Chapitre 20 : Malheureuse coïncidence

Le lendemain soir, elle sortit en pleine nuit du dortoir. Elle se désillusionna d'un sort informulé et partit dans la direction de la réserve d'ingrédient qu'elle savait protégée par de nombreux sortilèges. S'il y avait une chose que le sombre professeur détestait, c'étaient bien les voleurs de sa réserve et ayant déjà été pillé plusieurs fois, il avait renforcé la protection de la porte par de nouveaux sortilèges sacrément plus puissants et de sa propre invention.

June se doutait bien de la difficulté de la manœuvre. Si elle n'y parvenait pas ce soir, elle devrait attendre la fin de la semaine pour pouvoir aller en acheter. Et elle ne voulait pas attendre. Peut-être même qu'elle tomberait directement sur une fiole ou deux de polynectar, mais connaissant la prudence de son professeur, June en doutait sincèrement.

Elle arriva devant la porte, qui de l'extérieur et pour quelqu'un de lambda n'avait absolument rien d'extraordinaire. Mais la jeune femme pouvait sentir des crépitements de magie créés par les sortilèges, preuve qu'ils étaient bien en place. Elle entreprit un déverrouillage dans les règles de l'art à l'aide de la pensée et de quelques mouvements de mains. Elle avait toujours été plutôt douée pour l'ouverture de barrières magiques, notion qu'on apprenait sans relâche aux élèves de Durmstrang. Elle abaissa une à une les nombreuses protections jusqu'à ce que la porte fasse un déclic métallique. Elle attendit quelques secondes pour vérifier l'absence de crépitements supplémentaires et aussi pour bien vérifier l'absence de témoins aux alentours.

Toujours désillusionnée elle abaissa la poignée et lança un sort de silence aux gonds de la porte pour éviter un grincement. La porte s'ouvrit sans problème et elle put pénétrer dans la pièce. Là, elle tomba sur la caverne d'Alibaba, des ingrédients méticuleusement rangés et classés, des tiroirs remplis de fioles et flacons vides prêts à l'usage, une échelle pour monter accéder aux rayons supérieurs.

Alors qu'elle avançait la main vers un bocal de doigts de troll, elle entendit des pas dans le couloirs. Elle s'empressa d'éteindre sa baguette et se glissa discrètement et désillusionnée hors de la pièce. Elle replaça un ou deux sorts de sécurité sur la porte puis elle alla se cacher non loin de là, dans un renfoncement du mur.

Les pas, qui venaient d'en face se rapprochèrent. Elle reconnut un pas boiteux mais elle eut du mal à visualiser l'intrus. Les pas s'arrêtèrent devant la réserve et June entendit un marmonnement suivi d'un ricanement. La personne venait d'ouvrir les verrous et s'étonnait ironiquement de leur simplicité.

La porte s'ouvrit alors et cacha la vue de June. Elle devina par les ombres sous la porte que ce devait être un homme au vue de la taille des chaussures. Il entra dans la petite pièce. June était en plein dilemme. Soit elle tentait de savoir qui était l'intrus en passant à toute vitesse devant la porte, ce qui ne lui laisserait qu'un millième de seconde pour identifier le pilleur, soit elle restait là à attendre, le moyen le plus sûr pour ne pas se faire prendre. Avant qu'elle ne puisse faire un choix, le pilleur referma la porte et partit dans le sens opposé.

June essaya dans l'obscurité de deviner son identité mais ce fut peine perdue, l'ombre tourna dans un couloir et disparut.

Elle s'avança à son tour vers la porte et, avant qu'elle ne puisse faire le moindre mouvement, une voix retentit derrière elle.

-« Que faites-vous ici Revali. »

Merde. Merde. Merde.

-« Eh bien…. Je sortais prendre l'air professeur. » répondit-elle en se tournant vers l'homme aux yeux onyx brillants dans la nuit.

-« Ah tiens, une angoisse passagère peut-être, ou une déception quelconque ? » demanda doucereusement-il.

-« Pardon professeur ? » Fit June sincèrement perdue

-« Vous n'allez pas me faire croire que vous n'êtes pas déçue de pas avoir été sélectionnée pour concourir au Tournoi Revali. Vous qui êtes pourtant si disposée à vous mettre en avant peu importe la situation… » expliqua mielleusement Rogue.

-« Déçue de…. Mais pourquoi diable tout le monde pense-t 'il que je voulais participer à ce tournoi ! Je ne me suis pas proposée si vous voulez tout savoir professeur.

-« Étonnant venant de vous Miss » dit Rogue d'un ton neutre.

-« Je pense que c'est vous qui êtes déçu en réalité professeur.

