Krent Tiid ! Temps Brisé
Lydia, s'acquittant sans discuter de sa tâche de huscarl, gardait fidèlement Doucebrise, la maison de son thane. Elle y dormait, y entreposait son surplus d'équipement, nourrissait régulièrement la collection de livres qui alourdissait les étagères, entretenait la réserve de vivres, profitait du laboratoire d'alchimie presque neuf, balayait même la poussière quand le plancher revêtait des atours de crypte et, bien sûr, s'ennuyait à mourir.
Lydia respectait son thane, son titre, mais s'était attendue à plus d'action en devenant la subordonnée de l'Enfant de Dragon. Elle se rappelait précisément les événements de la tour de guet, le premier dragon vaincu. L'éveil du Dovahkiin. Elle se rappelait également la fierté sans pareille qui l'avait étreinte lors de sa promotion au niveau d'un huscarl, loin du rang de simple soldat. Si elle avait su que ses anciennes fonctions lui manqueraient… cela n'aurait rien changé, car sa loyauté envers le jarl lui intimait une aveugle obéissance. Elle soupira.
Pas une seule fois depuis son entrée service n'avait-elle pu accompagner son thane en mission et les journées monotones de Blancherive défilaient, entrecoupées seulement par des attaques de dragons. Parfois, la propriétaire des lieux passait une nuit dans la maison, abandonnait bijoux, armes ou lingots dans les coffres et armoires, puis s'en allait aussi simplement sans jamais s'étendre sur ses activités. Le seul événement notable, pour la plus grande honte du huscarl, avait été le cambriolage asséné à Doucebrise quelques semaines plus tôt. Une rafle impitoyable encore ignorée par la victime. Lydia espérait que les choses en resteraient là, même si elle doutait que le trop-plein d'espace dans les tiroirs demeure inaperçu. Le mal était fait, de toute manière.
Le feu ranimé, la porte verrouillée, son armure rangée à sa place habituelle, la guerrière voulut en finir avec cette journée trop pareille à la précédente et s'allongea, lasse, sur son lit. Yeux clos et couvertures levées, elle laissa les bruits de l'architecture la bercer doucement. Les craquements des poutres battaient un rythme irrégulier, le vent qui filtrait au-travers des infimes fissures des murs et des fenêtres les accompagnait de ses notes sifflantes, les crépitements du foyer dansaient au milieu de ce concert secret et les cliquetis de la serrure égayaient le tableau de leur chant tressautant. Elle releva brusquement ses paupières. La serrure. Cliquetis. Intrusion !
Elle sauta immédiatement de sa couche, empoignant son épée et sortant de sa chambre d'une enjambée prudente. Un coup d'oeil au bas des escaliers révéla la porte de la maison entrouverte et une figure encapuchonnée qui la traversait. Le sang de la huscarl bouillonna; on ne trompait pas sa vigilance deux fois ! Le visiteur n'avança que d'un pas dans la demeure et, déjà, la nordique attaquait, les poumons déployés dans un sauvage cri de bataille. L'intrus recula, se heurta à un mur, puis échappa un gargouillement étouffé quand Lydia lui saisit le col.
"Le coupable revient toujours sur les lieux du crime, murmura-t-elle en appuyant le bout de sa lame contre le ventre de son opposant, dis-moi où tu as caché ta prise de la dernière fois.
- Lyd-Lydia ! C'est moi ! Siltafiir ! Thane ! Amie ! Paniqua l'empoignée en agitant les mains.
- Mon thane ? S'étrangla la nordique avant de reculer, horrifiée par son affront. Par Ysmir ! Je suis désolée ! Je croyais qu'on crochetait la serrure et- et vous portez ce masque et je-
- Tout va bien, rassura la Brétonne en dévêtant les traits de Krosis, tu fais juste ton travail et puis… pour le crochetage… j'ai perdu ma clef, donc… Elle marqua une pause dans son explication. Qu'est-ce que tu voulais dire par "ta prise de la dernière fois" ?"
Le blêmissement et le regard fuyant de son huscarl l'interpellèrent.
"Raconte-moi ce qui s'est passé, insista-t-elle calmement.
- Un bandit a vidé la moitié des tiroirs, confessa fébrilement la guerrière, il y a un peu moins d'un mois, j'étais à l'auberge et, en revenant…"
Elle s'interrompit en voyant les yeux de son thane s'embraser sous un afflux de rage.
"Pardonnez-moi ! Je vous promets que je ne laisserai plus jamais-
- Quelle bande de sales petits ragnards ! Rugit soudainement l'indignée. Je vais leur apprendre à…"
Elle s'immobilisa, le poing en l'air. Prise d'un curieux questionnement, elle s'empara d'une lanterne et traversa la porte pour s'arrêter juste au devant de Doucebrise. Lydia, interloquée par ce comportement inhabituel, la suivit et s'étonna de la voir penchée sur l'encadrement, détaillant une rustre gravure; un rectangle strié emboîté dans un cercle que la huscarl n'avait jusqu'alors remarqué. Elle sursauta quand son thane dégaina une dague pour s'attaquer sauvagement à l'étrange symbole. Bientôt, un creux lisse le remplaçait, jurant violemment avec le bois ondulé de l'architecture.
