L'hôpital psychiatrique de Pennhurst se dressait au-delà de la route. La vue de l'établissement la rendait aussi mal à l'aise qu'être assied sur le siège passager à l'arrière de la voiture du laboratoire d'Hawkins.
L'établissement était aussi magnifique que menaçant. Les rayons du soleil éclairait l'hôpital, mais le toit gris ainsi que la brique sombre lui donnèrent un air lugubre et inquiétant. De plus, la présence du personnel qui gardait des patients fous avec des chiens de gardes ne rassuraient pas Annabelle le moins du monde.
Comme promis, deux agents se trouvaient avec eux. L'un d'eux conduisait la voiture et son nom de famille était Miller. Un homme aux allures sévères et il était le chef de la police militaire au laboratoire comme si cela pouvait la rassurer. L'autre était assied à l'arrière avec elle. Son badge indiquait qu'il se nommait Blackmon. Brenner était calmement assied sur le côté passager à l'avant de la voiture. De temps en temps, il jetait un coup d'œil dans le rétroviseur.
Le fait que Stanley est retrouvé la parole aurait pu être un soulagement, mais ce ne fut pas le cas. Cela ne faisait aucun sens. Est-ce que Brenner mentait sur lui? Peu importe, elle aurait sa réponse dans quelques minutes.
La voiture se gara à une place désignée et ils y sortirent pour suivre Brenner qui prit les devants. Comme s'il connaissait déjà l'endroit et qu'il était déjà venu par le passé, il se présenta au gardien responsable qui l'attendait gentiment avec son doberman. Celui-ci avait les oreilles et la queue coupée. Cette dernière, aussi petite soit-elle, se secoua dans tout les sens en fixant la rouquine comme s'il était heureux de voir une ancienne amie.
-Bienvenu Dr. Brenner, salua le garde avec un grand sourire et en étant trop amical. Nous sommes heureux de vous revoir.
-Ravi de vous revoir, également, répondit le scientifique responsable du laboratoire en lui serrant la main avec fermeté.
Le chien se mit à s'agiter en grognant et en posant son regard sombre sur le docteur. Il montra ses canines blanches, pointues. Elles pourraient déchirés sans aucune difficulté. La bête fut remit à l'ordre rapidement par son maître.
-Pardonner, Biscuit. Il est un peu agité...Ce n'est pas dans ses habitudes. Bref, vous connaissez les procédures habituelles. Votre ancien employé vous attend dans une chambre. Veuillez me suivre.
La rouquine fut surprise de constater que ce n'était pas la première fois qu'il venait ici. Pour quelle raison viendrait-il ici? Elle se contenta de suivre le reste du groupe et de rester le plus près possible de Martin. Il était stupide de penser qu'elle serait plus en sécurité près de lui.
-Je ne m'attendais pas à ses nouvelles mesures de sécurité, répondit le scientifique en parcourant du regard les autres gardes. J'ignorais que vous aviez rajouter la présence de chiens.
-Nous n'avons pas eu le choix. D'ailleurs, nous testons cette nouvelle mesure de sécurité, répondit-il tandis que le groupe avançait dans le bâtiment.
Les couloirs étaient vides. Les patients étaient sans doute dans leur chambre ou leur cellule attendant l'heure du repas. Cela la soulagea un peu, mais elle continua d'écouter la conversation. Le bruit des griffes du chien résonna sur le plancher, se répercutant sur les murs tel un avertissement. Ses griffes étaient sans doute trop longue.
-Victor Creel nous demande encore d'essayer d'avoir une conversation avec vous. Vous savez, nous ne pouvons nous permettre d'approuver sa demande. Il est encore plus fou que votre ancien employé, Stanley.
Qui est Victor Creel? Décidément, Brenner était un coffre à secrets. Mais plus le temps passait et moins elle avait envie de connaître ses manigances.
-Il s'est réveillé? Est-ce qu'il a dit quelque chose d'autre?
-Oui. Il est réveillé, mais la plupart du temps, il se plaint de démangeaisons sur sa peau et il ne cesse de parler d'araignées. Son état est stable, mais il se dégrade. Cependant, il lui arrive de vouloir s'arracher la peau et les yeux. Nous n'avons pas eu le choix de l'attacher à son lit.
