Iiz Los Dii ! La Glace est mienne
"Je me demandais…" Commença Siltafiir en luttant contre la neige qui entravait ses pas.
Vous vous demandiez ? Encouragea le Crâne de son timbre mielleux.
"Je comprends que Værmina veuille vous garder sous contrôle, mais je ne saisis pas l'utilité de vous confier à moi. Tout ce que ça va accomplir, c'est vous nourrir avec encore plus de rêves et de souvenirs. Un bon moyen de vous libérer complètement et de m'encourager à la trahir."
Elle vous a accordé l'accès à son royaume.
"Je ne vois pas le rapport."
Quel est votre plus lointain souvenir ?
Elle voyait encore moins le rapport, mais tenta de se rappeler. Elle se figea.
"Je ne me souviens de rien avant mes sept ans, paniqua-t-elle en piétinant la poudreuse, rien du tout ! Qu'est-ce qui se passe ?"
Vous avez payé le prix dont chacun doit s'acquitter pour s'aventurer toutes les nuits en Quagmire. Une part de votre âme - et donc de vos souvenirs.
"Mais elle m'avait dit que je ne risquais rien jusqu'à ma mort !"
Je pense qu'elle n'avait pas le choix. Il est pratiquement impossible d'asservir l'âme d'un dragon. À votre mort, vous auriez dû rejoindre les flots du temps, comme tous vos frères, mais en dérobant un morceau de votre être, elle a trouvé un moyen de vous ancrer à sa demeure. Sans compter que, nuit après nuit, elle aura de plus en plus d'aisance à vous contrôler.
"Comment ça ?" Questionna-t-elle avec anxiété.
Plus l'on passe de temps dans son plan d'Oblivion, plus il est difficile de lui résister. Chaque fois que vous parcourrez les remous de Quagmire, votre âme se détachera un peu plus de Nirn et vous succomberez lentement à l'emprise de la Dame.
Ses bras balancèrent piteusement, ses jambes se plièrent sous le poids de la lassitude et elle courba le dos en grognant des jurons dans une langue millénaire.
Si cela vous rassure, le processus est long. Il lui faudra des années pour totalement vous assujettir, peut-être des décennies. Dérober l'essence d'un dragon est une tâche ardue, même pour le Seigneur Cauchemardesque.
Elle inspira profondément, vaguement soulagée par cette révélation, et reprit son avancée. Décennies ou non, pas question de perdre un instant supplémentaire dans de pareilles conditions. Une question la tiraillait encore malgré tout.
"J'aimerais toujours savoir ce que l'état de mon âme change à votre situation." S'essouffla-t-elle en gravissant une colline.
Je ne possède ni bras, ni jambes, mon pouvoir ne s'étend qu'aux dormeurs et, sans l'action d'un porteur, le larcin d'un souvenir requiert de grand efforts. Celui qui me brandit est celui qui me commande et vous êtes l'une des seules personnes ayant jamais existé capable de résister assez longuement aux influences de la Dame pour que j'aie le temps de me libérer.
"Et vous ne savez toujours pas comment y parvenir, je me trompe ?" Insista-t-elle dans un sourire honteusement orgueilleux.
J'ai ma petite idée. Nous la mettrons en pratique quand vous dormirez. Je ne peux rien faire avant cela.
Elle grogna de frustration, mais oublia soudainement ses désagréments daedriques; des voix familières lui caressèrent les tympans dans un chœur étouffé. Immédiatement, ses sens draconiques se mirent en branle, scannant chaque parcelle du terrain pour localiser l'origine exacte de ces chants qu'elle appréciait tant. Elle fixait le vide, posait délicatement ses semelles sur la neige crissante, s'excitait à mesure que les notes s'intensifiaient. Elle s'accroupit brusquement, ayant repéré une petite grille à moitié dissimulée par l'épaisse couche de flocons. Le mot de puissance se trouvait là, juste au-dessous, et ses échos promettaient des résultats dévastateurs. Elle se releva, décidée à trouver l'entrée du temple qui abritait son futur pouvoir. Fortdhiver ne se situait qu'à une ou deux heures de marche après tout, elle pouvait se permettre un petit détour. Sa recherche ne dura pas, la porte de l'édifice se dressant au centre d'un site de fouilles démesuré au fond duquel un vieil homme dévoilait joyeusement les mystères de Saarthal. Devant lui, une poignée de jeunes mages aux origines variées l'écoutaient attentivement. Des mages. Elle soupira et se répéta qu'il lui faudrait infiltrer l'Académie de toute manière; autant s'habituer tout de suite à leur présence. De ce qu'elle comprit en les espionnant, ils s'apprêtaient à inspecter ces lieux pour une cause purement éducative. Rassurée, et impatiente de trouver le mur chantant, elle trotta vers la petite assemblée, s'attirant leurs regards méfiants et curieux dès qu'ils la remarquèrent.
"Bonjour, lui sourit l'aîné, pouvons-nous vous aider ?
- Peut-être, répondit-elle en observant brièvement les trois autres figures encapuchonnées, j'étudie la langue draconique et mes sources m'ont rapporté que des textes particulièrement… éloquents se trouvaient dans ces ruines.
