Zaamhus ! Servitude

Ici en mon temple…

Siltafiir s'immobilisa au milieu de Quagmire, interpellée par cette voix si familière. Mais personne ne parlait, aucune âme errante, aucune flaque particulièrement bruyante, rien. L'avait-elle imaginée ? Non, des mots résonnaient effectivement alentour, insaisissables pour la plupart, imposant leur rythme à l'Oblivion. Parfois, en se concentrant, elle en comprenait quelques-uns.

Je grandis, toujours plus près de vous…

Les phrases vibraient contre sa peau, suivant les battements de… d'un cœur ? Non, pas d'un cœur, ni d'un tambour. L'image d'une lame heurtant une armure gagnait en netteté. Pas une armure non plus, réalisa-t-elle en tendant l'oreille, un roc. Un automate dwemer qui avançait dans un couloir de pierre peut-être ? Non, ça n'avait aucun sens, les araignées ne marchaient pas avec un rythme si régulier, et les sphères ne marchaient pas du tout. D'ailleurs, elle voyait mal comment une de ces créatures mécaniques aurait pu entrer dans l'auberge où elle passait la nuit.

Vos mains étaient oisives, maintenant je parle à travers elles…

Le rythme grimpait dans ses bras, dans ses épaules, l'empêchait de se concentrer sur l'origine véritable de cette voix envoûtante et sur les mots qu'elle prononçait. Une réponse l'attendait forcément sur Nirn, aussi chassa-t-elle le sommeil qui l'habitait. Elle lutta contre un brouillard visqueux qui l'empêchait de regagner son corps, retrouva lentement ses sens, un par un. Les mots vibraient à présent dans son torse, le long de sa gorge, contre ses dents.

- Et quand le monde entendra… et quand le monde… verra ?

Elle cligna de l'œil, reconnut sa main droite serrée autour d'un manche en bois, lui-même appartenant à une pioche. Des bredouillements s'écoulaient encore de ses lèvres alors qu'elle arrêtait son bras au milieu d'un geste. Pourquoi tapait-elle sur un caillou ? Un regard vers ses jambes la réveilla complètement. La pioche tomba de sa main, dans l'eau qui montait presque jusqu'à ses cuisses dénudées. Agrippant sa tunique dans l'espoir de conserver un minimum de décence, elle poussa un coassement confus :

- Qu'est-ce qui se passe ?

- Intéressant, vous semblez montrer une certaine résistance à ce qui a asservi tous ces gens.

Hagarde, elle tourna sur elle-même, découvrant la construction sur laquelle elle avait travaillé contre son gré, et plus d'une dizaine d'autres personnes, toutes murmurant les mots envoûtants qui l'avaient poursuivie jusqu'en Quagmire. Aucune ne semblait lui prêter attention, à l'exception d'un Dunmer aux robes riches, les mains jointes derrière son dos droit, dressé au bord du cercle rempli d'eau dans lequel elle pataugeait.

- Puis-je vous demander ce que vous faites ici ?

- J'aimerais bien le savoir, maugréa-t-elle en sortant de l'eau, la confusion lentement remplacée par l'indignation, Miraak a besoin d'ouvriers apparemment.

- Miraak, dites-vous ? répéta-t-il en aplatissant sa barbe. Ce nom m'est familier mais impossible de… Ah ! oui, je me rappelle. Mais ça n'a aucun sens, il est mort depuis des millénaires.

- Non, il est vivant. Ses laquets ont essayé de me tuer.

Les yeux du Dunmer s'écarquillèrent, pour mieux se plisser un instant plus tard. Il n'inspirait qu'une sympathie limitée à Siltafiir, et la série de questions dont il l'assaillit n'améliora guère son opinion de lui. Qui était-elle, comment savait-elle que Miraak était en faute, pourquoi la tentative de meurtre et, surtout, d'où lui venait sa résistance naturelle à la magie inconnue qui asservissait l'île ?

- Je suis Enfant de Dragon.

- Tout comme Miraak, compléta-t-il avant de se tourner vers les ouvriers envoûtés, et vous dites qu'il est responsable de cette transe collective ? Je ne sais pas ce que tout cela signifie, mais c'est terriblement fascinant. S'il s'agit effectivement de son œuvre, les ruines de son temple au centre de l'île recèlent probablement plus de réponses.

Il mit fin à leur discussion en annonçant que ses recherches sur le terrain s'achevaient là. Trop heureuse d'avoir une destination précise où poursuivre sa traque, elle ne s'offusqua pas de son impolitesse, et puis certains des ouvriers semblaient reprendre leurs esprits, mieux valait s'enfuir. Heureusement, la ville ne se trouvait pas loin, aisée à repérer sous les rayons rosés du soleil matinal. Protégée des regards indiscrets par son invisibilité, Siltafiir retourna dans sa chambre, à l'auberge, où Nahlaas l'accueillit d'une voix paniquée.

