Emma grimaça doucement de douleur en se réveillant, elle se rallongea rapidement sur le dos et se tint l'épaule en se retenant de toutes ses forces de pleurer tant la douleur était vive.

En dormant, elle s'était tournée mais au lieu de s'allonger sur le côté droit son corps avait décidé de s'allonger sur le côté gauche, provoquant ainsi une douleur presque intenable dans son épaule blessée.

Elle soupira doucement et mordit de toutes ses forces dans sa lèvre inférieure pour retenir autant que possible les larmes qui inondaient à présent ses yeux. Elle resta de longues minutes sous sa couette à respirer calmement et profondément dans l'espoir de calmer son corps mais également la douleur qui irradiait son épaule mais aussi tout son bras.

Si quelqu'un lui avait un jour dit qu'une chute aussi stupide que la sienne pouvait faire aussi mal croyez-moi qu'elle n'aurait jamais, ô grand jamais, accroché ce père noël de malheur à son perron !

Quelques minutes passèrent et la douleur se calma légèrement, suffisamment pour qu'elle puisse bouger sans avoir envie de pleurer au moindre mouvement.

Elle rabattit les couvertures loin de son corps, elle enfila plus ou moins difficilement son peignoir pour cacher son corps simplement couvert d'un débardeur ainsi qu'un short de sport beaucoup trop court et quitta enfin sa chambre.

Sur la pointe des pieds, elle se dirigea vers la chambre d'ami qu'occupait Regina, en entendant le réveil résonner à l'intérieur, elle entra sans toquer et le désactiva.

Elle s'assit sur le bord du lit et observa attentivement la jeune femme qui semblait dormir tellement paisiblement que son cœur se serra dans sa cage thoracique rien qu'à l'idée de devoir la réveiller.

Du bout des doigts, elle lui caressa délicatement la joue et soupira discrètement.

Elle était en train de tomber.

Elle était littéralement en train de retomber pour cette femme et elle avait peur, non pas de la chute mais de l'atterrissage.

Emma était un peu comme une assiette.

On l'avait brisée en la laissant tomber au sol puis on avait essayé de la réparer mais les fissures étaient bien réelles. Puis elle était tombée à nouveau et s'était un peu plus brisée que la première fois. Encore une fois elle s'était relevée et reconstruite mais les fissures dans son âme étaient de plus en plus importantes, de plus en plus nombreuses. Elle était tombée une troisième fois, une quatrième fois, une cinquième fois.

Elle était souvent tombée.

Elle s'était souvent brisée mais à chaque fois, elle s'était relevée et la tête haute.

Elle s'était relevée un peu plus brisée à chaque fois mais elle s'était reconstruite autant que possible mais son cœur portait sur lui les marques indélébiles de ses atterrissages – ou plutôt ses chocs avec le sol – qui étaient de plus en plus brutales.

Après le départ soudain de Regina, elle était tombée.

Elle était tombée de très haut.

Ça a sans aucun doute était la chute la plus difficile qu'elle ait eu à surmonter dans sa vie mais elle l'avait fait, avec du temps et de la patience, elle s'était relevée pour Henry et Alice. Et pourtant, mentalement elle en gardait des séquelles.

Des séquelles plutôt conséquentes.

Elle s'était senti revivre lorsqu'elle avait vu Regina qui avait sa main sur l'épaule d'Henry sur le pas de sa porte. Elle avait eu l'impression de naitre et d'avoir pris sa première bouffée d'oxygène. Comme si elle était restée en apnée durant tout ce temps sans s'en rendre compte et que là, soudainement, elle remontait à la surface et pouvait à nouveau respirer sans avoir peur d'avoir les poumons pleins d'eau.

Elle avait tenté de lui résister, vraiment, mais comment pouvait-elle résister face à la seule femme qu'elle n'eut jamais aimée durant sa triste vie ? Elle ne pouvait pas, elle ne pouvait pas lui résister, elle n'était pas suffisamment forte pour cela.

Alors, peu à peu, elle s'était laissée aller mais Robin – l'ami, l'amour, l'amant ? – de la belle brune était sorti de nulle part et sans le vouloir, il avait anéanti la petite étincelle d'espoir qui s'était mise à briller dans son cœur.

A présent, elle était à nouveau en train de tomber pour cette femme qu'elle avait tant aimée durant son adolescence et les premières années de sa vie d'adulte.

Elle tombait pour elle mais elle était une assiette bien trop souvent brisée par la vie. Une assiette qui sera totalement impossible de réparer à la prochaine chute.