- Oh, c'est très intéressant, s'enthousiasma le barbu, mais je ne crois pas que l'on ait encore vu quoi que ce soit de ce genre. Bien sûr, nous n'avons exploré qu'une infime partie de la construction et Saarthal était l'un des centres du culte des dragons, donc il n'est pas insensé de croire en vos sources. À ce propos, maîtrisez-vous bien ces écritures ?
- Ma grammaire laisse encore à désirer, mais les lire n'est pas un problème.
- Fascinant ! Je pense qu'il nous sera profitable à tous d'associer nos recherches.
- Quoi ?! S'indigna une jeune Dunmer. Mais vous aviez dit que cet endroit devait être protégé des curieux !
- En plus nous ne savons rien d'elle, ajouta timidement le plus grand du groupe, vous ne lui avez même pas demandé son nom.
- C'est bien vrai, remarqua-t-il en se frappant le front, quel impoli je fais ! Laissez-moi me présenter: je suis Tolfdir maître spécialisé dans l'altération à l'Académie de Fortdhiver. Ces jeunes-gens sont mes étudiants.
- Siltafiir Viingnu. Exploratrice." Répondit-elle en les saluant d'un hochement de tête.
Les deux suspicieux ne se détendirent pas le moins du monde, et le troisième, un Khajiit, conserva son faciès de marbre. Ou du moins c'est ce que la Brétonne crut voir; décrypter les expressions des félins, sous toute cette fourrure, demeurait un travail délicat pour l'oeil inexpérimenté. Tolfdir déclara qu'un retardataire faisait encore défaut à leur rassemblement et insista pour qu'ils l'attendent patiemment. Le grand timide, un nordique qui disait s'appeler Onmund, interrogea alors l'intruse sur son masque. Il y reconnaissait l'ouvrage de ses ancêtres et se demandait comment un tel objet s'était trouvé en sa possession. Pressentant que leur conter la véritable histoire de sa rencontre avec Krosis engendrerait plus encore de questions, elle prétendit l'avoir dérobé à une bande de pillards durant ses voyages au-travers du pays. Les traits du jeune homme se détendirent quelque peu, mais sa collègue prit la relève dans leur quête d'informations.
"Vous l'avez volé, donc.
- À des bandits, oui.
- Qu'est-ce qui nous garantit que vous vous limitez aux bandits ?
- Brelyna ! Hoqueta le professeur. Tenez-vous, voyons !
- Non, elle a raison, intervint Siltafiir en s'attirant les regards interloqués de tous, on n'est jamais trop prudent en Bordeciel. Ni nulle-part en Tamriel, d'ailleurs. Je m'inquiéterais aussi à sa place."
La Dunmer, décontenancée par ce soutien inattendu, s'autorisa un regain de tolérance et laissa Tolfdir se renseigner, sans interruption, sur les connaissances exactes de la Brétonne en matière de langues mortes. Celle-ci se figea un instant, n'ayant pensé à peaufiner son mensonge jusque-là, puis décida de commencer par le début. Elle leur révéla l'existence des murs, le genre des textes qui les sillonnaient, leurs emplacements sur les hauteurs ou dans les bas-fonds et s'amusa de l'attention sans faille qu'ils lui accordèrent. Tandis qu'elle commençait à manquer d'idées, la neige craqua sous la course précipitée du retardataire mentionné plus tôt et elle soupira discrètement. Avant que Siltafiir puisse se retourner, la nouvelle arrivante s'excusa, essoufflée, de les avoir fait attendre et son timbre raviva foule d'images dans l'esprit de la Brétonne.
"C'est pas vrai." Mima-t-elle du bout des lèvres en dirigeant lentement ses yeux vers cette voix terriblement familière.
C'est vrai… Pensa-t-elle en reconnaissant fatalement la jeune femme aux joues aussi rouges que ses cheveux.
Celle-ci nota vite la présence d'un individu nouveau et Tolfdir s'empressa de faire les présentations, préférant éviter plus de soupçons au sein de leur groupe d'exploration.
"Evangeline Riscel, voici Siltafiir Viingnu.
- Enchantée. Ponctua-t-elle la gorge sèche.
- De même." Répondit Evangeline dans un sourire hésitant.
C'était mauvais. Très, très mauvais. Pire que mauvais, catastrophique. Ou du moins ça le deviendrait si son visage venait à être découvert. Il lui fallait conserver son calme, s'ordonna-t-elle ; sa sœur n'avait aucune raison de deviner sa véritable identité, pas tant qu'elle limitait les dialogues et continuait d'agir calmement. Heureusement, Evangeline semblait aussi enthousiaste que sa cadette à l'idée d'échanger des mondanités. L'équipe réunie, Tolfdir les attira enfin au sein de l'architecture, les mettant maintes fois en garde contre les pièges et les enchantements qui guettaient encore entre ces murs érodés. À l'intérieur, il leur assigna à chacun une tâche, qu'ils s'agisse de trouver des runes, calculer l'angle d'une rangée de piliers gravés ou repérer des objets chargés de magie. Une fois qu'il eut décidé du devoir de tous, il s'aventura lui même dans les dédales anciens, oubliant l'invitée de dernière minute aux mains de ses élèves. Ceux-ci l'ignorèrent surtout, concentrés sur leurs recherches, et seul l'un d'entre eux profita de l'absence du maître pour questionner l'inconnue plus en profondeur.