Que t'est-il arrivé ? Où t'es-tu rendue ? J'ai senti une onde d'énergie, puis tu t'es levée en récitant une prière, et…

Elle le calma en lui promettant que tout allait bien et qu'il pourrait regarder ses souvenirs dès qu'elle se serait habillée. L'impatience de Nahlaas agita l'air jusqu'à ce qu'il obtienne ses réponses, lesquelles ne l'apaisèrent que temporairement. En chemin pour le temple, il l'assaillit de suppositions, mais elle ne retint que la conclusion de son monologue : seul un être extrêmement puissant pouvait asservir tant de gens depuis un autre plan.

Impossible de lui donner tort ; à destination s'érigeaient de hauts échafaudages sur lesquels fourmillaient beaucoup plus d'ouvriers qu'autour de la pierre de Corberoc. Le bourdonnement de la prière qu'ils récitaient flottait dans l'air, étouffé par les flocons cendrés qui tombaient lentement alentour. Approchant prudemment de l'édifice, Siltafiir crut entendre des appels venant de son centre, suppliques rauques prononcées par une voix féminine. Une Nordique courait d'un ouvrier à l'autre, criant leurs noms, tirant sur leurs bras, secouant leurs épaules, sans résultat.

- Vous, là, qu'est-ce qui vous amène ici ? dit-elle dès qu'elle remarqua Siltafiir, une main serrée autour du manche de sa hache.

L'interpellée répliqua qu'elle cherchait Miraak. L'étonnement étira le visage fatigué de l'inconnue et défronça ses sourcils.

- Donc, comme mon père, vous pensez qu'il est de retour ?

- Je le sais, corrigea-t-elle en croisant les bras, il a essayé de me faire tuer.

Elle lui posa les mêmes questions que le Dunmer, mais sans son détachement hautain, et prit en plus le temps de se présenter. Frea de la tribu des Skaal cherchait à libérer son village de l'influence mystérieuse qui s'emparait de l'île, aussi suggéra-t-elle qu'elles s'aventurent ensemble dans les tréfonds du temple. N'y voyant aucune objection, Siltafiir ouvrit la voie.

Les premiers couloirs ne leur réservèrent aucune mauvaise surprise, à l'exception de quelques êtres arborant le même masque et les mêmes robes que ceux qui l'avaient attaquée à Faillaise. Ces ruines ressemblaient à toutes celles qu'elle avait visitées sur le continent, entre les brasiers, les gravures usées et tout ce qu'elle distinguait de l'architecture, elle se serait presque crue de retour en Bordeciel. Puis elles atteignirent la première grande salle.

En place de chandeliers, nombre de cages exiguës pendaient du plafond, près de la moitié habitées par des squelettes poussiéreux. Les victimes de Miraak, expliqua Frea d'un air sombre, torturées pour son plaisir, exposées comme des trophées, exemples de ce qu'il infligerait aux habitants de Solstheim une fois de retour. Cependant, avant que l'horreur de cette image ne s'immisce trop profondément dans l'esprit de Siltafiir, une voix lui offrit la distraction parfaite. Un chant vibrant, ne prononçant qu'un seul mot, encore trop lointain pour qu'elle le comprenne.

Mais elle en comprenait assez pour savoir qu'elle devait accélérer. Ce mot suintait une puissance nouvelle, un cri inconnu ne demandant qu'à être appris, hurlé et entendu par tout Tamriel. Hélas ! les couloirs effondrés et les êtres masqués s'alliaient pour la ralentir. Redoublant de souffle, elle balaya les obstacles les uns après les autres, et quand sa Voix ne suffisait pas elle disparaissait dans les ombres et achevait ses ennemis d'un coup de lame dans le dos.

Une éternité plus tard, elles atteignirent enfin le mur parlant. Frea ne saisissait guère l'importance de ce mur — pas que Siltafiir ait pris le temps de la lui expliquer — et lui ordonna de se dépêcher, car chaque seconde que les habitants de Solstheim passaient sous le contrôle de Miraak pouvait être celle de trop. Mais une seule syllabe résonnait contre les tympans de l'Enfant de Dragon : mul.

Prête à soulever des montagnes, elle prononça le mot du bout des lèvres, goûtant la brise piquante qui caressa sa langue. Un pouvoir enivrant coula le long de ses bras tandis que ses mains se gantaient d'une lueur dorée. Elle remua ses doigts, testant les griffes translucides qui les couvraient. Les appels de la Skaal s'intensifièrent jusqu'à se muer en râles gutturaux. Démangée par la soudaine envie de la faire taire, Siltafiir se détourna du mur les poings serrés.

Une lame s'abattit sur elle. Sans réfléchir, elle leva les bras. Sous le choc, ses pieds glissèrent dans la poussière, mais aucune entaille n'abîma sa peau. Serrant l'espadon qui avait failli lui fendre le crâne, elle découvrit un draugr au casque cornu, lequel tentait de libérer son arme en la tirant de toutes ses forces. Mais Siltafiir la tenait fermement, et d'un coup sec l'arracha à son propriétaire.

