Chapitre 26 - Là-haut
Sa barbe à papa à la main, Hermione l'emmena à la grande roue. Forcément, avec ses entraînements de Quidditch, Draco n'était pas très impressionné par les hauteurs. Ils montèrent dans leur nacelle. L'intérieur était rond, les sièges faisant le tour du pilier central. Aucune vitre ne les séparait du dehors.
Hermione hésita à s'asseoir face à Draco, puis décida de s'installer à côté de lui. Elle mordit un bout de barbe à papa et les filaments sucrés fondirent sur sa langue.
Draco l'imita, haussa un sourcil et reprit une bouchée. Leur navette commençait à s'élever.
— Alors Granger, pourquoi tes parents tenaient à nous laisser seuls ici ?
Hermione reprit de la barbe à papa.
— Pour que tu puisses voir un peu de notre monde, répondit-elle alors que Londres se révélait autour d'eux, ses fenêtres, ses réverbères et les phares des voitures illuminant la nuit. Ils voulaient que ce soit dans les meilleures conditions possibles et ils se sont dit que les meilleures conditions possibles, c'étaient sans eux.
Après un bref silence, Hermione ajouta :
— Moi aussi j'ai une question. Que moi j'arrive chez tes parents, tu es certain que ça va bien se passer ?
Draco ouvrit la bouche, mais aucun mot ne sortit.
— Je vois.
— Je ne peux pas dire que j'en suis certain, dit-il enfin sans se détacher du nuage rose qu'il tenait, je pense que oui, puisque j'ai une bonne excuse pour ta présence.
La grande roue redescendait à présent. Draco se redressa.
— À mon tour de poser une question. Qu'est-ce que tu préfères chez moi ?
Elle roula des yeux.
— Ton intelligence, je suppose. Tu ne l'utilises pas toujours à bon escient, mais c'est agréable de travailler avec toi.
Elle tapota sur la barre de la nacelle, tournée vers la ville nocturne qui se déployait à nouveau sous eux.
— De discuter avec toi aussi, admit-elle. Et… toi alors ? Chez moi ?
En dépit du vent frais qui les enveloppait, ses joues devinrent progressivement brûlantes.
— Ta loyauté, répondit Draco d'un ton traînant. Même envers moi. Tu n'es pas dans l'attente d'une occasion de me doubler, c'est presque suspect. Mais je suppose que grâce à ça je peux me reposer sur toi.
Forcément, si son entourage se constituait généralement de Crabbe et Goyle à qui s'ajoutaient Pansy, Blaise et Nott, elle voyait aisément en quoi sa compagnie pouvait sembler « reposante ».
— Ça ne te fatigue pas ? De supporter ça avec les autres je veux dire ?
— Je ne me pose pas la question. C'est comme ça, c'est tout.
Ses cheveux blonds contrastaient contre le ciel étoilé, agités par la brise. Elle retraçait les traits fins de son visage quand il releva ses yeux gris vers elle, un sourcil haussé.
— Tu as vraiment besoin d'autres amis, dit-elle.
— De toute façon, ça ne peut pas être toi, tu risquerais de succomber encore plus à mon charme.
Hermione éclata de rire.
— Aucun risque.
La grande roue revenait au sol. On leur ouvrit la nacelle. De retour dans la foule, Hermione vérifia sa montre, le cœur battant à tout rompre.
— Mes parents ne devraient pas tarder, viens.
Ils n'eurent pas à les attendre longtemps à l'entrée du parc et ils reprirent ensemble le chemin du parking, Draco un peu en retrait. Dans la voiture, il tira sa ceinture, pensif.
— À quoi est-ce que tu penses ? demanda Hermione.
— Mon père n'a jamais voulu que j'approche une voiture. Pourtant même le ministère les utilise.
En réalisant que son père ne conduisait pas vers chez eux, Hermione cacha son sourire. Ils se garèrent dans un parking désert et son père se tourna vers Draco.
— Veux-tu essayer ?
Draco hésita jusqu'à ce qu'il descende et lui laisse la portière ouverte. Hermione se posta dehors avec sa mère pendant que son père montait en co-pilote. Draco cala plusieurs fois avant de réussir à démarrer et entama quelques cercles autour du parking avec le même air concentré que lorsqu'il pilotait un balai.
— Alors ? demanda sa mère. Comment a-t-il réagi à cette soirée ?
Hermione croisa les bras.
— Positivement, on dirait, finit-elle par répondre en désignant la voiture au volant de laquelle Draco commençait à prendre confiance.
Après un instant, Hermione ajouta :
— J'ai l'impression qu'il est très seul.
— D'ailleurs, une question m'est venue pendant le dîner ; sa famille sait qu'il est ici ?
— Non.
— Il faut espérer qu'ils ne le découvriront pas, dans ce cas, dit sa mère d'un air soucieux.
