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Lucius jeta un coup d'œil méprisant au parchemin étalé sur la table. Les mots, griffonnés d'une main nerveuse, suintaient l'arrogance.
Cette paix précaire, qu'il avait goûté ces derniers mois, ne pouvait, bien sûr, pas durer éternellement.
Il le savait.
Loki, qui avait pris l'habitude de lire par-dessus son épaule, grogna en parcourant le message : « Je rêve, ou ce connard te menace ? »
Lucius tourna lentement la tête vers lui et ses yeux d'acier se posèrent sur le garçon avec froideur : « Je suis désolé. » dit-il d'un ton plus sec qu'il ne l'aurait voulu. « Ma localisation a été révélée. Il faut agir rapidement. Je vais vous trouver un autre logement dans une autre ville. Changez aussi votre nom. Vous avez l'habitude, non ? »
Sans se départir de son calme, Loki glissa ses bras autour de son cou, laissant ses doigts caresser doucement sa nuque : « Mais j'aime bien 'Loki'. »
Le blond releva les yeux sur lui : « Pourquoi ? »
Le garçon sourit : « Parce que c'est lui que tu préfères. »
Lucius se dégagea des bras chauds : « Ne soyez pas ridicule. Votre nom ne changera rien à notre relation. »
« Vraiment ? »
Lucius se figea. Quelque chose dans le ton de Loki lui déplaisait profondément. C'était une nuance à peine perceptible, un sous-entendu qu'il n'aimait pas. Il balaya ces pensées parasites d'un geste de la main. Il avait des affaires plus urgentes à régler.
« Cassius n'est pas un enfant de chœur, » poursuivit-il d'une voix froide. « S'il m'a retrouvé, alors le Maître doit également savoir que je suis en vie. Ce qui complique nos affaires. »
Des cinq traitres, celui-ci était le plus brutal. La ruse ne fonctionnerait pas avec lui. Il fallait le confronter directement, dans un duel sans merci.
Il regarda un instant la marque sombre sur son bras, en silence, puis soupira. Il aurait préféré se débarrasser de Cassius avant que ce dernier n'ait eu l'occasion de le trouver. Mais ce qui était fait, était fait. Heureusement, cet imbécile s'était contenté d'envoyer une invitation. Un piège grossier, certes, mais Lucius avait confiance en sa propre force et en ses capacités.
Loki se redressa brusquement : « Je viens avec toi. »
Lucius lui jeta un coup d'œil hautain : « Certainement pas. Un vulgaire moldu dans votre genre ne me sera d'aucune utilité. Votre présence pourrait même me déconcentrer. »
Le garçon lui jeta un regard noir : « Tu me sous-estime encore, Lucius. »
Lucius attrapa son manteau d'un geste sec. « Non. Je suis simplement réaliste. »
Et sans attendre, il claqua la porte derrière lui, coupant court à toute objection que Loki aurait pu formuler.
Il s'apprêtait à transplaner quand une main ferme agrippa soudain son bras, le tirant brusquement en arrière. Le garçon l'avait suivi et ses yeux brûlaient de colère. « Tu crois vraiment que je vais rester là sans rien faire ? » cracha-t-il.
Lucius le dévisagea, surpris par l'intensité de sa réaction. « Je ne vous demande pas votre avis, » répliqua-t-il d'une voix tranchante. « Retournez à l'appartement. »
Loki resserra sa prise : « Je ne suis pas un gamin à protéger, Lucius. Je suis puissant. »
Une nouvelle vague d'irritation monta en Lucius, mais quelque chose dans les yeux du garçon l'empêcha de répondre sèchement. Il soupira intérieurement, laissant sa colère se dissiper légèrement, puis expliqua d'un ton plus mesuré : « Ce n'est pas une question de puissance. C'est une question de survie. Je ne peux pas me permettre de perdre quelqu'un d'important pour moi. »
Loki resta silencieux, ses yeux sombres scrutant le visage de Lucius avec une hargne non dissimulée. Finalement, il relâcha son emprise sur le bras du sorcier. « Tu vas devoir trouver une autre excuse. »
Lucius laissa ses doigts glisser lentement sur sa baguette. Il se pencha doucement vers le garçon : « Je j'ai besoin que vous soyez là, dans l'appartement. »
Le garçon esquissa un sourire qui n'atteignit pas ses yeux. « Est-ce que tu as jamais eu l'impression que j'écoutais tes conseils?»