"J'Zargo s'interroge sur vos voyages, héla le Khajiit du ton caressant qu'employaient souvent ceux de sa race, quelles sortes d'ennemis rencontrez-vous dans des endroits tels que celui-ci ?
- Surtout des draugrs." Répondit-elle distraitement en tentant, le nez en l'air, de repérer la chanson murale.
Ne recevant aucune réaction orale, elle s'autorisa un coup d'oeil en direction du mage poilu et gloussa silencieusement. Les oreilles rabattues, la queue nerveuse et le museau retroussé de l'homme-chat prouvaient une aversion certaine pour cette révélation.
"Vous êtes fort en destruction ?
- J'Zargo sera bientôt un maître en la matière ! S'enorgueillit-il en cessant le balancement anxieux de sa queue.
- Dans ce cas vous n'aurez aucun problème, l'assura-t-elle, ils sont extrêmement sensibles au feu."
Le félin sembla se détendre et elle put reprendre son inspection sous les regards fuyants des étudiants; malgré toute sa bonne volonté, ils continuaient de la surveiller, craignant sûrement qu'elle succombe à quelque pulsion cleptomane. Elle choisit de les ignorer et fut plus qu'assistée dans cette idée par l'exclamation terrifiée qui s'échappa d'un couloir. Elle s'y engouffra au plus vite, reconnaissant avec frayeur les vocalises d'Evangeline; le ragnard de bibliothèque qu'était sa sœur n'y connaissait rien en exploration sauvage et rester à ses côtés dans un tel lieu paraissait brusquement nécessaire à la menteuse. Elle regagna son calme en la voyant indemne malgré les épais barreaux qui la séparaient maintenant du reste du groupe.
"Je suis bloquée ! Se plaignit la victime lorsque Tolfdir l'approcha.
- Allons, gardez votre calme, tempéra-t-il d'une voix plus intriguée qu'inquiète, il y a sûrement un moyen de vous sortir d'ici. Comment avez-vous déclenché ce piège ?
- J'ai ramassé cette amulette, avoua-t-elle en levant un bijou taillé dans une matière jaunâtre, comme vous me l'aviez demandé."
Le vieil homme l'encouragea donc à enfiler le collier et elle obtempéra, non sans en épousseter la suie qui encombrait ses antiques gravures. Le résultat vint de suite: le socle de la vieillerie vibra et, d'une légère poussée électrique, Evangeline le brisa, révélant le chemin à prendre pour continuer leurs recherches respectives. Les trois présents traversèrent la porte improvisée, mais durent faire halte en ne découvrant qu'une pièce ronde et sans débouché. La plus jeune, remarquant le trio de cercueils qui ornait les murs, voulut prévenir les académiciens, mais sa soeur, le teint soudain fort pâle, prit les devants en saisissant vivement le bras de son professeur.
"Oh, vous avez aussi ressenti cette dissonance magique ? Questionna-t-il sans se départir de sa bonhomie.
- Je l'ai vue ! Crissa-t-elle en serrant un peu plus ses doigts. Un membre de l'Ordre des Psijiques m'a parlé, là, à l'instant !"
Il fut hautement surpris par ces mots, mais les balaya bien vite en déclarant que les Psijiques n'avaient rien à voir avec ces ruines et que les sarcophages lui apparaissaient munis d'un véritable intérêt pédagogique. La magicienne bégaya quelque peu, outrée qu'on l'ignore au profit de boîtes de métal et insista, en tapant du pied, sur la véracité de sa vision. Siltafiir s'en moquait bien, trop concentrée sur la main de Tolfdir qui caressait du bout des ongles les côtés d'un des contenants. Oh non ! S'il s'approchait à ce point… ! Elle traversa la salle circulaire d'une enjambée hâtive pour calmer sans tarder la soif de connaissances insouciante dont il les accablait.
Trop tard. Un claquement résonna, le couvercle du cercueil tomba, dans un gémissement guttural un draugr se jeta hors de sa couche de fer, dégaina à une vitesse déconcertante pour ses muscles décharnés et attaqua. Le vieux mage endossa immédiatement une posture combattive et, sans broncher, embrasa ses poings, preuve qu'il n'ignorait pas tout des dangers de la vie. Mort-Dragon vaillamment brandie, la plus jeune s'apprêta à le soutenir, quand un second cercueil s'ouvrit et que son occupant se rua vers la personne la plus proche de lui: Evangeline. L'épéiste fit volte-face et s'en alla secourir son aînée qui montrait moins de réflexes que ses deux comparses, reculant, trébuchant sur ses propres robes, tendant ses mains armées d'éclairs vers le revenant insensible et échappant des cris de détresse tandis que la hache noircie par le temps s'élevait au-dessus de sa tête. Avant que Siltafiir ne puisse estoquer l'ennemi, la magicienne déchargea toute l'énergie qui habitait son corps dans une boule de feu désespérée. Le draugr tomba certes, ou plutôt il se désintégra, mais le souffle de l'explosion repoussa également la prétendue protectrice qui roula au sol dans un rattrapage maladroit.
