Merci à la so fresh Sockscranberries, pour sa lecture bêta !
Merci BlacktoSnape pour la constance de tes reviews, haha :-P
Je n'ai plus qu'un chapitre d'avance... aïe aïe aïe
ᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔ
Chapitre 6
Severus se réveilla aux aurores. Il avait toujours été du genre lève-tôt. En fait, il n'avait même jamais vraiment très bien dormi, et cela pour des raisons évidentes. Quand il s'éveilla, en s'étirant, il avait momentanément oublié où il était et ce qui s'était passé jusque-là. Il pensait à ce qu'il pourrait prendre au petit déjeuner, mourant d'envie d'un café. Il se réjouissait aussi du fait que, comme c'était samedi, il pourrait rester chez lui et n'aurait pas à supporter tous ces débiles au Ministère, qui le regardaient sans cesse comme s'il était la pire des ordure. Il n'aurait pas non plus à supporter la sorcière qui avait été son insupportable petite étudiante, et qui lui donnait maintenant des ordres sans qu'il n'ait son mot à dire. Et soudain, tout lui revint. Il supplia le Ciel que ce n'ait été qu'un cauchemar, mais non, ce n'était pas le cas, pas plus que les cinq jours précédents. Il ouvrit les paupières sur la chambre d'Hermione, dans la maison de ses parents, comme pour confirmer que tout cela était bien vrai.
Certains des rideaux qui avaient été tirés la veille étaient restés à peine ouverts, laissant percer la clarté du jour. Il cligna des yeux et s'assit, constatant qu'elle était toujours profondément endormie dans le lit. L'une de ses jambes nue était remontée à cheval sur les couvertures, baignée dans la lueur argentée de l'aube. Sa peau était lisse et semblait si douce... et sa nuisette remontait à peine, comme pour révéler la zone charnue où sa cuisse rejoignait ses fesses, laissant entrevoir juste assez de chair pour lancer l'imagination... Non ! Il repoussa de force cette vision et les pensées qui l'accompagnaient, tout comme il mettait à distance le fantasme de ses lèvres souples sous les siennes. Comme ces fesses-là lui avaient parues fermes au toucher, même à travers ses vêtements. Mais qu'est-ce que c'est que cette folie ? Il évacua avec plus de forces les vagabondages de son esprit et choisit plutôt la voie de l'agacement.
Il aurait voulu pouvoir se trouver de quoi se faire un café et rester en pyjama toute la journée mais bordel, c'était impossible parce qu'il était dans une maison remplie de gens, une maison qui n'était pas la sienne. Il se redressa et rejoignit la salle de bain d'un pas raide, en espérant que quand il en sortirait, elle serait réveillée et ils pourraient descendre prendre le petit déjeuner.
Mais elle était toujours endormie. Il avait fait ses ablutions, puis était retourné aux toilettes après avoir fait son « lit », avait sorti quelques vêtements de sa valise pour les suspendre dans l'armoire ou les ranger dans un tiroir - qui ne comportait aucun vêtement qu'elle aurait pu y laisser, validant le fait qu'elle ne venait ici que très rarement. Il choisit sa tenue du jour et l'enfila. Même après cela, elle dormait toujours. Il soupira avec colère et se leva pour parcourir les dos des livres sur les étagères, dans le petit couloir. Il en choisit un, une fiction du genre fantasy, pas forcément ce qu'il avait l'habitude de lire d'ailleurs, et s'assit à la fenêtre où la lumière était suffisamment vive pour lire. Depuis ce point, il pouvait voir l'arrière-cour, une piscine et le paysage alentour. Au loin, un vignoble se détachait dans la plaine, et même si les tons lilas n'étaient pas au rendez-vous puisque ce n'était pas la saison, un champ de lavande s'étalait plus à l'est.
Hermione finit par se réveiller. Elle s'étira, ouvrit les yeux et se redressa lentement, son regard tombant sur Severus assis sur le siège sous la fenêtre, les jambes allongées. Il lui faisait face. Elle remonta brusquement la couverture sur ses seins.
