Merci pour vos reviews ! Salut Karine, ô grande prêtresse...
Voilà ce que j'ai en tête pour le lieu où va se dérouler l'histoire : quelque chose près de Rians, en Provence, ça colle assez bien au reste du récit (il sera question de yacht vers la Ciotat, et d'un périple à Monaco, et au niveau des temps de trajet, on est assez raccord).
Et si on veut être plus précis.e, on peut faire un tour du côté du château de Vignelaure, à Rians...
Merci à la magique Sockscranberries, pour sa lecture bêta !
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Chapitre 4
Hermione le précéda, la démarche crispée, jusqu'au tapis de retrait des bagages. Elle se retenait de souffler, furieuse. Qu'avait-elle fait ? Bien sûr qu'elle pourrait supporter ses manières grossières au quotidien pendant un temps. Quand ils seraient seuls, elle pourrait se contenter de l'ignorer. Mais cela ne serait pas possible de se laisser traiter ainsi devant les autres, alors même qu'ils seraient persuadés qu'ils étaient en couple. Et devant sa famille, encore moins. Elle ne voulait pas qu'on la regarde comme une pauvre fille soumise, engagée dans une telle relation... faute de mieux. C'était justement une des raisons qui l'avaient convaincue de se soustraire aux manigances du Ministère, qui l'auraient casée avec un imbécile imposé en guise de mari jusqu'à la fin de ses jours.
Elle attrapa ses bagages sur le tapis roulant et s'éloigna, faisant rouler sa valise derrière elle et jetant sur son dos son sac en bandoulière, avant d'ajuster son sac à main sur son épaule. Snape récupéra sa propre valise - son unique valise - et la suivit, un sourire en coin, comme satisfait de l'effet qu'il lui faisait.
Alors qu'elle traversait la foule, la colère fut remplacée par une tristesse irrépressible quand elle songea à ce que sa famille pourrait penser d'elle, ce qu'ils lui diraient, les regards désolés qu'ils lui jetteraient. Quand elle repéra sa mère et sa grand-mère au loin, la cherchant des yeux, elle inspira profondément, comme pour se donner du courage. C'est alors qu'elle sentit une main sur son épaule et sursauta.
« Alors, nerveuse ? » lança Snape, suffisant. Il passa les doigts sous la sangle de son sac.
« Qu'est-ce que vous faites ? »
« J'imagine que les deux dames qui s'agitent en souriant sont de votre famille ? » questionna-t-il, la voix traînante.
Elle leva le regard, et vit que sa mère et sa grand-mère avaient toutes deux fini par la repérer. « Oui », répondit-elle en leur répondant d'un geste de la main avant de tourner à nouveau ses yeux vers lui. « Et ? »
« Alors, laissez-moi vous aider à porter cela... Chaton, » la taquina-t-il, en tirant légèrement sur la lanière du sac sous laquelle il avait laissé un doigt. « Ne prenez pas cet air choqué, je suis un homme serviable, » continua-t-il, moqueur. « Que diront vos proches s'ils s'aperçoivent que vous semblez surprise à chaque fois que je me montre prévenant ? »
Elle retrouva tant bien que mal une contenance. « D'accord. Merci. Mais nous les mettrons au courant de nos fiançailles uniquement quand je l'aurai décidé. » Elle fit volte-face et se dirigea à grandes enjambées vers sa mère, sa valise roulant derrière elle. Severus la suivit, chargé de son sac et de sa propre valise, d'un pas plus lent, stressé de l'imminence de la rencontre.
La jeune femme enlaça les deux plus anciennes en criant de joie, et Severus n'eut pas le loisir de comprendre tout ce que ces dernières lui disaient à propos du manque et de la joie de la retrouver enfin. L'une des deux était assez âgée, avec des cheveux courts et bouclés comme du coton, arborant un joli sourire qui ne semblait jamais devoir disparaître. L'autre n'était pas beaucoup plus vieille que Snape lui-même, et avait les cheveux longs, châtains comme ceux d'Hermione. Les yeux des deux femmes avaient la même couleur, proche de celle du whisky. Elles finirent par se tourner vers lui.
« Maman, Mamie, » commença Hermione, « je vous présente Severus ». Elles lui lancèrent un sourire, ainsi qu'Hermione, ce qui le surprit. « Severus, voici ma mère, Jane, et sa mère, ma Mamie, Judith »
Severus tendit la main vers elle, les lèvres à peine pliées en un sourire imperceptible, sans pour autant que cela ne paraisse ni sec ni stoïque, comme c'était le cas la plupart du temps. Il parut plutôt charmant et timide. « Mesdames, » il serra la main de Jane, puis celle de Judith, « enchanté. »
Jane, de son côté, parut un peu surprise alors qu'elles continuaient toutes deux de l'observer en silence, affichant toujours le même sourire chaleureux.
Severus se sentit de plus en plus nerveux. Il aurait voulu se fermer totalement et leur dire d'aller se faire voir. Mais cela n'était pas vraiment possible, n'est-ce pas ?
« Alors... vous étiez le professeur d'Hermione ? » demanda Jane.
Severus prit une grande inspiration. « Cela doit vous paraître surprenant, surtout après avoir entendu parler de moi en de si mauvais termes quand... Hermione était à l'école... »
« Oh non, elle n'a jamais parlé de vous en mal ! Non, non, » sourit Jane. Elle était vraiment enjouée, guillerette même. Sa fille avait hérité de ce trait de caractère agaçant, d'ailleurs. Enfin, elle était un peu comme cela à Poudlard. « Elle se plaignait juste que vous soyez particulièrement difficile à satisfaire, le seul professeur qui ne lui faisait jamais de compliments, et elle mettait tout en œuvre pour en recevoir. Elle était frustrée au possible de ne jamais faire assez pour que vous reconnaissiez ses qualités. »
« Maman ! » Hermione rougit.