"Qu'est-ce que c'était ? Interrogea la nordique.
- Une marque noire, siffla l'autre femme, un signe qu'utilisent les voleurs pour indiquer un butin. Ou autre chose, selon les besoins."
Elles s'apprêtèrent à rentrer, quand une insolente pulsion saisit la plus jeune. Ressortant la dague, elle se pencha sur le cadre de pin et y planta la lame dans un mouvement répétitif, arrachant de fines lamelles d'écorce et y dessinant un losange orné en son centre d'une paire de cercles entrecroisés.
"Voilà, ça devrait leur rafraîchir la mémoire, ricana-t-elle en rangeant son arme.
- Où avez-vous appris à reconnaître ces marques ? Questionna prudemment Lydia quand elles furent rentrées.
- J'étais membre de la Guilde, déclara simplement Siltafiir.
- Vous… Quoi ?! Vous ?
- Épargne-moi les discours sur l'honneur et la bonne manière d'agir, j'en ai déjà eu ma dose.
- Bien sûr, je n'y avais même pas pensé, mentit-elle en détournant les yeux, je suis juste surprise."
Siltafiir marmonna quelques mots incompréhensibles et lui souhaita une bonne nuit. La port de sa chambre fermée, ses vêtements mollement ôtés, elle pensa aux voleurs, à la gêne qu'ils lui avaient causée, décuplant encore sa colère et sa déception. Six mois à travailler ensemble, à rire, à boire, à se conter leurs missions, leurs échecs, à s'échanger leurs secrets, pour qu'elle ne devînt rien de plus qu'une adresse sur un contrat. Une boule dans la gorge, elle s'allongea et se couvrit jusqu'au menton. Ces traîtres payeraient de leur poche chaque grenat manquant, elle le jurait sur Zénithar.
xxx
Il y a un dragon à proximité.
"Enfin ! Quelle direction ?"
Siltafiir contourna les flaques de souvenirs, suivant anxieusement les indications du Crâne, impatiente de voir le monde par les yeux d'un immortel. Elle s'immobilisa une seconde quand une démangeaison similaire à celle que lui infligeait sa part manquante l'empoigna, mais se ressaisit en y décelant également les douceurs d'une âme à dérober.
Le voilà.
Elle se tenait devant une mare plus grande que toutes celles qui l'entouraient, plus agitée. Les chocs de batailles innombrables, le fouet du vent, une voix s'en dégageaient, des parfums brûlés et des morsures glaciales bouillonnaient sous la surface, des vibrations joueuses et orgueilleuses tapissaient l'étang. Tremblante, elle approcha de cette marmite surnaturelle et s'y pencha, comme elle l'avait fait avec celle de Brynjolf. À nouveau, le liquide l'imprégna, l'attira, et les images d'antan tourbillonnèrent alentours sans hiérarchie apparente. Elle voulut demander au Crâne quelle était la suite du plan, mais aucun son ne traversa ses lèvres. Portant les mains à sa bouche, elle réalisa qu'elle n'avait plus de mains. Plus de corps.
Calmez-vous, je vous entends. Murmura le Crâne. Entrez simplement dans un souvenir, peu importe lequel, et je le consumerai.
Elle obéit donc, observant les gouttes de mémoire et en isolant une au hasard. L'image désignée gagna en netteté, effaça ses congénères, les bourrasques du nord s'intensifièrent et une forêt de pins s'étendit sous les yeux hagards de Siltafiir. Un battement d'ailes régulier rythmait son avancée, accélérant quand les courants ascendants se raréfiaient, s'interrompant quand son auteur fatiguait. Elle volait ! Ou plutôt, son hôte volait, tranchant les nuages, surplombant majestueusement les terres enneigées, détaillant méticuleusement le sol, tentant de repérer les piètres joorre qui s'étaient crus capables de le vaincre. Une flèche traversa les arbres et lui blessa une patte; loin d'être grave, mais extrêmement agaçant. Immédiatement, il entama un vol circulaire à l'endroit d'où venait le trait, mais ne se trouva que plus frustré par l'habilité de ces humains à se cacher. Un second projectile partit d'une zone éloignée et sa patience s'évanouit.
LAAS YAH NIR
De suite, une dizaine de silhouettes écarlates dansèrent contre les aiguilles des conifères, trahissant l'emplacement des proies. Il plongea vers la plus proche, brisant un jeune tronc qui lui barrait le chemin, et déversa ses mots favoris sur le gibier tétanisé.
FO KRAH DIIN
Un blizzard destructeur balaya l'ennemi, l'emprisonnant dans un linceul cristallisé, mais le dragon n'eut loisir d'admirer son œuvre. Les autres mortels attaquaient déjà, profitant de son atterrissage pour dégainer leurs haches et épées. L'excitation du combat étreignit le reptile, déployant sa gorge une seconde fois dans un souffle glacé, repoussant presque la moitié des gêneurs. D'un balancement de sa queue il en jeta deux de plus à terre, d'une morsure il en élimina un autre, mais ces insectes lui tournaient autour sans répit et le piquaient de leurs dards métalliques. Pressentant que, malgré sa supériorité indubitable, le nombre supplanterait la puissance, il déploya à nouveau ses ailes et abandonna l'essaim d'un décollage hâtif.
