–T'avais bien dit qu'il serait parti pendant seulement deux minutes ?
–C'est ce que lui a dit. J'suis pas dans sa tête, Ned, p't'être qu'il avait besoin de rester seul un peu plus longtemps, proposa Flash.
Les quatre amis avaient déjà commencé à manger et lancé un film sur l'ordinateur de Peter, qui se trouvait assis sur son bureau pour regarder à travers la fenêtre, sa nourriture en main.
Il avait un drôle de présentiment et ne comprenait pas vraiment ce qui avait pu pousser son colocataire à s'éclipser sans donner trop d'explications. Flash leur avait en effet affirmé avoir croisé Pietro en arrivant, mentionné les deux minutes de calme dont celui-ci avait besoin, mais cela faisait déjà presque un quart d'heure et ce n'était pas dans les habitudes de Pietro de disparaitre comme ça.
Il savait que ça aurait forcément inquiété Peter et il mettait un point d'honneur à empêcher que cela arrive.
–Vous pensez qu'il a un problème ? demanda MJ, assise en tailleur sur le lit de son petit ami. Vu ce qu'il vous est arrivé récemment, ça ne serait pas surprenant.
–Il serait tombé sur vos ennemis jurés la seule fois où il sort tout seul ? lança Ned. Franchement, ça serait vraiment pas de chance, mentionna-t-il en regardant ensuite Peter. T'as essayé de l'appeler ?
–Répondeur, souffla Peter en fronçant les sourcils avant de quitter sa place. 'Faut que j'y aille.
–Que t'ailles où ?
–J'en sais rien, il faut juste que j'y aille, affirma-t-il en déposant sa nourriture sur son bureau avant de récupérer sa valise à nouveau rangée sous son lit. Il y a quelque chose qui cloche, il faut vraiment que j'aille voir si tout va bien. T'as dit qu'il n'avait pas l'air en formes ? dit-il en fixant Flash.
–Bah, c'est clair que je l'ai vu plus enjoué que ça, confirma l'autre jeune homme.
–Peter, c'est super dangereux de sortir maintenant, intervint MJ en se décollant du mur.
–Je ne vais pas laisser Pietro tout seul s'il est en danger, rétorqua-t-il avec vigueur.
–On n'est même pas sûr qu'il soit en danger, dit-elle, n'étant cependant qu'à moitié convaincue.
Ils entendirent quelque chose. C'était sourd, lointain, mais suffisamment puissant pour que cela leur parvienne et qu'ils puissent identifier ce son comme une explosion. Ils échangèrent un coup d'œil entendu et sentirent la panique les gagner.
–On est d'accord qu'on a tous entendu ça ? déclara Flash.
Ned ferma la page ouverte sur le film sur l'ordinateur et se connecta au site qui diffusait les infos en temps réel, maudissant les quelques secondes d'attente qui survinrent le temps que la page charge complètement, puis la voix de la présentatrice habituelle s'éleva dans la chambre et ils virent en avant-première des images qui confirmèrent leurs doutes.
Ils reconnurent le parc Lincoln, filmé depuis la voie des airs par une équipe en hélicoptère. Ils reconnurent également trois des quatre fauteurs de troubles s'en prendre à un quatrième individu qu'ils ne connaissaient que trop bien puisqu'il s'agissait de Pietro, dont l'identité demeurait secrète aux yeux du monde grâce à son costume de combat.
Ils le virent courir en laissant des effluves bleutées caractéristiques derrière lui, esquivant habilement les sorts et attaques diverses de ses adversaires, puis se positionner de sorte à se servir du dispositif attaché à son poignet pour se protéger d'un des tirs surnaturels de Gabriel grâce à la matérialisation expresse d'un champ de force.
Le magma généré par son ennemi se heurta violemment au champ de force et partit dans tous les sens, l'hélicoptère comprit et les images retranscrites se brouillèrent.
–'Faut vraiment que j'y aille, souffla Peter qui, à la grande surprise de ses trois amis, avait eu le temps de se changer sans qu'ils s'en rendent compte. Ne quittez surtout pas le campus, leur préconisa-t-il en ouvrant la fenêtre, prêt à aller aider Pietro.
