L'HÉRITAGE NON DÉSIRÉ

Chapitre 25

Attention, ce chapitre contient des notions qui pourrait heurter la sensibilité de certaines personnes : notions d'esclavagisme, de violences physiques et de violences infantiles.


Bordure extérieure, Zygerria, complexe minier, milieu de matinée


DIN DJARIN

A force de jouer au Kubaz infirme, stupide et maladroit en bousculant une nouvelle fois Mayfeld, Din fut renvoyé de la visite sur ordre du guide Zygerrien.

Migs ne put intervenir sans que cela ne paraisse suspect. En revanche, cela eut pour effet de stopper le châtiment corporel de la Twi'lek et d'attirer l'attention de Xi'an sur Mayfeld. A sa manière de se redresser, il était évident qu'elle l'avait reconnu, mais elle ne dit rien. Naturellement, elle ne put reconnaître Din sous son déguisement. De son côté, le Mandalorien était déjà en train de revoir mentalement son plan de sauvetage : une combattante aguerrie comme Xi'an serait un atout. Il ne serait pas compliqué de la rallier à l'évasion et encore moins au meurtre de plusieurs esclavagistes Zygerriens contre qui elle devait avoir beaucoup de griefs.

Il restait encore à voir comment la libérer en même temps que les autres… Din n'avait eu qu'un aperçu de la totalité des esclaves de la mine. Il n'avait vu que la moitié du groupe d'adultes qu'il était venu secourir, l'autre moitié devant se trouver quelque part dans les mines de métal. Groupe auquel il fallait désormais inclure un +1. Et, surtout, il n'avait pas la moindre idée de l'endroit où pouvaient se trouver les enfants ou du traitement qui leur était fait. Sous couvert de sa fausse identité, Migs avait tenté d'amener la Zygerrienne à le renseigner, mais elle avait systématiquement omis de répondre en changeant de sujet. L'ex-impérial ne pouvait pas non plus se montrer trop insistant pour ne pas éveiller les soupçons à son encontre. Ça ne plaisait pas au Mandalorien le moins du monde. Mentalement, Grogu lui avait aussi fait part de ses inquiétudes à ce sujet.

La seule chose positive de ce renvoie fut qu'un des gardes l'escorta en passant par le chemin le plus court pour rejoindre le palais royal. Ils prirent donc l'un des monte-charges à proximité de la mangeoire et ne tardèrent à arriver sur la place du grand marché, situé juste au-dessus, comme Din l'avait soupçonné. Depuis le sous-sol, ces monte-charges étaient le point de départ chemin le plus court vers la surface et surtout, du trajet le rapide vers l'aire de stationnement des vaisseaux. La zone était relativement exposée, mais avec une mutinerie d'esclaves dans les mines et une diversion, à mettre au point dès que possible, il serait faisable de guider ses cibles jusqu'à la navette impériale de Migs…

S'ils parvenaient à embarquer au niveau de l'aire de stationnement I5, le Mandalorien ne doutait pas de leur fuite. La navette était rapide grâce à sa conception d'origine et elle avait été boostée par Peli Motto avant de quitter Tatooine. Mais, cela ne ferait pas tout… Le premier problème était de trouver les enfants, le second de faire sortir un groupe d'une trentaine de personne, en se comptant avec Mayfeld et Grogu, et le troisième était de rejoindre la navette.

Il y avait beaucoup de vies sur les bras. Par ailleurs, dans un coin de sa tête, il imaginait mal libérer uniquement les résidents de Nevarro et Sorgan. Il devait faire quelque chose pour les autres esclaves, mais comment ? Et, surtout, il avait parfaitement conscience qu'il ne pouvait sauver la vie de tout le monde. Il y aurait des blessés et probablement des morts. Dès que cette pensée semblait s'imposer à lui, il se mettrait à réciter les préceptes de Mandalore. Il ne voulait pas que Grogu puisse être angoissé. Si seule sa vie avait été en jeu, ou celle de Migs, Din aurait été relativement serein et aurait compté sur sa capacité à improviser. Il ne craignait pas d'être blessé et peu lui importait que Mayfeld le soit. Il se préoccupait davantage du fait que ces blessures potentielles, de l'un d'eux, ne mettent en péril la réalisation de la mission.