« Ah oui ? » Severus souriait d'un air satisfait, les deux mains dans les poches de son pantalon. Hermione rougit encore davantage. « Eh bien, il semble que cela ait fini par arriver, n'est-ce pas ? » A la surprise d'Hermione, cette réflexion parut charmante, et sa mère ainsi que sa grand-mère eurent un léger rire.
« Même maintenant, depuis que vous travaillez ensemble, elle ne tarit pas d'éloges à votre encontre, elle passe son temps à nous raconter votre efficacité et à quel point vous vous montrez excellent face à tout ce qu'elle vous demande. Et dire qu'elle avait peur que vous la détestiez ! » Jane riait et Hermione prit une teinte écarlate.
Severus ne lâchait plus ses airs suffisants. « J'en apprends de belles, aujourd'hui. »
Hermione roula des yeux, exaspérée. Il continua de sourire et lui pinça la joue, ce que sa grand-mère sembla trouver tendre, mais qui agaça Hermione au plus haut point, il le savait.
« Comment en êtes-vous arrivé à devoir travailler pour notre petite Hermione ? » demanda Judith.
Le sourire de Severus s'estompa légèrement et il lança un peu plus timidement, tentant de dissimuler sa déception : « Eh bien, j'imagine que c'est juste la preuve de l'intelligence de votre petite fille. Quand elle y met du sien, elle obtient tout ce qu'elle veut. » Seule Hermione saisit le reproche sous-entendu. Les deux femmes se contentèrent d'un sourire fier.
« Nous devrions y aller », lança Hermione avant d'avoir encore plus honte.
« Oui, bien sûr, nous avons garé la voiture de ce côté, » montra Jane, et Hermione partit dans la direction indiquée, entre sa mère et sa grand-mère.
« Vu comme tu nous l'as toujours décrit, je pensais qu'il serait plus fermé, plus austère. En fait, il est très charmant, » dit Jane, pensant que seule Hermione l'entendrait dans le brouhaha de l'aéroport.
« Je l'aime bien. Il a l'air sympathique, » ajouta Judith d'un air entendu. « Et il est plus vieux que toi. Cela veut dire qu'il sait beaucoup de choses et qu'il peut t'en enseigner tout autant. Il a l'air très disposé à… te faire plaisir. »
« Mamie ! » s'exclama Hermione, mortifiée. Jane et Judith se contentèrent de rire.
« Est-ce qu'il sait bien se servir de sa bouche ? Il paraît que les hommes d'aujourd'hui font ça, » continua-t-elle.
« Oh mon Dieu, Mamie, » les rires ne cessèrent pas, sauf du côté d'Hermione.
« Est-ce qu'il est doué à cela ? Il pourrait peut-être en parler à ton grand-père et le convaincre de tenter le coup. »
« Mamie... Je t'en prie, arrête ! »
Bien que Severus les suive à une distance respectable, ses oreilles d'espion ne manquèrent pas une miette de l'échange, et il grogna à chaque commentaire, en se demandant si toutes les familles étaient aussi aimantes - bien que peut-être pas aussi ouvertes et excentriques - et s'il avait été le seul à ne jamais avoir connu cela.
Severus réalisa que les trois femmes l'avaient semé quand elles atteignirent la voiture. C'était une belle voiture. Étant la fille unique de gens riches, il n'était pas étonnant qu'Hermione soit si autoritaire et si agaçante. Elle avait été pourrie gâtée. Il laissa échapper un grognement en plaçant sa valise et le sac d'Hermione dans le coffre. Son père et sa mère avaient dû la laisser faire n'importe quoi en toute impunité depuis le berceau, voilà pourquoi elle était si despotique.
Sur la route vers chez les Granger, Severus se retrouva assis inconfortablement sur la banquette arrière à côté d'Hermione, réfugiant ses yeux dans le paysage qui défilait au-dehors. Ces gens allaient-ils s'avérer honteusement riches ? Il avait côtoyé ce genre de personnes quand il était Mangemort, et s'était toujours senti à la fois mal à l'aise et douloureusement conscient qu'il ne faisait pas partie du même monde qu'eux, bien qu'il se soit assez bien débrouillé en ce temps-là pour donner le change. Il n'avait pas hâte de devoir renouveler l'expérience durant les deux semaines à venir. Tout cela dépendrait d'à quel point il serait forcé de suivre la gamine partout et de supporter sa famille...
« Tu nous a manqué, Hermione. Avez-vous quelque chose à voir avec le fait qu'Hermione ne soit pas venue nous voir depuis plus d'un an, Severus ? » demanda Jane avec un sourire entendu.
Severus arracha ses yeux au paysage pour la regarder dans le rétroviseur. « Non, Madame. J'imagine que dans ce cas, je ne dois pas lui faciliter la vie au travail tant que cela, puisqu'elle n'a pas réussi à trouver le temps de vous rendre visite. » Il se tourna vers Hermione, un sourcil levé.
« Je suis là maintenant, Maman. Arrête de harceler Severus, » plaisanta Hermione.
« Nous t'avons organisé une petite soirée de bienvenue, » laissa échapper Judith, toute excitée.
« Quoi ? » s'exclama Hermione.
« Maman ! » la réprimanda Jane. « C'était censé être une surprise ! »
Severus se contenta de soupirer. Putain. Génial.