« Eh ben il était temps, » lança-t-il, tournant une page sans lever les yeux de son livre.
« Bonjour à vous aussi, Severus, » dit-elle, agacée.
« Cela fait une heure que je suis debout. Il me faut un café. »
« Et pourquoi n'êtes-vous pas descendu en chercher un ? »
« Tout seul ? Dans une maison remplie de toute votre famille ? »
« Ils n'auraient pas tous été là. Juste mes parents. Peut-être mes grands-parents. »
« Quand bien même. »
« Bon, d'accord. Alors, fermez les yeux et laissez-moi aller aux toilettes pour m'habiller, et nous pourrons descendre. »
« Je lis une histoire assez intéressante. Il y a du suspense, des luttes de pouvoir et peut-être même des meurtres. Pourquoi diable est-ce que je vous regarderais ? »
Hermione fut piquée au vif. Et il le remarqua, dans sa vision périphérique. Il ne pensait pas vraiment ce qu'il venait de dire, il avait juste voulu qu'elle enchaîne. Il regrettait ses mots, comme toujours. Voilà pourquoi personne ne se soucie de toi.
Hermione transforma sa douleur en colère. C'est ce qu'elle faisait toujours, pour ne pas montrer qu'elle souffrait. Elle n'aimait pas que les gens la voient pleurer. Jamais. Elle se leva, décidée, soufflant de colère, et marcha à grands pas vers l'armoire pour y prendre le jeans qu'elle y avait pendu la veille, puis vers la commode, d'où elle extirpa d'autres vêtements, avec des gestes tout aussi furibonds. Tout en faisant semblant de lire, évidemment, il la regardait. Elle avait vraiment des jambes magnifiques. Son esprit vagabonda légèrement, de son propre chef, et il les imagina un instant autour de sa taille... Non. Sale con. Cela n'arrivera jamais. Elle fit volte-face et passa devant lui pour rejoindre les toilettes. Il en profita pour jeter un œil à son décolleté, son livre levé haut devant ses yeux. Et puis, ses pensées vinrent roder du côté de ses seins... Non ! Tu lis l'histoire d'une princesse aux cheveux argentés mariée de force à un sauvage Dothraki. Reste concentré là-dessus.
Hermione émergea de la salle de bain peu après, portant un jean bleu marine, assorti d'une chemise à manches longues aux fines rayures noires et blanches. Tout cela moulait son corps à la perfection. Il ne l'avait jamais vu habillée autrement qu'en tailleur ou en pantalon. Elle était plutôt jolie ainsi. Sans parler de ses cheveux, à nouveau détachés. Il ne l'avait toujours vue coiffée qu'avec son chignon, jusqu'à la veille. Enfin, depuis qu'elle avait quitté Poudlard en tout cas. Il peinait tant à se concentrer sur sa lecture qu'il finit par abandonner, refermant son livre en un claquement après avoir marqué sa page. Il le laissa sur le siège devant la fenêtre et se releva. Il était plutôt soulagé de constater qu'il n'était pas trop mal habillé, quand il se compara à elle : il portait un jean noir, ses bottes et une chemise blanche, col et premiers boutons détachés. Sa cicatrice était à nouveau masquée par la magie. Elle s'assit sur le fauteuil face au canapé sur lequel il avait dormi pour enfiler ses bottines, puis ils quittèrent la chambre pour descendre au rez-de-chaussée dans un silence tendu.
Toutes sortes de choses les attendaient sur l'îlot pour leur petit déjeuner : un assortiment de fruits, du pain, des bagels, des gâteaux, du jus de fruits, de la charcuterie, du fromage à tartiner, du beurre et de la confiture.
« Bonjour Maman, » lança Hermione en embrassant sa mère sur la joue, « Mamie, » ce fut le tour de Judith, « Papi, » puis celui d'Edward. Severus les salua depuis la dernière marche de l'escalier, un peu gêné.
