Chapitre 24 : Le grimoire

June passa les jours suivants à feuilleter le livre qu'elle avait acheté deux jours plus tôt. Il était passionnant, beaucoup plus que la plupart des livres qu'elle avait pu lire au cours de sa vie. Même si à Durmstrang, la magie noire était enseignée, elle n'avait jamais vu autant de sortilèges terrifiants et d'incantations dangereuses réunis dans un seul grimoire.

Si ce livre devait appartenir à quelqu'un, ce serait certainement au diable en personne.

Avide de savoir, June lut avec délectation chaque passage, chaque nouveauté, chaque petit paragraphe annoté. Il semblait à la jeune femme que ce livre était passé entre de nombreuses mains, qui avaient, à leur tour, ajouté des petites notes.

Elle finit par tomber sur le passage qu'elle avait rapidement aperçu dans le magasin. Il concernait plusieurs moyens d'accéder à l'immortalité, chose que June considérait comme intéressante d'un point de vue purement théorique mais relativement futile dans son application dans la vraie vie. En effet, on ne pouvait pas être immortel. Seuls les vampires avaient la faculté de vivre un temps indéfini, mais même eux pouvaient perdre la vie s'ils restaient au soleil par exemple ou encore d'un simple pieu en plein cœur. De plus, les sorciers avaient déjà une espérance de vie supérieure à celle d'un moldu, faisant parfois arriver ceux-ci à des centaines d'années.

Tous ceux qui avaient tenté de parvenir à une vie infinie, quelque soit la manière d'y parvenir, avait perdu une partie de leur humanité, laissant derrière eux la subtilité des émotions et les complexes contrastes de l'être humain. Ils se rendaient esclaves d'une situation qui ne les amèneraient certainement pas au bonheur mais simplement à une satisfaction passagère. Toute chimère de ce genre finissait de toute façon par rendre les armes devant le cours naturel des choses, soit en se suicidant d'eux-mêmes, soit en se faisant tuer. Non, aucune espèce sur terre, même surnaturelle, ne pouvait véritablement devenir immortelle.

Elle jeta un coup d'œil au diadème, toujours entouré de sa coque magique. Elle renforça un peu la barrière et se remit à sa lecture.

Elle entama la section Objets et Transfert d'âme du grimoire et tomba alors sur un terme qu'elle ne connaissait pas, chose qui était devenu rare avec les immenses connaissances qu'elle avait accumulé au cours de sa vie.

Elle le relut une fois puis une deuxième. Elle chercha sa référence dans le livre et arriva enfin au passage qui lui était dédié. Les « horcruxes » étaient des objets ou êtres vivants qui devenait le réceptacle d'une vie humaine, celle-ci désirant scinder son âme en deux, divisant par la même occasion la probabilité de se faire tuer. Un sortilège extrêmement complexe devait accompagner le rituel afin de parvenir à ce résultat et nécessitait également, outre du sang de dragon et des crocs de vampires, un sacrifice d'une personne innocente.

June trouva ce rituel relativement horrible, même pour une sorcière comme elle, passionnée par les pans obscures de la magie.

Elle sentit alors ses mains picoter légèrement sous un afflux de magie. Elle comprit en lançant un tempus, qu'elle avait passé près de quatre heures à lire ce grimoire emplit de magie noire, chose qui pouvait s'avérer dangereuse si on n'en prenait pas conscience. En effet, s'instruire de nouveaux savoirs aussi sombres pouvait générer, chez le sorcier qui en prenait connaissance, un afflux de magie vive, qui pouvait mener à un désir violent de faire sortir de soi les effluves magiques. De la magie brute et dangereuse en somme.

June referma le recueil tout en marquant la page avec un bout de parchemin et le posa sur la table basse.