D'un coup de pommeau, elle brisa la face du draugr, puis sauta au-dessus de son corps dès qu'il s'effondra. Frea en combattait trois autres, dont un archer. Un frémissement parcourut Siltafiir. Elle bondit sur lui, l'élimina comme le précédent, s'empara de son arc et de ses flèches d'ébonite et visa l'un des zombies restants.

Un claquement lui vrilla le tympan, le manche de l'arc lui resta en main, la corde tomba mollement autour de ses doigts. Clignant de l'œil, lèvres entrouvertes, elle fixa l'arme inutile, hésitant entre frustration et émerveillement devant sa force destructrice. Puis elle se rappela des draugrs. Usant de l'arc sans corde comme d'une épée, elle les tua d'un coup chacun.

Dès lors, leur allure doubla. Une curiosité dévorante poussait Siltafiir à se précipiter sur chaque draugr qu'elle apercevait pour tester les limites de sa force surhumaine. De sa force draconique. Épée, hache, masse, poing, peu importait l'arme, ses ennemis n'en supportaient jamais plus d'un ou deux coups, et même ses cris, portés par mul, vibraient plus intensément que jamais.

Rien sur Nirn n'aurait pu ternir son euphorie, ni les appels essoufflés de l'autre femme qui lui demandaient de l'attendre, ni les second et troisième arcs qu'elle cassa, ni même l'immobilité glaciale de l'air qui s'accentuait à mesure qu'elles s'enfonçaient dans les profondeurs du temple. Une mélopée de murmures monocordes courait le long des murs, chargée de mystérieuses promesses aussi tentantes que mul. Siltafiir n'en entendait rien, assourdie par le sifflement qui émanait de ses bras, mais son emprise se renforçait à chaque pas.

Hermaeus Mora.

Elle manqua de trébucher, puis coassa un "Quoi ?" confus en cherchant autour d'elle la source de ces mots. Ce ne fut que quelques secondes plus tard, quand Frea la rattrapa, qu'elle réalisa qu'il s'agissait d'un avertissement de Nahlaas. L'influence du daedra régnait en effet sur ces couloirs poussiéreux, comme dans le souvenir de Miraak. D'ailleurs, si sa mémoire ne la trahissait pas, elle se trouvait là où il avait vu Krosis pour la dernière fois.

Ses doigts s'élevèrent jusqu'au masque qui avait assisté à leur ultime baiser. Elle se remémora malgré elle les lèvres de la prêtresse, pressées contre les siennes – non, contre celles de Miraak – et surtout, à seulement quelques mètres de là, le livre noir empli de phrases tentaculaires prêtes à happer leur prochain lecteur.

Au centre d'une pièce circulaire tapissée de métal, le tome patientait sur un piédestal, animé de pulsations verdâtres qui résonnaient comme les lents battements d'un cœur. Leurs échos résonnaient jusque dans les os des deux femmes. Les doigts de Siltafiir frétillaient d'impatience alors qu'elle levait lentement sa main vers la couverture aux reliefs mouvants.

- Mieux vaut continuer, murmura Frea d'une voix à peine audible comme si elle craignait que le livre l'entende, Miraak ne doit plus être loin.

- Il est là.

Saisie par l'image de phrases vivantes plantées dans ses bras – non, dans ceux de Miraak – Siltafiir s'immobilisa un instant. Mais l'appel insistant du livre supplanta ses peurs, il lui semblait même parfois entendre son nom parmi la myriade de voix qui s'en échappait. Mordant sa lèvre, elle le frôla.

Un coup de vent la força à reculer d'un pas, la couverture claqua contre le piédestal, les pages tournèrent et projetèrent des traînées d'encre virevoltantes droit sur elle. Elles l'empoignèrent, la tirèrent, l'écrasèrent contre les pages. Tout devint noir.

La plante de ses pieds heurta un sol irrégulier. Avant qu'elle ne puisse inspirer une seule bouffée d'air, le grésillement, ou plutôt le grondement d'une âme de dragon s'écrasa contre elle. Elle retrouva à peine sa vision et entendit tout juste un "Quoi ?" rauque avant qu'un éclair ne la percute en pleine poitrine.

- Qui êtes-vous pour oser vous aventurer ici ?

Recroquevillée au sol, parcourue de convulsions, Siltafiir employa toute son énergie à s'appuyer sur ses avant-bras. Malgré ses griffes de lumière, elle se sentait vidée. Elle reconnut Miraak sans le regarder ; son âme étincelait, appétissante et gourmande tout à la fois, infiniment plus puissante qu'en Quagmire.

Quand elle parvint enfin à lever la tête pour le fusiller du regard, une secousse étonnée la traversa de part en part. Elle s'attendait à le voir dressé à quelques pas, le dos droit, hautain, arborant les mêmes robes sombres et le même masque pâle qu'à l'époque du culte draconique. Ce fut bien ainsi qu'elle le trouva, pourtant la surprise entrouvrit sa bouche sans qu'elle puisse rien faire pour l'en empêcher. Certes, des tentacules avaient poussé sur son masque, mais cela ne valait pas un tel choc. Puis cette sensation disparut dès qu'il bougea.