Depuis l'humiliante déroute de Mirmulnir, entraînée par l'arrogance de celui-ci, les immortels montraient une inhabituelle vigilance face à leurs sujets atmoréens. Cette honteuse défaite avait taché d'une marque indélébile la réputation invincible des dov et les révoltes des mortels se multipliaient, ayant déjà abattu plusieurs de ses frères. Tout cela sans compter ce traître de Paarthurnax et son affection pour les humains à qui il enseignait le Thu'Um. Cette simple pensée arracha un sifflement dégoûté au dragon. Tous savaient que le plus sage des dovahhe défiait leur aîné à la moindre occasion, tous connaissaient son désir de le supplanter, car tous le ressentaient également, mais aucun ne se serait un jour abaissé à une telle ignominie. Ternir l'art de la Voix en l'offrant à cette vermine rampante, cela dépassait tous les désirs de grandeur.
Une volée de projectiles stoppa là sa réflexion. Avant de se plaindre, il lui fallait se débarrasser de son agacement présent. Encore une fois, il parla, et les silhouettes rougeoyantes lui révélèrent la position des inconscients. Ceux-ci avaient adopté un placement stratégique; une manœuvre habile, reconnut-il. Il faudrait les rabattre contre les flancs de la montagne, quelques coups d'ailes plus loin, mais l'épaisse couverture d'arbres limitait son champ d'action. Une idée découvrit alors ses crocs dans un sourire carnassier.
YOL TOOR SHUL
Il traça un mur de flammes d'un côté du groupe de combattants, les menant dans un déplacement désorganisé. Leur formation se désagrégeait, leurs chances de survie également, et l'incendie gagnait en puissance à mesure qu'il dévorait les pins. Rapidement, ils rejoignirent la lisière du bosquet, s'exposant au regard du dragon pour sa plus grande satisfaction. Il savoura un instant l'agitation paniquée des impudents débusqués, se posa à quelques foulées de ses proies, puis inspira profondément pour mettre le point final à cette distrayante chasse. Mais il fut interrompu.
Une déchirure.
Une cassure dans la trame du Temps.
Son âme vibra sous la douleur. Il se tourna vers la source du malêtre, sonné par cette sensation jusqu'alors inconnue, et frémit des cornes à la queue en observant de loin la montagne la plus haute de Bordeciel, la Gorge du Monde, d'où s'élevait une colonne lumineuse sûrement visible dans tout le pays. Un pressentiment étouffant saisit le dragon, la certitude que, cette fois, la rébellion des mortels entraînerait leur victoire. Le rugissement furieux et terrifié d'Alduin confirma cette pensée. Après seulement une poignée de secondes, toute trace du Dévoreur de Monde s'était évaporée, n'abandonnant qu'un vide inconfortable dans le fourmillement des âmes de Nirn. Choqué par cet événement impossible, le dragon en oublia la troupe d'humains qui l'agaçait tant, leur laissant tout loisir de l'approcher, de l'attaquer, de le blesser à l'aile.
Il hurla, les insulta, en tua un de son souffle, voulut reculer, mais ils l'encerclaient, le harcelaient, et, s'ils le vainquaient, sans le pouvoir d'Alduin son essence se disperserait entre les flots du temps. La mort lui apparaissait comme un concept flou, un simple mot parmi tant d'autres, mais se voir banni de son corps physique semblait un moyen radical d'en saisir au moins quelques bribes. Aucun dragon ne désirait cela. Aucun. Malheureusement, la membrane fendue de son seul moyen de transport le clouait au sol et lui assurait une cuisante défaite. Paniqué à la pensée d'une telle humiliation, il en oublia presque le cri qui sauva son âme:
GAAN LAH HAAS
Deux humains, qui se tenaient sur le trajet du souffle drainant, tournèrent de l'œil et s'effondrèrent, nourrissant le dragon de leur énergie vitale, soignant son membre blessé, rétablissant l'équilibre naturel des forces. Le reptile déploya son aile revigorée, puis l'autre, battit l'air d'un mouvement de retrait et se délecta des plaintes frustrées qui suivirent son envol. Cela faisait plusieurs décennies qu'il n'avait employé pareil vocabulaire; ces humains montraient une indéniable ténacité. Malgré cette respectable performance, leurs espoirs furent brisés par le rétablissement du dragon, à seulement une estoque de son élimination, et ils se dispersèrent comme une assemblée de cloportes terrifiés. Le prédateur échappa un rire tonitruant et les balaya, un à un, dans une chasse qu'il jugea trop aisée.
Ce problème réglé, il osa un regard vers la Gorge du Monde, soudainement pris d'une terrible hésitation. L'absence du despote noir se faisait plus oppressante de minute en minute; aucun doute ne subsistait quant à sa perte. Que fallait-il choisir ? Combattre ceux qui avaient vaincu Alduin en personne ou élire un pic reculé pour y installer sa demeure loin de tout danger ? La seconde option impliquait une fuite continue, dénuée d'honneur, indigne d'un dovah. Vivre en craignant les mortels ? Inacceptable. Il s'élança vers les neiges éternelles qui couronnaient Bordeciel, prêt à relever cette décisive épreuve.