« Entrez Severus, faites comme chez vous, » lui dit Jane avec un sourire en s'avançant vers l'îlot central. « Nous avons du pain, des bagels, du beurre, de la confiture, du fromage à tartiner... des fruits, toutes sortes de charcuteries, du jus, du café... Allez, mangez ! »
« Eh bien... merci, » fut tout ce que Severus trouva à répondre. Jane avait le chic pour le mettre à l'aise, qu'il se sente bienvenu, désiré... Pas même sa mère ne l'avait jamais nourri aussi bien.
« Voulez-vous du bacon ? Des œufs ? Je peux en brouiller quelques-uns. »
« Non, non, c'est très bien comme cela, » dit Severus avec un sourire timide.
« Est-ce que tu veux des œufs et du bacon, chérie ? » demanda-t-elle à Hermione.
« Non merci, Maman, » répondit sa fille en se saisissant d'une assiette pour y placer un bagel qu'elle le coupa pour y étaler du fromage.
Comme elle avait commencé, Severus se sentit alors suffisamment à l'aise pour se servir lui-même.
« Allez, mangez les enfants, une belle journée au domaine nous attend, » claironna Jane en débarrassant sa tasse, puis celles de ses parents, pour les mettre dans l'évier.
Hermione laissa échapper un râle de protestation. « Oh non, dis-moi que ce n'est pas vraaaaai ! » se lamenta-t-elle en s'effondrant sur l'îlot, l'air découragé.
Severus regarda la scène se dérouler devant lui, prenant un fruit et un bagel pour les déposer dans son assiette.
« Chérie, tu connais ton père. Il est déjà là-bas, il nous attend. » Jane sourit. « Il est vraiment emballé de montrer à Severus l'affaire familiale. »
Hermione grogna. « Oh oui, je n'en doute pas. » Elle étala avec colère davantage de fromage sur son bagel. « Je déteste ce putain d'endroit, » marmonna-t-elle, et seul Severus sembla l'entendre.
« Severus ! Voudriez-vous une bonne tasse de cappuccino bien chaud ? » Judith s'était levée et s'avança derrière Severus, posant une main dans son dos en souriant. Il se contracta. Il n'était pas vraiment habitué aux contacts physiques. Mais, elle resta à ses côtés, le même sourire chaleureux sur les lèvres. Jane, qui le regardait depuis l'évier en souriant également, ajouta : « Ah oui ! Comment ai-je pu oublier cela ? ». Alors, il se détendit un peu. Il avait remarqué la machine à café sur le comptoir et il mourrait d'envie d'en boire un, mais il n'était pas prêt à initier quoi que ce soit tant que l'on ne lui avait rien proposé. Et à présent, c'était fait. Il jeta un œil à Hermione, qui semblait toujours dépitée par la journée qui l'attendait, fourrant tant et plus d'ingrédients dans son bagel. Apparemment, elle compensait le stress en mangeant.
« Eh bien... Je crois que je vais en avoir bien besoin, » répondit-il à Judith en esquissant un sourire timide.
« Allez-y, servez-vous, » dit Jane, toujours à la vaisselle.
« Je... ne sais pas comment elle fonctionne, » dit-il.
« Hermie, chérie, fais-donc à ton fiancé une bonne tasse de café, » encouragea Judith, qui se tenait près d'Hermione en lui caressant le dos. « Prends soin de ton homme, ma puce, » ajouta-t-elle plus bas.
Severus l'entendit et afficha aussitôt un air suffisant, alors qu'Hermione relevait le visage vers lui, outrée. Mais il n'était pas question de répondre à sa grand-mère. Elle était d'une autre époque, et cette idée de prendre soin de son homme était importante pour elle. Bien sûr, Papi était un homme formidable qui prenait en retour soin de Mamie, alors il le méritait.
« Oui, Chaton, peux-tu me servir un cappuccino, s'il te plaît ? » renchérit-il, l'air toujours aussi fier, passant une main dans son dos. Il adorait cela. « Prends soin de ton homme, » murmura-t-il.
