Chapitre 407 : Praxis

Flamm ne me considère évidemment pas pour acquise - ce serait une grave erreur tactique.

Il est évidemment bouleversé par ce qui nous arrive, y pensant sans cesse, se touchant les lèvres de la pulpe des doigts, n'y croyant pas par instant, volonté arrachée à ses études.

Il n'était vraiment pas convaincu de parvenir à se frayer un chemin jusqu'à mon cœur.

Le sourire que je fais naître sur ses lèvres le rend méconnaissable. Mais il retombe rapidement en songeant que oui, il y a un... obstacle.


"Malaspina, vous prenez la suite de la lecture." directif en cours.

"Oui, Messire !..." se levant prestement pour poursuivre là où son camarade s'était arrêté.

Il m'est compliqué de demeurer concentrée tant j'envisage son corps avec un bouleversement ravi qui remue jusqu'en mes reins !...

Il a tant nourri ma haine que je n'avais jamais pris le temps de vraiment le regarder.

Je me défends de songer à ce que nous avons brièvement partagé dans ma chambre l'autre jour. J'ai encore la sensation de ses doigts passés entre les miens, le goût de la douceur de ses lèvres. Et je pense que - Rook me pardonne - j'en veux encore !...


Je l'attends à l'orée des bois mais il ne vient pas. Je l'attends deux bonnes heures avant de rebrousser chemin, dessellant Na'ir, la mort dans l'âme.

Il a dû être sommé d'effectuer une tâche pour sa reine, sans doute.


On tapote contre ma fenêtre et j'ouvre.

"Rook ?" surprise.

Il entre et referme derrière lui. "Désolé, Princesse, de t'avoir fait attendre. J'ai été réquisitionné par ma reine. J'ignore quand je pourrai revenir à la cabane."

"Je comprends, Rook."

Il glisse les doigts, plongés dans ses gants sombres de fleur de cuir d'agneau, sous mon menton. "Tu m'en vois sincèrement désolé, Princesse."

"Rook. Je..."

"Oui ?"

"Je crois que... qu'il m'attire."

"Eh bien... croques-y à pleines dents."

"Rook !..." outrée.

"Je te sais libre de corps et d'esprit, Princesse. Nous ne nous sommes rien promis. D'ailleurs, si je venais à retrouver les grâces de ma reine..." abaissant les paupières. "Reste assurée, cependant, que tu n'as jamais été un choix par défaut. Mais la vie est ainsi faite, Princesse." m'embrassant. "Je dois te laisser."

"Rook." l'embrassant une nouvelle fois. "Merci."


Je m'installe sur le banc, à ses côtés. "Que lis-tu ?"

"Le prochain cours de latin."

"J'ai eu... une conversation avec le garçon que je fréquente."

Il marque sa page et referme son ouvrage. "Tu lui as parlé de ce que... nous avons partagé dans ta chambre ?"

"J'ai dit que... tu m'attires, oui. Il souhaite me laisser libre de mes choix."

"C'est... à la fois surprenant et admirable. J'ignore si... je pourrai en dire autant."

"Non. Toi, tu entrerais en collision." faisant référence à sa vive réaction lors de notre dispute.

Il sourit face à ma répartie. "Tu crois, petite fée ?..." glissant les doigts dans mon cou, m'y caressant d'un doux revers avant de se pencher jusqu'à mon oreille. "M'embraser serait un terme plus exact. La jalousie appelle toujours la colère."

Je frémis délicieusement sous ses gestes.

"Souhaites-tu... que nous apprenions à mieux nous connaître ?..."

"Tu en sais déjà beaucoup sur moi. Tu as goûté mon Dark Fire. Peu ici peuvent se vanter de m'avoir vu sous cette forme."

"Tu recèles encore tant de mystères, Rollo."

Petit regard alentours, glissant les doigts sous mon menton, allant cueillir mes lèvres dans un élan doux, me quittant pour m'envisager, plongeant les doigts dans mes cheveux.

"Me permets-tu de te courtiser tel qu'il se doit ?..."

"M'autorises-tu à t'enseigner le plaisir ?..."


J'ouvre la porte, encore empêtrée de sommeil, chemise de nuit de fin lin sous la robe de chambre que je viens d'enfiler, bâillant derrière ma main. "Tu es bien... matinal."