Le trajet fut court, mais la brisure temporelle handicapait ses perceptions, mêlant les époques, secouant l'air de turbulences nerveuses, et il lui sembla voler des heures durant au milieu des bulles d'instants qui se formaient alentours, des courants contradictoires, échos d'âges lointains, futurs ou passés. Qu'avaient donc fabriqué ces hommes pour affecter l'Histoire à ce point ? Leur faible magie n'aurait eu un tel impact, il devait s'agir d'autre chose; sûrement un stratagème de Paarthurnax. Il atteignit le sommet du pic et y trouva sa réponse: l'un des deux humains présents tenait fermement un énorme rouleau de papier que l'immortel reconnut immédiatement. Un Parchemin des Anciens.
"Meyye ! S'exclama le dragon. Kel gut nol joorii mindoraan !"
Ces inconscients maniaient un pouvoir qui les dépassait - bien que les résultats semblent pencher en leur faveur - une puissance que même les dragons n'osaient s'approprier.
"C'est votre tyrannie qui nous a menés là ! Répliqua le plus jeune des hommes, agenouillé près d'un corps fraîchement tombé. En vous prenant pour des dieux, vous avez causé cette guerre ! Et vous allez la payer !"
Il se releva et, avant que le dragon ne puisse attaquer, hurla. Ses mots atteignirent l'oreille du reptile, mais il ne sut leur donner un sens, n'en comprit rien, que la douleur qu'ils amenaient. Sa connexion jusqu'alors immuable avec les flots du temps s'amenuisa. L'immortel se sentit soudainement faible, limité, dépossédé de ses crocs, de ses écailles. De ses ailes. L'air s'alourdit brusquement, le sol se rapprocha. Il tomba.
Siltafiir s'effondra, son dos heurtant violemment le sentier de Quagmire, à un pas de la flaque. Choquée, le souffle coupé, elle haleta, peinant à retrouver ses propres sens, ses propres souvenirs dans les méandres de son esprit.
C'était un mauvais calcul, siffla le Crâne, je n'ai pas réussi à dévorer quoi que ce soit.
Elle ne dit rien, se contentant de porter ses mains à hauteur de visage.
Les dragons sont trop puissants, reprit-il, nous serons bien obligés de nous en prendre à des mortels.
Un tremblement irrégulier s'empara des épaules de la jeune fille. Le Crâne s'interrogea alors sur cet inhabituel manque de loquacité.
Vous allez bien ?
Elle échappa un sanglot étranglé, puis un autre, puis abandonna sa lutte et pleura tout son soûl dans un concert de plaintes douloureuses.
Enfant de Dragon ? S'alarma l'artefact.
Elle ne parvint à articuler de réponse compréhensible, se recroquevilla, un bras contre chaque tempe, bascula sur le côté et continua d'évider son chagrin.
Siltafiir ! Insista-t-il avec empressement.
"C'était horrible, couina-t-elle faiblement, ce… cri…"
Elle happa l'air quelques fois dans l'espoir de calmer sa respiration tressautante, mais ne parvint qu'à nourrir ses pleurs. Ces mots que l'ancien humain avait prononcés, ces syllabes incompréhensibles résonnaient encore entre les atomes de la Brétonne, tout comme ils avaient incisé les chairs du dragon, l'avaient réduit à l'état de simple… de simple…
"Joor." Mima-t-elle aigrement du bout des lèvres.
Cet homme avait employé le Fendragon, elle le savait, elle le sentait. Rien d'autre n'aurait pu jeter un immortel à terre. Pas si puissamment. Ses larmes se tarirent lentement, mais la douleur demeurait, l'étreignait de l'intérieur, comme s'étant définitivement installée en son âme. Puis elle réalisa: cette sensation ne disparaîtrait jamais, car, depuis toujours, elle avait été une part intégrante de son être, de son corps mortel. Ses genoux se rapprochèrent un peu plus de son torse. Ça n'était qu'un simple souvenir qui, de plus, naissait d'une vie autre que la sienne, mais cette impression d'infinité, cette ignorance de la mort lui avaient parues naturelles, acquises, comme faisant partie de sa personne. Un moment durant, elle avait goûté au véritable pouvoir des dov; un moment seulement.
Nous devrions continuer, murmura le Crâne d'une voix étrangement douce.
La jeune fille acquiesça faiblement. Les membres lourds, elle se redressa, heureuse d'avoir troqué son armure contre une simple tunique avant d'entrer en Quagmire. Dans un tel état, elle ne se pensait guère capable de transporter le quart de son équipement habituel. Le pas traînant, elle marcha sans but entre les mares, désirant avant tout s'éloigner de celle du dragon.
Vous devriez plonger dans un autre esprit, suggéra le Crâne, le plus tôt sera le mieux.
"Hein ? Ah… Oui, c'est vrai… " Confirma-t-elle distraitement.