–Peter ! l'interpela MJ en saisissant son poignet. Je t'en supplie, sois prudent.
–Et si ça devient trop risqué, tirez-vous, lança Ned.
–Revenez en entier, ajouta Flash.
–On va essayer, répondit Peter en enfilant son masque avant de disparaitre dehors.
Le trio se pencha à la fenêtre afin de suivre des yeux sa trajectoire, chacun partageant l'angoisse des autres. Ils n'avaient pas prévu de vivre une soirée aussi mouvementée, et en moins d'une heure, ils apprenaient qu'ils connaissaient personnellement Spider-Man depuis longtemps, que lui et son colocataire combattaient des êtres venus d'un autre univers et qu'ls devaient à présent espérer que le duo survivrait à l'attaque de ce soir.
Ils apercevaient, au loin, l'animation qu'il y avait au niveau du parc Lincoln, les déflagrations et les flammes qui s'élevaient depuis les lieux et l'hélicoptère qui perdit dangereusement de l'altitude.
–On n'a vraiment aucun moyen de leur filer un coup de main ? commenta Flash, appuyé contre l'encadrement de la fenêtre.
–A moins que tu aies été mordu par une araignée radioactive ou mystérieusement développé des pouvoirs magiques dans les cinq dernières minutes, je ne crois pas qu'on leur sera très utiles, répondit MJ, néanmoins elle aussi désireuse de leur venir en aide.
–Et si on demandait à Stephen Strange ? proposa Ned.
–T'as son numéro ? répliqua l'étudiante. C'est Peter qui a ce genre de contacts, pas nous.
–Alors quoi, on est juste condamnés à attendre et prier pour qu'ils s'en sortent ?
MJ ne répondit pas. A ce stade-ci, elle n'était plus sûre de rien.
. . . . . . . .
Peter ne tarda pas à arriver sur les lieux.
Pour commencer, il eut la surprise de découvrir qu'aucun des passagers de l'hélicoptère n'était gravement blessé et, lorsqu'il s'approcha d'eux pour vérifier que tout allait bien, l'un d'eux baragouina quelque chose comme quoi le Chevalier Blanc s'était servi de sa magie pour « adoucir l'atterrissage » et leur permettre de sortir à temp avant que le véhicule n'explose.
Il les laissa donc entre eux, rassuré qu'ils se portent bien et se focalisa exclusivement sur son objectif principal, qui était de rejoindre son ami au plus vite pour l'aider. Il ne tarda pas à le repérer mais il fut frappé par un trouble important lorsqu'il vit l'état de fatigue qui frappait Pietro.
Ce dernier avait l'air d'avoir déjà encaissé pas mal de coups et même si Peter ne pouvait voir son visage à cause de son masque et sa capuche, il sut grâce à ses mouvements que Pietro avait connu des jours meilleurs et commençait à vraiment manquer d'énergie, pour le plus grand plaisir de ses ennemis.
Peter ne réfléchit pas et s'élança donc sur le terrain juste à temps pour attraper l'autre jeune homme par le bras, lui évitant ainsi d'être frappé par un tir parfaitement ciblé de Gabriel. Pietro créa ensuite rapidement un dôme translucide autour d'eux grâce à son équipement portable qui devrait leur servir de rempart pendant quelques secondes, le temps qu'il puisse reprendre son souffle.
Peter ne chercha pas à l'empêcher d'ôter son masque, surtout lorsqu'il le vit prendre de profondes inspirations comme s'il avait jusque-là cruellement manqué d'air. Le secret d'identité pouvait attendre, le plus important était que Pietro récupère au plus vite.
Le masque et les lunettes tombèrent à terre et Pietro, une main au sol, garda les yeux rivés vers le bas en inspirant longuement tandis que Peter avait sa main posée sur son dos. Le plus jeune vérifiait en même temps que leur bouclier de fortune tenait bon face aux offensives de leurs adversaires, puis une question émergea dans son esprit.