"Ah, voilà la sortie." Remarqua joyeusement Tolfdir en indiquant l'un des sarcophages, son propre adversaire fumant lamentablement sur les dalles du temple.
Le fond de ce lit d'acier manquait effectivement, révélant un couloir sombre et étroit. Le vieil homme encouragea les deux filles à continuer leur exploration sans l'attendre et se pencha, les yeux brillants, sur une gravure à moitié illisible. Heureuse de pouvoir enfin se débarrasser de cette envahissante bonne humeur, Siltafiir se remit sur pieds d'un bond et traversa le passage aussi vite, mais perdit de son enthousiasme lorsque l'autre Brétonne lui emboîta le pas. Les premiers mètres furent parcourus en silence, mais la plus âgée décida soudainement de mettre à mal les nerfs de la plus jeune.
"Désolée pour la boule de feu, mais j'ai paniqué. Je n'avais jamais rencontré ces choses et je ne savais pas comment…
- C'est normal, coupa Siltafiir en tentant de modifier sa voix sans que cela se remarque, les draugrs sont effrayants.
- Je vous promets que ça n'arrivera plus, reprit-elle d'un ton déterminé mais plus dirigé vers elle-même que vers sa sœur, une personne de ma formation ne devrait pas se laisser-
- Chut !" Stoppa la cadette en levant un bras.
Elle dégaina silencieusement, avalant une profonde inspiration tandis que la corde de son arc s'étirait dans un imperceptible grincement. L'autre femme observa ce que pointait l'archère et remarqua une paire de morts-vivants, quelques mètres au bas du couloir, pour son plus grand dégoût. Son tir assuré, Siltafiir lâcha la ficelle et l'un des cadavres mouvants s'effondra dans un cliquetis d'os et de métal. Le second ne tarda à l'imiter et les Brétonnes purent reprendre leur chemin dans un mutisme prudent. À côté des macchabées, un levier et une épaisse grille. Pas besoin de mode d'emploi: l'habituée des donjons actionna le mécanisme et, la voie libérée, entra dans une pièce ronde, tapissée d'un grillage rouillé, plus spacieuse que la précédente, mais encore ornée d'une couronne de cercueils, bien plus nombreux cette fois. Ça se présentait mal. L'aventurière banda de nouveau son arc, décidée à l'employer au moindre mouvement suspect. Bien lui en prit, car trois pas à peine dans la salle éveillèrent l'intégralité de ses occupants, bombardant les intruses d'une cacophonie de couvercles et de gémissements sépulcraux. C'est ce moment également que choisit le mage optimiste pour les rattraper, et ils purent engager les hostilités.
Mort-Dragon ne suffit bientôt plus à garder les ennemis loin des points vitaux de sa porteuse et un coup d'oeil aux sorciers confirma que la situation ne ferait qu'empirer. Encerclés, n'abattant leurs adversaires que trop lentement, atteignant les limites de leur endurance et de leurs réserves magiques, une seule solution s'offrait:
YOL TOOR SHUL
La moitié des draugrs s'envola, éparpillant leurs cendres aux quatre coins de la pièce, et permettant à l'Enfant de Dragon d'aider ses associés d'une lame secourable. Ravivés par le nombre nettement restreint d'adversaires, les trois humains redoublèrent d'efforts et eurent tôt fait d'évincer la menace. Un dernier râle emplit les lieux et chacun reprit son souffle, l'une avec plus de difficulté que les deux autres. Celle-ci évitait consciencieusement de croiser leurs regards, attendant les questions qui suivraient immanquablement.
"Vous maîtrisez véritablement la langue draconique, affirma Tolfdir d'un ton léger, vous ajouter à cette expédition a été, sans conteste, une décision profitable à tous."
Puis il leur conseilla, sans autre, de reprendre les recherches. Peut-être qu'elle aimait bien l'insouciance de ce vieillard après tout. Elle ne pouvait en dire autant de sa sœur; cette dernière la fixait avec une intensité presque admirative. Une bouffée de fierté saisit alors le Dovahkiin, étirant ses lèvres dans un sourire vainqueur tandis qu'elle savourait l'instant. Arracher un tel regard à son aînée, à celle qui maîtrisait les arts des arcanes mieux que tous ceux de son âge, qui moquait son absence de talent à la moindre occasion, qui testait ses sortilèges d'illusion sur elle sous le prétexte de l'entraînement. Cette personne-là l'observait avec respect. Une idée folle posséda la plus jeune. Révéler son identité maintenant causerait de grands remous, des remous amusants, et, maintenant qu'elle y songeait, Evangeline ne se trouvait guère en position de la ramener en Haute-Roche. Décidément, l'envie de briser les convictions de sa sœur surpassait de loin son souhait d'anonymat.
"Vous avez l'air impressionnée. Remarqua-t-elle avec malignité une fois qu'elles eurent abandonné Tolfdir à ses sarcophages.
- Qui ne le serait pas, répliqua-t-elle d'un timbre étonné, je ne suis pas en Bordeciel depuis longtemps, mais tout le monde ici connaît la Voix. Ils disent qu'il faut des années pour la contrôler.