Elle chercha donc une victime appropriée.
xxx
Même une nuit pour le moins chargée n'avait su effacer la colère que Siltafiir éprouvait envers la Guilde. Son expérience par les yeux d'un dragon et son retour à la terre ferme, bien qu'ayant abandonné un goût amer au coin de ses lèvres, ne supplantaient encore le sentiment de trahison qui suintait de ses tiroirs évidés. Sa vexation était telle que voir le Crâne dévorer les souvenirs d'un quelconque hors-la-loi n'avait suffi à l'apaiser; il lui fallait obtenir réparation. C'est sur cette idée qu'elle avait repris la route, plus au sud que ce que son plan initial prévoyait. Au lieu de regagner l'ascenseur d'Alftand, qui lui permettrait de reprendre sans détour son exploration de Griffenoire, Vendeaume l'accueillerait pour une nuit, avant qu'elle ne rejoigne Faillaise où l'attendaient ses traîtres d'anciens collègues. Passant les portes de la ville, elle se dirigea vers le marché, désireuse d'alléger son bagage chargé d'acquisitions plus ou moins frauduleuses. Malheureusement, le destin avait un horaire différent en tête.
Un hurlement puissant secoua les bâtisses de roc et hérissa le poil de tous. La jeune fille grogna, mais conserva son calme en inspectant le ciel pendant que les habitants s'agitaient, saisissant un arc ou s'abritant sous un toit. Rapidement, elle repéra la source du désagrément: un dragon de glace qui volait en cercles au-dessus de la cité. Se rappelant le souvenir visité la nuit précédente, Siltafiir s'imagina ce qu'il pouvait bien penser, perché dans les nuages, à observer cette fourmilière désorganisée. À observer ces insectes.
La Brétonne grimaça en songeant au mépris qu'éprouvaient les reptiles pour toutes les races bipèdes et se jura de faire payer ce manque d'intuition au moins à ce dragon. Elle se rua vers un espace plane, libre de maisons et autres boutiques, puis banda son arc en direction de la bête. Un rapide coup d'œil lui apprit que presque tous les gardes de la ville l'imitaient déjà. Plusieurs volées de flèches s'élevèrent de l'assemblée, agaçant le dragon, l'encourageant à élire une cible parmi les combattants; il choisit l'un des soldats. Entamant une descente rapide, il déploya ses serres et visa sa proie, prêt à écraser ce vermisseau, puis à offrir le même sort à tous ses frères rampants. À peine se tourna-t-il vers sa future victime que Siltafiir comprit son objectif, puis elle jeta à son tour un regard vers cette proie hasardeuse pour s'étrangler derrière son masque.
Trop lent, l'homme ne pouvait esquiver. Trop faible, les griffes acérées le transperceraient sans difficulté. Elle courut, s'élança dans le but de désamorcer cet assaut, mais le monstre se rapprochait. Une seule solution se présentait.
WULD
Projetée vers l'avant, la jeune fille heurta le soldat, les envoyant tous deux à terre, le poussant loin de la trajectoire mortelle du reptile. Celui-ci, ne s'attendant guère à une telle réplique, atterrit lourdement là où aurait dû se tenir l'humain chanceux et se tourna vers celle qui avait usé de la Voix. Un instant durant, il s'étonna de ressentir tant de puissance se dégager d'une âme mortelle, mais réalisa vite que le sang de ses frères courait dans ces veines indignes. Il gronda de mécontentement et siffla:
"Dovahkiin los Paaksedov.
- Hio kos Paaksedov !" Cracha-t-elle en se relevant, plus blessée par ces mots que ce qu'elle voulait bien admettre.
Vexés, les parleurs inspirèrent profondément et, d'une même voix, tentèrent de refroidir l'ardeur de leur interlocuteur.
FO KRAH DIIN
Les souffles se heurtèrent, se mêlèrent, formèrent un tourbillonnant blizzard au centre de la place, forcèrent les spectateurs impuissants à lever les bras pour se protéger de la tempête gelée. La Brétonne haleta, engourdie par cet échange, mais sortit son épée sans attendre. Encouragés par son mouvement, les guerriers alentours l'imitèrent et, bientôt, l'envahisseur ne savait où donner de la tête. Il éleva sa queue et frappa le sol de toute sa force, propageant un choc suffisant pour déséquilibrer ses assaillants et lui permettre de regagner la sécurité des airs. L'Enfant de Dragon grommela, frustrée, mais ressortit son arc et tira, encore et encore, toujours suivie par les soldats. Une colonne de givre tout droit sortie de la gorge reptilienne traversa alors la place, touchant plusieurs humains de ses mortelles syllabes. Les guerriers conservèrent malgré tout une formation stable en ne cessant de le bombarder de leurs projectiles. Fatiguant rapidement sous ces attaques sans fin, l'immortel perdit haleine et se sentit forcé de redécouvrir la vulnérabilité qui accompagnait la terre ferme. Il jeta son poids sur les dalles de Vendeaume, secouant à nouveau ses ennemis, puis hurla sans attendre qui ne l'approchent.
FO KRAH DIIN
À son grand désarroi, l'un des opposants esquiva et attaqua. Ignorant la tête gargantuesque, l'Enfant de Dragon s'était jeté sur l'aile bleutée du reptile, taillant et estoquant chaque articulation dans une rage frénétique. En quelques coups, il fut cloué au sol et poussa un rugissement de colère désespéré. Le pouvoir du Dovahkiin se faisait plus oppressant à chaque goutte de sang qu'il versait, son âme vibrait de panique, il déploya alors ses crocs, tournant son cou serpentin dans le but de dévorer celle qu'il avait sous-estimée. Elle ne lui en laissa pas l'occasion.