Elle eut un sourire forcé. « Bien sûr, Sev, » et elle se dirigea vers la machine à café. Elle allait s'en faire un, de toute façon, alors cela ne serait pas beaucoup plus de travail de le servir également.
Severus se saisit de l'assiette qu'Hermione avait laissée sur l'îlot et continua de la remplir. Il se dit qu'après tout, il avait commandé pour son compte assez de repas à emporter, et avait mangé avec elle suffisamment de fois pour la compléter selon ses goûts. Et cela renforcerait son apparence de bon fiancé, amoureux, ce qui était l'enjeu majeur du moment. Comme il finissait de remplir les assiettes, et sans qu'il ne le remarque, Jane, Judith et à présent Edward, qui avait fini par poser son journal et s'était levé de la table, le regardèrent en échangeant des sourires entendus.
Il plaça les assiettes sur la table et commença à manger. Hermione le rejoignit avec son cappuccino et remarqua son assiette, composée tout comme elle l'aurait fait elle-même. Elle en fut soufflée. Il la regarda et prit son café, qu'elle tenait dans une main.
« Merci, » dit-elle, ses yeux allant de l'assiette, à Snape. Il hocha la tête avant de boire une gorgée de son cappuccino.
« Est-ce que tu nous accompagnes à la vigne, Papi ? »
« Oh non, non. Je vous laisse ce plaisir, les filles, et à Severus bien sûr, » dit-il, un peu ironiquement. Severus commençait à bien l'aimer. Il eut un léger grognement. « Severus, vous auriez dû demander un double cappuccino. Charles est très... passionné, quand il est question de son vignoble. »
Severus eut un nouveau sourire, timide, charmant, et leva sa tasse.
« Je passerai la matinée avec Laura, » compléta Edward. C'était l'une des tantes d'Hermione, du côté de sa mère, se remémora Severus. « Ensuite, je rentrerai à la maison, pour rejoindre mon fauteuil préféré et regarder un bon vieux navet à la télévision, » termina-t-il. Puis il déposa un rapide mais tendre baiser sur les lèvres de sa femme et quitta la pièce.
Une fois qu'Hermione et Severus eurent fini de déjeuner, ils prirent la direction du domaine, en compagnie de Jane et Judith. Hermione semblait toujours mal à l'aise, ou agacée, ou les deux, quand elle prit place à ses côtés dans la voiture, yeux perdus dans le paysage et bras croisés devant elle. Il se demanda si la perspective de cette journée était vraiment si terrible pour elle. Mais il aurait bientôt la réponse, de toute façon.
Quand ils atteignirent la porte de la cave, parmi le personnel et les visiteurs se trouvaient Charles... et Jacques. Charles regarda sa montre en notant leur arrivée.
« Ah, enfin, » sourit-il, en embrassant sa femme et sa belle-mère. Mais quand il en vint à Hermione, il l'embrassa sur la joue et ajouta « J'imagine que tu n'as pas à te lever tôt donner le change, quel que soit l'endroit où tu travailles. »
Hermione soupira lourdement alors qu'il se tournait vers Severus pour lui serrer la main, ce qui ne les enchantait ni l'un ni l'autre. Charles fit volte-face pour expliquer la visite qu'il allait mener, quand Jacques apparut devant eux.
« Salut, 'ermione. »
« Bonjour, » dit-elle, sans cet air rêveur qui avait été le sien la veille, un peu sèchement tout en s'efforçant de rester polie, ce qui constituait un grand changement. Les bras toujours croisés sur la poitrine, elle tentait de contrôler les émotions qui se bousculaient en elle et qui menaçaient même de surgir par ses yeux. Le parfum capiteux de Jacques qui, autrefois, faisait voleter des papillons dans son ventre, la déstabilisa un peu. Puis il se saisit de la main qu'elle tenait serrée derrière son bras opposé et en embrassa le dos. Hermione ne sut pas vraiment comment réagir.