- Vous êtes l'Enfant de Dragon qui a vaincu Alduin, je le sens, dit-il en croisant les bras. J'aurais pu m'en charger moi-même, mais j'ai choisi une autre voie.

Celle qui l'avait mené ici, emprisonné depuis des millénaires, oublié de tous à part de ceux qui le nommaient "traître". Et il en était fier. Siltafiir tenta de le lui faire remarquer, mais seule une toux douloureuse traversa ses lèvres. L'atmosphère corrompue de ce plan piquait ses poumons. Indifférent à l'état de son auditoire, Miraak continua son monologue dont chaque mot était plus agaçant que le précédent.

Fulminante, impuissante, Siltafiir subit la vanité et les moqueries du premier Enfant de Dragon durant ce qui lui parut une éternité. Il conclut en revêtant les mêmes gants lumineux qu'elle, accompagnés du casque et du plastron assortis. Malgré elle, un couinement envieux lui échappa. Une satisfaction débordante lui gonfla ensuite le torse, mais comme pour son accès de surprise elle se trouva incapable d'en identifier la source.

Il lui tourna le dos pour s'adresser à des créatures flottantes qu'elle n'avait pas remarquées jusque-là. Leur faciès ressemblait au masque de Miraak et leurs haillons se fondaient dans les nuages de brume verdâtre qui tachaient le décor.

- Renvoyez-le d'où il vient. Il attendra mon retour avec le reste de Tamriel.

Avant qu'elle puisse le corriger, il s'éloigna et disparut derrière les créatures. Elles levèrent chacune deux paires de bras décharnés. Siltafiir vit tout juste un dragon s'envoler, emportant Miraak sur son dos, avant d'être bombardée de décharges magiques. Des dizaines, puis des centaines, puis des milliers de morsures couvrirent sa peau. À nouveau, l'obscurité l'engloutit.

Tout cessa. La douleur s'évapora comme si elle n'avait jamais existé, un air stagnant et poussiéreux remplaça le poison fétide d'Apocrypha et, surtout, laissant place à un silence aussi pesant qu'apaisant, l'âme de Miraak se tut. Confuse, la tête légère, elle regarda les tentacules d'encre se dérouler de ses membres avant de se replier entre leurs pages. Le livre se ferma d'un claquement sec.

- Vous allez bien ?

Elle sursauta, puis reconnut Frea. Apprenant que ce livre menait bien à Miraak, celle-ci s'en empara pour l'amener à son père et en éclaircir les mystères. Siltafiir la suivit, perdue dans ses pensées, heurtant le cadran d'une arche avec son épaule sur le chemin de la sortie. Le vent glacial du nord de Solstheim la réveilla enfin.

- Il m'a prise pour un homme, bougonna-t-elle.

- Quoi ? Frea se retourna en levant un sourcil.

- Miraak. Il a cru que j'étais un homme.

Il faut bien avouer que tu n'as pas beaucoup de formes.

- J'ai des hanches quand même !

- C'est tout ce que vous avez retenu ? grinça Frea. Vous n'avez rien vu d'utile ? Quelque chose qui nous permettrait de le vaincre ?

- Allez voir vous-même, il vous suffit d'ouvrir ce bouquin, rétorqua Siltafiir sur le même ton.

Un tic agita le visage de Frea, puis elle regarda le livre serré sous son bras en se mordillant la lèvre. Secouée d'un frisson, elle choisit plutôt de reprendre leur route et marmonna qu'elles avaient déjà perdu assez de temps. Siltafiir ne se fatigua pas à dissimuler son ricanement vainqueur.

Sa fierté s'évapora avec ses griffes. Un poids s'écrasa sur ses épaules, s'insinua dans ses bras, coula jusqu'au bout de ses doigts. Dénudées, tétanisées, ses mains tombèrent mollement contre ses cuisses. Malgré toute sa frustration, impossible de serrer le poing, seuls ses pieds acceptaient de frapper les cailloux et tas de neige qui se dressaient sur sa route.

Toute à ses maugréements, elle ne remarqua que tardivement le dôme translucide qui couvrait le plus petit hameau qu'elle avait vu de sa vie. Une barrière visant à protéger les Skaals de l'influence de Miraak, expliqua sa guide. Celle-ci termina le trajet en courant, brandissant le livre noir qu'elle présenta à un groupe de personnes agenouillées. Le plus âgé du groupe s'adressa à Siltafiir dès qu'elle les rejoignit.

- Je me nomme Storn Marche-Roc. Ma fille me dit que vous avez rencontré Miraak, et que comme lui vous êtes Enfant de Dragon.

Son "oui" lui valut de se voir assigner une tâche qu'elle ne pouvait pas refuser, après tout c'était bien la responsabilité de l'Enfant de Dragon d'aider ceux qui en avaient besoin. Au moins, cela lui octroya aussi un lit et deux repas chauds.