Il apporte avec lui un sac en papier kraft qui dégage, ma foi, une odeur fort agréable.

"Tout chauds sortis du four de la boulangerie l'Épi."

Il s'agit de viennoiseries.

Il a également pensé au café.

"Hmm. Tu connais de bonnes adresses. Intéressant."

"Je t'en prie, sers-toi." ouvrant le paquet.

J'agite les doigts avant de faire mon choix, mordant à pleines dents dans un pain au chocolat, gourmande.

Après s'être lavé les mains, il porte son choix sur un croissant, le posant sur une serviette en papier, le brisant en deux pour le savourer, délicat.

"Je vais y prendre goût."

"C'est le but." m'offrant mon gobelet.

"Je vois."

"Je te rappelle que tu m'as autorisé à te faire la cour."

"Je ne pensais pas que ça allait impliquer de me faire tirer du lit plus tôt le matin... d'une bien agréable façon, cela dit. Donc... le petit-déjeuner en chambre fait partie de la panoplie de séduction ?"

"Je t'aurai bien réveillée d'un baiser si tu ne t'étais pas levée." petit regard coquin et charmant à la fois.

"On s'enhardit, je note. A défaut de s'encanailler."

"Tu serais très étonnée lorsque j'use d'un certain vocabulaire." lâchant l'information sans se restreindre avant de réaliser sa bourde. "Ahem. Je veux dire..."

"Oui, là, tu en as trop dit. Alors ?"

Il soupire, conscient que je ne vais guère le lâcher.

"Tu me promets de ne pas me... juger ?"

"Hmm... pas sûr."

Il jure intérieurement de s'être mis dans un tel pétrin !...

"Quand j'ai commencé à réaliser que... tu me plaisais... je... j'ai... hem... eu recours à... une certaine... pratique pour... faire passer la tension."

"Hmm mmm. Je pense deviner de quoi il s'agit. Et ?"

"Disons que... le vocabulaire dont j'usais pour te qualifier était loin d'être composé de mots doux et aimables." joues rosissant violemment, récupérant son mouchoir pour y camoufler sa gêne extrême.

"Hey." lui faisant abaisser la main pour découvrir le bas de son visage. "C'est derrière nous, tout ça. Cependant, j'en retiens que le très distingué Rollo Flamm sait se montrer grossier et vulgaire à certaines occasions. J'en ai eu d'ailleurs un beau panel lorsque tu t'étais dressé sur mon chemin, en de multiples reprises."

"Je... j'en suis désolé."

"Quant à notre... projet. Il faut du temps devant nous pour nous y atteler." triturant un bouton doré de sa longue tunique.

Il attrape délicatement ma main pour l'embrasser, tendre. "Entendu."


Il connaît des coins incroyables dans la cité !... Il me la fait visiter en m'exposant un intéressant historique. Nous marchons beaucoup.

"Tu y es né ?..."

"J'aurai aimé." souriant.

Soudain, un groupe de gamins descend la ruelle en cavalant.

Le plus jeune, à la traîne, appelle ses camarades pour qu'ils l'attendent.

Rollo s'arrête et le fixe, le suivant du regard. "Moddo..."

"Rollo ?..." faisant grimper ma main le long de son bras, le tirant de sa rêverie.

"Oh, je... ce n'est rien." secouant la tête.

"Qui est... Moddo ?..."

Il pourrait se maudire que j'ai si distinctement entendu ce prénom !...

"Qui est Moddo, Rollo ?..."

"Pas maintenant, petite fée." avec un mouvement de la main qui élude la question.


Nous prenons place sur le lit, face à face, assis en tailleur.

"L'essentiel est de communiquer : si je fais ou dis quelque chose qui te déplaît ou t'est désagréable, tu m'en avertis. Et pareil de mon côté."

"D'accord." souriant, posant ses paumes sur mes cuisses, les laissant cheminer jusqu'à mes hanches. "J'ai vu des... estampes. Et lu quelques textes."

Je cligne. Ai-je bien entendu ?...

"Et... as-tu jugé cela bénéfique ?..."

"Je dois t'avouer que... j'étais assez retourné après... ces lectures."

"Je ne veux absolument pas savoir où tu t'es procuré un tel... matériel." sur un petit rire.