–Où est Pyro ?
Pietro secoua la tête et Peter vit à son air presque abattu que ça n'avait pas l'air d'être forcément une bonne nouvelle. Le plus jeune soupira puis il retint son souffle lorsqu'il vit la tache rougeâtre qui s'était formée au niveau du flanc droit de son ami. Elle n'était pas trop importante pour que cela soit très grave, mais assez pour que Peter s'inquiète.
–J'ai besoin de vacances, Parker, soupira Pietro.
–C'est bientôt le congé de Noël, l'encouragea-t-il. Si on tient bon, on ira se planquer quelque part au soleil pendant deux semaines, proposa-t-il. Toi, moi, MJ, Ned et Flash. On pourra même aller chercher Wanda si ça te dit, mais pour ça, va falloir se relever et y retourner, affirma-t-il en mettant autant d'énergie dans sa voix que possible pour motiver son ami. Pourquoi t'as pas appelé tout de suite quand ils ont attaqué ?
–J'étais occupé à renouer avec un vieux pote, se justifia l'autre en levant hasardeusement les yeux vers lui. Et t'avais des trucs à faire.
–Sauver le monde passe avant, rétorqua Peter en sursautant lorsqu'un des dragons de Chiméra se heurta violemment au dôme. J'crois pas que ton bouclier va tenir encore longtemps, fit-il remarquer. Quand tu m'as parlé de ton univers, t'as bien dit que Tony Stark était une sorte de mentor pour toi ?
–Et après ?
–Il l'était pour moi ici, lui rappela Peter en lui montrant sa paume ouverte.
Pietro regarda sa main gantée et plissa les yeux en remarquant le symbole d'araignée aux reflets métalliques, sur laquelle Peter appuya une fois et un dispositif se déplia autour de son poignet. Le sportif reconnut, aux alliages et au design, la patte de Stark.
–Tu crois qu'on pourrait combiner nos deux technologies pour… j'en sais rien, décupler nos capacités respectives et améliorer nos chances de survie ? reprit Peter en s'exprimant rapidement.
–T'as pas dit que tu avais arrêté de t'en servir après tout le foutoir généré par Mysterio ?
–Techniquement si, mais j'ai quand même gardé un petit souvenir, se justifia-t-il. T'es d'attaque, ça va ? demanda-t-il ensuite, inquiet de voir son acolyte dans un tel état pour la première fois, lui qui avait l'habitude qu'il soit infatigable.
–J'ai encore deux-trois trucs à régler avec eux, maugréa Pietro en désignant du menton le trio qui s'acharnait sur eux de l'autre côté. Crevé ou pas, j'en ai pas terminé, affirma-t-il en se redressant maladroitement, soutenu par le plus jeune. Encore désolé que tu te sois retrouvé mêlé à ce bordel, j'aurais vraiment aimé pouvoir t'épargner tout ça.
–C'est vrai que je voulais une vie d'étudiant tranquille, mais je crois que je me serais vite ennuyé, lui confia Peter.
Un des javelots de Cal'ysyee perça la paroi opaline, qui commença à se fissurer un peu partout.
–Ça, c'est pour l'aile dont elle ne peut plus se servir à cause de moi, déduisit fièrement Pietro en s'époussetant les manches du revers de la main. Bon, t'as un plan, Parker ? l'interrogea-t-il ensuite, apparemment de bien meilleure humeur depuis qu'il n'était plus seul. Parce que perso, je suis un peu à court d'idées, avoua-t-il, puis il baissa les yeux sur ses poignets, orné de matériel technologique signé Stark. A part peut-être créer une explosion qui pourrait nous tuer tous les deux au passage, et ça, ça craint un peu.
Peter écarquilla les yeux, bien que son acolyte ne puisse pas le voir faire.
–Pietro, t'es un génie !
–Je sais, mais tu veux bien développer ?
–On va les renvoyer d'où ils viennent !
–Au cas où tu l'aurais oublié, Peter, il n'y plus de « chez-eux », cet univers a été complètement détruit, c'est comme s'ils n'existaient plus.