YOL TOOR SHUL
Le dragon se déconcentra un instant, la peau dévorée par les mots qu'il détestait le plus, mais éleva bien vite son aile épargnée pour balayer l'opposante d'une bourrasque violente. Elle s'effondra sous l'assaut venteux, le souffle coupé par la rencontre brusque de son dos avec la roche. Saisissant cette opportunité, le dragon se jeta en avant, ignorant les braises qui couvraient ses écailles froides, juste intéressé par sa victime. Il regretta ce manque d'attention, car les autres humains ne s'étaient contentés d'un rôle de spectateurs. L'un d'entre eux dépassa ses compatriotes et attira sur lui les regards de tous.
FUS RO DAH
Le dragon bascula, ne sachant se retenir après les dégâts subis par son aile, et la Brétonne put retrouver une posture combattive, sans manquer de dévisager le nouvel arrivant. Ulfric Sombrage lui-même brandissait son épée, sa poitrine se levant et s'abaissant rapidement alors qu'il tentait de reprendre son souffle. Siltafiir saisit cette opportunité et empoigna fermement Mort-Dragon, plus que jamais décidée à achever cet insolent lézard. Ce dernier s'était redressé, jurant qu'il ne mourrait pas sans une lutte honorable, et voulut parler à nouveau, mais sa fatigue offrit un avantage à l'humaine. Elle le devança.
KRII LUN
Les pupilles draconiques se fendirent brusquement, un râle lui étreignit la gorge et des spasmes secouèrent ses muscles, n'épargnant aucune part de son être. Les soldats et leur jarl s'étaient maintenant approchés, plantant leurs lame entre les écailles, frappant les cuisses et les côtes, évitant les battements de la queue écailleuse, et Siltafiir se rua sur le cou sans défense, visa une zone fragile et y enfonça son épée. Un dernier sursaut agita la bête, puis sa carcasse s'étala, inerte, entre les vainqueurs.
L'Enfant de Dragon soupira de soulagement et se détourna du corps à la recherche d'un siège quelconque. Elle repéra un petit escaliers et s'en accommoda, s'y laissant tomber en étirant ses bras engourdis. L'excitation retombant, les brûlures glaciales du souffle ennemi grignotaient ses bras et ses mains. Elle grommela, mais se détendit en sentant l'âme durement gagnée se détacher de son propriétaire. Sans même observer la scène, elle voyait les volutes d'énergie se soulever, s'embraser, se rassembler, voler dans sa direction et nourrir sa soif de connaissances. Elle rit discrètement en entendant les exclamations impressionnées des spectateurs et leur décocha un regard amusé. À l'avant du groupe, le chef rebelle semblait hésitant quant à l'attitude appropriée. Il s'avança soudainement et, arrivé près de la jeune fille, lui tendit la main.
"Beau combat, Dovahkiin."
Elle frissonna, fixa la paume qu'il lui offrait et se releva sans aide en marmonnant un simple "Merci". Il fronça les sourcils devant ce dédain évident, mais n'abandonna ici la discussion.
"En remerciement pour vos services, accepteriez-vous de partager ma table ? Les histoires des dragons tombés sous votre lame sont nombreuses, mais entendre votre version des faits serait un privilège."
Elle se félicita de porter un masque, certaine que son expression décontenancée l'aurait irréparablement décrédibilisée. Elle examina un instant la foule de soldats qui les détaillaient avec intensité, puis repéra alors celui qu'elle avait sauvé de l'attaque aérienne et son cœur accéléra sensiblement. Son éternelle natte blonde défaite par les hostilités, Ralof ne la quittait pas des yeux. Il affichait un air hésitant, content et inquiet tout à la fois. Bien que la perspective de goûter aux mets cuisinés dans le Palais des Rois l'enchante, l'auberge lui apparaissait une option plus reposante, sans compter qu'un dîner en compagnie d'Ulfric l'empêcherait de conter ses aventures aux seules oreilles qu'elle en avait élues dignes. Heureuse de son plan, elle se tourna une dernière fois vers le jarl et lui répondit platement:
"Non."
Sans plus discuter, elle marcha vers les soldats, fendant la foule sans cesser d'observer Ralof. Il frétillait, nerveux, encore plus troublé qu'auparavant; sûrement un effet de l'invitation refusée. Il s'immobilisa brusquement en réalisant qu'elle se dirigeait droit vers lui, élevant ses sourcils bien haut. Les mots lui manquèrent quand elle le saisit par le bras, accélérant son pas tandis qu'elle le tirait vers l'auberge. Des murmures, tantôt enthousiastes, tantôt réprobateurs, s'élevèrent au sein des spectateurs, mais l'Enfant de Dragon ne répliqua qu'en resserrant sa prise sur le poignet du Nordique. Sonné par cette suite d'événements inattendus, il la suivit sans protester, jetant malgré tout quelques coups d'œil inquiets vers les autres sombrages, et surtout vers son jarl. Qu'allait-il donc penser de cette démonstration déplacée dont elle les avait accablés ? Ils passèrent les portes de la taverne et la jeune fille s'approcha du bar, commandant naturellement une soupe et une bouteille.