Allait-elle vraiment prendre ce risque ? Le risque de mourir intérieurement tout en vivant extérieurement ? Allait-elle vraiment prendre le risque de se briser à nouveau ?

Elle savait pertinemment qu'elle était incapable de résister à Regina et elle se sentait tellement stupide de ne pas être plus forte. Elle se sentait stupide d'être retombée aussi facilement.

Un seul sourire avait suffi pour avoir raison des quelques barrières qu'elle avait pris le temps d'installer avec le temps.

Un seul sourire.

Une simple grimace et cette femme avait à nouveau son cœur en main malgré ses six ans d'absences.

Elle savait bien que cette fois-ci elle ne s'en remettrait pas, elle ne pourrait pas se relever mais n'allait-elle pas se briser elle-même à force de lutter contre ses sentiments ?

Elle observa la jeune femme en train de dormir pendant encore quelques minutes sans ne rien dire, elle se contenta de lui caresser la joue du bout des doigts en admirant ces douces lèvres pulpeuses.

Ces lèvres qui lui faisaient tant envie.

Les lèvres de Regina étaient pour elle ce que la pomme avait été à Eve : un pécher, un délicieux pécher auquel elle voulait gouter sans plus attendre.

Finalement, elle se leva du lit, couvrit correctement la jeune femme et quitta la pièce avant de se laisser aller à son envie d'embrasser ses douces lèvres qui manquaient aux siennes.

Elle ferma doucement la porte de la chambre derrière elle et se dirigea vers les escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée. Elle n'avait pu se résoudre à réveiller Regina, celle-ci méritait un peu de sommeil, la brune courrait partout pour s'occuper des deux enfants mais aussi d'elle à longueur de journée depuis sa chute alors elle pouvait bien lui offrir une bonne matinée de sommeil.

Elle entra dans la cuisine et regarda ses divers placards en se demandant ce qu'elle allait bien pouvoir faire à ses enfants, ayant ses deux attelles, elle était sacrément handicapée en termes de mouvement mais elle pouvait le faire.

Après plusieurs minutes à réfléchir, elle décida de faire simple. Elle brancha son grille-pain à la prise, glissa des tranches de pain qu'elle avait pour une fois achetée déjà découpée et lança la cuisson. Elle lança la bouilloire à chauffer avant de verser un peu de lait dans une casserole qu'elle mit sur le feu.

Elle sortit un peu difficilement trois tasses du placard, elle versa un peu de chocolat dans deux d'entre elles et déposa un sachet de thé dans la troisième. Baissant le feu, elle monta rapidement pour réveiller sa fille et son fils qui ouvrirent les yeux sans grande difficulté. Ils descendirent tous les trois.

Emma aida sa fille à s'asseoir et se retourna pour préparer les boissons chaudes mais son fils tenait déjà la petite casserole à deux mains et versait le lait chaud dans les deux tasses avec beaucoup d'attention.

« Assieds-toi, je m'en occupe. » Sourit-il en saupoudrant les deux tasses d'un peu de cannelle.

Il déposa la casserole vide dans l'évier et attrapa cette fois-ci la bouilloire qui laissait s'échapper une légère fumée ce qui montrait bien que l'eau à l'intérieur était très chaude. Avec beaucoup de concentration, il versa l'eau presque bouillante dans la dernière tasse en vaillant à ne pas se brûler.

Il remplit une petite cuillère de miel, la glissa dans le thé et tendit le tout à sa petite sœur qui lui déposa un léger baiser sur la joue.

Il sortit les tranches de pain qui était cuite et tartina un peu de Nutella dessus avant de les déposer sur l'ilot centrale.

Il attrapa ensuite un tabouret, grimpa dessus pour monter sur le plan de travail malgré les interdictions de sa mère. Il ouvrit le placard, attrapa la boite de médicament et prit sa gélule de vitamine avant de donner ses cachets à Alice et à Emma.

Il s'assit à son tour et déjeuna avec sa famille dans un silence reposant pour chacun.

Plusieurs minutes passèrent et les deux enfants montèrent à l'étage, la blonde débarrassa la vaisselle sale à son rythme pour ne pas blesser un peu plus son poignet encore endolori.

Elle attrapa son téléphone portable pour téléphoner à sa sœur, elle n'avait aucune envie de réveiller Regina mais elle ne pouvait pas prendre le risque de prendre le volant car elle risquait surtout de provoquer un accident avec l'état de son épaule immobilisé et son poignet douloureux.