Le cœur de l'assistante de Ellis se figea dans sa poitrine. Quelle jolie ambiance pour la rendre à l'aise. Les deux hommes de Brenner ne broncha pas. Ils en avaient l'habitude d'être témoin d'évènements violents et qui n'avait ni queue ni tête. Ils arrivèrent à la chambre contenant le fameux patient.
-Voilà. Nous sommes arrivés.
-Vous me dites qu'il est bien attaché?
-Comme un chien à sa niche si vous voyez ce que je veux dire.
-Si je peux me permettre, je vais rentré avec ma collègue ici présente. Je ne veux pas d'autres interférences et ce qui va se dire dans cette pièce est strictement confidentiel. Vous comprenez?
Le garde hocha la tête comme s'il était un employé sous l'autorité de Brenner et non de celui de l'hôpital psychiatrique. Le chien s'agita de nouveau en voyant Annabelle et Martin rentré dans la chambre. La porte se referma sur eux et Stanley descendit son regard du plafond vers sa nouvelle visite.
L'ancien employé portait une camisole de force. Il était également attaché à son lit par des sangles. Sa peau sombre était marquée par des plaies ainsi que des cicatrices ressemblant à des marques laissés par des ongles. Ses yeux étaient rougis par la fatigue. Il ressemblait presque à un vampire sortit d'un compte d'horreur. Son silence surprit autant l'homme que la femme.
-Bonjour, Monsieur Johnson, salua le docteur en s'approchant et en prenant place sur une chaise près du lit. Comment allez-vous aujourd'hui?
Annabelle resta debout et plus éloignée que Martin. Elle préférait garder ses distances tandis que le patient ne répondit pas au docteur. D'ailleurs, il ne le regarda pas. Il fixa Annabelle.
-Est-ce que vous pouvez m'entendre? Demanda Brenner.
Martin poussa un soupir en voyant que Stanley continuait à fixer son autre employée. La rouquine préféra parcourir la chambre du regard, mais elle parla à son supérieur :
-Si vous pensez avoir des réponses, pourquoi m'avoir amené ici s'il n'est pas capable de prononcer un seul mot? C'est extrêmement désagréable comme endroit. Je ne me sens pas à l'aise.
Martin soupira de nouveau. Il comprenait parfaitement pourquoi elle ne voulait pas resté. Peu de personne voudrait se retrouver dans un hôpital de fous. Les gens qui y travaillaient devaient avoir des nerfs d'aciers et ce qui n'était pas le cas de la jeune Walker. Celle-ci était toujours dans son coin, timide et réservée. Mais c'est pour cela que Martin était intrigué par elle. Il ne comprenait pas ce qui se passait, mais une chose était sûr elle avait attiré l'attention d'Henry par son plus grand malheur. Elle ne semblait pas être au courant et la jeune femme était peut-être sensible...Lui dire la vérité était inconcevable.
-Comme je vous l'ai déjà expliqué, c'était un mal nécessaire. Il vous a demandé de vous voir et j'aimerais avoir des réponses claires et concrètes sur ce qui se passe.
-Vous voyez très bien qu'il ne parle pas.
-Peut-être si vous essayez de lui parler, nous aurons quelque chose à nous mettre sous la dent. Il est clair que je n'en tirerai rien. S'il vous plaît. Faites-le. Si jamais nous n'obtenons aucune réponse, nous sortirons et retournerons au laboratoire.
Quel joie! C'est tout ce qu'elle demandait pour partir. Elle releva ses yeux et regarda Stanley. Celui-ci observait maintenant le plafond avec beaucoup d'attention.
-Eh...Stanley?
Il continua de regarder le plafond sans lui porter attention. Brenner insista du regard pour qu'elle continue sur sa lancée. Elle ne savait pas quoi lui dire, alors elle lui posa des questions :
-Est-ce que vous vous souvenez de ce qui s'est passé à la bibliothèque municipale?
Toujours aucune réponse, mais Martin embarqua dans la conversation.
-Voici Annabelle Walker. Vous l'avez rencontré à la bibliothèque et vous travaillez au laboratoire d'Hawkins. Vous en souvenez?
Monsieur Johnson baissa son regard vers eux, mais sa bouche ne s'ouvrit toujours pas. Aussi silencieux qu'une tombe et quelque part dans sa tête, Annabelle ressentit Henry venir gratter sa tête et s'imposer de manière moqueuse, mais possessive. Elle en eut mal à la tête, mais pas assez pour saigner du nez.