–Mais tu as forcément dû faire des recherches là-dessus après être arrivé ici, au moins pour comprendre comment tu étais passé d'un monde à l'autre, devina-t-il, très enjoué par les idées qui se succédaient dans sa tête. Tu as peut-être mis la main sur des données, des coordonnées quelconques, tu ne vas pas me faire croire que tu n'as pas chercher ce qui avait fiat que tu étais passé de là-bas à ici.
–Bien sûr que si, pour qui tu me prends ? Tu l'as dit toi-même, je suis un génie, donc évidemment que j'ai fait des rech– il s'interrompit lorsqu'un autre dragon s'écrasa sur le bouclier, que Pietro renforça grâce à une simple pulsion émanant d'un de ses propulseurs. On peut parler deux secondes sans être interrompus ? s'exclama-t-il à l'adresse de Chiméra avant de se tourner vers Peter. A quoi tu penses ?
–T'as encore les coordonnées de ton monde ? le pressa Peter.
–Mon monde qui n'existe plus ? souligna Pietro.
–Si on arrive par je ne sais quel moyen à ouvrir un portail qui les enverrait là-bas alors qu'il n'y a techniquement plus rien, ils n'existeraient plus non plus, expliqua frénétiquement le plus jeune en se débarrassant de son masque, commençant lui aussi à un peu suffoquer.
Au diable le secret à ce stade-ci.
–Tu me demandes de créer un portail similaire à ceux qui ont failli cause la fin du monde quand tu as demandé à Strange de t'effacer de la mémoire de tout le monde ? résuma très sérieusement Pietro, sur le visage duquel finit par se dessiner un sourire complice. Je ne sais pas si on te l'a déjà dit, mais tu es un grand malade, Parker. Je suis ton homme, déclara-t-il ensuite avec entrain, puis après avoir tapé une série de chiffres sur l'écran miniature intégré à ses bracelets, il les retira et les lui remit. Sauf que c'est toi qui vas t'y coller pendant que je détourne leur attention.
–Attends, j'y connais rien !
–Tu vas trouver, affirma Pietro, c'est pas pour rien que Stark t'a pris sous son aile. Tout est dedans, essayes juste de ne pas te faire aspirer à travers le portail parce que je ne garantis pas être capable de venir te chercher !
Sur ces quelques mots, il plaça sa paume contre la paroi translucide et, à la nouvelle attaque orchestrée par Gabriel, le sort de celui-ci se répercuta contre le bouclier et repartit à l'envoyeur grâce à une onde de choc puissante générée par Pietro.
Peter n'eut pas le temps de protester et signaler à Pietro combien c'était d'une dangerosité sans nom qu'il s'occupe tout seul de faire diversion pendant qu'il faisait joujou avec ses gadgets, mais comme il n'avait pas une seconde à perdre, il resta concentré et essaya de comprendre le fonctionnement du matériel de son ami, qui était plutôt intuitif.
–Tu as besoin d'un adolescent pour te couvrir, maintenant ? cracha Chiméra à Pietro.
–Crois-le ou non, il est plutôt utile, et il ne prend pas beaucoup de place, répliqua le concerné du tac-au-tac.
Il courut vingt-mètres plus loin pour dérouter la blonde et disparut momentanément de son champ de vision. Il siffla ensuite un coup pour manifester sa présence derrière elle et, au moment où elle pivota pour lui faire face, il se remit à courir en la faisant chuter par la même occasion.
Pietro esquiva ensuite le flux de magma que projeta Gabriel dans sa direction tout en gardant un œil sur Peter, qui essayait lui-même d'échapper à Cal'ysyee tout en chipotant au dispositif.
–J'aurais dû savoir que John finirait par faillir, lança Gabriel en se dressant face à Pietro. Il a toujours été le moins intéressant de ceux que j'ai récupéré, ajouta-t-il, ce qui fit voir rouge à son adversaire. J'ai touché un point sensible, Maximoff ? devina-t-il en souriant en coin. Tu sais que notre but n'était que de mettre en lumière la communauté mutante pour qu'elle soit acceptée et respectée à sa juste valeur. Pourquoi sembles-tu incapable de comprendre un concept aussi simple alors que tu es toi-même concerné ?