Elle resta plusieurs minutes au téléphone avec sa sœur puis elle monta à l'étage pour s'assurer que tout se passait bien pour ses enfants.

Elle retrouva Alice et Henry, habillés, dans la salle de bain et elle les regarda se laver les dents en silence. Avec beaucoup de difficulté, elle brossa délicatement les cheveux de sa fille avant d'essayer de les lui attacher, elle grimaça à la douleur et décida finalement de les lui laisser détachée pour aujourd'hui.

Ils redescendirent tous les trois au rez-de-chaussée pour ne pas faire plus de bruit et Alice se jeta littéralement sur Swan pour le caresser pendant de longues minutes.

« Gina ne se lève pas aujourd'hui ? » Demanda-t-elle en regardant sa mère.

« Non chérie, elle est fatiguée, c'est Mary qui va vous emmener à l'école et on viendra vous chercher ce soir. D'accord ? » Sourit Emma.

« D'accord. » Répondit simplement Alice avant de se reconcentrer sur Swan qui gigotait dans ses bras.

Henry s'assit doucement sur le canapé à coté de sa mère et ensemble, ils attendirent la petite brune qui arriva plusieurs minutes plus tard.

Lorsque des coups furent frappé contre la porte d'entrée, les deux enfants sautèrent sur leurs pieds, enfilèrent rapidement leur veste, plaquèrent un baiser sur la joue de leur mère et partirent tous les deux en courant. Emma et sa sœur se regardèrent avant de rire de leur comportement.

Comme toute grande sœur, Mary s'assura que tout allait bien et que la blonde avait tout ce dont elle avait besoin avant de lui ordonner d'aller se coucher.

Emma ferma la porte derrière elle et se vautra littéralement dans son canapé en soupirant tout l'air qu'elle avait dans les poumons. Elle resta allongée sur le dos à regarder son plafond pendant de très longues minutes sans bouger, elle profita seulement du silence de la pièce qui, pour une fois depuis bien longtemps, ne lui fit pas peur au contraire, il était reposant.

Apaisant.

Relaxant.

Pour une fois depuis six ans, elle n'alluma pas la télévision et ne lança pas de musique pour combler le vide alors qu'elle se retrouvait complètement seule dans une pièce. Elle se mit à sourire doucement en se rendant compte que, pour une fois depuis bien longtemps, son cœur ne la faisait pas souffrir à cause du silence qui l'entourait.

Elle attrapa son ordinateur portable qui était rangé dans le petit emplacement sous la table basse du salon, elle le posa sur ses cuisses, le déverrouilla et ouvrit les différents dossiers qui contenaient toutes les photos qu'elle devait encore imprimer et trier pour ses divers albums de photo souvenir.

Elle créa plusieurs dossiers et commença à les ranger avec beaucoup de concentration, elle en supprima certaines qui étaient soit flou soit en double et cliqua sur une photo pour l'agrandir un peu.

Son cœur rata un battement dans sa poitrine.

De toutes les photos qu'elle aurait pu vouloir agrandir pour pouvoir choisir dans quel dossier la ranger, il avait évidemment fallu qu'elle choisisse la photo qu'ils avaient pris tous ensemble, le matin de noël.

Son sourire s'élargit un peu plus si cela était possible, son sourire s'étirait jusqu'à ses oreilles et elle ne parvenait pas à s'arrêter.

Du bout des doigts, elle vint caresser le visage de Regina qui tenait Henry par les épaules, le brun respirait la joie de vie et elle n'avait plus vu son fils sourire autant depuis bien trop longtemps. Elle admira cette doucement photo pendant un long instant avant de la sélectionner et de la mettre en fond d'écran de son ordinateur.

Elle ferma les pages qu'elle avait préalablement ouverte et admira la photo qui embellissait son écran d'accueil. Elle resta pendant plusieurs minutes à ne rien faire sans lâcher l'image des yeux, ils étaient tellement beau. Ils ressemblaient tellement à une famille que son cœur ne pouvait s'empecher de battre plus vite face à ce si beau cliché.

Elle se ressaisit finalement après de longues minutes, elle ouvrit sa boite mail et commença à répondre à ses messages, messages pour lesquels elle avait si peu de temps habituellement.

Les minutes défilèrent rapidement, tellement rapidement qu'elle ne vit pas les heures passées.

Elle releva seulement son visage en entendant du bruit provenant des escaliers, elle se redressa légèrement et doucement dans le canapé et eut tout le plaisir de pouvoir observer Regina qui descendait les escaliers en se frottant les yeux, encore simplement habillée de son pyjama.