Lucius sentit l'irritation monter en lui. D'un mouvement vif, il pointa sa baguette sur le jeune homme et murmura : « Petrificus Totalus. »
Le corps de Loki se raidit instantanément, ses muscles se figèrent et Lucius tendit les bras pour le rattraper avant qu'il ne s'effondre. Il porta le garçon jusqu'au lit, le déposant avec soin sur les draps. Un instant, il le regarda, impassible, avant de murmurer d'une voix glaciale : « Je suis désolé, mais je ne peux pas me permettre de vous avoir dans mes pattes pour cette mission. »
Puis, il se redressa, le regard dur, avant de transplaner dans un craquement sec.
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Un trait rouge siffla au-dessus de sa tête, éclatant contre le mur avec une force violente. Les débris de pierre volèrent en éclats autour de lui alors qu'il roulait souplement sur le côté, évitant de justesse un autre sortilège qui effleura son bras.
La brûlure cuisante se répandit rapidement dans ses chairs.
Il serra les dents.
Bien. Il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même. Il connaissait pourtant Cassius. Il aurait dû se douter que ce dernier ne viendrait pas seul.
Il se redressa et lança un sortilège de mort sans hésitation. Un éclair vert traversa l'air, frappant un mangemort en pleine poitrine. Le corps s'effondra près de lui, mais Lucius ne prit même pas le temps de le regarder tomber.
C'était sans fin. C'était déjà le troisième qu'il tuait, mais les hommes semblaient arriver en flot continu, l'empêchant d'étudier calmement la situation.
« Expelliarmus ! Incendio ! »
Le rire désagréable de Cassius résonna dans ses oreilles.
Bon sang, il devait se concentrer.
Lucius se baissa brusquement, évitant de justesse un autre sort, qui fit éclater un banc derrière lui en une gerbe de flammes.
Il disparut pour réapparaitre derrière un quatrième homme.
« Bombarda ». L'explosion, projetée à bout portant, déchira le mangemort en deux.
« Lucius, Lucius, Lucius ! Tu es toujours aussi répugnant. Laisse la place à la jeunesse ! Pourquoi tu ne meurs pas une bonne fois pour toute ? »
Lucius, sans répondre, pointa sa baguette vers Cassius et l'homme évita de justesse un sort qui fendit le lobe de son oreille. Un filet de sang coula sur son cou. Il grimaça, mais retrouva rapidement son sourire.
Lucius se redressa, son regard d'acier fixé sur Cassius. Il était bien conscient que la bataille n'était pas seulement entre eux deux. D'autres mangemorts se rassemblaient, formant un cercle de plus en plus étroit autour de lui.
Il pivota immédiatement.
« Diffindo ! » Le sortilège lacéra l'air, atteignant un autre adversaire au torse. Des gerbes de sang éclatèrent, maculant le sol de rouge alors que l'homme tombait à genoux.
Lucius disparu à nouveau et deux autres corps tombèrent.
« Crucio ! » hurla Cassius, mais le blond parvint à lever un bouclier juste à temps, déviant le sortilège qui alla s'écraser contre le mur dans une explosion de pierres.
« Vous n'êtes qu'une bande d'incapables ! » siffla-t-il à ses hommes, agacé par sa propre inefficacité.
Lucius ressentit une vive douleur dans sa jambe gauche, un autre sort l'avait atteint. Il tenta d'ignorer la souffrance et riposta avec une précision redoutable. « Impero ! » L'homme qu'il avait visé se retourna contre ses compagnons, lançant une série de sorts à l'aveuglette, semant la confusion dans leurs rangs.
Lucius profita de ce moment pour abattre deux autres adversaires avec un « Confringo » qui déchira l'air.
Une détonation soudaine éclata à quelques mètres de lui, suivi par une pluie de débris et de feuilles volant dans toutes les directions : un kiosque à journaux, situé à quelques mètres à peine, venait d'exploser dans un nuage de feu et de fumée.
Des fragments de papier enflammés tourbillonnèrent un instant autour d'eux.
Lucius détourna brièvement les yeux vers le kiosque en flammes, remarquant que quelques mangemorts, surpris par l'explosion, s'étaient dispersés dans la confusion.
Une silhouette familière se dégagea de la fumée, s'avançant calmement vers lui, baguette levée.
Severus.
Le regard noir du potionniste croisa celui de Lucius, puis, d'un geste négligent de la main, il désigna la gauche de la place où plusieurs mangemorts s'étaient regroupés. « Je prends ceux-là. Occupe-toi des autres. »
Lucius n'hésita pas une seconde. Il savait que Severus était parfaitement capable de tenir sa position, et cela lui permettait de se concentrer sur le principal protagoniste de l'histoire.