Elle se dirigea vers le mannequin d'entraînement qui n'avait pas servi depuis un certain temps et lança de toutes ses forces vers celui-ci, un confringo à l'aide de ses deux bras. L'objet explosa en une multitude de pièces mécaniques. Elle répara alors le mannequin et pratiqua ensuite sur lui un certain nombre de sortilèges aussi dangereux que destructeurs. Elle s'amusa ainsi pendant environ une vingtaine de minutes à vider son énergie magique avant d'aller manger dans la Grande Salle, pour la sécurité des occupants du château.

Quand elle arriva dans la Grande Salle, ses amis lui firent le reproche de ne pas être venue avec eux à la bibliothèque pour travailler ensemble. Elle leur expliqua qu'elle avait dû répondre à plusieurs courriers. Soudain un geignement aigu se fit entendre dans les hauteurs de la salle. Tous tournèrent leur regard vers le bruit et ils virent fondre vers la table des serpentards, et plus exactement vers là où était assise la sorcière, un grand aigle noir, chose qui n'avait jamais été vue dans le monde sorcier, plutôt habitué aux chouettes ou aux corbeaux.

Celui-ci lâcha sans grâce son colis dans l'assiette de June, laquelle se brisa sous l'impact. L'oiseau majestueux atterrit bien plus loin, et plus précisément sur l'accoudoir de Dumbledore qui avait encore sa cuillère levée et remplie de potage à la tomate. Le rapace fixa de loin la jeune femme, plongeant son regard acéré dans ceux, bicolores, de la sorcière. Celle-ci lui jeta un regard mauvais. Elle sortit alors un bout de papier et une plume avec laquelle elle écrivit quelques mots de remerciements à son elfe, sachant pertinemment ce que contenait le colis. Sous les regards curieux de l'ensemble de la Grande Salle, June éleva son bras, le papier replié dans la main, tenu entre l'index et le majeur. Le grand aigle reprit alors son envol et fondit vers le bras de la jeune femme, arrachant de ses serres le message.

Il continua son envolée vers le plafond de la salle et finit par disparaître comme il était venu.

June s'était déjà retournée vers son assiette cassée qu'elle avait immédiatement réparée puis s'était resservie de la soupe, non sans avoir posé préalablement son colis à ses côtés, sur le banc.

Toute la grande salle recommença à parler, à messes basses. Qu'avait donc pu recevoir la jeune femme ? A qui appartenait donc cet animal ? Pourquoi semblait-il détester la sorcière ? Voilà les questions que se posaient les étudiants et les professeurs.

La jeune femme mangeait tranquillement sa soupe, ignorant le regard de ses camarades sur le colis et sur elle-même.

Enfin, n'y tenant plus, l'une de ses amis, Angelica, prit la parole.

-« June tout va bien ? A qui appartenait cet aigle ?

-A la famille Revali. » Répondit simplement la sorcière.

-« D'accord donc il est à toi ?

-Dans un sens oui, mais il ne m'apprécie pas. Il obéit plus à mon elfe qu'à moi-même. » expliqua June en commençant à tartiner du fromage sur une tranche de pain complet.

-« Mais alors comment se fait-il qu'il soit venu aujourd'hui ? » continua la préfète.

-« Oui, on veut dire par là qu'on ne l'avait jamais vu avant. » argumenta Edgar.

-« C'est normal, il n'accepte que rarement de se déplacer pour m'apporter des choses, et seulement quand mon elfe arrive à le convaincre que c'est un jour particulier. » fit June en levant les yeux au ciel.

-Et en quoi aujourd'hui est un jour particulier ? » demanda Edgar, curieux.

June haussa les épaules d'un air las.

-« C'est le jour de son anniversaire » répondit à sa place Victor Krum, toujours assis à côté de la jeune femme.

-« Jour qui m'importe peu pour être honnête » Coupa June avec un regard noir pour le bulgare, « Mais qui est important pour Agatha. Elle veut absolument le fêter chaque année. »

Ses deux amis se regardèrent dans les yeux d'un air circonspect.

-« Mais June, il fallait nous le dire que c'était ton anniversaire ! On n'a absolument rien pour toi….