« Où sont les enfants ? » Demanda-t-elle en baillant.

« A l'école. » Sourit la blonde en l'admirant.

« Dis-moi que tu n'as pas pris la voiture sinon je vais te découper en morceau et te mettre dans le congélateur. » Prévint la brune en fronçant des sourcils.

« Ma sœur est venue les chercher. » Informa la photographe sans relever la fausse menace.

« Bien, bien. Petit déjeuné ? » Proposa Regina en s'étirant.

« Plutôt déjeuné. Il est déjà midi tu sais. » Répondit Emma en posant son ordinateur portable sur la petite table près d'elle.

« Non mais je rêve ! Pourquoi est-ce que tu m'as laissé dormir tout ce temps ? C'est une blague ! Tu veux une salade ? Peut-être une omelette ? Ou un sandwich ? Je peux rapidement faire cuire du poulet si tu veux. Ou des pates. Ou tout ce que tu veux en fait. » Lança-t-elle précipitamment en entrant presque en courant dans la cuisine.

Emma se laisser aller et rigola du comportement de la brune qui venait pourtant tout juste de se réveiller. Regina avait bien trop d'énergie dès le réveil.

Elle se redressa dans le canapé et attendit sagement en zappant de chaine en chaine.

Plusieurs minutes passèrent et Regina revint dans le salon avec deux assiettes remplies de pates qui étaient, elles-mêmes recouvertes d'une couche de fromage râpé.

La blonde sourit comme une enfant le soir de noël et se fit joyeusement à manger sous les rires de la brune qui s'était assise à côté d'elle. Elles déjeunèrent en silence puis passèrent de très longues heures, affalées chacune d'un coté du canapé, à regarder des films et à les commenter en rigolant.

On aurait dit deux adolescentes.

L'après-midi passa à une vitesse folle, elles quittèrent le canapé seulement pour monter s'habiller.

Comme à chaque fois, Regina aida délicatement Emma à se préparer avant de partir, presque en courant, pour se préparer elle-même le plus rapidement possible.

Lorsqu'elles furent toutes les deux habillées et coiffées, elles quittèrent le manoir et grimpèrent dans la voiture de luxe de la brune qui conduisit tranquillement vers l'école primaire.

Elle se gara devant l'école et soupira discrètement en voyant tous les regards se tourner vers son véhicule, elle savait bien qu'elle n'était pas vraiment la bienvenue dans cette ville, ils la détestaient tous et étaient très peu ravi de la voir revenir maintenant mais si au moins ils pouvaient faire l'effort de ne pas l'accueillir à chaque fois avec des regards plus sombres que les ténèbres.

Emma lui sourit doucement et elles sortirent de la Mercedes. De sa main droite, la blonde lui attrapa le poignet et l'attira vers le petit groupe qui discutait entre eux à voix basse.

« Alors comment tu te sens ? » Questionna August en la prenant délicatement dans ses bras pour ne pas lui faire plus de mal.

« Très bien, Regina prend merveilleusement bien soin de moi. » Sourit-elle.

« C'est vrai ? » Lança Li en regardant la jeune femme en question.

« Je fais de mon mieux. » Répondit la brune en rougissant légèrement.

« La grande Regina Mills qui rougit, on aura donc tout vu. » Taquina Philipe en lui donnant un léger coup de poing dans l'épaule pour la faire réagir.

« Ne l'embêtez pas trop, on dirait un petit chat apeuré. » S'exclama Peter en riant.

« Fait gaffe, le petit chat apeuré à des griffes. Ce serait fortement dommage qu'elle abime ton si beau visage. » Répliqua rapidement Emma en souriant.

La cloche de l'école sonna ce qui les coupa dans leur conversation avant que Regina ne puisse répondre quoi que ce soit.

Elle lança un léger sourire à la blonde et s'éloigna légèrement du groupe pour se rapprocher de la grille.

Les premiers élèves se mirent à sortir de l'établissement et elle ne put se retenir plus longtemps, elle se dressa sur la pointe des pieds pour chercher la tête d'Henry ou celle d'Alice parmi le troupeau d'enfant qui gigotait dans tous les sens au plus grand damne de leur professeur qui tentait au mieux de les retenir en rang.

Le portail s'ouvrit et les enfants ne perdirent pas une seule seconde avant de courir vers l'extérieur pour rejoindre leurs parents. Regina suivi du regard une petite rousse avec des nattes qui se mit à courir, à peine eut-elle posé le pied en dehors du grillage, elle se jeta dans les bras de son père en criant de joie.