« Je sais, mais je n'ai pas pu m'en empêcher ! »
« Qui sera là ? » demanda Hermione.
« Seulement les gens qui sont déjà arrivés pour la fête d'anniversaire de tes grands-parents. Quelques voisins... des amis... » répondit Jane.
Severus leva les yeux au ciel.
« Je vous vois, Severus. Quel est le problème ? » demanda Judith. « Ils sont tous aussi enthousiastes à l'idée de vous rencontrer que de revoir Hermione. »
Severus tenta de paraître plus amical. « C'est seulement... »
« Severus n'est pas du genre social. Ni fan à l'idée d'être le centre de l'attention, » expliqua Hermione. « C'est pour cela que tu aurais dû me prévenir, Maman ! J'aurais pu te dire que ce n'était pas une super idée. »
« Sottises », coupa Judith. « C'est un grand garçon, n'est-ce pas Severus ? Vous vous en sortirez très bien. »
« Oui, Madame, » répondit Severus après un long soupir. « Je ferai de mon mieux pour être de bonne compagnie, » répondit-il, retroussant légèrement les lèvres.
« Vous avez été très bon jusqu'ici. Et appelez-moi Judith, s'il vous plaît. » La grand-mère d'Hermione lui lança un regard chaleureux.
Severus hocha la tête. « Judith. » Il était un peu perdu face au fait que les deux femmes semblaient vraiment l'apprécier. Il ne se sentait pas aussi maladroit et gauche qu'il aurait dû l'être dans ce genre de situation. « Merci de... m'accueillir chez vous, » tenta-t-il, essayant de rester... de bonne compagnie.
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Ils arrivèrent à la maison après environ une heure de route. C'était une très belle et grande bâtisse. Elle était à l'écart du village, entourée de verdure et d'arbres. Une allée de graviers menait à l'entrée, vaste bien que complètement ombragée. La façade principale était parée de pierres nues, dans des tons pastel soulignés par le soleil couchant. Les fenêtres et les portes de bois semblaient rustiques, mais pas comme si elles avaient été défraîchies ou négligées : on sentait que l'aspect rustique était voulu. Des pots de fleurs étaient disséminés devant la maison, au niveau de l'allée de graviers, d'autres sur la façade, ou sur des portes de bois extérieures gardées ouvertes. De grandes fenêtres et d'anciennes portes métalliques laissaient voir l'intérieur de la maison, remplie d'invités discutant, un verre à la main. D'autres pots étaient suspendus aux arbres. Il y avait aussi des topiaires. Tout était bien tenu, douillet.
A la simple vue de la réception qui se tenait dans le salon, Severus soupira.
« Je vais récupérer les bagages... » dit-il presque froidement, fermant déjà son esprit.
« Oh non, vous les prendrez plus tard ! Tout le monde vous attend ! » s'exclama Jane qui accompagnait sa mère le long de l'allée, jusqu'à la grande bâtisse.
Les épaules de Severus s'affaissèrent et il souffla, regardant vers la maison comme s'il s'apprêtait à grimper à l'échafaud.
« Je suis désolée, Severus, je ne savais pas... »
« Allons-y… qu'on en finisse, » lança-t-il, agacé, en s'avançant vers l'entrée. Elle le suivit de près.
Comme ils approchaient, il ralentit le pas. Il ne voulait pas entrer en premier, et encore moins entrer seul. En plus, il n'y avait aucun intérêt à y aller seul, il fallait qu'ils apparaissent comme un couple uni. L'employé du Ministère aurait la possibilité de tout vérifier, par conséquent, ils devraient convaincre chacun des invités qu'ils étaient profondément amoureux, au cas où ces derniers seraient questionnés à ce sujet. Il ne voulait pas retourner à Azkaban pour quelque chose de si dérisoire. Il aurait pu prévoir qu'il aurait à faire face à tout cela avant d'accepter le marché de Granger, mais il était si impatient de diriger son propre laboratoire, d'avoir enfin la place qu'il aurait dû décrocher foutrement plus tôt s'il n'avait été question que de ses capacités... S'étant rendu à l'évidence que ce ne serait jamais le cas, il avait accepté d'y accéder par ce chemin détourné. Bordel, comment est-ce que j'en suis arrivé là ? L'injustice, toujours. Et maintenant, pour obtenir un poste que mon niveau aurait dû me permettre de décrocher dès le début et enfin vivre avec un peu de dignité, voilà qu'il me faut me plier aux caprices d'une sale gosse gâtée que j'avais en classe.
Hermione le dépassa et pénétra dans le salon, vaste et lumineux, qui n'était certes pas bondé mais regroupait suffisamment d'inconnus pour l'intimider. Les gens l'aperçurent, son nom fut lancé dans les airs, et bientôt, tout le monde se dirigea vers elle. Elle se retourna vers lui avant que les invités ne l'atteignent.
« Severus ? » l'appela-t-elle. Le sourire qu'elle avait eu en voyant tous ses proches réunis était resté figé sur ses lèvres, mais la flamme du stress et de l'insécurité dansait dans son regard. C'était étrange. Pourquoi était-elle ainsi ? Cela ne lui ressemblait pas, elle qui était toujours si assertive et sûre d'elle, se pavanant au Département des Potions, s'y croyant toute permise, le menant à la baguette et prenant un foutu plaisir à le faire. Il découvrait là une nouvelle facette de sa personnalité. De quoi avait-elle peur ? La Granger avec laquelle il travaillait aurait trouvé un moyen pour s'assurer qu'il ne se défilerait pas, l'aurait soudoyé de quelconque manière ou même, lui aurait tout bonnement imposé de la suivre.