-Je vous demande pardon Revali ? » gronda Rogue

-« Vous auriez aimé me voir dans ce tournoi avouez-le et si j'avais pu y passer en même temps…

-« Vous vous accordez beaucoup trop d'importance Revali, une fois de plus…

-« Si vous le dites… » Répliqua June en levant les yeux au ciel.

-« Maintenant arrêtez de me prendre pour un idiot. Que faisiez-vous vraiment dans ce couloir à cette heure ?

-Je vous l'ai déjà dit professeur. Je sortais prendre l'air.

-Et vous vous êtes comme par hasard arrêtée juste devant ma réserve. J'imagine que ce n'était pas pour le point de vue. » Répondit Rogue, sarcastique.

-« Oui, je me demandais justement où cette porte pouvait mener. Mais vous venez d'éclairer mes lumières monsieur. Je peux donc aller prendre l'air. »

Rogue s'approcha soudain de la jeune femme et se retrouva à quelques centimètres d'elle, il plongea ses yeux dans les siens.

-« Ne. Me. Mentez. Pas. Revali. Je peux très bien aller chercher l'information par moi-même. Je me montre immensément patient avec vous mais vous flirtez dangereusement avec mes limites.

June haussa un sourcil.

-« Oh mais je crois qu'il n'en faut pas beaucoup pour les heurter vos limites professeur. Arrêtez de me menacer à tout bout de champ, vous n'avez pas envie que je vous montre jusqu'où je peux aller monsieur. La dernière fois ne vous a donc pas suffit ? »

Rogue sentit de nouveau des fourmillements caractéristiques dans la main. Il serra le poing pour se maîtriser.

Il ne devait pas céder.

June baissa son regard sur sa main crispée.

Elle sourit imperceptiblement.

-« Bonne nuit professeur. » dit-elle doucement avant de s'en aller.

-« Si vous n'êtes pas dans votre dortoir dans 10 minutes je vous promets que vous serez sévèrement sanctionnée miss ! » Menaça Rogue en la regardant partir avant de se tourner vers la porte pendant que la jeune femme s'éloignait rapidement.

Il vérifia les verrous à l'aide de sortilèges complexes et remarqua qu'ils n'étaient pas mis en place. Son cœur rata un battement. Il entra précipitamment dans la pièce et vit des tiroirs ouverts, des bocaux renversés et des herbes au sol. Il comprit alors qu'on avait pillé sa réserve. La colère monta brusquement en lui.

Je vais la tuer de mes propres mains.

-« REVALI ! REVENEZ ICI TOUT DE SUITE !»

Mais la sorcière était loin. Elle avait déjà rejoint le hall principal et ne pouvait pas entendre son professeur. Il s'élança à sa suite.

June arriva aux portes du château et s'empressa de sortir du bâtiment. Elle alluma une cigarette et prit une longue bouffée. La nuit était froide et la fumée sortit de sa bouche par de lourdes volutes.

La porte s'ouvrit brusquement derrière elle et une main s'abattit sur son épaule.

-« VOUS VOUS FOUTEZ DE MOI ! » Hurla Rogue hors de lui.

La jeune sorcière se retourna vivement vers l'homme en colère. Elle fit de son mieux pour afficher un air surpris sur son visage.

-« Excusez-moi professeur ? »

-« Vous avez pillé ma réserve Revali ! » cracha Rogue « C'est inadmissible ! Rendez-moi ce que vous avez volé. IMMEDIATEMENT !»

-« Mais professeur, je ne vous ai rien volé ! Je vous le promet.

-Donc vous allez me faire croire que je vous retrouve devant la porte de la réserve, que le même soir on me vole de précieux ingrédients et que ces deux faits n'ont rien à voir entre eux ? » Commenta le maître des potions à deux doigts de la syncope nerveuse.

-« Exactement monsieur. Et puis si je vous avais volé, j'aurais des ingrédients sur moi n'est-ce pas ?

-ESPECE DE PETITE … »

Une voix ferme et imposante interrompit son insulte.

-« Severus ! Que se passe-t-il ici ? Vous êtes en train de réveiller tout le château avec vos hurlements ! »

Le potionniste se retourna vers l'origine de la voix.

-« Albus ! Miss Revali ici présente vient de piller ma réserve d'ingrédients. C'est absolument inacceptable ! »

Le vieil homme se tourna vers la jeune femme qui terminait tranquillement sa cigarette avec un air las et détaché.

-« Miss Revali, est-ce que l'accusation du professeur Rogue est véridique ?