- En effet, ricana Siltafiir, c'est le cas pour les gens normaux.
- J'en déduis que vous n'êtes pas normale ? Osa la magicienne d'un ton prudent.
- Est-ce que ce "tout le monde" vous a parlé des Enfants de Dragon ?"
Ô jubilation ! pensa-t-elle en voyant les paupières de son interlocutrice s'écarter, béantes, sur les iris jaunes qui se transmettaient de génération de Riscel en génération de Riscel.
"C'est ce que je pensais, mais ce n'est rien comparé à ma prochaine révélation, reprit-elle en chantonnant à moitié, attendez de voir ça…"
Elle ôta son masque et rabaissa son capuchon.
"Ursanne ! S'étrangla l'autre fille.
- Bonjour Eva, salua-t-elle en réprimant une grimace à l'entente de son véritable nom, comment va la famille ?
- Tu es vivante !
- Toujours aussi fine observatrice.
- Qu'est-ce qui t'a pris de quitter la maison comme ça ? S'énerva-t-elle en lui saisissant les épaules.
- Il y a un an, je t'aurais dit que c'était parce que nos parents et toi étiez insupportables, expliqua-t-elle en conservant son calme, mais là je pense plutôt que c'est une question de prophétie et d'influence divine.
- Tu te moques de moi. Murmura Evangeline d'un ton acide.
- Hélas non, soupira théâtralement sa petite sœur, je suis le pantin d'un maudit destin, condamné à sauver le monde du joug des dragons ou à périr en accomplissant ma mission. Les draugrs de l'autre pièce ne me contrediront pas."
La magicienne s'apprêta à répondre, mais l'information atteignit ses sens à ce même instant. Elle fixa l'Enfant de Dragon d'un air confus, indécis, peinant à accepter les faits. La petite Ursanne, qui parvenait, dans les meilleurs jours de sa vie à Refuge, à produire une piteuse braise au sein de sa paume, crachait maintenant les torrents enflammés des légendes d'antan comme de rien.
"Comment as-tu obtenu un tel pouvoir ? Susurra-t-elle d'un souffle suspicieux.
- Je suis née avec, rétorqua l'autre en se dégageant de sa prise, les divins me l'ont confié parce qu'ils m'en ont jugée digne.
- Toi !?"
Le visage sombre, Siltafiir renfila Krosis et reprit son chemin vers le mot de puissance. Sa distraction s'avérait moins drôle qu'agaçante, elle préférait y mettre fin.
"Où est-ce que tu crois aller ? Héla ladite distraction.
- J'ai des textes draconiques à retrouver."
Disant cela, elle glissa hors d'une sacoche un petit flacon blanchâtre, souleva le menton de son masque et, sans rien ajouter à l'encontre de sa sœur, l'avala. Dans un éclat violacé, elle s'évapora du champ de vision de la magicienne pour se mêler totalement aux ombres des tunnels, souriant une dernière fois lorsqu'elle perçut l'exclamation outrée de la plus âgée des filles Riscel. Cette dernière grogna, puis prévint la fuyarde qu'un sortilège de détection des vivants ne demandait que peu d'efforts à une sorcière expérimentée. Tandis qu'elle levait le bras pour user de sa magie, des pas précipités tapotèrent vivement le couloir, se dirigeant aussi loin d'elle, aussi vite que possible. Immobile, elle décida de laisser disparaître sa cadette. La courser dans des ruines maudites infestées de revenants semblait un moyen sûr de mettre un terme à ses études. Et à sa vie. Elle avança donc lentement, un pied après l'autre, en prêtant une oreille plus qu'attentive au moindre roulement de caillasse ou clapotis d'eau qui frappaient les parois moussues des corridors.
Ursanne, Enfant de Dragon. Si on lui avait raconté, elle aurait rit au nez du messager. Entre ça et le spectre qui se disait membre de l'Ordre des Psijiques, Evangeline commençait à douter de sa santé mentale. Peut-être les vents glaciaux de Bordeciel étaient-ils parvenus à geler sa raison. Elle secoua cette pensée hors de son crâne et reprit possession de ses réflexes scolaires, organisant rapidement ses priorités. Sa petite sœur observait un calme assuré face à ces dangereuses ruines et, même si la magicienne ne l'admettait jamais de vive voix, la démonstration brûlante dont elle l'avait gratifiée un peu plus tôt prouvait ses capacités à survivre sans aide. Le véritable sujet d'angoisse se trouvait dans les mots du Psijique. Il avait parlé d'une série d'événements inévitables, d'un danger qu'elle seule pouvait prévenir et que cet Ordre la jugerait sur ses actions futures.
"Julianos me protège… " Pria-t-elle aigrement.
