imaginer un avenir…
Au bout d'un long moment d'immobilité, il osa tout de même demander :
« Est-ce que tu comptes faire la grasse matinée ? Ça ne te ressemble pas.
– Je ne fais pas la grasse matinée, gloussa Potter sans bouger. Je profite du fait que tu sois trop gêné pour me repousser.
– Est-ce que… La dernière fois, tu as dit à Granger que tu continuais de fantasmer là-dessus. C'était vrai ? »
Le corps de Potter changea légèrement de position. Probable qu'il trouvait la question inconfortable.
« Pas sur le fait que tu me repousses ou que tu ne veuilles pas de moi, se défendit Potter sans montrer son visage. Mais oui. Pas… Pas seulement le sexe, et pas vraiment notre relation non plus… Mais t'étais là, chaque matin, à attendre. Je me posais pas de question. Ça me semblait tellement simple. Et puis je suis un mec. Bien sûr que le sexe véritable me manque.
– Je ne comprends pas pourquoi tu me réponds honnêtement, avoua finalement Drago. Tu aurais plus de chances de me convaincre de rester si tu mentais.
– Il y a encore une chance de te convaincre de rester ?! » Potter se redressa d'un coup pour fixer Drago avec des yeux écarquillés et un air haletant.
« Non, s'empressa de le corriger Drago. Je m'interroge, c'est tout.
– Je le droit d'insister ? Je me suis dit que ça ta brusquerait si j'essayais d'argumenter et que tu aurais encore plus envie de partir, mais ça change tout si ça te dérange pas. J'ai le droit d'essayer de te convaincre de rester ?!
– Ça ne changerait rien, ma décision est prise. » Il repoussa doucement Potter pour sortir du lit, mais celui-ci s'effondra à nouveau sur son corps, le clouant au milieu du matelas. L'espoir. Toujours ce satané espoir qui décevait et faisait souffrir. L'espoir avait fini par lui porter chance, mais il aurait dû insister davantage pour que Potter perde cette mauvaise habitude.
« Ça me va, prétendit Potter. J'ai jamais abandonné devant une cause perdue ! J'ai des tas d'arguments. Reste. »
Drago attendit un moment.
« J'attends tes arguments, grinça-t-il finalement en souriant malgré lui.
– Reste. Je t'aime.
– Ce n'est pas un argument.
– Reste. Tu m'aimes.
– Non. Et je voudrais que tu arrêtes de le prétendre.
– Comme tu veux. Dans ce cas, reste : A partir d'aujourd'hui, tu auras un jour de congé chaque semaine que tu pourras passer dans ce lit avec des bouquins, du chocolat chaud, un plaid en pilou, et moi pour te divertir. Ça commence maintenant. »
Drago gloussa : « Non, j'ai du travail.
– Sérieux ?! s'offusqua Potter en se redressant à nouveau. Aujourd'hui ?! Tu veux faire quoi ?! Non, ne réponds pas ! T'es viré de toute façon ! »
Drago riait doucement. Il fallait rédiger une offre d'emploi pour que Potter puisse engager un nouveau secrétaire. Il avait repoussé la corvée jusqu'au dernier moment : Signer le document reviendrait pour le Directeur d'Azkaban à mettre un terme à une autre de leurs relations, et il ne voulait pas être présent quand ça arriverait.
« Kenaran m'a dit que je pouvais mettre des conditions au fait de travailler avec lui. Je préfère noter tout ça pour ne rien oublier. Je dois m'occuper de mon père aussi. Et puis je voulais voir Nguyen avant de partir. Et Mullan. J'ai des tas de choses de prévues.
– Tss. » Potter s'extirpa du lit avec son air boudeur et puéril.
Le jogging était déformé au niveau de l'entrejambe. Cette vision aurait pu être comique, mais elle avait quelque chose de triste qui fit soupirer Drago. Potter réenfila sa chemise de la veille, sa cravate, ses lunettes… Il tendit ensuite une main à Drago pour l'aider à sortir du lit, et celui-ci accepta, amusé de nouveau. La manche de sa robe se souleva un instant, révélant la manchette de cuir avec la baguette d'aubépine.
« Finalement, tu l'as jamais réutilisée… fit-il remarquer.
– Non. Tu veux la garder ? » proposa soudain Drago, en repensant à leur conversation de la veille sur un objet souvenir. Ça ferait un cadeau parfait : précieux, intime…
« Non. Je l'aimais bien, mais c'est pas la mienne.
– C'est la mienne, mais je ne l'ai jamais beaucoup aimée, admit Drago en tripotant le bois.
– Vraiment ?! Pourquoi ? »
Il haussa les épaules. « Manque de puissance. Manque de précision. Manque d'obéissance.
– Et bien qu'est-ce que ça aurait donné si j'avais eu une bonne baguette entre les mains au moment de combattre Voldemort, n'est-ce pas ? Parfois ma supériorité m'étonne moi-même. »
Drago fronça les sourcils. « Tu avais une bonne baguette. La Baguette de Sureau. Non ?
– Non, Voldemort avait la Baguette de Sureau. Moi j'avais celle-ci. C'est avec elle que je l'ai désarmé. Le dernier sort qu'elle a lancé est celui qui a mis fin à la Guerre. »
Drago resta bouche bée, silencieux, stupide. Il n'avait pas vu les choses de cette manière. Soudain, le bout de bois fixé à son bras lui parut plus précieux et effrayant que jamais.
« C'est le crin de licorne, expliqua alors Potter. Forcément qu'elle ne répondait pas bien si tu la forçais à lancer des Doloris et ce genre de conneries. Mais c'est une bonne baguette, vraiment. Essaye sérieusement de l'utiliser pour un Patronus, par exemple, et tu verras la différence.