Jacques afficha un sourire fier, plongeant ses yeux dans ceux d'Hermione en se redressant. Severus plissa les yeux et retroussa les lèvres à la vue de ce qui se déroulait devant lui. Jacques se tourna alors vers lui et lui tendit sa main.
« Septimius, oui ? »
Severus lui lança un regard si assassin qu'il devait sembler vouloir le trucider sur place. « Non, c'est Severus. »
« Ah, oui, un truc Latin, » ajouta Jacques en souriant et en lui serrant la main.
« Oui, oui, c'est vrai. » Severus sourit en retour, mais un sourire plein de haine. « Fort à propos, François. »
« Jacques. »
« Pardon ? » Severus joua l'incompréhension.
« Jacques. Je m'appelle Jacques. »
« Ah. Oui. Un truc français. » Severus le regardait toujours, yeux plissés. Hermione ne put se retenir de sourire en voyant son agacement, et aussi du fait qu'il était parvenu à irriter Jacques à son tour.
Il leur fallut passer des bottes propres pour la visite des locaux. Ils s'assirent donc pour retirer leurs chaussures et enfiler des bottes de caoutchouc, et à nouveau, Jacques ne laissa pas passer l'occasion de revenir les harceler.
« Laisse-moi t'aider, 'ermione. J'adore tes jolis pieds. » Il était agenouillé devant elle, et tentait de retirer ses bottines, tenant dans une main les bottes vertes qui lui étaient destinées.
Severus était assis à ses côtés, chaussant ses propres bottes, et puisqu'il comprenait tout aussi bien le français que le langage corporel, ce trou du cul commença sérieusement à lui taper sur le système. Il était jaloux. Pourquoi donc ?
Hermione lui prit vigoureusement les bottes des mains. « Je peux très bien me chausser moi-même, » s'exclama-t-elle avec vigueur, puis elle se retourna, faisant basculer ses jambes de l'autre côté du banc rustique sur lequel ils se trouvaient, tournant le dos à Jacques et se rapprochant un peu plus de Severus.
Jacques sembla un peu gêné, se releva et rejoignit le groupe qui les attendait pour la visite.
Severus était scandalisé. Quel voyou oserait courtiser de la sorte et sans gêne une femme fiancée, et devant son compagnon, qui plus est ? Évidemment, ils n'étaient pas vraiment ensemble, mais cela, la brute épaisse ne le savait pas. Ce qu'il avait vu, ce qu'on lui avait dit, c'est qu'ils étaient ensemble, qu'ils étaient fiancés. Essayer de séduire la compagne d'un autre homme sous son nez était juste écœurant. Finalement, ce n'était qu'un petit fils de pute imbu de sa personne, et qui se pensait si séduisant qu'il imaginait qu'Hermione allait lui tomber dans les bras, tout cela impliquant évidemment qu'elle était une fille facile ou volage, et Severus un gros nigaud. Un homme détestable. Au moins, Hermione ne se laissait pas faire, contrairement à la veille, et ne participait pas au fait de le faire passer pour une mauviette.
Le groupe s'avança vers les vignes, et même si la visite était censée être destinée à Severus, il marchait légèrement en retrait, avec Hermione qui paraissait toujours blasée.
« Pourquoi est-ce qu'il est là ? » demanda Severus à son intention.
« Il travaille ici. »
« Ah. » Il comprenait mieux pourquoi Hermione n'aimait pas venir à la vigne.
Jacques se sépara du groupe qui ouvrait la marche sur la petite route poussiéreuse pour venir lui tendre la main. « Tu auras une meilleure vue devant, 'ermione. » Il souriait fièrement, tenant une main devant ses yeux pour les protéger du soleil, vision dégoûtante.