En les voyant tous les deux, la brune ne put s'empecher de se demander si un jour Henry, ou même Alice, agirait ainsi avec elle.

Si un jour ils seraient ravis de la voir les attendre au portail.

Si un jour ils quitteraient l'école en courant juste pour pouvoir se jeter dans ses bras après une longue journée de séparation.

Elle en rêvait. Elle en rêvait vraiment. Elle voulait de tout cœur vivre ce genre de moment avec les deux enfants, ce genre de moment que toute mère devait vivre avec ses enfants.

Une fois de plus, la réalité la frappa en plein visage et elle se rendit à nouveau compte qu'elle avait raté beaucoup trop de chose avec les deux enfants mais maintenant, elle le savait, elle s'en rendait compte et elle comptait bien profiter du temps qu'elle avait à présent.

Elle soupira doucement et se promit de faire tout son possible pour ne plus jamais rien rater dans la vie d'Alice et d'Henry. Elle voulait vraiment être présente pour tous les petits moments de la vie. Elle releva le visage et s'aperçu que les élèves de la classe de son fils étaient tous sorti, elle tourna vers Emma mais elle était toujours en pleine discussion avec les autres alors elle observa attentivement la cour et se rendit compte qu'il attendait patiemment devant la porte de bâtiment.

Elle fronça des sourcils en se demandant ce qu'il pouvait bien être en train de faire mais quelques secondes plus tard ce fut au tour de Mary, accompagnée de sa classe, de sortir. Henry se saisit immédiatement de la main de sa petite sœur et l'accompagna jusqu'à la sortie. Emma s'excusa auprès de ses amis et s'approcha de la brune pour accueillir ses enfants.

« Je peux te voir deux minutes ? » Demanda soudainement Mary-Margaret en la regardant.

La blonde hocha la tête de haut en bas, embrassa doucement le front d'Alice puis celui d'Henry avant d'entrer dans la cour de l'école. Elle sourit à ses amis qui partaient avec leurs enfants attendit plusieurs minutes le temps que sa sœur termine la discussion qu'elle avait avec un autre parent d'élève.

« Alors comme ça la maitresse va disparaitre et se transformer en papillon si on ne lève pas la main ? » Plaisanta l'institutrice en s'écartant des autres parents et professeur.

« Une invention de Regina hier soir. » Répondit Emma en jetant un coup d'œil vers la brune.

« Eh bien, ça a marché du tonnerre ! Ils ont été parfaits aujourd'hui, vraiment ! C'est limite s'ils n'avaient pas peur de lever la main pour demander la parole ! » S'exclama Mary en souriant de toutes ses dents.

« C'est vrai ? Tant mieux alors. » Sourit à son tour la blonde.

« Embrasse Regina pour moi tu veux ? Elle m'a permis d'échapper à une affreuse migraine. » Dit-elle en posant sa main sur le bras de sa sœur cadette.

Emma lui sourit et la prit dans ses bras avant de lui souhaiter une bonne soirée, elle quitta la cour de l'école et rejoignit rapidement sa petite famille qui l'attendait sagement devant le grillage. Elle plaqua un rapide baiser sur la joue de Regina et lui offrit un doux sourire.

« De la part de Mary. » Souffla-t-elle simplement avant d'entrainer ses enfants vers la voiture.

Regina ne put empêcher ses joues de prendre une teinte un peu plus rouge qu'à l'habitude mais elle sourit tout de même de toutes ses dents, rapidement elle rejoignit sa Mercedes et s'installa du côté conducteur.

Le trajet se passa calmement, les deux enfants racontèrent joyeusement leur journée et Alice n'oublia pas d'expliquer en détail la réaction de ses camarades de classe face à l'histoire que Regina lui avait raconté la veille en rentrant de l'école.

La brune qui fixait la route du regard ricana discrètement dans son coin en écoutant la petite blonde.

En arrivant, Henry monta directement dans sa chambre pour faire ses devoirs et Alice s'installa sur le canapé du salon pour faire ses coloriages magiques tout en regardant les dessins animés.

Tout se passa tranquillement, Regina alla finalement faire à manger et Emma abandonna sa fille devant la télévision pour venir s'asseoir sur le plan de travaille pour regarder la brune faire.

Elles ne dirent rien, elles ne parlèrent point, elles profitèrent silence de la présence de l'autre femme dans la pièce en silence. Après plusieurs longues minutes de préparation, ils purent passer à table pour le plus grand bonheur des enfants qui commençait à mourir de faim.