-Vous ne faites pas assez d'efforts, se plaignit le vieil homme en soupirant pour la trentième fois. Je vous ai dit de ne me faire confiance. Pourriez-vous au moins lui redire les évènements à la bibliothèque? Peut-être que nous pourrions en tirer quelque chose.
-Je fais ce que je peux. Vous aviez dit que nous partirons si nous ne pouvons pas…
-Araignées! Araignées! Araignées! C'est….C'est...lui!
Ils sursautèrent tout les deux en entendant les mots de la bouche du patient sous des cris terrifiants. Stanley se débattait dans tout les sens en tentant de se détacher de ses attaches pour fuir quelque chose qu'il était le seul à voir. Il ferma les yeux, mais cela ne semblait pas le calmer. Le cœur de la jeune femme battait mille à l'heure, la vision de l'homme fou qui se débattait dans tout les sens lui envie de sauver sa vie. Elle se sentait en danger.
Ce qu'elle ne savait pas, c'est que cela provoqua un sentiment protecteur de l'entité obscure et Henry.
La vitre de la porte se fracassa en mille morceaux tandis qu'une masse sombre traversa le verre. Sur le coup, Annabelle se protégea la tête avec ses bras et elle s'accroupit sur le sol en lâchant un cri. Terrifiée, elle ne bougea pas et elle ne comprenait pas ce qui se passait. Le jappement d'un chien lui parvint aux oreilles, le cri et le son du sang qui giclait, une chaise qui tombait, la porte qui s'ouvrait à la volée…
L'animal se tourna vers Martin, les babines retroussées en montrant ses canines pleines de sang. L'envie de le tuer le poussa vers l'avant.
Puis, des balles tirés et le silence.
Elle rouvrit les yeux devant le chaos qui s'offrait. Stanley était mort, le cou déchiquetée avec du sang qui continuait à couler à flots. La vitre de la porte était en mille morceaux et Biscuit, le doberman, était mort d'une balle dans la tête avec la gueule pleine de sang.
Martin Brenner venait à sa rencontre, inquiet et il prit même son manteau pour la couvrir dans un geste protecteur. Aussitôt, les jappements des autres chiens de l'établissement résonnèrent sur les murs de l'hôpital. Cela réveilla les autres patients qui se mirent à crier à tue tête. Un vrai chaos sonore s'installa.
Elle sentit aussi un sentiment malsain venant d'Henry comme de la colère et un sentiment de jalousie.
-Tout va bien? Demanda Martin à elle. Je suis là. Vous êtes en sécurité.
Il ne s'excusa même pas de ce qui venait de se passer! Elle avait envie de lui en mettre une et pas des moindres. Elle se retint de justesse tandis que les gardes et les autres employés vinrent dans la pièce. Aussitôt, le docteur se mit à réprimander le garde responsable et le propriétaire de Biscuit. Quel beau nom pour un chien tueur…
-Comment osez-vous! Vous aviez dit que cet endroit était sécuritaire et vous pensez avoir le contrôle sur la situation! Ce n'est pas le cas!
-Je ne sais pas ce qui s'est passé! Se plaignit l'homme en protestant. Je tenais Biscuit et il s'est échappé. Ce n'est pas normal. Les chiens ne se comportent pas comme ça…
-Suffit! Vous en entendrez parler! Soyez en sûr!
Il fit signe aux autres qu'il était temps de partir et qu'il devait assurer leur sécurité jusqu'à la voiture et au-delà. Il y avait d'autres chiens dans l'établissement et il ne voulait pas qu'il arrive un autre incident. Il aida Annabelle à se remettre debout et s'assura qu'elle reste à ses côtés tandis qu'ils quittèrent l'hôpital sous le regard des employés qui couraient partout pour tenter de calmer le chaos. Les chiens continuaient à japper sans cesse et les autres patients tapaient dans la porte de leur chambre pour faire du bruit.
Martin se retrouva frustré. Il ne trouva pas de réponse à ses inquiétudes. Cela ne fit que les amplifier...Mais à chaque fois qu'il se passait quelque chose, Annabelle se trouva souvent au mauvais endroit, au mauvais moment. Il était clair qu'elle n'était pas l'auteure, mais simplement la victime et il n'était pas sûr de pouvoir l'aider à s'arracher aux griffes d'Henry. Il en était sûr. Il n'en avait tout simplement pas les preuves...