Severus avait chaussé ses lunettes aviateur depuis qu'ils étaient sortis des locaux, et Jacques ne put cette fois voir ni ses sourcils froncés ni son regard assassin. La rage qui bouillonnait en lui fut plus puissante que la raison et il passa prestement son bras autour de la taille d'Hermione pour l'attirer à lui. « Elle est très bien là où elle est, Pierre. »
Hermione sourit et décroisa ses bras, pour en glisser un dans le dos de Severus. Jacques sembla à nouveau déstabilisé, et même un peu furieux.
« Jacques. Je m'appelle Jacques ! »
« Oui, bien sûr. Ne devriez-vous pas rejoindre votre patron là-bas, Claude ? Il a peut-être besoin de vous. »
Hermione ricana, les yeux au sol, et tenta d'accorder sa démarche à celle de Severus pour retrouver l'équilibre qu'elle avait légèrement perdu quand il l'avait attirée à lui.
Jacques souffla lourdement et partit vers l'avant du convoi, hâtant le pas pour retrouver son patron, qui l'avait effectivement appelé.
Ils marchèrent parmi les vignes alors que Charles menait la visite, contant l'histoire du domaine et expliquant comment le raisin était vendangé, comment le vin était fabriqué, et tout le reste. Severus donnait le change en feignant l'intérêt, souriant d'un air charmant, et parvint même à poser des questions constructives pour gagner des points auprès de Charles Granger. En fait, il se foutait complètement de tout cela. La seule chose qui l'intéressait dans le vin, c'était d'en boire de temps en temps. Point de vue partagé par Hermione.
Tout du long, son bras resta sur les épaules d'Hermione, la maintenant près de lui. Jacques se retourna plusieurs fois, et fut comme déçu de les voir si proches.
Pendant ce temps, Hermione se contenta d'essayer de contrôler les papillons qui se répandaient peu à peu dans son bas-ventre. Sans qu'elle ne sache pourquoi, se tenir contre Severus provoquait ce genre de réaction en elle. C'est juste pour faire semblant, Hermione. Et il sentait... si délicieusement bon. Exquis. C'était poivré, léger, à l'opposé de l'odeur capiteuse, presque insupportable, qui suivait Jacques de partout. Elle l'avait aimée, autre fois, mais à présent, elle trouvait que c'était un peu trop, et presque révélateur de l'ampleur de sa connerie. Bien sûr, il voulait attirer l'attention sur lui quand il entrait dans une pièce, que tous les regards des femmes se posent sur lui, pleins de désir, et que les hommes en soient jaloux. Sentir le parfum de Severus était plutôt réservé à celles et ceux qu'il autorisait à s'approcher suffisamment de lui pour le sentir. C'était intime et plutôt réservé aux... privilégiés, dans un sens. Alors qu'elle travaillait à ses côtés depuis plusieurs années à présent, elle ne l'avait jamais vraiment senti ou remarqué jusqu'au moment où il l'avait attirée à lui dans la vigne. Et pendant ce baiser, hier. Elle secoua le visage, tentant d'évacuer la vision qui s'insinuait dans son esprit.
Ils entrèrent dans la cave et l'exposé sur le vin se poursuivit. Severus tenait toujours Hermione contre lui, surpris de ne pas être mal à l'aise à ce contact. Jacques se tenait près d'elle et la dévisageait avec son regard de merlan frit, souriant bêtement. Elle lui lançait de temps à autre des regards en biais, un peu gênée.
Mais qu'est-ce que c'est que ce clown ? Severus guida Hermione pour qu'elle se place devant lui alors qu'ils observaient de gros fûts de vin et écoutaient son père disserter. Elle trébucha légèrement quand il l'attira à lui pour qu'elle appuie son dos contre son torse, un bras autour de sa taille. Ce qu'elle fit, plaçant une main sur les siennes, qui reposaient sur son ventre. Son cerveau ne savait pas bien si elle faisait avec la situation ou si elle y prenait plaisir. Severus, lui, était en proie à ses propres paradoxes, alors que le doux parfum de sa chevelure massive venait chatouiller son visage et qu'il sentait ses fesses se lover contre son sexe. Les images de sa peau nue sur les couvertures, s'échappant à peine de sa nuisette, s'imposèrent à lui.