Il prit une grande inspiration et entra dans la pièce, juste au moment où elle était submergée par les étreintes et les salutations. Il resta un peu en retrait, les mains derrière le dos, essayant de faire en sorte que les barrières qu'il érigeait toujours tout autour de son esprit ne le fassent pas passer pour le connard qu'il était. Personne n'aurait pu tomber amoureux d'un connard désobligeant. Il le savait d'expérience. Il faut qu'ils croient que tu es amoureux. Qu'elle est amoureuse de toi.
Elle se retourna pour s'assurer qu'il l'avait suivie après avoir embrassé tout le monde. Elle fut comme soulagée quand ses yeux se posèrent sur lui.
« Les amis, voici Severus, mon... compagnon. » Petit ami ne paraissait pas approprié, il ne l'était pas, pas vraiment. Dans leur scénario, il était son compagnon. Elle ne mentait pas.
Severus s'avança et tendit la main vers l'un des hommes qui sembla le plus disposé à la saisir. Il la serra et elle le lui présenta comme son oncle, Mark. Il y eu d'autres poignées de mains, les tantes Kate et Laura, des cousins et d'autres proches plus éloignés. Deux grands-pères, Edward et Nigel. Il faudrait qu'il intègre leurs prénoms pour s'en rappeler. C'était une bonne chose qu'il ait conservé sa mémoire d'espion.
Tout le monde se dispersa, après quelques propos aimables, et seules deux cousines demeurèrent, papotant avec Hermione. Severus resta là, faisant tout son possible pour tenir le coup, et gardant sur les lèvres ce léger sourire qui le faisait paraître charmant, accessible, mais qui masquait tout son agacement.
Les jeunes femmes parlèrent d'elles, et évoquèrent leurs vies extraordinaires, dirent à quel point elles étaient heureuses avec leurs compagnons, et l'une d'entre elle se révéla légèrement plus exaspérante quand elle ajouta à leurs exaspérants sujets de conversation le fait qu'elle venait d'avoir un bébé, et qu'être mère était tout simplement une bénédiction. Hermione affichait un sourire forcé, celui que Severus lui avait remarqué maintes et maintes fois au laboratoire, quand il arrivait qu'un idiot fasse quelque chose de stupide et qu'elle fasse tout son possible pour éviter de jouer les connasses. C'est sur lui qu'elle avait l'habitude de hurler sa frustration, et c'était ensuite à lui de retourner dans le laboratoire, d'être Severus Snape et de fendre le crâne de ces débiles. Il renifla légèrement en la regardant, hochant la tête en souriant.
Au fond de la pièce, il vit, alors que les cousines Andrea et Karen s'éloignaient en caquetant, qu'un homme avait remarqué la présence d'Hermione et ne la quittait plus du regard. Il délaissa le groupe avec lequel il discutait jusqu'alors, et se dirigea droit vers elle. Il avait des yeux bleu vif et une mâchoire si carrée qu'elle paraissait presque trafiquée. Il avait l'air en plastique, un peu comme une poupée Ken. Ses cheveux - blond sale - étaient peignés en arrière comme ceux du personnage. Il avait même les pectoraux et les gros biceps qui faisaient partie du lot. Pectoraux et biceps qu'il exhibait, bien sûr, en portant un tee-shirt qui paraissait deux tailles trop petit pour lui.
« 'Ermioonee ! » s'exclama-t-il avec un fort accent français, en se penchant pour l'enlacer.
Elle parut prise de court et légèrement nerveuse, comme si elle ne savait pas comment réagir. « Oh... humm... salut. » Elle ne le toucha pas vraiment.
Ils s'écartèrent l'un de l'autre et elle se contenta de le regarder, bouche bée. Ça ne va pas du tout, elle est censée être amoureuse de moi, pensa Severus avec un sourire moqueur.
« Comment ça va ? » demanda Ken, sans même regarder Severus, étalant un sourire éclatant.
« Oh... Humm... Très bien. »
Severus décida d'entrer en scène avant qu'elle ne mette à mal toute leur supercherie avec ses yeux de biche. Il s'éclaircit la gorge et passa un bras autour de sa taille. Elle se raidit légèrement, surprise, mais abandonna fort heureusement son numéro de séduction.
« Oh, voici Severus, mon compagnon, » le présenta-t-elle sur le champ. Severus tendit sa main vers l'homme. Il était cependant hors de question qu'il se pare du sourire charmant qu'il avait affiché toute la soirée pour cette tête de nœud. Il ne le sentait pas. Il ne savait pas pourquoi, mais quelque chose n'allait pas. Instinct d'espion.
« Severus, voici... mon ex…»
Ah, évidemment, pensa Severus, se retenant de lever les yeux au ciel.
« Jacques, » se présenta le trublion, son sourire Colgate toujours collé aux lèvres.
« Mais qu'est-ce que tu fous là, Jacques ? Retourne dans le trou d'où tu t'es extirpé, espèce de rat ! » lança Karen à voix basse, pour ne pas faire de scandale.
L'abruti se contenta de sourire, l'air toujours fier, « Qu'est-ce que tu dis ? Je ne comprends pas, euh... » répondit-il, son accent plus lourd que jamais.
Hermione le laissa à son altercation avec Karen sous le prétexte d'aller chercher quelque chose à manger. Mais, au lieu de se diriger vers la table dressée dans le salon, où s'étalaient les amuse-gueules, elle se rabattit vers la cuisine.