Méditant sur cette mystérieuse menace, Evangeline trébucha quand un glaive érodé lui glissa sous le pied. Elle se rattrapa, mais croisa le regard éteint d'un draugr à la poitrine percée. Animée d'un sursaut brutal face à cette macabre découverte, elle se jeta vers l'arrière et, levant les yeux, hoqueta de surprise en découvrant d'autres morts, éparpillés le long du chemin, certains appuyés contre les murs la tête ballottante, d'autres gisant pitoyablement dans les flaques boueuses qui parsemaient l'édifice, tous achevés d'un coup dans le dos. Des bruits de combat l'interpellèrent soudain, mélange de cris bestiaux et de râles lugubres. À peine s'élança-t-elle en direction des hostilités que le silence s'abattit à nouveau sur les galeries de Saarthal. Figée dans son élan, elle tendit l'oreille pour essayer de deviner le dénouement de l'esclandre, mais rien ne lui parvenait plus, que les gouttelettes de condensation qui tombaient du plafond pour s'écraser bruyamment au sol. Elle déglutit et reprit son avancée, plus prudente que jamais, pour découvrir une immense salle, ornée en son centre d'un autel de taille proportionnelle auquel s'arrimaient deux escaliers. Au pied de l'un d'eux, gisait un draugr à la mâchoire béante et criblé de flèches carbonisées, confirmation qu'Ursanne ne requérait aucune forme d'aide. Un frottement rocailleux attira soudainement son attention. Il provenait d'un tunnel, étroit à vous rendre claustrophobe comparé à la pièce gigantesque qui le précédait. Elle s'y engouffra malgré tout et reconnut de suite les grognements impatients de sa cadette. Écoutant attentivement, elle comprit des phrases, comme si… Comme si elle parlait à quelqu'un.
"J'ai vu, merci. Non, il ne faut pas bouger celui-là ! C'est celui-ci qui active le mécanisme des trois autres ! Oui, je sais mieux que vous !"
Evangeline courut vers ce monologue inquiétant et rencontra sa cadette, toujours à parler dans le vide, qui poussait d'épais piliers décorés de figures animalières au-dessus desquels pendaient des images similaires. Soudainement, le bloc sur lequel elle s'acharnait fit claquer ses rouages et les trois autres tournèrent également sur leur socle dans ce même raclement de roche qui l'avait alertée.
"Vous voyez, j'avais raison ! S'exclama la jeune fille dans une posture victorieuse.
- À qui tu parles ?"
La cadette sursauta violemment puis, croisant les bras dans une attitude défensive, répondit froidement:
"À mon ami imaginaire."
Elle s'approcha sans plus d'explications d'un autre roc taillé et le tourna en soufflant comme un bœuf. Cette fois, deux piliers seulement se murent en réaction et elle continua jusqu'à ce que chaque gravure corresponde au dessin qui la surplombait. Ceci achevé, elle s'étira et actionna le levier qui trônait au centre de la pièce, ouvrant une lourde grille de fer qu'Evangeline n'avait jusqu'alors remarquée.
"À qui étais-tu en train de parler ?" Répéta-t-elle sans plus se laisser distraire.
L'interpelée éleva et rabaissa ses épaules dans un soupir agacé, puis avança, sans rien dire, en direction du mot de puissance dont les échos se rapprochaient doucement.
"Je t'interdis de m'ignorer !" S'indigna la plus âgée en la poursuivant.
Elle ne réagit pas, continuant de marcher hâtivement vers son but. Elle regrettait déjà d'avoir succombé au désir de supplanter son aînée, nul besoin d'y ajouter l'histoire de son artefact rebelle. Avant que sa sœur ne puisse la rejoindre, une voix enjouée les arrêta.
"Il était temps que je vous rattrape, déclara Tolfdir, avez-vous découvert quelque chose d'intéressant ?"
La magicienne s'empressa de lui dévoiler ses observations, mais Siltafiir préféra s'enfoncer plus avant vers l'incessante mélodie qui titillait sans relâche sa soif de connaissances. Elle descendit une rangée de marches, emprunta une bifurcation, trouva de nouveaux escaliers et échappa un couinement stupéfait en découvrant ce qui devait être le secret de Saarthal. En contrebas du balcon sur lequel elle se tenait, un tourbillon bleuté, au milieu duquel flottait une sphère luisante, englobait presque la moitié de l'immense chambre, coincé entre d'épaisses colonnes de pierre, bloquant l'accès au vocabulaire ancien qui intéressait tant la Brétonne. Connaissant trop bien les ruines nordiques pour ignorer que leurs plus puissants occupants se trouvaient toujours dans leur salle la plus importante, l'Enfant de Dragon échappa un murmure inquisiteur.
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Une simple figure rougeoyante, le dos appuyé au dossier d'un trône poussiéreux, apparut quelques mètres devant la tornade magique et la parleuse empoigna son arc pour y déposer une flèche prudente. Des bruits de semelles impromptus brisèrent sa concentration et elle se tourna, un doigt sur la bouche de son masque, vers les silhouettes de Tolfdir et son élève rendues écarlates par le Thu'Um. Trop tard; une plainte gutturale s'éleva de l'antique siège et hérissa le poil de l'archère. Elle pointa rapidement l'ennemi et décocha presque immédiatement. Le projectile heurta sa cible en pleine face, mais le draugr ne s'en préoccupa guère. Il se contenta de lever ses orbites glaciales vers son attaquante et lui exposa, en trois mots, l'accueil qu'il réservait aux aventuriers téméraires.