–Parce que tu cherches à commettre un putain de génocide, espèce de taré ! lui reprocha Pietro en levant les yeux au ciel. Excuse-moi, mais niveau « façon d'essayer de convaincre les gens qu'on peut vivre en harmonie », j'ai connu mieux !
Sa remarque ne plut pas à Gabriel, qui concentra son énergie entre ses mains et envoya vers lui un déluge de flammes et de lave en fusion. Le sportif, déjà très agacé par le comportement de son ennemi, grimaça et courut à toute vitesse pour éviter de finir carbonisé. Il prit ensuite appui contre un des arbres du parc, le dos plaqué contre le tronc, mais dut rapidement reprendre sa course lorsque Chiméra envoya ses dragons fantomatiques sur lui.
La blonde ne semblait pas de meilleure humeur que son acolyte, c'en était fini des remarques cinglantes et sarcastiques. Le seul but de chacun était de se débarrasser de l'autre. Pietro traça dans l'autre sens en slalomant entre les créatures verdâtres dont les gueules manquaient à chaque fois de se refermer sur lui. Il détestait se retrouver dans une telle position, mais si cela permettait à Peter d'être un peu plus tranquille, ça ne le dérangeait pas.
Il vit le plus jeune continuer à travailler sur l'appareil d'une main en se balançant à une de ses toiles de l'autre., passant littéralement entre les griffes de Cal'ysyee. Leurs regards finirent par se croiser et Pietro sut que son ami avait terminé grâce à la lueur qu'il vit briller dans ses yeux.
Ils se rejoignirent à peu près au milieu du terrain et Pietro attrapa au vol le dispositif que lui lança Peter, puis ils se séparèrent à nouveau en changeant d'adversaires.
Un des dragons frappa Peter d'une de ses pattes, ce qui le désorienta légèrement, mais il garda l'équilibre et continua de se balancer de lampadaire en lampadaire, se servant même des dragons eux-mêmes comme d'accroche pour ses toiles. De son côté, Pietro activa le dispositif.
Le même phénomène que celui qui s'était produit lors de l'arrivée du trio se manifesta, mais en plus grandiose, et surtout plus bruyant et plus terrifiant. Des étincelles, puis des éclats de lumières se transformant en un cercle lumineux qui s'agrandit brusquement et sembla aspirer ce qu'il y avait à proximité : feuilles mortes, débris, poussière.
Du coin de l'œil, Peter vit que de l'autre côté, c'était le néant. Une sorte de vide intersidéral aux tons ocres et bordeaux. Il était clair que s'ils parvenaient à y envoyer Gabriel, Cal'ysyee et Chiméra, ces derniers n'auraient probablement aucune chance de survie.
Il modifia donc sa trajectoire de sorte à y attirer ses deux ennemis tout en surveillant son ami, qui se faisait assaillir par une angesse particulièrement remontée. En quelques pirouettes, il fut suffisamment proche du portail pour se placer juste devant et immédiatement, il sentit la force d'attraction de ce dernier l'attirer.
Il essaya de maintenir sa position sans trop s'inquiéter du fait qu'il glissa lentement vers l'arrière sur le sol graveleux. Et maintint son regard dirigé vers Chiméra et ses créatures dévastatrices. Heureusement pour lui, la blonde était bien trop aveuglée par son désir de semer le chaos pour se soucier des risques qu'elle encourait en filant tout droit vers le jeune homme.
Ce fut donc au dernier moment que Peter se décala sur le côté, évitant ainsi la plupart des dragons ainsi que leur maitresse. La plupart tomba dans le vortex, même si un des monstres parvint néanmoins à écorcher la jambe de Peter. Il décida de faire momentanément abstraction de la douleur, fort heureusement soutenu par son pic d'adrénaline, et il pivota afin de se tourner vers Gabriel qui avait considérablement réduit la distance entre eux sans qu'il ne s'en rende compte.