-« Eh bien non monsieur le directeur, le professeur Rogue m'a effectivement trouvé devant sa réserve mais j'étais simplement en chemin pour aller prendre l'air. Je reconnais que la coïncidence est douteuse mais je ne suis en rien responsable de ce vol. » Expliqua la jeune femme calmement.

-VOUS ETIEZ ARRETEE DEVANT ! NE NOUS MENTEZ PAS ! » hurla Rogue, absolument furieux.

-« Severus, calmez-vous enfin ! Miss, pourquoi vous étiez-vous arrêtée juste devant la porte ?

-Parce que je me demandais justement sur quoi donnait cette entrée. Mais comme je l'ai dit au professeur Rogue, je n'ai absolument pas pénétré le lieu ni volé quoique ce soit. D'ailleurs si vous ne me croyez pas, fouillez mes poches. » proposa-t-elle en écartant les bras.

June savait qu'elle mentait, au moins pour une partie de l'histoire mais tâcha de d'exposer les faits comme si elle n'avait rien à se reprocher. Elle vit que sa petite comédie marchait un peu sur le vieil homme qui la dévisageait au départ un peu suspicieusement.

Rogue demanda l'autorisation à son mentor de procéder à la fouille et celui-ci l'autorisa d'un signe de tête.

Le maître des potions palpa chaque pli de tissus comme si la jeune sorcière était une criminelle hautement dangereuse qui pouvait cacher un doigt de gobelin dans le nœud de sa cravate. Il termina par les poches de sa jupe. Ses gestes étaient précis et méticuleux, rien n'était laissé au hasard. Si June avait effectivement pris la moindre chose, il l'aurait assurément trouvée.

Il se renfrogna et jeta un regard noir à la jeune serpentard qui lui renvoya un coup d'œil victorieux.

Albus soupira, fatigué de la soirée.

-« Bien Severus, tu n'as rien trouvé sur miss Revali. Es-tu sûr que l'on t'a bien volé des ingrédients ?

-Vous me prenez pour un idiot vous aussi Albus ?

-Non mais j'aimerais que tu ailles vérifier ce qu'il manque exactement. Je ne doute pas de la véracité de tes propos mais savoir ce qui a été volé nous permettrait de connaitre le motif du vol. Vas-y s'il te plait. »

L'homme en noir acquiesça sèchement et jeta un regard assassin à June, prometteur d'une sacré revanche, avant de tourner les talons dans un tourbillon de cape.

Albus avait les yeux posés sur la jeune femme scrutant son visage. Celle-ci ralluma une cigarette.

-« As-tu quelque chose à me dire June ?

-Monsieur ?

-Je sais que mon maître des potions ne ment pas. Nous ne pouvons pas t'accuser sans preuve mais peut-être que tu as vu le voleur. Tu étais devant la porte après tout.

-Oui effectivement mais qu'est-ce qui nous dit que le vol a été commis pendant la nuit. Le voleur est peut-être venu dans la journée ou plus tôt dans la soirée après tout.

-Mhm… c'est tout à fait possible mais je crois savoir que le professeur Rogue vérifie les sortilèges de fermeture tous les soirs après sa ronde. Le vol a forcément été commis dans le laps de temps. Es-tu sûre de n'avoir rien vu ou même entendu ? »

June hésitait à révéler qu'elle avait effectivement vu quelqu'un rentrer dans la réserve. Mais accuser sans avoir aucune idée de qui et de pourquoi n'était pas dans ses habitudes. En tant que bonne serpentard, elle préférait avoir un véritable intérêt pour le faire et pour cela, il fallait préalablement connaître qui était derrière le coup, pour savoir si cela pouvait lui être profitable ou non.

Je vais mener une petite enquête.

-« Non professeur Dumbledore, je n'ai rien vu ni entendu. Tout cela est un malheureux concours de circonstances. Puis-je à présent aller me coucher ? Il se fait tard et je n'aimerais pas rater les cours de demain. » dit-elle en écrasant son mégot de cigarette sur le sol à l'aide de son pied. Elle le fit disparaître d'un coup de baguette.

Le vieil homme n'était pas dupe. La jeune sorcière avait beau mentir à la perfection, il sentait bien qu'il y avait quelque chose. Si elle ne désirait pas en parler pour l'instant, il la requestionnerait plus tard. Cette jeune femme était curieuse et il était sûre qu'elle mènerait sa propre enquête sur la disparition des ingrédients. Il attendrait.

-« Bien June, tu peux y aller. Bonne nuit.

-Bonne nuit monsieur. »

June poussa les portes du château, laissant un vieil homme fatigué derrière elle.

Décidément, je commence à avoir une sacré liste de choses à faire. Je vais devoir m'organiser.