– Elle… Ça ne fonctionnera pas : Elle a changé d'allégeance, elle…
– Mon pauvre, t'y connais vraiment pas grand-chose en baguettes. C'est le crin de licorne, je te dis : Elle a un cœur fidèle. Elle attend que ça, de travailler à nouveau avec toi. Arrête juste de lui faire faire des trucs dont t'as pas envie. Si t'en as pas envie, elle en aura pas envie non plus. »
Difficile de lui donner encore moins envie d'utiliser cette baguette. Sa place était dans un musée, pas entre ses mains.
·
En réalité, le bébé albatros avait toujours été adorable, et Drago ne savait plus trop ce qui l'avait poussé à le trouver laid, la première fois. C'était vrai qu'il était empoté, maladroit, et que ses proportions ne ressemblaient pas à celles d'un oiseau, mais son duvet désormais blanc était extraordinairement doux et chaud. On aurait dit un petit nuage qui pépiait sans cesse.
Vif-Eclair était vexé de nouveau. Il lui tournait le dos de façon ostentatoire. Pourtant, cette fois-ci, Drago était venu les informer de son départ en personne, s'expliquer, se justifier… L'albatros lui avait donné un coup d'aile, comme lors de leurs premières rencontres, et avait refusé les friandises.
D'autres avaient été un peu moins capricieux.
Drago s'était assis sur les rochers. Il avait pourtant encore du travail à faire, mais avait besoin d'une pause. Sa conversation avec Mullan l'avait épuisé : Il lui avait montré l'offre d'emploi qu'il avait rédigée pour trouver un nouveau secrétaire à Potter, mais elle avait prétendu qu'il avait occupé le poste plus longtemps qu'elle, et que son opinion avait donc peu d'intérêt.
« Est-ce que vous pourrez expliquer à Lucile pourquoi je suis parti ? J'aurais aimé lui dire adieu en face, mais…
– Veux-tu que je lui dise adieu à ta place ou bien que je lui explique tes raisons ? Ce sont deux choses très différentes. Tes raisons, je ne les connais pas. »
Drago avait énuméré les avantages du poste, la reconnaissance, la sécurité… Mullan l'avait toisé avec sa moue de bouledogue et ses yeux méprisants.
« Tu penses qu'elle est capable de comprendre ce genre de concepts ? Tu me parles de conneries humaines.
– Peut-elle comprendre la notion de liberté ?
– Tu penses sincèrement que tu seras plus libre là-bas que tu ne l'es ici ? Tu veux que j'explique à une créature qui possède l'océan que tu préfères vivre dans un aquarium plutôt que dans un bocal ? »
Drago avait grogné, puis demandé à Mullan si elle pouvait au moins accepter de lui transmettre une lettre de sa part, s'il lui en rédigeait une. Elle avait acquiescé, mais il avait senti tout son dédain dans son regard.
Après quoi, il ne s'était pas senti l'énergie d'aller voir Nguyen, et s'était donc rabattu sur les albatros. Un public plus conciliant, avait-il espéré. Jusqu'au camouflet de Vif-Eclair.
« Si tu pouvais parler, tu me dirais qu'il est stupide de quitter une cage pour une volière ? Que je devrais directement viser le ciel ? C'est facile pour vous ! Moi je fais avec ce que j'ai ! Je n'ai pas d'ailes ! »
Autant parler à une pierre.
« Je pars demain. Si tu veux qu'on se quitte comme ça, après tout, libre à toi. Il y a des tas d'autres oiseaux en Europe. »
Coup d'œil méprisant et caquètement de mise en garde.
« Non, bien sûr. Aucun qui soit à ta hauteur… »
Vif-Eclair gonfla fièrement les plumes de son poitrail avant de reprendre sa position orgueilleuse, malgré les claquements de becs jaloux du reste de la colonie. Drago calma les esprits en balançant une poignée de friandises à la volée.
Plus loin sur la plage, il y avait le Détraqueur. Il n'était coincé ni dans un bocal, ni dans une cage, mais dans un espace plus petit et déprimant encore, garrotté dans une magie qui l'empêchait même de respirer… On le voyait mal, d'ici : Il y avait les gardes, il y avait Kenaran, il y avait le Dottore spécialiste de la legilimancie, et encore deux ou trois nouveaux, et tous lui tournaient autour, le torturaient de leur présence, de leur vie, de leur excitation, de leur exaltation, qu'il pouvait sentir mais auxquelles il ne pouvait plus gouter…
Drago reçut un léger coup sur le flanc quand Vif-Eclair vint finalement le pousser pour libérer de l'espace sur son rocher, et s'installer contre sa cuisse. Il fit passer le pan de sa cape de morse par-dessus l'oiseau pour partager sa chaleur avec lui.
Il pouvait imaginer sa détresse d'ici : Sa faim, toujours, toujours, toujours, mais aussi sa peur, son incompréhension, cette sensation qu'aucune fatalité ne viendrait mettre fin à son calvaire.
Une nouvelle fois, il prononça le sort à voix basse.
La forteresse était assiégée.
Des centaines de libellules, délicates et brillantes, tentaient de s'immiscer entre les pierres noires, de forcer le passage. Les murs étaient immenses, solides, redoutables, et les créatures aussi fragiles que des courants d'air… Et pourtant, elles gagnaient du terrain : On pouvait voir le sang, ou le pétrole, ou la mort, qui goutait de chaque minuscule ouverture.
C'était caricatural, presque manichéen : Une véritable illustration d'un combat du bien contre le mal où le camp qu'il fallait choisir ne faisait aucun doute…
Sauf que le mal ne pouvait que se défendre.
Et qu'il était désespéré.