Le début du repas se passa dans le plus grand des calmes. Alice baillait discrètement devant son assiette, ses yeux se fermaient et se tête tombait légèrement vers l'avant alors Regina la prit sur ses genoux et lui donna à manger en la faisant rire aux éclats pour la tenir éveiller quelques minutes de plus.

Henry débarrassa finalement son assiette et toutes les autres avant de plaquer un rapide baiser sur la joue de sa mère, puis celle de Regina, sans oublier le front d'Alice puis il monta rapidement les escaliers et rejoignit sa chambre.

La brune se leva de table en gardant la petite fille dans ses bras et grimpa à son tour les escaliers, Emma ne tarda pas à la suivre et à la rejoindre dans la chambre de sa fille.

Depuis l'embrasure de la porte, elle observa Alice qui luttait autant que possible contre le sommeil et Regina qui la changeait puis faisait son petit rituel médical avec beaucoup d'attention.

« Gina ? Une histoire. » Souffla la petite blonde en baillant.

« Tu ne veux pas l'histoire de la lune et du soleil ? » S'étonna Emma en haussant des sourcils.

« Je veux une histoire de Gina. » Dit-elle en souriant doucement.

« Tu veux une histoire sur quoi ma chérie ? » Questionna Regina en se rasseyant sur le bord du lit.

« Sur comment on fait les bébés ! » Lança Alice en souriant de toutes ses dents.

« Non mais je rêve. » Chuchota la photographe en rougissant à vue d'œil.

« Petite maligne. Alors, dans un petit village de France entouré de montagnes vivait autrefois une fillette nommée Rosalie. Sa grand-mère Ursule, qui l'élevait, prétendait l'avoir trouvée dans une rose. Enfant choyée, Rosalie désirait plus que tout avoir un petit frère et se demandait d'où venaient les bébés. Était-ce Dieu qui les façonnait avec l'eau de la pluie, la terre des jardins, était-ce le soleil qui insufflait la vie à leurs corps ? Sa grand-mère lui avait expliqué que les petits garçons se formaient dans les choux. Quand une femme désirait avoir un enfant, elle plantait un chou et devait l'entourer d'amour pendant neuf mois. Alors il arrivait qu'un bébé naisse. Mais tous les choux n'en contenaient pas. Ceux-là, on les mangeait.

Un jour, Ursule rentra du potager avec un panier remplie de choux magnifiques. De belle humeur, elle les posa sur l'évier de la cuisine. Tout en les lavant à grande eau pour préparer la soupe, elle chantait à tue-tête :

Pour faire la bonne soupe d'Ursule

A l'heure dorée du crépuscule

J'y mets un chou, deux choux, trois choux

Mais ce n'est pas tout !

Lundi j'y mets trois céleris

Mardi j'ajoute deux radis

Le mercredi du pissenlit

Et le jeudi un salsifis

Le vendredi un brin de persil

Le samedi du pain rassis

Et le dimanche

Je la mange.

Tout en chantant, elle sortit un couteau aiguisé et entreprit de couper le gros chou par la moitié. A cet instant retentit un grand cri et éclatèrent les pleurs d'un bébé.

-Arrête Grand-Mère ! Hurla Rosalie, il y a un bébé à l'intérieur ! Arrête, tu vas le tuer !

Nul doute, le chou avait crié ! Effrayée, Grand-Mère Ursule le lâcha et il alla rouler sous l'évier.

Cette nuit-là, Rosalie se leva, alla chercher le chou dans la cuisine, le posa sur son lit, écarta les feuilles vertes et vit à la lueur de la lune un tout petit bébé blotti au cœur du chou. « Grand-Mère a dit vrai ! pensa-t-elle. Les petits garçons viennent des choux ! Quelle chance ! C'est la première fois que j'en trouve un ! Mais celui-ci n'est pas encore prêt à naître. Il faut qu'il grandisse. » Pas plus grand qu'un doigt, recroquevillé sur lui-même, le bébé ressemblait à une grenouille avec sa grosse tête et ses membres malingres. Rosalie le cacha sous sa commode et se recoucha. Un peu plus tard, elle fut réveillée par des pleurs. Un bébé gigotait sur le sol de sa chambre à coté du chou. Son petit frère était déjà né ! En toute hâte, Rosalie l'enveloppa dans une couverture et l'apporta à sa grand-mère. Devant un tel miracle, la brave Ursule ne savait que faire. Elle alla sollicites les conseils de la sorcière de la montagne.