Jacques la suivit des yeux, toujours furieux, mais sans avoir abandonné son air suffisant pour autant, jusqu'à ce qu'elle s'arrête et s'appuie contre l'îlot de cuisine, y attrapant un sandwich en leur tournant le dos. Severus l'observait également.
« Excusez-moi, » dit-il, et se sépara des insupportables cousines et de l'ex aux deux neurones.
Il s'appuya contre l'îlot, près d'Hermione. « Il m'a tout l'air d'un charmant garçon, » dit-il, ironique.
Elle mordit dans son sandwich.
« Pourquoi ne pas l'épouser et le présenter au Ministère, et me lâcher les basques, puisque vous en pincez encore pour lui ? » continua-t-il d'une voix traînante.
« Oh pitié, ne plaisantez pas avec ça, » dit-elle d'un air triste avec un arrière-goût amer.
Severus leva un sourcil. « Qu'est-ce qu'il s'est passé entre vous ? »
Hermione plissa les yeux, soudain furieuse. « Ce ne sont pas vos foutues affaires. Tout ce que vous devez savoir, c'est que c'est un Moldu et que le Ministère n'en voudra pas, donc je ne vous lâcherai pas les basques. »
Severus leva un sourcil. « Très bien. Mais pour coller à notre histoire, arrêtez de le regarder avec cet air entiché, » lança-t-il en tentant de contrôler sa rage. « Je ne me laisserai pas ridiculiser devant tous ces gens pour en plus finir à Azkaban. Donc... contrôlez-vous. »
Hermione soupira. « Vous avez raison. Vous avez raison. Il faut qu'on ait l'air amoureux, » dit-elle calmement.
Severus avança la main pour la placer sur ses fesses. Elle ne l'écarta pas, mais lui lança un regard de biais, fronçant les sourcils. « Mais qu'est-ce que vous foutez ? » demanda-t-elle à voix basse.
« Il regarde par ici. Il faut que je reprenne le dessus. Faites comme si vous étiez amoureuse, comme si vous ne voyiez que moi. » Severus souriait, l'air goguenard. Il s'amusait, clairement. « Souriez. »
Elle obéit, mais grinça entre ses dents serrées : « Si vous n'enlevez pas tout de suite votre main de mon cul, je vous la coupe, Severus. »
Il grogna, obtempéra, et fit glisser son index le long de sa joue jusque sous son menton qu'il saisit. Il était exaspérant. Il le savait. « C'est bien, bon Chaton... » lança-t-il avec douceur faisant légèrement osciller le visage d'Hermione, ce sourire charmant aux lèvres dont elle seule savait qu'il était plein de sarcasme.
Ils retournèrent dans la pièce où les invités étaient rassemblés. Andrea et Karen semblaient avoir réussi à faire partir Jacques. Ou peut-être que le fait de voir Severus plaquer sa main sur le postérieur d'Hermione l'avait un peu découragé de rester. Severus sourit, satisfait.
« Donc, » commença l'une des jumelles - elles n'étaient pas réellement jumelles, mais elles étaient si ressemblantes par leur côté superficiel et exaspérant que c'est ainsi que Severus les appelait à présent dans sa tête. « Qu'est-ce que vous faites exactement, en Angleterre ? »
« On a demandé à tante Jane et oncle Charles, mais ils n'ont pas vraiment su nous dire, » compléta l'autre.
« Oui, s'il te plaît. Eclaire notre lanterne. Je ne... sais pas vraiment moi-même. » Un homme plus âgé auquel il n'avait pas été présenté approcha. Il n'avait pas cet air affable qu'avaient tous ceux dont il avait fait la connaissance jusqu'à présent. L'homme ne semblait pas beaucoup plus âgé que Severus.
Hermione le regarda nerveusement avant de soupirer pour répondre à ses cousines.
« Je travaille dans la chimie. Je dirige des laboratoires, des expériences... Dans un genre d'entreprise de pharmacie, » lança Hermione en souriant faiblement.
« Oh, intéressant. Et vous, Severus ? »
Severus ouvrit la bouche pour répondre mais l'homme l'interrompit.
« Severus était le professeur de ma fille. A présent... eh bien à présent, c'est son assistant, c'est bien cela ? » Le ton de sa voix était légèrement malveillant, mais uniquement un expert comme Severus pouvait le déceler. Celles et ceux qui lui auraient prêté une oreille distraite ou ne le connaîtraient pas bien auraient même pu penser qu'il était amical. « Qu'est-ce que cela trahit de vos véritables capacités, Severus ? Je suis vraiment partagé. »
Severus n'aimait pas cet homme. Sa main se referma sur sa baguette, cachée dans la poche de son pantalon. N'attaque pas son père, sûrement pas devant tous ces gens. Il prit une profonde inspiration. « Je pense que cela en dit davantage sur la persévérance et le talent de votre fille, Monsieur, » parvint-il à répondre avec élégance, même si admettre qu'Hermione, la femme qui lui avait rendu la vie insupportable ces dernières années, était effectivement intelligente, lui laissait un goût amer.
« Monsieur ? Mais j'ai pratiquement votre âge. S'il vous plaît, appelez-moi Charles, Severus. » Severus n'accueillit pas la remarque comme particulièrement amicale. Il se contenta de hocher la tête. « Charles. » Il était raide, et n'essayait même plus de paraître amical.