Apprendre un mot et le crier sur un caillou semblait presque trop aisé, mais pas question de se plaindre, après tout vaincre Miraak s'avérerait certainement plus ardu. Le premier mot de l'aspect draconique conférait une puissance écrasante, elle n'osait imaginer le pouvoir du trio complet. Elle sentait déjà la brûlure revigorante du thu'um dans sa gorge en s'imaginant revêtue de l'armure lumineuse, et à nouveau un couinement envieux lui échappa.

Elle secoua la tête en voyant les ruines décrites par Storn, ce n'était pas le moment de se laisser distraire par de jalouses divagations. D'entre les ombres jetées par les décombres surgirent nombre de draugrs, et surtout, tombant du ciel, un délicieux grésillement l'enveloppa. Galvanisée par la simple idée d'enfin absorber une âme de dragon, elle se rua sur les draugrs en riant à pleins poumons.

Presque tous les zombies étaient tombés quand le dragon apparut au détour d'un pic gelé. Siltafiir ignora les derniers pour se précipiter vers sa nouvelle proie. Ni l'onde de choc, ni la bourrasque causées par l'atterrissage du dovah ne ralentirent sa course. Des tourbillons de flocons marquaient son sillage tandis que les rotmulagge se disputaient dans son torse pour savoir qui saluerait en premier cet interlocuteur bienvenu.

Feim ouvrit le débat face à une insulte glaciale. Loin de se renfrogner, Siltafiir jubila en réalisant que ce dragon ne demanderait pas à devenir le protecteur de Corberoc ou du village Skaal, et courut au-travers du nuage de glace, droit sur la gorge écailleuse. Deux profondes entailles crachèrent un sang poisseux sur Krosis.

Un hurlement tonitruant la déstabilisa, un battement d'ailes la jeta à terre. Aveuglée, elle ne put que sentir le dragon s'envoler tandis qu'elle retirait son masque pour essuyer le sang qui maculait sa paupière. À peine sur pieds, elle appela mul à son aide, sauta sur l'arc le plus proche et en tendit lentement la corde, prudente de ne surtout pas le briser.

Le dragon piquait déjà dans sa direction, la gueule béante. Avant que son cri ne s'abatte sur Siltafiir, celle-ci lâcha sa flèche qui se ficha dans le palais de son adversaire. Elle dut plonger sur le côté quand le corps massif heurta le sol, mais ne gaspilla pas cette chance. Profitant qu'il soit à moitié assommé, elle bondit sur sa nuque et y planta sa hache encore et encore et encore jusqu'à entendre le sifflement de son âme qui s'échappait de ses plaies.

Alors qu'il commençait à se désagréger, elle sauta à terre en se léchant les lèvres. Frétillante, salivante, elle fixa les émanations dorées qui s'élevaient de plus en plus rapidement, savourant déjà l'énergie pure qui allait imprégner son être. Le grésillement de l'âme atteignit son paroxysme. Genoux fléchis, bouche entrouverte, elle cessa de respirer.

Quelque chose se brisa.

Comme contre Alduin.

Tendant une main vers les filaments fuyants, elle poussa une supplique désespérée. Avait-elle perdu la capacité d'absorber les âmes ? Juste avant que l'hystérie ne la saisisse, une aura étouffée mais familière balaya ses peurs. Au lieu de s'enfuir vers les cieux, l'âme vola droit sur elle pour la traverser avec une cruelle indifférence et rejoindre le voleur qu'elle reconnut avant de se retourner.

Miraak se dressait dans son dos, bras croisés, exsudant la satisfaction qu'elle aurait dû ressentir. Il la remercia pour ce cadeau et ponctua cette insulte d'un lent gloussement. Un roulement de tonnerre secoua Siltafiir.

Lorsqu'elle rouvrit son œil, un mur de feu noir lui bloquait la vue. Il se dissipa vite, révélant un Miraak inébranlable qui gloussa de plus belle avant de disparaître sans une trace. Secouée de hoquets impuissants, elle happa l'air et bredouilla des syllabes essoufflées qui se muèrent en une note crissante.

Des cliquetis osseux percèrent le brouillard enragé qui étouffait ses sens. Son bras se mut de lui-même dès qu'elle vit le draugr. Sa hache vola et enfonça le torse osseux plus aisément qu'une motte de beurre. Ne demeurait qu'un seul zombie, sur lequel elle se jeta toutes griffes dehors. Ses membres éparpillés jonchèrent bientôt la neige cendrée, mais cela ne suffit guère à calmer l'Enfant de Dragon. Écrasant de son talon les restes des draugrs, elle hurla une fois de plus, fissurant le mur le plus proche.

- ZU'U FEN KRII ROK !

À bout de souffle, accablée d'un mal de tête tambourinant, elle retrouva malgré tout un peu de contrôle avec l'aide de Nahlaas et ses paroles pragmatiques. Celui-ci lui rappela également la raison de sa présence dans ces ruines.

Apprendre ce mot de puissance te changera sûrement les idées.

Le mot, bien sûr ! Elle tourna sur elle-même à la recherche d'un mur chantant, abaissa sa paupière et se concentra. Quelques secondes lui suffirent pour déceler une mélopée à la faiblesse déroutante. Focalisée sur cet appel imprécis, elle réalisa que ses pieds le suivaient seulement lorsqu'elle atteignit l'autel qui couronnait les ruines.