"Prends ce que tu veux, c'est moi qui offre." Encouragea-t-elle en se tournant vers son captif.
Il bégaya un instant, mais se dit que, de toute manière, ses collègues l'inonderaient de questions. Autant que ça en vaille la peine. Il accepta donc cette proposition et suivit son amie jusqu'à la chambre qu'elle venait de louer, son propre repas entre les mains. Dès que la porte fut refermée, elle ôta son masque, baissa son capuchon et se massa vigoureusement le crâne, ébouriffant encore plus ses cheveux déjà indomptés en se dirigeant vers une chaise.
"Ça fait du bien." Ronronna-t-elle en dégustant son hydromel.
Le soldat acquiesça, goûtant sa propre boisson avec approbation. Il entamèrent le repas, demeurant silencieux pour un moment, puis il brisa la glace:
"Merci. Je serais mort sans ton intervention.
- Je ferais une piètre héroïne si je n'arrivais même pas à sauver mes amis, sourit-elle en soufflant sur son bol.
- Quand même, c'était impressionnant. Te voir parler avec un dragon… Tu fais ça souvent ?
- Plus que ce que j'aimerais. J'ai dû absorber au moins une vingtaine d'âmes depuis qu'on s'est vus à Faillaise."
Le sombrage s'étouffa en découvrant ce nombre et s'empressa de l'interroger sur ses aventures. Elle les lui conta sans retenue, décrivant en détails ses duels contre les lézards volants, ou des camps de brigands, ou d'autres créatures diverses et variées, sa rencontre avec sa sœur, sa visite de l'académie, et il baissa finalement les yeux en avouant que ses exploits n'égalaient guère ceux de la jeune fille. Elle cligna quelques fois des paupières, s'étonnant d'une telle gêne.
"Ton rôle est tout aussi important que le miens, souffla-t-elle avec douceur, sans gardes, sans soldats, n'importe quelle ville serait vulnérable aux attaques et votre rébellion n'irait pas bien loin.
- Tu me flattes, rit-il en vidant sa flasque, mais je sais bien que tu es plus nécessaire à l'avenir du monde que je ne le serai jamais.
- Sans des gens comme toi, ma mission n'aurait aucun sens, répliqua-t-elle, ce monde vaut la peine d'être protégé parce que tu y vis."
Elle réalisa la portée de ses paroles et, détournant les yeux, bégaya:
"Enfin, parce que des gens comme toi y vivent, je veux dire. Si je me retrouvais toute seule, même sans dragons, la vie serait ennuyeuse, hein. Du coup… Tu veux une autre bouteille ? Je vais en chercher."
Elle s'empara de son masque, voulut sauter de sa chaise, mais une main apaisante lui saisit gentiment l'épaule, calmant son accès de nervosité. Ralof, penché au-dessus de la table, lui souriait maladroitement.
"Détends-toi, c'est ma tournée. Tu as déjà payé le repas, je peux bien me charger de ça."
Il la reposa donc sur son siège et se dirigea vers la porte. La jeune fille, quant à elle, triturait Krosis de ses doigts embarrassés. Oui, Ralof lui plaisait, et plus qu'un peu, mais un tel aveu paraissait téméraire. De plus, d'autres personnes justifieraient tout autant son dévouement; Evangeline, Brynjolf, Delvin, les citoyens de Blancherive, ceux de Faillaise, tout Bordeciel. Tous les mortels. Osant un regard vers la porte, elle sentit ses joues s'échauffer. Malgré toutes ces âmes dignes d'être protégées, un seul visage lui venait en tête quand elle songeait à son devoir et elle ne savait trop dire pourquoi. Ses iris bleus aux lueurs enfantines ? La force de ses convictions ? L'attention qu'il lui portait ? Peut-être sa manière de la regarder droit dans les yeux sans jamais s'attarder sur ses cicatrices, de lui sourire franchement, de s'inquiéter pour elle ?
Comme c'est mignon, susurra le Crâne, capable de tenir tête à un dragon, mais perdant ses mots face à un simple humain.
"Oh, c'est bon ! Grogna-t-elle en rougissant. On ne peut pas tous être des bâtons sans émotions."
Vous me blessez, Enfant de Dragon. Me nourrir de souvenirs mortels durant tant d'années m'a doté d'une certaine empathie.
"Sans rire ? J'avoue que je suis surprise."
N'importe qui se trouverait influencé en de telles conditions, se justifia-t-il, n'importe qui.
Elle médita un moment sur ces paroles, se sentant désagréablement visée par les derniers mots de son compagnon de route. La porte s'ouvrit alors et elle se concentra sur son masque, ne s'en détachant que lorsque son breuvage atterrit sur la table. Ralof entama sa propre bouteille en se rasseyant, puis laissa ses épaules s'affaisser.
"Ça va ? S'inquiéta la Brétonne.
- Oui, juste des collègues qui étaient au bar, marmonna-t-il, ils peuvent être lourds parfois. Pires que des femmes de chambre, à toujours chercher les ragots. Je sens que ça va parler dans mon dos pendant un moment.
- Ça doit être pénible, constata-t-elle en jouant avec sa bouteille.