-Ce n'est pas un enfant ordinaire, déclara la sorcière. Il faut le nourrir avec du lait de la Voie Lactée.

On nomma le garçons Fabien, nom qui signifie « fève » en latin. Chaque soir, Ursule et Rosalie déposaient un petit pot de grès devant leur porte et, chaque matin, elles le retrouvèrent rempli d'un lait brillant et translucide qui avait la texture des nuages. Nourri de ce lait fabuleux, Fabien grandissait à une allure prodigieuse. Dès qu'il sut parle, il dit à Rosalie :

-Grande sœur, je ne suis pas d'ici. Ma mère est une étoile et mon père est le ciel. L'autre jour, mon âme est tombée sur la terre. Les rayons de la lune l'ont déposée au cœur d'un chou. Là elle est entrée dans le corps d'un bébé. Je voudrais retourner là-haut car je m'ennuie de mes parents. Ce soir, si tu veux, je t'emmène avec moi sur le dos de la jument de nuit.

Au coucher du soleil, la jument de nuit arriva au galop. Elle était noire comme l'espace intersidéral et ses yeux étaient deux sphères de feu. Rosalie avait un peu peur mais le garçon riait aux éclats. Les enfants montèrent sur son dos, et d'un sabot léger, l'animal s'élança vers les confins de l'univers. Les anneaux flamboyants de Saturne s'esquissaient dans la nuit, quand Rosalie se pencha vers la Terre. Alors le secret de sa naissance lui fut révélé. Elle se revit bébé, enveloppée de grossiers chiffons, sur les marches de l'église. Elle pleurait de froid et de faim, mais des mains chaudes la saisissaient, une femme la serrait dans ses bras aimants et l'emportaient vers la maison. C'était Ursule, plus jeune de quelques années. En contrebas, la fillette aperçut le portager de sa grand-mère. Comme elle se penchait davantage pour admirer les choux, elle chuta dans le vide dans que la jument, poursuivant sa route, emportait son petit frère vers la Voie Lactée, là où naissent les âmes des bébés dans les amas d'étoiles.

La chute de Rosalie prit fin dans une rose géante. Des pétales lui entraient dans la bouche et l'étouffaient. Il faisait une chaleur atroce dans ce jardin. Elle cria et ouvrit les yeux. Non, ce n'était pas une rose, c'était un lit. Ce qu'elle avait pris pour des pétales étaient en réalité ses draps emmêlés dans lesquels elle se débattait.

-Petit frère ? appela-t-elle. Où est mon petit-frère ?

-Quel petit frère ? Tu as rêvé ! Répondit sa grand-mère qui était accourue en l'entendant crier.

-Fabien, l'enfant du chou ! Celui qui m'a emmenée au ciel sur le dos de la jument de nuit !

-Tu as simplement rêvée Rosalie. D'ailleurs tu es assez grande maintenant pour savoir que les enfants ne naissent pas dans les choux.

-Et moi, Grand-Mère, reprit Rosalie les larmes aux yeux, tu ne m'as pas trouvée dans une rose ?

Ursule la prit dans ses bras.

N'y pense plus, lui dit-elle, et viens m'aider au potager. Tant de choux et tant de rose méritent d'être cueillis ! Tant de jours heureux nous attendent encore ! Un jour, je t'expliquerai tout, ma chérie. Mais peu importe d'où tu viens, tu seras toujours ma petite-fille chérie. » Raconta la brune dont la voix était calme et posée.

« Ça ne me dit pas comment on fait les bébés. » Remarqua Alice en baillant.

« C'est tout ce que tu auras ce soir alors dors chipie pour que le marchand de sable puisse venir embellir tes rêves. » Répondit Emma en lui embrassant doucement le front.

Regina lui déposa à son tour un doux baiser sur la joue et glissa le masque customisé autour du visage de la petite fille pour qu'elle ait tout l'oxygène dont elle avait besoin durant la nuit. Elle lui brossa les cheveux en lui souriant tendrement et attendit qu'elle s'endorme complètement pour rejoindre la blonde qui l'attendait dans le couloir. Elle ferma délicatement la porte en sortant pour faire le moins de bruit possible puis elle lâcha un léger soupir de soulagement.

« Il va falloir que tu me donnes ton secret. Où trouves-tu ses histoires ? » Questionna à voix basse la photographe.

« Tu as toujours été douée pour le dessin et la photographie, moi j'ai toujours aimé les mots. Chacun son domaine de prédilection Mademoiselle Swan. » Souffla Regina en souriant doucement.