Un bruit sourd suivi de cris les fit bondir. Un groupe entourait la voiture et l'un d'eux était étendu au sol. Ils devaient avoir surgi de la rangée de voitures garées et Draco n'avait pas eu assez de réflexes pour freiner.
Un des gars frappa sur le capot de la voiture et son père descendit. Draco l'imita, l'air irrité.
— Je peux savoir pourquoi vous vous êtes précipités devant moi ? lança-t-il.
Son agressivité fit monter la tension d'un cran. Son père aida un des gars à soulever le blessé et sa mère partit avec eux à la recherche d'un poste de téléphone.
Ce qui laissait Draco seul face à trois personnes énervées. Énervées par lui. Hermione approcha, une boule au ventre.
— Tu devrais changer de ton, parce qu'on dirait que tu n'es pas du tout désolé.
— Et pourquoi je le serais ? Ce n'est pas moi qui ai demandé à votre petit copain moldu de se jeter sous la voiture.
— Comment tu l'as appelé ?
— Draco, intervint Hermione.
— Moldu. C'est moi qui devrais réclamer des excuses, si vous croyez qu'il va m'avoir avec ses jérémiades…
Une droite à la tempe le projeta contre la voiture, il perdit l'équilibre et sa tête heurta le gravier. Hermione se précipita vers lui avec un cri. Sonné, Draco fit un geste comme pour récupérer sa baguette et sa main se referma sur le vide. Du sang coulait sur le côté droit de son visage.
— Pousse-toi, lança une voix derrière elle.
Elle tentait d'aider Draco à se relever quand on la repoussa sur le béton. Les mains endolories, elle se retourna. Le groupe avançait sur Draco. Les réverbères derrière eux gardaient leurs visages dans l'ombre, mais l'attitude suffisait ; ils allaient le passer à tabac. Ni son père ni sa mère n'étaient en vue.
Qu'auraient fait Ron ou Harry à sa place ? Au fond elle le savait.
Elle se releva, son corps entier lui criant de partir, et pointa un doigt vers eux. Sa main tremblait.
— Je vous interdis de l'approcher. Peu importe ce qu'il dit, ça ne vous donne pas le droit de faire justice vous-même.
Sa voix tremblait aussi.
— Il n'a pas l'air de réaliser ce que ça fait d'être percuté par une voiture, lui répondit l'un avec colère. Je vais juste l'aider à comprendre.
— Vous ne ferez rien du tout !
— Toi tu devrais vraiment apprendre à rester à ta place.
— Ma pla… ?
Un coup dans son épaule l'envoya valser, renversant le parking, elle serra les dents en attendant le choc et un bras amortit sa chute. Elle capta le parfum de Draco, les battements effrénés de son cœur et sa cage thoracique qui se soulevait à toute vitesse lui transmirent toute sa terreur.
— Hey !
C'était la voix de son père. Un soulagement sans nom l'envahit. Celui que Draco avait renversé revenait avec lui. Il dépassa Hermione et Draco pour interpeller son groupe. Pendant qu'il les fustigeait, son père aida Hermione à se relever puis récupéra un mouchoir et la bouteille d'eau dans la portière de la voiture.
Comme il revenait vers Draco pour l'examiner, Hermione se prépara au pire. Contre toute attente, Draco ne se défila pas, ne repoussa pas sa main, ni ne grimaça à son contact. Il se contenta de rester en place, raide, le regard ailleurs.
— Tu te sens étourdi ?
— Non, fit sèchement Draco.
— Ce n'est pas profond, tu n'as pas de soucis à te faire. On désinfectera en arrivant, pour l'instant n'y touche pas.
Draco haussa les épaules puis se retrancha derrière la voiture jusqu'à ce que les deux parties s'accordent pour oublier l'incident. De tout le trajet du retour, il ne prononça pas non plus un mot. Une fois garé devant la maison, son père se retourna vers Draco, une main toujours sur le volant.
— Je te dois des excuses. J'ai mal anticipé les risques lorsque je t'ai proposé de conduire et lorsque je me suis éloigné de vous.
Draco tapota le rebord de la portière sans le regarder.
— C'était à eux de présenter des excuses.
Le sang sur le côté de son visage avait commencé à sécher, formant des croûtes brillantes.
— Non. Le fait est que quand tu tiens le volant, tu es responsable. Nous étions en tort.
Le bref haussement de sourcils de Draco parla pour lui.
— Mon garçon, quand tu es en tort, la seule chose à faire est de prendre sur soi et tenter de réparer, si c'est possible. Dans notre monde quand quelqu'un est blessé, cela ne s'arrange pas d'un simple coup de baguette.
Je commence à avoir pas mal d'avance sur les chapitres que j'ai de prêts, donc je me dis que ça pourrait être pas mal de passer à deux chapitres par semaine, par exemple mardi/vendredi ou mercredi/samedi, ou même un autre duo de jours.
Vous avez une préférence ?