Une fois la visite et la dégustation terminées, ils étaient censés déjeuner tous ensemble. Mais Judith, qui avait remarqué à quel point ni Severus ni Hermione n'avaient pu se retenir de laisser courir leurs mains l'un sur l'autre pendant toute la matinée leur avait fait préparer un panier repas et les avait libérés pour qu'ils puissent pique-niquer ensemble, seuls. Personne n'osa opposer résistance à la matriarche.
Ainsi s'écartèrent-ils du bâtiment principal où les autres s'apprêtaient à prendre leur repas. Severus étendit une grande serviette au sol, tout contre les vignes, pour qu'ils puissent avoir un peu d'ombre. Il invita ensuite Hermione à s'assoir en lui offrant sa main, conscient que dans leurs dos, derrière les touristes qui vagabondaient dans l'herbe, toute la famille d'Hermione les observait depuis le bâtiment qu'ils venaient de quitter. Il déposa le panier et s'assit sur la serviette, puis soupira en s'allongeant, rapatriant ses lunettes sur ses yeux.
« Votre grand-père avait raison, j'aurais dû me faire un double cappuccino. » Pas exactement pour les raisons qu'il a évoquées, en revanche.
Hermione eut un petit rire. « Merci encore de faire tout cela. »
« Est-ce que j'ai vraiment le choix ? »
Elle ne répondit pas et se contenta de sortir le pain et le fromage, les fruits, les desserts et le vin - bien sûr - du panier. Elle commençait à se sentir vraiment mal de devoir le forcer à participer à toutes ces choses. Mais y avait-il une autre solution ? Le fait qu'il lui serait tout à fait possible de vivre avec lui s'imposait peu à peu à elle. Elle se rendait même compte qu'elle n'aurait aucun mal à mener cette supercherie avec succès, et que cela serait peut-être même assez agréable, si seulement ils parvenaient à cesser de se chamailler et réussissaient à s'accorder. C'était bien mieux que la cohabitation forcée uniquement basée sur le mépris et la corruption à laquelle elle avait songée en premier lieu. Si elle avait dû se soumettre au Ministère... qui sait avec quel idiot elle aurait fini. Et elle aurait en plus été forcée de... faire des choses avec lui.
Elle leva les yeux pour voir que sa famille - et Jacques – ne se retenaient pas de les observer depuis l'intérieur.
« Vite, faites quelque chose Severus, ils nous regardent. »
« Et que voulez-vous donc que je fasse ? » répondit-il d'une voix traînante. Elle vit un sourcil se lever derrière les verres de ses lunettes.
« Je ne sais pas, un truc romantique, donnez-moi à manger ou quelque chose du genre. »
« Et pourquoi serait-ce toujours aux hommes d'être romantiques ? » Il fronça les sourcils. « Pourquoi les gens imaginent-ils que cela ne plairait pas aux hommes qu'on prenne soin d'eux ? En plus, c'est moi qu'on a forcé à venir ici. Je suis celui qui doit souffrir pour avoir enfin la promotion qu'il a par ailleurs amplement méritée. » Il n'était pas vraiment en colère, juste las. Déjà, alors qu'il n'avait pas été sournois, ni même tenté de l'être, il put voir son expression changer, se teinter de tristesse. Il ne voulait vraiment pas qu'elle se sente mal ou coupable. C'était déjà bien amplement suffisant qu'elle ressente tout cela auprès de son père, sous le feu de ses remarques passives-agressives. Et c'était sans parler du contrôle constant et de la pression mise par les femmes de la famille. Pour couronner le tout, il n'était pas question qu'elle paraisse triste. Ils étaient amoureux, après tout. Ou du moins, ils étaient censés l'être.
« C'est moi qui ai dû supporter le retour de Jacques-ass*, défiant éhontément ma virilité, » ajouta-t-il plus doucement. Hermione ne put se retenir de rire à son jeu de mot.