Mais son sourire, elle le perdit bien vite en se rendant compte de ce qu'elle venait de dire. Venait-elle vraiment d'appeler Emma « Mademoiselle Swan » ? Elle détourna le regard et mordilla sa lèvre inferieur pour ne pas revenir sur ses mots. Avait-elle vraiment fait cette erreur ? Venait-elle vraiment d'insinuer que sa femme ne portait plus son nom ? Donc qu'elle ne faisait plus partie de sa vie ? Donc qu'elle était un cœur à prendre ?

Une douleur lancinante broya sa poitrine. Elle n'avait fait qu'énoncer la vérité, elle avait disparu donc Emma avait divorcée donc celle-ci ne portait plus son nom et n'avait, aux yeux de la loi, plus rien à voir avec elle.

Regina le savait pertinemment mais le fait de le dire à voix haute ne faisait que le rendre plus réel. Elle n'était plus rien pour la belle blonde qui faisait battre son cœur. Elle avait mal. Très mal. Elle s'éloigna d'Emma et avança dans le couloir.

Elle avait perdu sa place dans le cœur de la belle photographe et elle avait entièrement mérité son sort mais, au fond, une partie d'elle refusait catégoriquement d'y croire.

Une toute petite partie de son âme voulait continuer à croire qu'Emma l'aimait toujours, que d'une manière ou d'une autre elle avait toujours une certaine importance dans la vie de celle-ci.

Mais comment pouvait-elle continuer de l'aimer après tout le mal qu'elle lui avait – involontairement – fait ? Elle avait assumé à voix haute avoir perdu sa femme devant sa femme elle-même et bon dieu que son cœur lui faisait mal à cet instant précis.

Elle donnerait tout pour pouvoir le retirer de sa poitrine ne serait-ce que quelques millièmes de secondes afin de ne plus souffrir un court instant.

Elle avait perdu sa femme mais avait-elle une infime chance de pouvoir la reconquérir comme au premier jour ? Elle avait bien peur que la réponse soit un non catégorique alors elle se retenait de la poser à la première concernée.

Elle comptait bien tout faire pour revenir dans la vie des trois Swan quitte à devoir se frotter encore et encore à un mur, elle ferait tout, absolument tout pour être la raison du sourire sur leurs trois visages. Elle prit une profonde inspiration, tenta de calmer les battements de son cœur douloureux et entra dans la chambre d'Henry qui dormait paisiblement.

Elle referma rapidement la porte pour ne pas le déranger et prendre le risque de le réveiller, elle se tourna et vit Emma entrer dans sa propre chambre. Elle la suivit en regardant le sol, la blonde allait avoir besoin de son aide pour se mettre en tenue de nuit.

Elle entra donc dans la pièce éclairée et fronça des sourcils en voyant la jeune femme s'allonger dans son lit. Elle la regarda de longues secondes et décida de l'imiter, elle contourna le lit et s'allongea à la place vide. Les deux femmes fixèrent le plafond sans ne rien dire, sans bouger, juste, elles regardaient chacune un point fixe sur le plafond peint en blanc.

Elles étaient silencieuses, tout ce qu'on entendait dans la chambre était le bruit de leurs poumons se chargeant puis se vidant d'air. Regina finit par bouger pour s'installer un peu plus correctement, elle tourna la tête vers Emma et se rendit compte que celle-ci avait les yeux fermés.

Était-elle en train de dormir ? Sans doute. Elle se permit donc de l'observer pendant de longues secondes, d'admirer la courbe de ses yeux et le léger, très léger grain de beauté qu'elle avait au niveau de la mâchoire.

« La plus belle chose qui soit arrivée à mon cœur c'est de battre pour toi. » Chuchota-t-elle en pensant que personne ne l'entendrait.

« Le jour où je t'ai perdu, j'ai cru mourir tant j'avais mal, tant la douleur était puissante. » Murmura la blonde en ouvrant difficilement des yeux.

Regina rougit doucement et plongea dans le regard émeraude qui la détaillait. Les deux femmes restèrent allongées dans le lit, la tête tournée l'une vers l'autre et se regardant dans le blanc des yeux.

Elles restèrent habillées et sur le matelas de la chambre d'Emma. Elles s'observèrent l'une à l'autre pendant de longues minutes avant que leurs paupières ne deviennent trop lourdes.

C'est ainsi qu'elles s'endormirent, dans le même lit, la main de Regina délicatement posée sur celle de la blonde avec la lumière allumée.