Naturellement, la vie et le bien-être de Grogu était en haut de la liste de ses priorités. A présent, il faisait attention à lui-même pour le bien de son fils. Néanmoins, il faisait de mieux en mieux confiance en la capacité de son enfant à survivre. Autre étrange pensée, qui lui traversait régulièrement l'esprit, et ce depuis qu'il voyageait avec Grogu, était celle qui l'amenait à faire confiance à d'autres. Avant Grogu, il n'avait compté que sur lui. Même ses frères et sœurs de la Tribu de Nevarro n'entraient pas dans ses calculs pour sa probabilité de survie. Puis, Grogu l'avait sauvé du Mudhorn. Et, Din Djarin, qui ne comptait que sur lui, s'était mis à avoir confiance en d'autres, à hauteur de leurs compétences, pour sa vie ou pour une mission : Grogu, Kuiil, IG-11, Cara, Karga, Ahsoka, Luke, Boba, Fennec… même Migs, dans une certaine mesure.

C'était aussi l'une des raisons qui l'empêchait de se baigner des les eaux vivantes de Mandalore. S'il était vraiment Mandalorien, pourquoi avait-il plus confiance en des « étrangers » qu'en ses frères et ses sœurs d'armes ?

Son escorte le laissa à l'entrée de la chambre, en lui indiquant que des repas lui seraient fournis. Commença alors une attente de près d'une dizaine d'heures, pendant lesquelles Din s'évertua à mettre à jour le plan, à revoir les préparatifs de l'évasion et à tenter d'imaginer tout ce qui pourrait mal se passer en attendant le retour de Migs. Beaucoup de choses pouvaient mal se passer…


Bordure extérieure, Zygerria, palais royal, milieu de nuit


DIN DJARIN

La nuit était déjà très avancée, pourtant Migs n'était toujours pas revenu. S'il avait été démasqué, des gardes seraient déjà venus chercher Din. Aussi, ce dernier continuait de faire profil bas. Enfin, presque.

A l'intérieur de la suite, il portait toujours son déguisement mais, se sachant non observé, il ne se tenait plus de façon voutée. Un garde montait la garde devant la porte depuis son retour dans la matinée et lui avait déposé un déjeuner et un dîner. Si quelqu'un d'autre que Mayfeld devait entrer dans la chambre, il devait pouvoir donner le change le temps de pouvoir analyser la situation. Compte tenu de l'heure tardive, Din avait autorisé Grogu à dormir.

Durant la visite du complexe minier, il avait suffisamment écouté pouvoir savoir à quelle heure les esclaves dinaient et à quelque heure il était enfermé pour la nuit, tous ensemble, dans une fosse humide et sombre. Il n'y avait que ceux qui étaient à l'isolement et les enfants qui n'y dormaient pas. A moins d'un soulèvement dans la journée, la Twi'lek Xi'an était la seule à être isolée des autres esclaves. Aussi, depuis plus de deux heures, Din faisait régulièrement grésiller le communicateur qu'il avait caché dans la tunique de Caben, l'un de fermier de Sorgan.

Les grésillements, qu'il faisait avec son communicateur, étaient en réalité un langage codé de la guilde des chasseurs de primes. Code qui demandait un contact lorsque la situation de la personne serait propice à une communication orale. Karga connaissait ce code. Si les esclavagistes avaient trouvé le communicateur, ils seraient en train de chercher l'origine de l'objet et fouilleraient en particulier les personnes extérieures à leur peuple. Si un simple esclave avait trouvé un communicateur fonctionnel, il s'en saurait servi immédiatement. Si Karga était en possession, il conserverait le communicateur et attendrait le moment opportun pour répondre. Cette hypothèse était la plus probable. Din se contentait donc d'indiquer que, de son côté, la voie était dégagée.

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Le Mandalorien déguisé sursauta en entendant un fracas à l'entrée de la suite. Aussitôt, il se voûta et alla à l'entrée. Migs était revenu, passablement éméché. A moitié vautré sur l'encadrement, il discutait avec une personne dans le couloir, vraisemblablement tout aussi éméché que lui. Din reconnut la voix de la Zygerrienne qui les guidait depuis leur arrivée.

_ Ah ! fit Migs. Kub, mon p'tit Kub. Approche.

Din approcha, et pria pour Mayfeld soit suffisamment clair dans sa tête pour ne pas trahir leur position.

_ J'ai besoin que tu ailles au vaisseau pour chercher… Chercher quoi ? demanda Migs à la Zygerrienne.

_ Je ne sais plus, dit-elle en riant. Vous là, dit-elle au garde dans le couloir. Le Kubaz doit aller chercher quelque chose d'important de leur vaisseau. Laissez-le circuler.