"Je ne parlerai pas, même sous la torture." cherchant le contact et le baiser.

"Ah et... tu peux laisser monter le niveau sonore sans le réprimer."

"Bon à savoir." penchant la tête pour m'inviter au baiser.

Nos lèvres s'épousent lentement, s'effleurant avant de venir en légère compression.

C'est doux. Ça dure un petit moment.

Il peut déjà ressentir un agréable picotement au niveau des organes génitaux, sentant comme tout commence à être sous tension.

De mon côté, idem, ça s'exprime.

Je caresse les cheveux qui garnissent ses tempes.

Je trouve ça touchant qu'il ait attendu la bonne personne pour le faire. Et cela ne m'étonne pas qu'il ait été dévolu à ses études jusqu'à présent.

Bien. L'heure est venue pour moi d'en faire un homme.

Il abandonne mes hanches pour récupérer mes mains et glisser ses doigts entre les miens, paumes en contact.

Ma langue réclame lentement l'entrée de sa bouche. Il me laisse explorer un instant avant de m'offrir la sienne qui imite aussitôt les rondes de la mienne.

Ses paupières en papillonnent de délice, lui arrachant un premier geignement conquis.

Vache, il apprend vite !... Nos langues se gâtent à présent à l'extérieur des cavités avant de s'y engouffrer à nouveau.

Sous sa tunique, ça monte d'un cran, étirant son dessous et le pantalon.

Il aurait très envie d'y poser la main pour se comprimer mais se l'interdit.

Ses mains quittent les miennes et il les fait plonger dans mon cou, comme j'aime que les hommes font, pouces longeant ma mâchoire, doigts égarés sous mes oreilles jusqu'à la nuque, caressant.

Nos bouches poursuivent leurs délices. Nos sexes se préparent à la rencontre. La chaleur fait irradier nos bassins, y diffusant des ondes voluptueuses.

Nous cessons par manque d'air. Il en sourit, front posé contre le mien. "Ma petite fée..." prêt à me céder les rênes.

Je fais échouer ses paumes sur mes seins qu'il caresse et masse avec beaucoup de précaution, sans se montrer gauche.

Il a... le sexe dans le sang !... Ma surprise est totale.

"Tu... t'en tires très... bien..." levant le menton, pointes saluant ses initiatives sous l'étoffe.

"Tu ne veux pas... venir sur moi ?..." enhardi.

"Je peux ?..." ouvrant mes jambes pour les passer par-dessus les siennes.

Là tout s'emballe. Nos baisers prennent un tour terriblement chaud et ses mains cheminent partout dans mon dos, bassins en contact, le mien oscillant contre le sien, savourant la raideur prometteuse qui l'anime.

"Je pense... qu'il est l'heure de... quitter nos vêtements." l'y invitant, le faisant chacun de notre côté, face à face, bataillant parfois, riant de nous.

Mmm... mais dites-moi, Messire Flamm, en voilà une admirable raideur !...

Je me rapproche, m'en saisissant lentement pour quelques allées et venues, lui arrachant un geignement aussi vibrant que fort. Il apprécie très très vivement !...

Et je note qu'elle est bien généreuse en fluide pré-séminal, ce qui rend la sensation d'autant plus agréable pour lui.

"Messire Flamm, la nature vous a gâté, dites-moi." jouant du pouce à chaque remontée, massant le frein en passant.

"Ce n'est paaaaah..." dodelinant de la tête sur un soupir geint. "... trop ?..." manifestant son inquiétude pour la première fois.

"Ce doit être très agréable et facilitant pour toi. Chance." presque jalouse.

Petit rire. "Si ça te convient..." me rappelant pour un baiser, mains partout sur ma peau, tendu et suintant entre mes mains.

"Tu veux que... ça se termine comme ça... ou tu en veux... davantage ?..."

"Comme... tu veux..." en proie à des sensations de plus en plus vives.

Je passe sur les genoux, m'avançant pour l'insérer lentement.

Son souffle vacille à mesure qu'il se sent enserré, évoluant dans une chaude compression.

J'arrive jusqu'à la garde.

Il pose le menton sur mon épaule, bras fermés autour de moi.

"Ça va ?..."