De près, la voix monocorde du mot résonnait plus nettement, mais elle s'adressait à tout, à l'air, aux pierres, aux flocons, au ciel, même à la mer en contrebas, contrairement aux précédents qui hélaient Siltafiir, uniquement Siltafiir. Nullement refroidie par ce comportement atypique, elle approcha dans l'espoir de l'entendre encore mieux. Dès qu'elle le lut, il se tut.

- C'est tout ? s'indigna-t-elle à l'encontre du nouveau rotmulaag. Ni drem yol lok ? Nid ?

Il demeura inerte dans son ventre, posé silencieusement sous ses frères agités. Grognant sa frustration, Siltafiir se dépêcha de retourner au village Skaal, et surtout à la pierre dressée qui asservissait peu à peu la tribu. Mieux valait tester au plus vite ce nouveau pouvoir, son manque de répondant ne lui inspirait pas confiance.

Ses griffes de dragon disparurent à seulement une dizaine de pas de sa destination. Maugréante, elle hésita à se reposer un moment au village avant de se charger de sa mission, mais la vue des travailleurs hypnotisés lui arracha une grimace. Grâce à son anneau de marche sur l'eau, elle évita cette fois de se mouiller les pieds en approchant de la pierre. Sans grande conviction, elle visualisa son nouveau mot.

GOL

L'effet ne se fit pas attendre. Tous les Skaals lâchèrent leur pioche et la construction sur laquelle ils s'étaient affairés s'illumina, se fissura et implosa, n'abandonnant qu'une fine poussière qui se mêla au vent et à la neige. Loin de pouvoir profiter de son succès, Siltafiir poussa un juron coloré quand une énorme masse tentaculaire surgit de l'eau juste à côté d'elle. Sa Voix ne lui accorda pas même le temps de comprendre ce qui se passait. Fus poussa tous ses frères, se fraya un chemin le long de sa gorge et sauta sur l'ennemi.

FUS RO DAH

La créature, dont la taille rivalisait avec celle d'un géant, s'éleva dans les airs, atterrit en contrebas, dégringola le long d'une pente enneigée et s'écrasa finalement contre des rochers.

Assurée que cette chose était hors d'état de nuire, Siltafiir s'autorisa à respirer. Une quinte de toux interminable la prit, qui s'intensifiait à chaque bouffée d'air. Elle n'en voulait pas à fus, il venait de lui sauver la vie, mais ces deux cris d'affilée l'avaient réduite à un silence forcé. Heureusement, les Skaals trop heureux de se voir libérés la soutinrent jusqu'au village où elle passa les heures suivantes à rassembler ses forces.

À en croire Storn, un seul habitant de Solstheim possédait les connaissances nécessaires pour élucider le mystère des livres noirs et attirer Miraak hors de sa cachette. Siltafiir le trouva dans une espèce de fungus géant très répandue en Morrowind. L'amusement produit par cette maison insolite se ternit dès qu'elle découvrit son occupant.

- Ne vous ai-je pas vue à Corberoc ?

Encore le Dunmer hautain. Au moins, il semblait prêt à l'aider ; à peine mentionna-t-elle le livre noir qu'il lui révéla l'emplacement d'un second tome perdu dans des ruines dwemers et offrit même de l'y accompagner. Agréablement surprise par cette générosité, elle lui présenta de sincères remerciements qu'elle regretta instantanément.

- J'ai tenté plusieurs fois de me procurer ce livre, mais les protections des dwemers sont infranchissables sans un assistant. J'espère que vous me serez utile.

Entre l'humidité moisie du champignon de Tel Mithryn et l'humidité métallique des ruines de Nchardak, Siltafiir savait parfaitement ce qui la débectait le plus : l'attitude puante de ce Telvanni. Pire encore, les talents qu'il démontrait en éliminant sans effort des vagues d'automates justifiaient son agaçant orgueil, impossible de le renvoyer chez lui sous prétexte qu'il la ralentissait.

Esquiver des pièges, des araignées métalliques et des tirs de balistes animées sous les commentaires exaspérants du Telvanni faillit venir à bout de ses nerfs, mais elle se maîtrisa. Même lorsqu'il se plaignit de sa lenteur à vaincre un centurion, elle se contenta d'une réplique à peine vibrante. L'idée de voir les ruines s'effondrer sur sa tête la maintint relativement calme durant l'expédition.

Puis ils retournèrent dans le hall de Nchardak, là où les Dwemers avaient conservé le livre noir. Son contenant de verre s'ouvrit, son piédestal s'éleva au centre de la pièce, et Siltafiir regretta instantanément d'avoir conservé son sang-froid, une pile de décombres paraissait fort tentante comparée à l'appel du livre.

Il existait forcément un autre moyen de découvrir les secrets de Miraak. Un regard vers Neloth ne lui apporta aucune assistance. Il l'encouragea à lire le tome, refusant de tenter l'expérience lui-même sous prétexte qu'un esprit aussi précieux que le sien ne pouvait s'exposer aux manipulations d'Hermaeus Mora.