Il fut un peu surpris. Il ne l'avait jamais entendue rire. Il n'avait d'ailleurs jamais vraiment fait rire une femme de la sorte, si ouvertement et… avec tant de sincérité. Il apprécia plutôt ce son, et la chaleur qui se diffusa soudainement en lui à l'idée d'avoir produit un tel effet sur Hermione Granger, toujours si sévère et autoritaire. Elle avait un très beau rire. Ses propres lèvres se courbèrent en un sourire. « C'est vous qui devriez me donner la becquée, » ajouta-t-il d'un air taquin.
Elle lui lança un sourire en coin, retroussant le nez, et malgré ses lunettes de soleil, il sut que ses yeux roulaient dans leurs orbites. « Espèce de sale canaille, » marmonna-t-elle.
« Oh là, mais qu'est-ce que c'est que ces manières, Chaton ? »
Ses remarques la touchaient de moins en moins. Sûrement parce qu'il y avait de moins en moins de bassesse et de venin dans ses propos.
« Ne vous y habituez pas trop, Severus Snape. » Elle leva les yeux vers la bâtisse, et remarqua qu'ils les observaient toujours par moment, en mangeant. Jacques, assis face à eux, les fixait ouvertement. Son attitude et sa prétention commençaient à lui taper sur les nerfs. Elle baissa le regard vers Severus, allongé sur la serviette à carreaux, une main sous son crâne, l'autre reposant sur son estomac. Il affichait toujours le même air taquin. Alors, elle commença à porter à la bouche de l'homme des morceaux de fruits, et il en sourit de plus belle. Même s'il était plutôt suffisant, c'était le premier vrai sourire qu'elle lui voyait. Et c'était plutôt agréable de le voir ainsi.
Une légère brise souffla, douce, caressante. L'air fit s'envoler quelques mèches de ses cheveux - qu'il avait attachés mais qui s'étaient décoiffés quand il s'était étendu au sol - vers son visage, et sa bouche. Sans y songer vraiment, elle les balaya doucement avant qu'il n'ait le réflexe de le faire, souriant, plongeant ses doigts dans ses cheveux pour les ramener en arrière. Tous deux furent secoué par le contact, les yeux dans les yeux, même s'il n'était pas vraiment possible d'y lire quelque émotion que ce soit, à cause des lunettes de soleil. Ils balayèrent néanmoins assez rapidement ces sensations.
Elle se tourna vers le panier pour y prendre un cube de fromage, concentrée sur sa tâche, tout cela pour calmer Jacques, si par hasard, il les observait toujours. Elle en porta un, puis deux aux lèvres de Severus. Au troisième, il suça légèrement le bout de ses doigts, lui arrachant un frisson. Il aurait aimé pouvoir dire que c'était un accident, mais sans savoir pourquoi, il avait eu étrangement très envie de le faire, juste pour voir comment elle réagirait.
« Bon, ça ira bien, non ? » dit-elle, le souffle court, après un silence. « Il faut que je mange aussi. Et vous avez aussi votre part du travail à faire, » ajouta-t-elle sur le ton de la plaisanterie.
Il s'assit. « Est-ce qu'ils sont passés à autre chose ? » demanda-t-il, tournant le dos à la bâtisse.
« Plus ou moins. Seul Jacques-ass nous regarde toujours par moments. » Elle eut un sourire. Elle aimait vraiment ce jeu de mots.
Severus leur servit du vin alors qu'elle commençait à manger, le picotement provoqué par le contact de ses lèvres persistant sur ses phalanges.
ᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔᚗᚔ
* Jacques-ass : ce jeu de mots est formidable dans la VO, et j'ai choisi de ne pas essayer de le traduire (ça aurait impliqué de changer le prénom du personnage). Il est formidable, parce qu'à la fois, "jackass" veut dire "crétin / idiot / imbécile" et "ass" veut dire "pauvre con / connard / trou du cul". On conservera donc "Jacques-ass" en ayant en tête tout ça :-)