Il s'abaissa à temps et le flot de lave qui lui était destiné passa à travers le portail pour heurter directement Chiméra.
Il profita de la surprise de Gabriel pour entourer une de ses toiles autour de la cheville du mutant et le tirer suffisamment fort vers lui et le propulser à son tour à travers le vortex. Pietro débarqua de nulle part, Cal'ysyee sur les talons et attrapa Peter par le coude afin de l'écarter de son chemin lorsque l'angesse se dirigea vers eux puis, grâce à sa force décuplée, il ne lui suffit que d'une poussée bien maitrisée pour la faire basculer dans le cercle.
Les deux jeunes hommes étaient tombés à terre à la suite de la réaction de Pietro pour les sauver touts les deux, mais il ne leur fallut qu'une seconde pour se remettre sur leurs pieds. Face à eux, depuis l'intérieur du vortex, Gabriel et Cal'ysyee se remettaient de leur stupeur et plantèrent leur regard sur leur ennemi originel.
Pietro leur fit coucou d'une main puis broya le dispositif de l'autre. Les pièces tombèrent à terre dans un joli tintement puis il s'approcha du portail qui commençait à doucement se refermer.
Il tendit une main vers le haut et referma le poing sur du vide puis baissa très lentement le bras, et Peter vit dans son geste que c'était comme s'il avait saisi à distance une des extrémités du portail afin de le clore plus rapidement.
Peter ne comprit par trop ce dont il était témoin. Il n'avait jamais vu son ami utiliser ce type de magie auparavant, et de ce qu'il savait de « Quicksilver », cette aptitude n'en faisait pas partie. Mais encore une fois, certaines choses différaient d'un univers à l'autre, et ce Pietro-ci semblait lui réserver encore bien des surprises.
Peter essaya de ne pas trop s'inquiéter en voyant l'écoulement de sang qui partait du nez de son ami, se disant que ce devait être à cause de l'énergie qu'il déployait pour terminer le travail.
Lorsqu'il repéra Gabriel bouger de l'autre côté, remonté et apparemment bien décidé à ne pas baisser les bras, Peter tira une salve de toiles dans sa direction afin de le repousser, le temps que Pietro en termine une bonne fois pour toute. Il lui lança tout ce qu'il put, ne manquant jamais sa cible et espérant que cela serait suffisant pour l'empêcher de retraverser le portail en sens inverse.
Il repéra le javelot que Cal'ysyee avait utilisé pour tenter de détruire leur dôme, qui trainait désormais sur le sol. Il le ramassa et serra fermement ses doigts autour de l'objet, la mâchoire crispée.
–'Fallait pas mettre les pieds dans mon univers, prononça gravement Peter.
Il concentra toute sa force dans le mouvement qu'il effectua ensuite et qui consista simplement à envoyer le javelot droit vers Gabriel. L'arme se logea dans l'épaule de son ennemi, qui recula suffisamment pour faire baisser la menace qu'il représentait.
Toute la haine que Peter put lire dans son regard disparut à l'instant où le portail se clôt totalement, ne laissant que quelques maigres étincelles crépitantes comme seule marque de son existence.
Tout bruit lié au combat s'évanouit subitement et un silence assourdissant s'empara progressivement des lieux.
Après quelques secondes, quelques lointaines sirènes de voitures de polices se manifestèrent, mais ni le duo de héros ni les civils à proximité n'y firent attention.
Epuisé, Pietro tomba à genoux, une main à terre pour le soutenir et, de sa main libre, il essuya grossièrement le sang qui coulait de son nez. Peter se précipita vers lui et s'agenouilla à ses côtés, inquiet pour lui, mais Pietro leva ensuite un pouce en l'air, pour le moment incapable de répondre à cause de son essoufflement.
–T'avais raison, soupira le plus jeune. Je suis un grand malade, c'était un truc de dingue.