« Severus n'est pas mon assistant, Papa. » Hermione paraissait reconnaissante envers lui de l'avoir complimentée devant son père. Alors, elle rassembla tout le courage nécessaire pour l'aider à son tour. « Il dirige un laboratoire, supervise des expériences. Il pourrait être mon patron. J'ai juste, pour la paperasse et l'administratif, un truc qu'il n'a pas, et lui a davantage le sens pratique, » déclara-t-elle le menton haut. Severus remarqua qu'elle paraissait beaucoup moins détendue que d'ordinaire quand elle se retrouvait face à son père. Elle avait dit cela avec beaucoup moins de confiance et de toupet qu'elle l'aurait fait devant n'importe qui d'autre. Il n'y avait plus cette fougue habituelle en elle.
Charles se contenta de grogner : « Evidemment, » et s'éloigna. Hermione soupira.
« Charmant, » lança ironiquement Severus à Hermione. Elle lui jeta un bref regard désolé, et courut rattraper son père.
« Tu n'as pas le droit de traiter mon conjoint de la sorte ! »
« Ton conjoint ? Pitié. Il ne fait certainement que se servir de toi pour gravir les échelons au... dans cet endroit où tu travailles »
Severus avait laissé les jumelles lourdingues au prétexte d'aller se servir un verre. Par chance, le bar n'était pas trop éloigné d'Hermione et son père. Par chance également, Severus avait des oreilles d'espion et entendit tout, même avec le brouhaha ambiant et même s'ils tentaient d'étouffer leur échange.
« Il ne fait que se servir de toi. Je savais que tu n'arriverais pas à te caser avec un homme potable, pas même l'un de… ton espèce, » ricana Charles. Severus était abasourdi. Il commençait à saisir pourquoi elle avait voulu venir en avion, comme une fichue moldue. Manifestement, il lui en voulait d'être une sorcière. Et il commençait à se demander s'il n'était pas un peu injuste de la penser pourrie gâtée.
« Et après tout ce que tu nous as dit avoir traversé l'année où nous étions en Australie, tu ramènes l'un… d'entre eux à la maison, pour mettre ta mère en danger ? Toute ta famille ? »
« Severus n'est pas l'un d'entre eux ! C'est un putain de héros de guerre ! » lança-t-elle pleine d'une ferveur à peine retenue.
Charles eut un rire moqueur. « Je ne sais pas si je dois croire tout ce que tu me racontes sur les tiens. Ni si je dois te faire confiance. Je n'ai jamais été particulièrement ravi que tu… en sois. Mais après que tu ais eu le courage d'effacer la mémoire de tes parents, de les écarter de leur vie, de les séparer de leurs proches… Je suis certain qu'il n'y a rien de bon à cela »
« Je vous ai sauvé la vie ! Et Severus aussi, d'ailleurs ! De l'esclavage, de la mort ! »
« Ne me parle pas sur ce ton. Je suis toujours ton père, que je sache »
« Alors, tu n'as qu'à accepter que Severus et moi sommes ensemble. » Elle avait mal de constater que son père n'avait pas cessé ses piques à propos de son incapacité à trouver l'amour. Il aimait bien Jacques, mais…
« Pour l'instant. Tant qu'il n'a pas ce qu'il veut. Tu es juste une sorte de tremplin, ce n'est pas sérieux pour lui. »
A l'intérieur d'elle, la colère enfla, et elle ne put se retenir d'éclater : « Bien sûr qu'il l'est ! Nous sommes fiancés ! »
Severus manqua de recracher son cocktail. Bordel, bordel, bordel. Il lui avait servi un verre et attendait le bon moment pour le lui apporter. L'échange avec son père avait pris de telles proportions qu'elle allait en avoir bien besoin. Et concernant le bon moment, eh bien, il semblait nécessaire de la rejoindre avant que sa détresse ne lui fasse dire des choses encore plus stupides.
Il fondit près d'elle et lui tendit son verre, buvant une gorgée du sien.
« Merci, Sev, » lança-t-elle avec un sourire rayonnant, pour jouer le jeu devant son père.
Il eut un sourire timide, l'air charmant mais entendu. « Tu avais l'air d'en avoir besoin, » dit-il à voix basse en se penchant vers elle de côté.
« Est-ce que c'est vrai ? » demanda Charles.
« Qu'est-ce qui est vrai, Charles ? » demanda Severus dans une longue expiration. Il ne voulait pas donner l'air d'avoir écouté aux portes.
« Que vous êtes fiancés ? »
Severus se retourna vers Hermione avec un sourire, un sourire sincère, quoi qu'elle seule sût qu'il était forcé. Même en sachant cela, c'était la première fois qu'elle voyait un tel sourire sur ses lèvres. C'était… cela lui allait bien.
« Chaton… Je croyais que nous devions attendre le bon moment pour annoncer la nouvelle. » Il posa une main dans son dos et se rapprocha.
« Oui, eh bien… C'est sorti tout seul. Oups, oups, oups ! » dit-elle, l'air adorable et stupide à la fois, ce qui ne lui ressemblait pas, mais lui donnait des airs de ses abrutissantes cousines, ou juste d'une pouffe.
« Et alors, vous n'aviez pas assez de moyens pour acheter une bague à ma fille ? » demanda Charles sarcastiquement. Fielleusement, même.
Hermione se raidit. Merde. Quoi qu'elle mette en place pour être à la hauteur, ce n'était jamais assez pour son père.
« Oh, si, » lança Severus, en plongeant la main dans sa poche. Il en sortit une magnifique bague en or blanc, monté d'une émeraude ovale ornée de diamants, rappelant la forme d'une vigne, vigne dont les tiges tourbillonnaient pour s'entremêler en deux nœuds celtiques de part et d'autre. Elle la regarda fixement, la détaillant, et il la lui tendit.