FO KRAH DIIN
Elle esquiva d'une roulade le blizzard déferlant qui couvrait de givre tout ce qu'il heurtait et tira encore une flèche qui frappa directement le poitrail décomposé pour rebondir aussi lamentablement que celle qui l'avait précédée. Bien entendu; un ennemi seul dans une salle si énorme, impossible qu'il soit aisé de le vaincre. N'étant demeurés immobiles durant ce rapide échange, les deux mages couraient déjà de chaque côté de l'adversaire et commençaient à le bombarder d'éclairs enflammés. Les gerbes rougeoyantes le heurtèrent de plein fouet, mais leurs efforts n'accomplirent rien que prouver son insensibilité. Le vieil homme désigna alors le tourbillon étrange aux deux Brétonnes dans une attitude inquiète qui contrastait brutalement avec son usuel optimisme.
"Il est protégé par une barrière ! S'exclama-t-il rapidement. Occupez-le pendant que je tente de la désactiver !"
Il fit grésiller ses doigts et frappa l'orbe flottant d'une série de décharges électriques, abandonnant les deux filles au bon vouloir du mort-vivant. Celui-ci s'adressa soudainement à la plus jeune dans ce qu'elle crut identifier comme un sourire.
"Bolog aaz, mal lir !
- Espèce de… ! S'étrangla-t-elle devant cette rude insulte. Dreh nii hinmaar !"
Le draugr sembla mal prendre sa réplique et se rua, hache brandie et gorge grondante, vers l'impudente parleuse. Celle-ci tenta d'ignorer la peur qui asséchait sa bouche et l'imita en se jetant, Mort-Dragon dégainée, contre son opposant. Elle courut si vite qu'elle pouvait, formant sur le fond de sa langue un mot tout désigné pour ce genre de situation, et feignit de préparer une frappe de sa lame. L'ennemi éleva également son arme en prévision du choc, puis l'abaissa dans un même élan, prêt à rabattre le caquet de celle qui osait le défier, mais elle l'attendait.
FEIM
L'ancienne hache ne rencontra que le vide et son utilisateur bascula, entraîné par le coup, pour tituber sur quelques foulées. Il tourna la tête de droite et de gauche, puis fit volte-face, découvrant une silhouette spectrale qui fuyait à l'autre bout de la pièce. Il la pourchassa immédiatement et, dès qu'elle retrouva son corps tangible, l'assaillit de sortilèges glacés. Lui tournant le dos, elle ne put esquiver et reçut l'entier de l'assaut, stoppant net sa course paniquée. Le souffle coupé par l'air chargé de givre, incapable de bouger assez vite pour lui faire face, elle ne put qu'entendre le râle rauque de l'adversaire et sa démarche claudicante qui approchaient, augures d'une douleur imminente. Elle ferma les yeux, pria les divins, et une vague de chaleur lui caressa soudain la nuque quand sa sœur décida d'appâter à son tour le draugr d'une bourrasque enflammée. La diversion dura assez longtemps pour que Siltafiir s'extirpe du carcan neigeux et, enfin, la voix de Tolfdir renouvela leur ardeur:
"Il est vulnérable ! Allez-y !"
On ne leur répéta pas. Une boule de feu d'Evangeline le repoussa de plusieurs enjambées et sa cadette n'attendit guère qu'il reprenne son équilibre.
YOL TOOR SHUL
Oh ! comme elle aimait ce cri. Le draugr ne pouvait en dire autant, les membres agités de spasmes incontrôlables sous la morsure embrasée de cette double attaque. Parties dans leur lancée, les deux filles n'abandonnèrent ainsi le bombardement, l'une décochant ses flèches et la seconde ses sorts brûlants. Rejointes par le vieux professeur, leurs attaques annihilèrent prestement la menace et le dernier draugr de Saarthal s'effondra dans une ultime plainte aux relents enfumés. Les filles récupéraient lentement de l'affrontement, tandis que Tolfdir, qui semblait revenir d'une balade de plaisance, approchait la sphère inconnue d'un oeil fasciné.
"Evangeline, ma chère, j'ai une nouvelle tâche pour vous." Dit-il sans cesser de détailler l'objet.
Elle s'avança, encore essoufflée, vers son professeur, puis acquiesça lorsqu'il la chargea de retourner à l'Académie pour faire un rapport à l'archimage. Elle s'attarda un instant dans la contemplation de l'orbe, prise d'un désir presque irrésistible de le toucher, de compter les runes qui le sillonnaient, de s'imprégner de sa magie, de… Des bruits de course l'interpellèrent et elle se détacha de la chose pour découvrir sa sœur qui trottait vers une porte perdue dans les ombres. Oh non ! Elle ne lui fausserait pas compagnie deux fois dans la même heure, parole de Riscel ! Immédiatement, elle traça les pas de sa cadette et poussa les lourds battants que la plus jeune venait de franchir. Derrière s'érigeait une construction caverneuse, éclairée seulement d'une trouée lumineuse qui s'écrasait sur un pavé d'herbe et un épais coffre orné. Elle ignora cela et rejoignit Siltafiir qui s'était accroupie devant un mur couvert de textes anciens.