En toute honnêteté, Siltafiir était prête à quitter ces ruines sans accorder un regard de plus à ce maudit mage et à ce tome maudit. Sauf que son œil ne cessait de retourner sur la couverture de cuir sombre, et qu'à chaque clignement de paupière le piédestal semblait se rapprocher. Avant qu'elle ne le réalise, ses pieds l'avaient menée jusqu'au livre et les tentacules noirs se jetèrent sur elle.

Miraak ne se trouvait pas de l'autre côté des pages. Elle dut avouer que cela rendit sa seconde intrusion en Apocrypha plus confortable que la première. En se concentrant, elle pouvait tout juste sentir la chaleur de son âme, il devait se trouver à l'autre bout de ce royaume. Trop loin pour qu'elle puisse se venger.

Sans vraiment savoir ce qu'elle cherchait, elle erra entre les bibliothèques surchargées et les lacs d'encre, occasionnellement ralentie par les créatures tentaculaires qui habitaient ce plan, ainsi que par les ponts et couloirs mouvants qui s'acharnaient à l'égarer.

Parfois, des tomes attiraient son regard. Pas question de passer une seconde de trop à respirer cet air oppressant, elle se força donc à tous les ignorer. Tous, à l'exception d'un livre sans titre orné d'une bourse et d'une clef gravées dans sa couverture de cuir. Son œil parcourut de lui-même les premières pages, dévorant avidement secrets de crochetage, de vol à la tire et autres moyens de désarmer des pièges.

Puis l'âme de Miraak grésilla dans le lointain, lui rappelant où elle se trouvait. Elle se força à enfourner le tome dans son sac dès qu'elle eut fini son paragraphe. Malgré les tentations littéraires qui semblaient se multiplier, elle doubla son allure. Les gardiens d'Apocrypha l'attaquèrent également avec une ardeur accrue, surgissant d'entre les étagères ou émergeant des flaques d'encre sans relâche.

Une éternité aurait pu s'écouler quand elle trouva enfin la sortie de ce cauchemar, essoufflée et frétillante, jetant des regards dans son dos tous les trois pas alors qu'elle s'avançait vers un livre étrangement similaire à celui qui l'avait menée là. Trop heureuse de pouvoir s'échapper, elle en oublia la raison de son intrusion. Le propriétaire des lieux s'empressa de la lui rappeler.

Poussant un juron étranglé, elle sauta en arrière, trébucha sur le sol irrégulier et se tapa le coccyx quand un bouquet d'yeux et de tentacules apparut juste au-dessus du livre. Elle entendit à peine les premiers mots d'Hermaeus Mora derrière le tambour de son cœur paniqué. L'essentiel lui parvint tout de même : il lui proposait les deux derniers mots du cri d'asservissement.

Sans lui dire ce qu'elle paierait en échange de ces connaissances, et sans lui laisser le temps de se relever, il glissa un tentacule sous son capuchon et caressa sa tempe, lui arrachant frisson après frisson jusqu'à ce qu'un nouveau mot, hah, s'inscrive à l'arrière de son esprit juste à côté de gol. Leur silence l'emplit, l'apaisa, allégea son corps. Les autres rotmulagge s'agitèrent, frustrés par l'inaction de leurs deux frères. La voix douce et sèche d'Hermaeus Mora gratta ses tympans comme une plume contre du parchemin :

- Employez ce Mot de Pouvoir pour plier les mortels à votre volonté, susurra-t-il en ramenant son tentacule vers lui, mais il ne suffira pas. Miraak connaît le troisième et dernier Mot de ce cri. Sans cela, vous ne le surpasserez jamais.

Siltafiir ferma sa bouche, qui était restée à moitié ouverte jusque-là, et plissa son œil. La transe hébétée qui l'avait possédée disparut sans trace, remplacée par un agacement grandissant. Elle ne le surpasserait jamais ? Quel affront ! Il connaissait à peine un mot de plus qu'elle, un mot sûrement aussi muet que les deux qui le précédaient. Si des dizaines d'yeux sans paupières n'avaient été en train de l'analyser sous tous les angles possibles, elle aurait partagé cette pensée avec le daedra.

- Je peux vous accorder ce pouvoir, mais toute connaissance a un prix.

Pourquoi l'aiderait-il à tuer Miraak ? faillit-elle demander. Elle ravala cette question et la remplaça par celle qu'il désirait entendre. De toute manière, la réponse ne l'aurait sûrement pas satisfaite.

- Quel est ce prix ?

- Le savoir contre le savoir.

Une note un peu plus aiguë dans sa voix, un frétillement un peu plus rapide de ses tentacules, une étincelle un peu plus brillante dans ses myriades de pupilles trahirent l'excitation de Mora. Il se pencha sur elle, ou plutôt flotta vers elle, pour lui révéler dans un souffle vibrant ce que valait la vie de Miraak.

- Les Skaals m'ont dissimulé leurs traditions pendant de trop nombreuses années. Le temps est venu de les ajouter à ma bibliothèque. Amenez-moi leur chaman, il possède les secrets qui seront bientôt miens.