Il releva les yeux, cherchant Cassius du regard, mais ce dernier avait disparu.
Merde.
Avant même qu'il ne puisse réagir, une main brûlante saisit sa gorge avec force pour le plaquer brutalement contre un mur de pierre. Le choc fut violent et Lucius sentit sa tête heurter durement la surface rugueuse.
Son esprit vacilla un instant mais, malgré la douleur sourde qui pulsait à l'arrière de son crâne, il parvint à pointer sa baguette directement contre la tempe de Cassius. Le mangemort, un sourire tordu sur les lèvres, fit de même, plaçant sa propre baguette contre celle de Lucius.
Les deux hommes s'immobilisèrent.
Cassius, malgré le sang qui coulait abondamment de son front, sourit avec perversité : « Même couvert de sueur et de poussière, tu es toujours aussi baisable, Lucius. »
Lucius esquissa un sourire glacé. « Navré, Cassius, mais je ne fais pas dans les déchets. »
Le sourire de Cassius s'élargit, révélant des dents tachées de sang. « Aucun souci, je pourrais toujours profaner ton cadavre. Je ne suis pas un homme difficile. »
Lucius éclata d'un rire froid et sa baguette s'enfonça un peu plus dans la tempe de son adversaire, menaçant de percer sa peau. « Dire que tu n'as même pas osé m'affronter sans amener tous tes chiens avec toi. »
Cassius sourit encore, mais cette fois, il semblait dément. « C'est parce que tu es trop ancré dans les traditions, Lucius. Que veux-tu, les méthodes ont changé. Maintenant, le nombre fait la force. »
Lucius sentit la pression autour de sa gorge se resserrer davantage, coupant partiellement sa respiration. « Il faudrait plus qu'une bande de chiens pour m'abattre. » répliqua-t-il d'une voix rauque.
Cassius éclata d'un rire gras et sinistre : « Évidemment, tu crois que je ne le sais pas ? » Il rapprocha leur corps, plaquant Lucius encore plus fermement contre le mur et glissa une jambe entre celles du blond. C'était une pression vicieuse. Un voile de dégoût passa sur le visage de Lucius, mais il ne bougea pas.
« Otto et moi, on t'avait prévu tellement de choses sympas pour ton retour. » Susurra l'homme. « Au fait, on a retrouvé tes cadeaux, tu sais. Ta signature est si facile à reconnaitre. Ça m'a fait un truc, ici, en bas. Tu peux pas imaginer. »
Cassius avait toujours été un type cinglé, le genre d'homme à l'intellect limité, mais doté d'une cruauté sans borne, prêt à tous les sévices pour satisfaire ses désirs morbides. La mort qu'il lui réservait serait lente et douloureuse, à l'image de la pourriture qu'il incarnait. Il suffisait juste qu'il parvienne à se dégager de son emprise.
« Ooooh, Lucius... » reprit Cassius. Sa voix était caressante, presque chantante, un contraste effrayant avec la violence de ses gestes. « Toi et moi… on pourrait faire tellement de mal autour de nous. Je t'ai toujours admiré, tu sais ? Admiration, fascination, amour, dépeçage… ces sentiments se confondent parfois en moi. Je sais parfaitement pourquoi le Maître t'a choisi, toi, pour le seconder. » Il se pencha encore plus près et son souffle chaud caressa l'oreille du blond qui se retint de lui cracher au visage. « Est-ce que tu lui as donné ton corps, à lui aussi ? »
Lucius ressentit une montée de haine pure le saisir. Un sourire effleura ses lèvres et il pencha lentement la tête sur le côté : « Tu sais, Cassius, de vous cinq, j'ai toujours trouvé que tu étais le plus intéressant. Le plus tordu. » Sa voix s'infiltrait comme un venin. « Alors, naturellement, je me suis dit que tu méritais un traitement très spécial. Juste pour toi. Quelque chose de brutal et de vicieux, exactement comme tu l'aimes. »
Cassius frissonna, la pointe de sa baguette descendit lentement, traçant une ligne brûlante le long de la joue de Lucius, avant rejoindre son cou : « Vrai de vrai ? » C'était un gémissement immonde, déformé par l'excitation.