"O... oui. C'est..." approchant la bouche de mon oreille. "... meilleur encore que je me l'étais... imaginé." sourire audible.

"Maintenant... laisse le plaisir monter..." contractant autour de lui avant de m'attacher à ses bras pour aller et venir, lui arrachant une salve vocale remarquable, sensation repartant immédiatement à la hausse.

Je commence moi aussi à m'enfoncer dans le plaisir. Je ne lui en voudrai pas de ne pas tenir la distance mais il fait preuve d'une retenue remarquable pour une première fois, très maître de son corps.

"Petite... petite fée !..." haletant, respiration de plus en plus vive, corps entier spasmant, tempes battantes, surtendu, m'avertissant d'un orgasme proche, peau couverte d'un film moite.

Il rend les armes dans la minute qui suit, l'annonçant à haute voix, se perdant généreusement au fond de moi.

Je le laisse savourer son orgasme sans bouder le moins du monde son plaisir, curieuse de la suite.

Il me garde un long moment sur lui, le temps qu'il décroisse et retrouve ses esprits.

Il m'allonge sur le dos, à quatre pattes sur moi, paume cheminant sur mon ventre, frôlant le pubis. "Guide-moi."

"Fie-toi à... ma respiration et ma voix."

Il caresse mon pubis d'un revers doux, me faisant renouer avec les sensations, lèvre pincée.

Son majeur s'avance, effleurant.

"Comme ça, c'est... bien..." l'encourageant.

Il est en mode découverte, testant les effleurements, les pressions, attentif à mes réactions.

Il finit par trouver la bonne combinaison et m'offre un très bel orgasme, se gavant de mes expressions.

Je l'accueille contre moi et il ramène la couverture sur notre nudité, sentant le sommeil nous gagner.


"Messire Flamm, où est mon petit-déjeuner au lit ?..." poings sur les hanches, mine insatisfaite.

Petit rire. "Si je m'étais levé aux aurores, pourquoi pas. Mais là... j'ai dormi comme un bébé, petite fée. Merci." ravi par cette expérience - il a le sommeil troublé d'ordinaire.

Nous avons fait l'amour plusieurs fois au courant de la nuit, l'entrecoupant de petits sommes réparateurs pour ne pas être totalement décalqués le lendemain.


Avant nous lisions, dos adossés contre des coussins, jambes placées à la perpendiculaire du lit. A présent je repose contre son épaule, bras ouvert, sa main égarée dans mes cheveux.

Petit rire couvé, posant son ouvrage ouvert sur la cuisse. "C'est amusant. Et terriblement ironique à la fois."

"Hmm ?" levant le regard sur lui.

"Je m'étais toujours imaginé arriver en âge de me marier à une fille qui me serait soumise."

Je cligne. "Quel magnifique plan de carrière..."

"Force est de constater que je préfère les jolies louves." embrassant mon front.

"Les louves plutôt que les dindes ? Voilà qui est très avisé, Messire Flamm." amusée.


Nous souhaitons demeurer discrets quant à notre relation naissante. Aussi, en public, nous ne nous accordons aucun geste tendre. Ce qui se passe dans sa chambre ou la mienne, une fois la porte refermée derrière nous, ne regarde que nous.


La saison de chasse est ouverte. Et les garçons de notre établissement sont euphoriques !

La chasse reste l'apanage des mâles et Noble Bell n'y fait guère exception.

Je découvre que la tradition veut qu'à l'ouverture de la chasse, toutes les classes confondues s'accordent deux jours dans les bois, dressant un vaste camp dans une clairière.

Les garçons partent à la chasse la journée et rentrent, à la tombée de la nuit. Le butin de leur chasse est consommé dans la soirée, viandes délicates cuites sur les braises, autour d'une immense feu de camp.

Les musiciens ont emporté leurs instruments. Rollo joue de la vielle à roue - un instrument médiéval très prisé. Le son est magnifique.

Il est accompagné de tambourins, flûtes. Les sons montent jusqu'au croissant de lune.

Le moment est magique.

Les veillées sont comme pillées au temps.

Nos regards, avec Rollo, s'accrochent parfois et nous nous souhaiterions davantage de proximité, alliée à des gestes et des mots tendres.

Qu'importe ! Nous nous rattraperons à notre retour à Noble Bell.