_ J'escorterai… commença le garde.

_ Non, non, non ! dit Migs. Si Kub part, je vais avoir besoin de quelqu'un d'autre. Tu feras l'affaire.

_ Je ne suis pas au service…

_ Maintenant, si ! dit la Zygerrienne.

_ Mais, Madame…

_ Le Kubaz fera juste l'aller-retour au vaisseau, commença la femme.

_ Faut déjà que je me souvienne de ce que je voulais… dit Migs.

_ Lorsque Monsieur Arryn enverra son serviteur à son vaisseau, je vous donne l'ordre de le laisser partir et de veiller au bien-être de notre hôte en son absence. C'est un ordre, ajouta-t-elle en titubant.

_ A vos ordres, Madame.

_ Moi, il faut que je retrouve ma chambre, dit-elle.

_ Tu veux rester ? demanda Migs. Il y a du vin de prunes azotées ici.

_ Naaan ! répondit-elle en partant, appuyée à un mur.

_ Kub ! dit Migs. Je veux me laver ! dit l'ancien impérial, tout en progressant dans la suite, en chancelant.

Din passa derrière Migs, ferma la porte sous le regard curieux du garde du couloir et la verrouilla. Contenant à peine sa colère, il alla voir Migs, debout et parfaitement stable, au centre de la pièce.

_ Tu n'es pas bien de boire ici ? demanda le Mandalorien.

_ Des années à picoler m'ont rendu assez résistant, dit Migs, totalement lucide.

_ Tu jouais la comédie ?

_ A ton avis, Mando ?

_ Tu es très convainquant…

_ Elle a essayé de me saouler avec un alcool d'ici. Vraiment très fort. Ma résistance m'a permis de boire assez pour donner le change sans être repéré, mais c'est une plante en pot qui a picolé pour moi. Elle va crever et quelqu'un finira par s'en apercevoir. Faut qu'on accélère le plan.

_ Oui, je suis d'accord. Plus on s'éternise, plus les risques sont grands. Mais, je n'ai aucune idée d'où sont enfermés les enfants.

_ A un kilomètre deux, dans cette direction. Au premier étage.

_ Sérieusement ?

_ Que crois-tu que j'aie fait toute la journée ?

_ Euh…

_ C'est vexant.

_ Pardon. Cette histoire devient de plus en plus complexe.

_ Demain, dit Migs, retour dans les mines. Tous les esclaves seront dans la salle où il y avait Xi'an, sauf les enfants. Des plus dociles au plus sauvages. Iain Arryn doit faire son choix d'adultes.

_ Et les enfants ?

_ Ils sont entrainés à part pour être des petits soldats fidèles à Zygerria. Les Zygs les envoient sur différentes planètes pour faire de l'espionnage sous couvert de mendicité et de prostitution infantile.

_ Quoi ? s'exclama Din.

_ Actuellement, ils n'ont qu'un groupe récemment arrivé et très rebelle. Ils ne peuvent les envoyer nulle part. Ils n'arrivent pas à leur inculquer « l'éducation » Zygerrienne de base. Les gamins passent leur temps à essayer de fuguer.

_ Comment on y va ?

_ Nous, on n'y va pas. Pour les punir, les Zygs privent enfants de tout contact avec un autre être. Depuis plusieurs jours, ils sont enfermés dans des cellules individuelles de deux mètres carrés, composées d'une couchette misérable, d'une fosse d'aisance et d'un point d'eau rationnée. Ils sont nourris de la même bouillie que les autres, qui leur est distribuée par un tube sortant du mur.

_ Seigneur ! C'est horrible !

_ Les Zygerriens veulent briser les gosses pour pouvoir les dresser. Dans le genre détruire pour mieux reconstruire.

_ C'est abject !

_ Ouais, donc, plus on fait vite, mieux ce sera.

_ Mais, du coup, comment on les sauve ?

_ Pour éviter toute empathie envers les gamins, la porte ne s'ouvre qu'après un temps programmé à l'avance… dans neuf jours.

_ Impossible, dit Din.

_ Mais, il y a un conduit de maintenance, assez étroit qui entre dans cette annexe des enfers, dit Migs, en sortant une clé de sa poche. Quelqu'un de petit pourrait sans soucis faire sortir les enfants des cellules et ouvrir la porte du bâtiment de l'arrière. C'est le seul moyen pour contourner la minuterie.