Lucius maintint son sourire, imperturbable : « Vrai de vrai. » Sa voix était douce et caressante. « Par exemple, je pourrais commencer par ouvrir ton ventre en deux, très lentement, pour en sortir tout ce qu'il y a dedans. Je te garderais en vie, bien sûr. Juste assez pour que tu sois conscient et que tu ressentes chaque seconde de ton agonie. »
Le rire nerveux de Cassius résonna dans l'air, mais il ne parvint pas à masquer le frisson involontaire qui parcourut son échine. Il savait que Lucius était capable de tenir cette promesse et la cruauté glacée qui suintait de ses paroles laissait peu de place au doute.
Le sourire du blond se transforma en un rictus cruel : « Pas d'Avada pour toi, Cassius. Tu es bien trop divertissant pour mériter une mort aussi rapide. » Il prit soudain un air faussement attristé. « Tu sais, j'ai beaucoup réfléchi avant de décider ce que j'allais faire de toi. Mais toi, tu voudrais me tuer sans que l'on ait le temps de jouer ensemble, une dernière fois ? »
Le souffle de Cassius devint haletant, ses pupilles dilatées trahissaient l'excitation malsaine qui l'envahissait : « Tu veux… jouer avec moi ? » Sa baguette poursuivit sa descente lente et, d'un geste sec, il fit sauter le premier bouton de la chemise du blond, exposant sa peau pâle.
Lucius laissa échapper un rire glacialet se pencha légèrement en avant, rapprochant leurs visages : « Quoi ? Tu n'en as pas envie ? » Sa voix était du velours.
Cassius, presque tremblant, acquiesça : « Si… » Il était incapable de détourner les yeux.
Le blond remonta sa main libre jusqu'au poignet du mangemort. Cassius, captivé, baissa les yeux et Lucius sut que c'était l'instant qu'il attendait. Avec une rapidité fulgurante, il enfonça son genou dans l'estomac de l'homme, puis le repoussa violemment.
L'air froid de la nuit lui fit un bien fou lorsqu'il put enfin respirer à pleins poumons. Il pointa de nouveau sa baguette, les yeux brûlant de haine froide. « Alors, allons-y, mon ami. Jouons. »
Le premier sort déchira violement les tendons de sa cheville droite et l'homme tituba un instant avant de poser un genou à terre. D'un coup de pied, Lucius lui renvoya sa baguette : « Prends ton arme. »
Cassius tendit la main vers elle, mais le second sort sectionna trois de ses doigts et il se recroquevilla sur lui en hurlant. Un sourire cruel étira les lèvres de Lucius : « Quoi ? Tu sembles moins enthousiaste, tout à coup. »
Le mangemort, tremblant, tendit un bras vers ses compagnons, cherchant désespérément à reprendre le contrôle de la situation : « Attrapez-le... Ne le tuez pas, mais empêchez-le de bouger ! »
Un sortilège fusa en direction de Lucius mais, avant qu'il n'ait le temps de réagir, une barrière de protection absorba l'attaque dans un éclat lumineux.
Son regard se porta instinctivement vers Severus, mais ce dernier était encore engagé dans un duel acharné, bien trop occupé pour être à l'origine de ce bouclier.
Puis, il l'aperçu, fendant le champ de bataille avec une détermination féroce, enchaînant les sorts avec une précision et une vivacité qui trahissaient une grande maîtrise de la magie.
Loki.
Lucius sentit une vague d'incompréhension l'envahir, rapidement suivie par une colère froide et intense. Il n'était pas un moldu. Il ne l'avait jamais été. Tout ce temps, il avait été trompé, manipulé. Ce garçon, qu'il croyait sans défense, était en réalité l'un des leurs.
Cassius se releva lentement, mais Lucius ne parvenait plus à se concentrer. Comment avait-il pu être si aveugle ? Et pourquoi le garçon avait-il dissimulé sa puissance ? Merlin ! S'il l'avait su, alors… alors il aurait…
Un autre assaillant tenta d'attaquer le garçon par derrière, mais ce dernier réagit instantanément, l'envoyant valser contre un mur dans une explosion de lumière.
Lucius ne pouvait plus détourner les yeux.
Il était fasciné.
Ce gamin était fait pour le combat.
Et cette fascination ne faisait qu'alimenter sa rage. Un sort lui traversa l'épaule, projetant une gerbe de sang dans les airs, mais Lucius n'émit pas une plainte, trop absorbé par le spectacle.
« Lucius ! Finis ce que tu étais en train de faire, putain ! » La voix impérieuse, presque furieuse, de Loki retentit jusqu'à lui et le regard noir du garçon se posa sur lui, brûlant de reproche.