« Je l'ai gardée pour toi. C'est inutile de la cacher à présent que tout le monde est au courant… chérie. »
Hermione la tint entre deux doigts, incapable d'en détacher les yeux, fascinée. Mais comment… Elle était magnifique.
« Nous ne voulions pas voler la vedette à Papi et Mamie pour leur anniversaire, ou bien monopoliser l'attention avant le mariage, » continua Severus, en réponse à Charles, qui pour une fois était resté sans voix. Bien. Trou du cul, pensa Severus.
Il se pencha finalement vers Hermione après avoir écarté sa chevelure de sa joue avec son nez, presque tendrement, comme s'ils étaient vraiment amoureux, alors que sa main reposait au creux de ses reins. « Arrêtez de fixer cette bague comme si vous ne l'aviez jamais vue, » murmura-t-il entre ses dents serrées, et elle en leva les yeux… légèrement. Son nez contre sa joue, son souffle dans son oreille, tout cela la fit frissonner et glousser par mégarde.
Il recula, souriant. « Est-ce que tu veux que je la passe à ton doigt ? » demanda-t-il.
« Oui, » répondit-elle, se disant que cela aurait son petit effet.
Severus prit la bague qu'elle tenait entre pouce et index et la fit glisser doucement à son annulaire. Elle perçut le picotement de l'informulé qui permit à l'anneau de s'y ajuster parfaitement. Mais, pour être honnête, ce ne fut pas le seul picotement qu'elle ressentit.
« Mes amis, » lança Charles, faisant tinter un couteau sur son verre. Il s'était avancé vers le centre de la pièce pour être visible de tout le monde. Severus récupéra son verre, qu'il avait posé sur une table pour passer la bague au doigt d'Hermione, et en avala une longue gorgée. Apparemment, il allait en avoir foutrement besoin.
« Il semblerait que l'on ne nous ait pas tout dit. Severus et notre petite Hermione sont fiancés. »
On les acclama, alors que Severus se tenait près d'Hermione, glissant sa main autour de sa taille sous les applaudissements. Elle se contenta de sourire timidement. Il leva son verre, hochant brièvement la tête, plein de haine pour son père. Il lui faisait penser à une version passif-agressif du sien, et même s'il y allait moins fort, il réveillait de mauvais souvenirs en lui. Il avait fait cette annonce sans leur en demander la permission, seulement pour les mettre dans l'embarras, en espérant lever le lièvre d'un mensonge sous leur silence. Il n'avait pas tort mais ses motivations étaient impardonnables. Au lieu de se soucier du bien-être de sa fille et de son bonheur, il semblait qu'il ne pensait qu'à l'humilier. Severus en avait la nausée. Il ressentait même à présent un peu d'empathie pour la petite bucheuse autoritaire qui se tenait à ses côtés.
Jane et Judith, accompagnée d'une ou deux des tantes d'Hermione, s'avancèrent pour l'embrasser. Une fois que Judith l'eut enlacée, elle se tourna vers lui avec un sourire satisfait sur les lèvres, ses deux mains serrées devant elle. Severus ne sût pas comment réagir. Il n'aimait pas qu'on l'observe de la sorte. Quand elle se relâcha, il en profita pour tendre l'une de ses mains pour serrer la sienne, pensant qu'il méritait aussi des félicitations, en tant que futur marié.
« Sottises ! » s'exclama-t-elle en tapotant sa main pour ouvrir les bras. « Vous allez faire partie de la famille ! »
Il aurait voulu se soustraire à son étreinte, mais il n'y parvint pas. La vieille dame, étonnamment forte pour son âge, l'attrapa fermement par la nuque et l'attira à elle pour l'enlacer copieusement. Il n'avait jamais été dans une telle situation. D'ailleurs, la soirée était moins insupportable qu'il ne l'aurait pensé Jane vint l'étreindre à son tour. Étaient-ils toujours ainsi ? Il n'avait même pas le souvenir que qui que ce soit l'ait jamais pris dans ses bras, même en remontant jusqu'à l'enfance.
« Oh mon Dieu, il faut que vous nous racontiez la demande en mariage ! » lança Andrea à la cantonade, toute excitée, afin que tout le monde l'entende.
Ah… À présent, la distraction préférée de Severus était d'imaginer les différentes façons d'assassiner les jumelles et de faire disparaître leurs corps. Il y avait tellement de possibilités… Je commencerais très certainement par lui arracher sa putain d'énorme langue.
« Pardon ? » demanda Hermione, sous le choc.
« Comment il t'a demandée en mariage ! On veut savoir, » dit Andrea.
« Mais oui, cela en dit beaucoup sur le caractère d'un homme, » ajouta l'une des tantes.
« Ouais ! »
« Allez, raconte-nous ! »
Et les acclamations reprirent.
Hermione était pétrifiée. Elle aurait dû anticiper ces détails, blinder son plan. Ils auraient dû régler ces choses-là dans l'avion, parce qu'il était évident qu'elles feraient surface. Elle était tellement bête. Elle ne faisait vraiment rien de bien. Putain. Elle serait foutue et Severus irait en prison. Je suis tellement nulle. Il faut que j'imagine quelque chose, vite.
« C'était… plutôt simple, vraiment, » commença Severus. Tout le monde les regardait, dans l'attente, et Hermione était figée à ses côtés.
Et merde, trop tard. Il parle. Oh mon Dieu, c'est Severus Snape. Cela va être horrible. Il n'est pas romantique. Il est Snape ! Oh mon Dieu, oh mon Dieu, oh mon Dieu.