Il s'évapora sur cette conclusion, abandonnant Siltafiir devant le livre qui, elle l'espérait, la renverrait sur Nirn. La mâchoire serrée, elle se hissa sur ses jambes flageolantes et se pencha sur le tome. Trois orbes lumineux pulsaient dans l'air, chacun murmurant des promesses de connaissance et de pouvoirs. L'un appelait Fus, le second Yol, le troisième Fo, et les trois mots répondaient en sautant dans sa gorge et son ventre, ni heureux, ni inquiets, mais nerveux au point de lui retourner l'estomac.

La lumière des orbes s'intensifia, comme pour lui ordonner de faire son choix. La main tendue vers celui qui appelait Fus, elle faillit fermer ses doigts sur cette nouvelle source de puissance. L'âme de Miraak choisit ce moment pour grésiller, comme lorsque Siltafiir s'était égarée dans sa lecture imprévue. Elle recula d'un pas.

Les rotmulagge se calmèrent quelque peu. Ni elle, ni eux ne savaient comment se comporter face à ce savoir daedric. Alors elle l'ignora. Penchée sur les pages du livre et les lignes de texte serpentines qui y rampaient lentement, elle ne résista pas quand celles-ci lui sautèrent à la gorge et la tirèrent dans l'abîme.

L'humidité de Nchardak purifia ses poumons de la poussière astringente d'Apocrypha, et une pression dont elle n'avait pas conscience quitta ses épaules. Ses jambes flanchèrent dès qu'elle les bougea, elle se rattrapa tout juste au piédestal du livre noir.

- Que s'est-il passé ? Qu'avez-vous vu ?

Le timbre agaçant de Neloth lui parut rassurant en comparaison des murmures acides de Mora. Elle lui résuma son échange avec le daedra pour obtenir une réponse qui lui fit presque regretter Apocrypha.

- Hermaeus Mora apprend un nouveau moyen de dépecer un horqueur, et vous devenez le second Enfant de Dragon le plus puissant ayant jamais vécu. Cela m'a tout l'air d'une affaire en or.

Oui, une affaire en or. Venant d'un prince d'Oblivion, cette offre cachait forcément un piège. Et qui était ce mage pour la traiter de second Enfant de Dragon le plus puissant ? Elle sortit des ruines d'un pas claquant, dents et poing serrés, pressée de passer la nuit à Corberoc. Alors qu'elle passait la grande porte, un crépitement familier picota son âme. Un dragon l'attendait dehors, en vol stationnaire. Pas question de le laisser s'échapper ! Elle le dévorerait, pensa-t-elle, trépidante, en sortant sa hache et en se léchant les lèvres.

- Miraak a ordonné ton exécution, tonna-t-il entre deux battements d'ailes.

Le combat ne dura pas. Entre l'animosité affamée de Siltafiir et les sorts précis de Neloth, le dragon s'écrasa devant Nchardak en une poignée de minutes seulement. Sautant d'un pied sur l'autre devant le cadavre qui commençait à luire, elle poussa un couinement à la limite du désespoir en sentant les premiers lambeaux d'âme s'en détacher. Un deuxième couinement, complètement désespéré celui-là, résonna contre son masque quand un cassure déjà trop bien connue anéantit ses efforts.

Son lien avec le dragon se brisa. Bras ballants, elle observa la forme translucide de Miraak s'envelopper d'une aura dorée. Elle ne se rappelait même plus du goût des âmes. Comment osait-il lui infliger ça ? Dans sa situation, elle aurait sûrement fait la même chose, mais quand même !

- Mora veut que je te tue.

Les mots étaient sortis tout seuls, sans motif précis. Elle ne savait pas si elle l'avait menacé, prévenu, ou si elle lui demandait conseil. L'idée de l'éliminer ne la dérangeait pas, il l'avait électrocutée, insultée, semblait décidé à lui voler toutes ses âmes, et tentait de réduire une île en esclavage. Mais elle servait déjà trop de daedras, et accomplir les desseins d'Hermaeus Mora ne simplifierait pas sa vie, impossible de le nier quand le résultat de cette obéissance se tenait juste devant elle à… ricaner ?

- Je suis enfin devenu gênant. Intéressant.

Il s'évapora. Lasse, Siltafiir prit la route de Corberoc sans se fatiguer à saluer le Dunmer. Celui-ci ne s'en offusqua pas, absorbé par un monologue concernant les recherches qu'il pourrait mener sur les livres noirs.

À suivre…

Et non, la fic n'est toujours pas abandonnée ! Je vais ouvrir deux paris : combien de remakes de Skyrim sortiront avant que je finisse cette fic et est-ce que je la terminerai avant la sortie du prochain Elder Scrolls ?

Mes prévisions sont dix et non.

Termes draconiques

ZU'U FEN KRII ROK ! - JE LE TUERAI/JE VAIS LE TUER !

Ni drem yol lok ? Nid ? - Pas (de) bonjour/salutation ? Rien ?