Il sortit enfin de sa transe et se retourna, d'un mouvement fluide, pour pointer de nouveau sa baguette vers Cassius.
« Excuse-moi. Je t'avais oublié. »
Le sang coulait à flot de son épaule, imbibant le tissu de sa chemise et il changea sa baguette de main avec une aisance déconcertante, comme si cette blessure n'était qu'un désagrément mineur et qu'il avait toujours été ambidextre.
« Tu m'avais… oublié ? » grinça Cassius avec hargne.
« Oui. Pendant un moment, j'ai pensé à autre chose. Mais ne t'inquiète pas, je suis revenu à moi. Continuons notre petite conversation, tu veux ? Où en étions-nous, déjà ? »
Il fit un pas en avant, sa baguette maintenant pointée directement sur le front du mangemort.
« Tu sais, quand j'avais ton âge, j'ai créé un sort. Quelque chose d'assez immonde, pour tout te dire. Dis-moi, Cassius, tu as déjà vu une tête exploser ? »
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Lucius essuya d'un geste nonchalant sa baguette sur son pantalon. C'était toujours aussi spectaculaire que dans ses souvenirs. Peut-être même trop spectaculaire. Il fallait vraiment qu'il arrête d'utiliser ce sort.
Ou peut-être qu'il devrait en inventer un autre, un peu moins salissant.
Un petit sourire satisfait effleura ses lèvres à cette pensée.
Il écouta d'une oreille distraite le tumulte du champ de bataille. Il adorait ce son. C'était dans ce chaos qu'il se sentait le plus vivant, que ses instincts étaient les plus aiguisés.
Le nom d'Harry Potter résonna dans les rangs clairsemés des mangemorts restant, porté par des murmures apeurés. Lucius fronça les sourcils.
Il releva les yeux pour voir Loki se déchaîner.
« Une aide inespérée. » Grogna une voix grave à côté de lui.
Lucius tourna légèrement la tête, toujours fasciné par la scène qui se déroulait devant lui : « Oui. J'ignorai qu'il avait ce talent. Je pense que nous aurons une petite conversation, ce soir. Tu as fini avec les tiens ? » ajouta-t-il distraitement.
Il n'obtint pas de réponse.
Étrange.
Son regard se détacha enfin du carnage pour se tourner vers Severus. Ce dernier le regardait, abasourdi.
« Quoi ? »
Severus, d'ordinaire si impassible, semblait lutter contre lui-même : « Lucius. Ce garçon… »
« Loki ? »
Une vague de dépit déferla soudainement sur le visage de Severus. Avant que Lucius ne puisse réagir, son ami saisit brusquement le col de sa chemise et le secoua avec une force inattendue : « Ne me dis pas que c'est avec lui que tu as baisé ? »
La surprise passa rapidement sur le visage de Lucius, vite remplacée par une colère froide. Il se dégagea violemment de la poigne du potionniste : « Qu'est-ce que ça peut te foutre, Snape ? »
La voix, pourtant d'habitude si égale, de Severus roula comme un coup de tonnerre : « Tu te fous de ma gueule, Malfoy ? Ou est-ce que tu es réellement stupide ? »
Lucius ne comprenait pas. Son regard se reporta à nouveau sur le garçon. Celui-ci esquiva avec une souplesse féline un sortilège avant de riposter avec facilité.
« C'est Harry Potter, espèce d'abruti ! »
Quoi ?
Le monde de Lucius vacilla un instant.
Un rire incrédule monta en lui, secouant son corps tout entier : « Ne dis pas n'importe quoi. »
Le regard mortellement sérieux de Severus effaça lentement son sourire. Le maître des potions se baissa lentement, ramassant un journal chiffonné qu'il lança sans ménagement sur la poitrine de Lucius. Ce dernier l'attrapa d'une main, encore sous le choc.
« Tu devrais lire les journaux, pour une fois, Malfoy. Ça te ferait le plus grand bien. »
Lucius contempla avec incertitude le papier dans sa main. Il releva un regard perdu vers son ami.
« Lis-le. Et je te jure que si tu me dis que tu ne vois pas la ressemblance, je me débarrasse de toi définitivement. »
Lucius déplia lentement le journal. Il n'eut pas besoin d'aller très loin : le premier article parlait d'Harry Potter et relatait, à travers tout une série de témoignages poignants, l'épopée du garçon dans sa quête contre le Seigneur. Juste en dessous, se trouvait une photo sur laquelle le jeune héros combattait un mangemort.