« C'était… l'anniversaire de notre rencontre. Nous étions ensemble depuis un moment. Assez longtemps pour que je sois sûr de vouloir passer le restant de mes jours à ses côtés. »
La pièce s'emplit de « ooooooohhhh ». Il parlait très bien. Bien qu'il ne soit pas à l'aise, loin de là. Elle savait qu'il n'aimait pas être le centre de l'attention, ni mentir de la sorte, mais malgré cela, tout le monde était pendu à ses lèvres, même Hermione. Bien sûr, Hermione. Il a été professeur. Il sait captiver un groupe, espèce d'idiote. Tu as trop écouté les imbéciles du monde sorcier qui passent leur temps à le descendre, et tout cela a entaché la vision que tu avais de lui. Il peut le faire. Il est brillant. Il avait même prévu une foutue bague, n'est-ce pas ? Elle baissa le regard sur sa main et remua les doigts. C'était une très belle bague. Et verte, de surcroît.
« J'ai prétendu être malade pour ne pas aller au bureau. Elle en était dépitée, pas seulement parce que cela signifiait que l'on ne pourrait ni fêter notre rencontre ni dîner ensemble, mais aussi parce que cela voulait dire qu'elle aurait à gérer seule les idiots qui travaillent dans notre service. » Il eut un sourire, donnant l'impression qu'il plaisantait, et ne pensait en fait pas aux employés du Département comme des idiots. Des gloussements et des petits rires fusèrent dans la pièce. Bien sûr, il était convaincu que toutes les personnes sous les ordres d'Hermione méritaient ce jugement.
« Quand elle est arrivée à la maison, épuisée et surmenée, s'attendant à y trouver un homme malade qui ne ferait qu'ajouter au poids de sa journée, » il y eut à nouveau des rires, « toutes les lumières de l'appartement étaient éteintes. De petites bougies et des pétales de roses traçaient un chemin de la porte d'entrée à celle de la chambre. Et dans cette chambre, il y avait plusieurs dizaines de vases remplis de lys roses et blancs. J'étais agenouillé parmi les fleurs, l'attendant, avec sa bague entre mes doigts et le cœur dans la main, pour lui dire que je ne pourrait plus vivre un jour de plus sans être sûr qu'elle voudrait m'épouser et être à moi pour toujours. »
Un retentissant « ooooohhh » s'éleva dans la pièce alors que toutes les femmes se posaient la main sur le cœur comme si elles pensaient qu'il était l'homme le plus parfait au monde. Il eut un sourire fier. Fier, car il venait de remarquer le rictus défait qu'avait affiché Jacques avant de quitter tout bonnement la pièce. Son père, quoi que parvenant à le cacher, était également consterné. Bien.
Hermione le regarda, ébahie. Ouah. Merde, il avait été bon. J'aurais aimé qu'on me demande en mariage ainsi. Savait-il que ses fleurs préférées étaient les lys ? Ou bien était-il… Non, il les avait seulement choisies à cause… d'autre chose. A cette pensée, son cœur se serra sans qu'elle ne sache pourquoi.
« Embrassez-la ! » encouragea Karen d'une voix forte.
Il pourrait se débarrasser de Karen en premier. Et peut-être la donner à manger aux requins. Est-ce qu'il y avait des requins sur la Côte d'Azur ? Peu importe, il pourrait toujours jeter son corps dans la mer Méditerranée. En volant, il y serait rapidement.
Les convives les encouragèrent, emballés par l'idée, et Hermione devint rouge comme le dernier tiers du drapeau français. Severus prit sa main et la porta à ses lèvres, en embrassant le dos. Tout le monde le hua.
« Embrasse-la sur la bouche ! » hurla un type derrière lui, et les acclamations éclatèrent à nouveau.
Bordel. Il regarda Hermione, un sourcil levé, comme pour dire « et maintenant ? » Elle hocha la tête comme pour lui répondre qu'il n'y avait rien à faire, et qu'ils ne pourraient pas y échapper. Apparemment, il reçut le message, puisqu'il frôla ses lèvres des siennes, maladroitement et un peu trop rapidement. Elle aussi était gênée : elle le suspectait de n'avoir jamais embrassé personne. L'idée qu'il avait regretté Lily toute sa vie durant et n'avait jamais été avec personne d'autre lui revint à l'esprit.
« Fais pas semblant ! » lança un autre type. Ces gens allaient le tuer.
« Ouais, allez ! »
Bordel. Bordel. Il frôla de nouveau ses lèvres des siennes. « Bordel, » y murmura-t-il alors que les acclamations reprenaient.
« Faites-le, c'est tout, » dit-elle contre sa bouche entre ses dents serrées.
Finalement, il prit sa lèvre inférieure entre les siennes. Elle suivit son mouvement et embrassa sa lèvre supérieure, avec douceur, lentement. La main de Snape était appuyée à l'arrière de son crâne, ses doigts emmêlés dans sa crinière, et quand il inclina légèrement le visage sur le côté, leurs lèvres s'ajustèrent parfaitement. Il l'embrassa lentement, la poussant à lui répondre : ce qu'elle fit. Cela ne dura pas longtemps, et il ne fut pas question de langues. Cependant, elle sentit ses poils se dresser sur son échine alors que les exclamations remplissaient la pièce, accompagnées de sifflets et d'applaudissements. Il termina alors avec un dernier baiser plutôt chaste sur ses lèvres avant de se retirer. Hermione vit une lueur de… quelque chose passer dans ses yeux avant qu'il ne détourne le regard. Elle tenta de bouger, mais ses jambes manquèrent de se dérober sous elle.
Oh ouah. Oh putain.