–Ça a marché, parvint à articuler l'autre, c'est déjà un bon point, poursuivit-il en redressant le buste de sorte à s'asseoir sur ses talons et tourner le visage vers le ciel désormais dégagé, les yeux clos, puis il se mit à rire doucement. Bordel, je ne pensais pas finir ma journée comme ça.
–Moi non plus, compléta Peter en le rejoignant dans son rire, sentant la pression retomber. Ça va ? demanda-t-il ensuite, toujours inquiété par l'état de l'autre.
–Nickel, répondit Pietro d'une voix rauque en acceptant l'aide de son ami pour se relever difficilement, les muscles endoloris. C'est clair que j'ai vraiment besoin de vacances, mentionna-t-il en s'étirant, puis son regard fut happé par quelque chose à quoi Peter ne fit pas attention. T'as bien parlé de partir au soleil ? mentionna-t-il, ce à quoi son ami hocha la tête. Ouais, souffla-t-il. Bah j'crois que ça va devoir attendre.
Peter pivota pour regarder dans la même direction que l'autre jeune homme et constata qu'ils avaient de la compagnie.
Il n'y avait pas que quelques civils un eu trop curieux, mais également des individus armés d'appareils photo et micros. Des journalistes, évidemment impatients d'interroger les deux survivants de cette attaque, le duo qui venait tout bonnement d'empêcher que la ville n'explose d'ici les prochaines dix minutes, chose que tout le monde ignorait probablement.
Le rythme cardiaque de Peter s'accéléré et ses paumes devinrent moites. La dernière fois qu'il avait été directement confronté à la presse sans son masque pour cacher son identité, ça lui avait attiré des montagnes de problèmes. Il avait ôté son masque dans le feu de l'action, autant pour respirer plus librement que pour se sentir plus proche de son acolyte, mais maintenant qu'il était sur le point de confronter tous ces reporters, il était moins confiant.
Il sentit Pietro passer un bras autour de ses épaules et effectuer une légère pression réconfortante sur son articulation avant d'échanger un coup d'œil complice avec lui, lui faisant ainsi savoir que quoi qu'il puisse arriver par la suite, ils feraient front ensemble.
Quelle ne fut pas la surprise de Peter lorsque, une fois que les journalistes les aient rejoints, ces derniers les interrogent majoritairement sur les ennemis qu'ils venaient juste d'éliminer, les aptitudes exceptionnelles, la façon dont ils avaient géré la situation en limitant les dégâts sans jamais insinuer qu'ils faisaient partie intégrante du problème.
Ils n'eurent droit qu'à des louanges, et aucun commentaire sur les quelques endommagements environnants. Certains parurent surpris par l'âge des deux jeunes hommes, en particulier celui de Peter. Il était clair qu'il faisait vraiment son âge et que cela devait sembler étonnant qu'un étudiant à peine majeur soit derrière ce masque.
Le cœur de Peter gonfla de fierté –et surtout de soulagement– lorsqu'ils eurent droit à des applaudissements.
Pietro raffermit sa prise autour de ses épaules et, en dépit de sa fatigue, offrit un sourire éclatant à la presse en faisant signe à ces gens qui les félicitaient. Il se pencha vers Peter et, sans lâcher des eux leur public, lui glissa :
–Je crois qu'ils ont enfin compris à quel point ils avaient besoin de toi.
Peter répondit par un sourire et expira longuement, libéré de son stress. Il ignorait comment il aurait fait pour affronter la situation si Pietro n'avait pas été dans les parages. S'il ne l'avait pas rencontré à la rentrée. S'ils n'avaient pas été colocataires, s'ils n'avaient pas partagé avec l'autre leur parcours respectif, ce qui les avait encore plus rapprochés.
Rien de ce qu'il avait hypothétiquement prévu pour cette année scolaire ne s'était déroulé normalement, mais maintenant qu'il faisait une brève rétrospective sur les derniers temps, il réalisa qu'il ne changerait le déroulé des événements pour rien au monde.
Pietro faisait désormais partie intégrante de son existence et il espérait que cela durerait.