- Tu n'as pas idée, s'emporta le Nordique, toutes ces questions, toute cette attention, c'est… Oh…
- Oui ? Ricana-t-elle en levant les yeux.
- Rien, rien, ponctua-t-il en brassant l'air d'une main, oublie même que j'ai dit quoi que ce soit."
Ils ne pipèrent mot durant une poignée de secondes, se contentant de siroter leurs boissons en évitant ostensiblement de croiser les pupilles de l'autre. Puis le sombrage brisa le silence:
"Pourquoi avoir refusé l'invitation d'Ulfric ? Ne te méprends pas, je suis content de passer la soirée avec toi, mais je me demande quand même…
- Disons que je préfère éviter les interrogatoires. En plus, il aurait essayé de me faire rejoindre vos rangs pendant tout le repas. Assez pour attraper une indigestion si tu veux mon avis.
- Il veut juste mettre toutes les chances de notre côté, argua Ralof.
- Je n'ai jamais dit qu'il avait tort. C'est juste le mauvais moment pour ça. Tant qu'Alduin respire, aucune guerre n'a d'importance.
- C'est vrai, acquiesça-t-il d'un air sombre, Alduin…"
Un voile pessimiste couvrit ses traits et la Brétonne s'agita.
"Mais, euh, tout ira bien, parce que je vais gagner et, hum, accomplir mon destin, tout ça. Après tout le temps que j'ai passé à m'entraîner et à rassembler des informations, c'est impossible que j'échoue."
Elle ne put empêcher ses lèvres de tressauter en prononçant ces derniers mots. Impossible ? Vraiment ? Un frisson la parcourut, son estomac se contracta, le sang abandonna son visage. Malgré cet acte peu convaincant, le sombrage se rassura et lui décocha un sourire reconnaissant. Elle le lui rendit et ils terminèrent leurs boissons au rythme de la conversation. La dernière goutte ingurgitée, le Nordique déclara avoir déserté son poste pour un temps assez long.
"Je parie qu'ils vont me refiler la ronde nocturne pour se venger de mon absence." Geignit-il en saisissant la poignée de la porte.
La jeune fille échappa un rire compatissant et posa une main réconfortante sur son bras ganté. Lui-même couvrit ces doigts fins d'une paume épaisse, attendit une seconde la réaction qui s'ensuivrait et, ne décelant aucun refus, se pencha lentement. Le cœur de Siltafiir rata un battement, puis elle éleva ses talons, laissant doucement tomber ses paupières tandis que leurs respirations se mêlaient. Elle sentit d'abord les picotements de sa barbe, puis le parfum moite de son armure, puis le goût doucereux de l'hydromel. Ses mollets fatiguant, elle passa les bras derrière la nuque du guerrier, tandis qu'il enlaçait fermement ses reins d'une main et soutenait délicatement sa mâchoire de l'autre.
"Au moins je saurai à qui penser durant mon tour de garde." Murmura-t-il d'un souffle ténu.
La jeune fille gloussa, écarlate, et déposa à nouveau ses lèvres contre celles du soldat, trop euphorique pour répondre intelligemment à ce doux compliment. Ils se souhaitèrent bonne nuit, s'embrassant entre chaque mot, puis Siltafiir ferma la porte, un sourire hébété illuminant ses traits.
À suivre…
Mots draconiques:
dovah(he) - dragon(s)
joor(re) - mortel(s)
mey(ye) - idiot(s)/imbécile(s)
Kel gut nol joorii mindoraan - (Le) Parchemin (est) loin/au-delà de (la) compréhension d'un mortel.
("-ii " marque le possessif, tout comme le "-'s" de l'anglais (dont s'inspire la langue draconique). "Joorii mindoraan" est donc "Mortal's understanding" qui est "Compréhension d'un/du mortel") C'était la minute "Grammaire Draconique" ou "Comment Vous Encombrer l'Esprit avec des Connaissances Parfaitement Inutiles".
Dovahkiin los Paaksedov - (L')Enfant de Dragon est (la) honte de la race des dragons.
Hio kos Paaksedov ! - Tu es (la) honte de la race des dragons ! (On atteint des sommets de maturité… Faudrait vraiment qu'elle rafraîchisse sa réserve d'insultes.)
Wouh ! Les histoires d'amour ça me rend tout chose. C'était dur de pas directement passer à la partie intéressante pendant que j'écrivais ça, huhuhu.
Ahem… Donc, oui, voilà, un chapitre de plus, avec plus d'action
Sinon, merci à Rusty pour la correction.
J'ai profité de cette modification pour mettre à jour mes quatre premiers chapitres (sans compter le prologue). Principalement des "s" et majuscules mal placés, voire absents, mais, bien qu'on soit loin de la fin du monde littéraire, c'est toujours des fautes, peu importe leur légèreté. Comme quoi, même plusieurs relectures rigoureuses ne suffisent pas à éliminer toutes les erreurs.
Donc oui, n'hésitez pas à me le dire si vous en repérez, parce que dans des chapitres de cinq-mille mots on a vite fait d'en laisser filer.
J'attends toujours vos critiques ou simples compliments et je loue votre patience, lecteurs adorés.
En vous souhaitant un joyeux 25 de Soirétoile (ou Noël, si vous habitez dans le monde réel).
Bonnes fêtes à tous !