-Je viens de vous dire que ce jour n'était pas important pour moi. Je n'ai pas le choix d'accepter le cadeau annuel d'Agatha mais je ne veux rien d'autre. Ne vous inquiétez pas pour ça. » assura la sorcière d'une voix ferme.

Elle leur sourit gentiment avant de finir sa tartine.

Victor leur fit le signe de ne pas insister. Ses amis lui obéirent sur ce point, qui leur paraissait certes curieux mais intime pour la jeune femme. Cela faisait partie de l'« Énigme Revali ».

Après le souper, June voulut aller déposer son colis dans son dortoir. Elle promit à ses deux compagnons qu'elle les rejoindrait à la bibliothèque. Victor lui avait chuchoté quelque chose dans l'oreille, juste avant de quitter la Grande Salle. Cela avait fait sourire la jeune femme, puis le sorcier s'était détourné et était reparti.

Arrivée dans les cachots, elle se fit arrêter par une voix grave.

-« Revali. Arrêtez-vous immédiatement. »

June se stoppa dans sa marche et lâcha un soupir, excédée.

Putain de bordel de merde ! Il ne peut pas aller surveiller quelqu'un d'autre à la fin ?

Elle attendit que le sombre sorcier la dépasse. Il se mit devant elle, l'empêchant de continuer sa route. June leva les yeux aux ciel.

-« Oui ? » fit-elle, sans formule de politesse.

-« Qu'avez-vous là ? » Demanda calmement Rogue en pointant du doigt le colis.

-« Rien qui vous regarde professeur » répondit June avec insolence et dans un second soupir.

Le professeur prit une grande inspiration, visiblement pour se maîtriser.

-« Je vais me répéter qu'une seule fois miss, qu'y a-t-il dans ce paquet ?

-Rien de dangereux professeur, si c'est cela qui vous fait peur. » ironisa la jeune femme.

Voyant qu'il la fixait d'un air suspicieux et qu'il ne lâcherait pas l'affaire, June abandonna.

-« Vérifiez par vous-même » dit-elle, las, en lui tendant le colis d'une main tout en roulant des yeux.

Le sombre sorcier haussa un sourcil et lui retira le paquet d'un geste sec. Il pratiqua plusieurs sortilèges de sa baguette sur le paquet. La sorcière n'avait pas menti. Il ne contenait pas de magie noire. Il ouvrit alors le colis d'un sort précis et tomba sur le contenu de l'emballage. Il eut une moue dégoutée en le rendant à la jeune femme.

-« Son contenu n'est pas assez bien pour vous ? Ô Éminent Professeur de la très Célèbre École de Sorcellerie de Poudlard ? » demanda June sarcastiquement.

Ledit « éminent » professeur lui lança un regard assassin.

-« Effectivement Revali, je ne comprendrais jamais ce que vous, les fumeurs, pouvez trouver comme intérêt à vous ruiner la santé de cette façon stupide. Mais après tout, plus vous disparaitrez rapidement de la surface de cette Terre, mieux je me porterai. » fit-il dans un sourire mauvais.

La jeune femme éclata de rire puis contourna son professeur. Arrivée à ses côtés, elle se hissa légèrement pour se mettre à la hauteur de son professeur.

-« Si tel est le cas, pourquoi m'avoir sauvée la dernière fois ? » lui glissa-t-elle à l'oreille d'une voix douce mais ô-combien chargée d'ironie.

Le professeur, qui s'était figé, se reprit rapidement. Il tourna son visage vers elle et l'observa de longues secondes.

-« Je me le demande bien moi-même » lui dit-il d'une voix grave.

June lui sourit, franchement amusée. Elle continua alors sa route sans se retourner.

Le potionniste eut un pincement de lèvres puis reprit lui aussi sa route dans l'autre sens. Il allait pouvoir rassurer Albus, la jeune Revali n'avait pas reçu un « détraqueur miniature » pour son anniversaire. Car oui, il avait bien entendu la discussion de ses élèves. Il savait à présent que c'était son anniversaire. Mais jamais il ne s'abaisserait à le souhaiter à un seul de ces insupportables cornichons.