L'Enfant de Dragon suivait délicatement, du bout de ses doigts, les reliefs d'un mot bien particulier. Le chœur invisible qui l'avait appelée ici s'éteignait lentement alors qu'une sensation familière la pénétrait. Nus. Le troisième et dernier mot du cri de glace. Le Froid s'empara d'elle, la statufia un instant, et les vents qui filtraient par l'interstice du plafond, non ! tous les vents de Bordeciel semblèrent s'inviter dans ses muscles, ses os, son sang.
"Iiz los dii. Murmura-t-elle sans vraiment s'en rendre compte.
- Qu'est-ce qui est écrit ? S'enquit son aînée qui se dressait juste derrière elle.
- C'est une épitaphe, comme tous les murs de ce genre ou presque, répondit-elle dans une immobilité sereine, Sigruuf wahlaan qethsegol… Hmm… Celle-ci a été rédigée par un certain Sigruuf apparemment, à la mémoire de sa sœur Lanal, briinahii vahrukt Lanal. Le reste c'est juste une description du visage "aussi aiguisé et blanc qu'une statue taillée dans de l'ivoire vivante" de cette fille. Ces nordiques et leurs comparaisons…
- C'est incroyable.
- Je n'irais pas jusque-là, mais-
- Tu es vraiment l'Enfant de Dragon dont tout le monde parle en ce moment.
- Parce que ma démonstration contre l'autre zombie n'était pas assez éloquente ? Il te fallait en plus une traduction ?
- Non, non, mais c'est dur de se faire à l'idée. Avant d'entrer dans ces ruines, je te prenais pour une bonne à rien, un élément inutile, et maintenant…
- Merci, ça fait toujours plaisir.
- Maintenant tu es l'espoir de Tamriel ! S'enflamma-t-elle. Ce prêtre de la Phalène n'était pas si aveugle finalement !
- Un prêtre de la Phalène ? De quoi tu parles ?
- Peut-être que tu l'as oublié - tu avais quatre ou cinq ans à l'époque - mais père avait pu en rencontrer un et, je ne sais plus trop comment, il nous avait amenées avec lui. C'était très formel, père n'a pu que le saluer, puis il t'a aperçue, s'est approché et a dit t'avoir vue dans les Parchemins des Anciens et que tu avais un futur hors du commun ou je ne sais plus trop quoi. Tu dois bien te rappeler quelque détails, non ?
- Non." Ponctua-t-elle en se dégageant de l'emprise de Nus.
S'il avait été là hier, le souvenir de ce prêtre s'était maintenant évaporé. Moins d'une journée entre les griffes de Værmina et déjà on mettait à l'épreuve sa mémoire amputée. Sans compter cette histoire de Parchemin et de "futur hors du commun", puisque les rêves prémonitoires ne lui répétaient pas assez souvent la tâche qui l'attendait. Quelqu'un - quelque-chose ? - quelque-part se moquait d'elle, riait de toutes les coïncidences douteuses qui l'assaillaient sans relâche depuis tant d'années. Elle le savait. Mais rien ne pouvait être fait pour encrasser la mécanique du destin, alors autant s'y plier docilement. Elle repéra un tunnel étroit qui, elle supposait, menait à la sortie et l'approcha.
"Pas si vite ! La héla Evangeline. Ne crois pas m'abandonner deux fois d'affilée !
- T'inquiètes, je dois me rendre à l'Académie de toute manière, besoin d'informations pour sauver le monde et tout ça. Me débarrasser de toi maintenant serait juste une dépense d'énergie inutile."
Elle reprit son chemin sans plus payer d'attention à l'autre Brétonne qui, étrangement, se mura dans le silence. Parti comme ça l'était, elles entreprendraient le voyage jusqu'à Fortdhiver ensemble. Ô joie. Au moins, la magicienne semblait encline à cesser ses questionnements. Siltafiir espérait que cela durerait. Le passage les ramena bientôt à l'entrée de Saarthal, puis après un rapide résumé des événements aux autres étudiants, les deux filles retrouvèrent l'air libre du Grand Nord. Un sourire, satisfait malgré sa réunion de famille inopinée, accroché aux lèvres, l'Enfant de Dragon inhala les bourrasques aux relents de blizzard qui gratifièrent ses narines de picotements revigorants et entama leur retour à la civilisation.
À suivre…
Mots draconiques:
Bolog aaz, mal lir ! - Prie pour que j'aie merci de toi (littéralement: supplie merci), petit ver !
Dreh nii hinmaar ! - Fais-le toi-même ! (Super mature, je sais)
Iiz los dii - (La) glace est mienne. (Un petit rappel, si le titre du chapitre ne suffisait pas)
Encore une quête, mais légèrement modifiée cette fois. Légèrement. Surtout une excuse pour que Siltafiir puisse apprendre ce cri tout en restant un minimum fidèle au fonctionnement du jeu et à son personnage. La connaissant, jamais elle n'aurait suivi une troupe de mages en expédition si elle n'avait pas senti de mot de puissance d'abord.
Si ça manque de clarté, n'hésitez pas à m'en faire part, tout conseil, toute correction sont les bienvenus. Et si vous aimez bien le texte sans critique spéciale, vous pouvez me le dire aussi, c'est toujours encourageant. :D
En espérant que vous resterez vaillants face à l'attente, je vous souhaite de passer une délicieuse journée. Ou nuit, selon vos horaires.