C'était mettre une grosse responsabilité sur les épaules de son fils…

_ Il y arrivera, assura Migs. Il est fort, vaillant et bien plus fiable que moi.

_ Ils pourront rejoindre les mines ?

_ Mieux. Ils pourront rejoindre le vaisseau directement. Attends, je vais faire un plan pour Grogu.

_ Mais, et les gardes ?

_ Grogu devra attendre qu'on commence à libérer les esclaves de notre côté. Tous les gardes vont se jeter sur nous. L'annexe, où sont retenus les enfants, est jugée suffisamment sûre pour ne pas être surveiller.

_ Les Zygerriens sont bien orgueilleux.

_ Ça fait nos affaires. Il faut qu'on fasse une diversion assez importante pour obliger les gardes autour de la navette à nous rejoindre.

_ Je n'en doute pas. Pour les autres…

Au moment où Din allait poursuivre, le communicateur émit une série de grésillement demandant une identité et indiquant que son émetteur était en prêt à discuter de vive voix. Din souleva le haut de son déguisement et approcha le communicateur de son casque de Mandalorien.

_ Tu pourras faire un effort pour deviner quel chasseur de primes est assez fou pour prendre d'assaut une planète d'esclavagiste par amitié pour toi, dit Din.

_ Mando ! s'exclama Karga. Je crois que je n'ai jamais été aussi heureux d'entendre le son de ta voix. Et oui, tu es fou. C'est de la folie de venir ici.

_ Tu auras une belle dette envers moi.

_ Et moi, ajouta Migs.

_ Qui est-ce ? demanda Karga.

_ Un autre ami.

_ Tes amis sont les miens, Mando. Encore plus s'ils risquent leurs vies pour la mienne. Comment va Nevarro ?

_ Entre les mains d'autres amis qui se font un plaisir de faire le ménage.

_ Tu as beaucoup d'amis, mon ami.

_ J'en ai peu, mais je sais les choisir. Cara est grièvement blessée, mais ses jours ne sont plus comptés.

_ Ça ne m'étonne pas. Cette petite est coriace, dit Karga.

_ C'est marrant, dit Migs. « Petite » n'est pas le mot que j'aurais utilisé pour qualifier miss trooper.

_ Tais-toi. Karga, demain, au niveau de la mangeoire et de l'abreuvoir, tous les esclaves adultes seront réunis pour un acheteur.

_ Moi, dit Migs.

_ On a trouvé le moyen de vous réunir pour vous libérer, mais pressé par le temps, notre plan n'est pas finalisé. Une idée ? demanda Din.

_ Les enfants, Mando. Ils ne sont pas avec nous.

_ Oui, on le sait. Ils seront libérés indépendamment. Quand on vous libérera, il faudra faire du remue-ménage pour que les petits rejoignent notre vaisseau.

_ Je te fais confiance pour ce genre de détail. Pour les esclaves de la mine, ils nous ont implanté à tous une microbombe. Mais, le géôlier en chef possède une sorte d'immense bâton.

_ Oui, on l'a vu, prêt de lui, pendant qu'il battait une Twi'lek. Twi'lek qu'il faudra sortir de là, Karga.

_ Reçu. Ce n'est pas un bâton ou un gourdin, c'est une télécommande grande taille pour les bombes. C'est très sensible. Ça tombe au sol et ça peut déclencher une bombe et tuer un esclave. C'est déjà arrivé. Ce type peut tuer chacun de nous en nous désignant du bout du bâton. Mais, il doit le faire un par un. Si un esclave d'éloigne du bâton, la bombe explose aussi

_ Donc, il faut lui prendre cette télécommande. C'est noté, dit Mando.

_ Par contre, reprit Karga, il peut aussi désactiver toutes les bombes en une fois.

_ Vraiment ?

_ Il y avait eu une tempête il y a quelques années, et les mines avaient été inondées. Des esclaves avaient essayé d'échapper au flot en quittant les mines et ils en sont morts. Les Zygerriens aiment chasser. Ils auraient préféré traquer les esclaves en fuite pour le jeu que les tuer. Du coup, ils ont fait installer un arrêt d'urgence sur la télécommande pour avoir l'opportunité de jouer en cas de catastrophes.

_ Dis-moi que tu sais te servir de cette télécommande ? demanda Din.

_ Naturellement ! Pour qui me prends-tu ? Je l'étudie depuis que je suis arrivé ici.


à suivre