La main de Lucius trembla et il posa son regard sur Loki. La photo devait dater de quelques années peut-être, le gamin avait un peu vieillit depuis, mais il n'y avait pas l'ombre d'une hésitation à avoir.
Loki était Harry Potter.
Quelque chose se brisa en Lucius.
Severus épousseta d'un air indifférent sa robe : « Et maintenant, Lucius, tu as intérêt à réparer toute ta merde. On se revoit au camp. Je pense que tu n'as plus vraiment le choix, désormais. »
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Il devait y avoir une erreur.
Lucius avança lentement vers Loki. Le garçon lui jeta un coup d'œil intrigué avant de repousser une nouvelle attaque avec une aisance qui, en d'autres circonstances, aurait pu être admirée : « Tu as pu régler tous tes problèmes ? »
« Non. »
Loki fronça les sourcils, perplexe : « Oh. Je vois. »
Les deux hommes se baissèrent simultanément alors qu'un sort explosait au-dessus d'eux. Le garçon esquissa un sourire narquois, se redressant pour envoyer un contre-sort qui fit reculer leurs assaillants. « Alors retournes-y ? Qu'est-ce que tu attends ? Je m'occupe de ces mecs. »
Lucius attrapa la taille du jeune homme d'un geste ferme, le pivotant vers lui juste à temps pour lui éviter un sort lancé traîtreusement dans son dos. Ce dernier soupira avant de dresser un nouveau bouclier : « Merci. Tu n'y vas pas ? Je t'ai déjà dit que tu n'as pas besoin de me protéger. »
« Je sais. » La voix de Lucius était glaciale et Loki releva un regard étrange vers lui.
« Tu es en colère ? »
Lucius tendit son bras par-dessus l'épaule du garçon et jeta un rayon vert sur l'un des mangemorts restant. « J'ai un nouveau problème. »
Loki resta silencieux quelques secondes, le temps de dévier un énième sort qui fusait vers eux : « Est-ce que ce problème me concerne ? »
« Oui. »
« D'accord. »
Le dernier corps tomba enfin et les deux hommes se redressèrent lentement.
Les yeux d'acier de Lucius ne quittaient pas le garçon.
« Quand on s'est rencontré, il y a plusieurs mois, vous m'avez dit que vous aviez plusieurs noms. »
Le souffle de Loki était erratique. Il prit le temps de calmer sa respiration avant de répondre. « C'est vrai. »
Lucius esquissa une moue indifférente avant de tendre lentement sa baguette sur le front du jeune homme : « Oui. Je suis curieux. Vous m'avez dit comment on vous appelait ici et dans l'ouest… »
Loki sourit doucement : « Oui. »
Lucius continua, implacable : « Maintenant, j'aimerai savoir comment on vous appelle à Londres. »
Le garçon essuya d'un geste machinal un sillon sanglant qui coulait sur son visage. Le blond suivi avec intérêt son geste.
« Harry. »
Un sourire de dépit traversa le visage du sorcier. « Harry. » répéta-t-il comme s'il voulait être certain d'avoir bien entendu. « Vos yeux ne sont pas verts. »
Un rire doux secoua Loki.
Ou Harry.
Il ne savait plus.
« Je porte des lentilles. Je suis sûr de te l'avoir déjà dit. »
Les mâchoires de Lucius se serrèrent : « Vos parents sont morts… »
« … Tués par Voldemort. »
Lucius frissonna.
Merde.
Il avait envie de crever maintenant.
Le garçon n'avait pas menti. Pas une seule fois. « Vous m'avez laissé… vous… Oh Merlin. » Il passa une main fatiguée sur son visage.
Loki pencha la tête sur le côté et rangea sa baguette : « Oui. Je t'ai offert mon corps, si c'était là ta question. »
Lucius leva les yeux vers lui, luttant pour reprendre son sang-froid : « Et vous saviez qui j'étais…tout ce temps, vous le saviez. »
« Bien entendu. Je te connais depuis longtemps. Tu te souviens quand j'ai libéré ton elfe ? J'avais quoi… 12 ans ? Le temps passe vite, hein ? Maintenant qu'on a mis tout ça au clair, qu'est-ce que tu comptes faire ? Me tuer ? »
« Vous tuer ? » Un rire amer secoua Lucius. Il abaissa lentement sa baguette. « Je rembourse aujourd'hui ma dette envers vous. Je vous laisse la vie sauve. De cette façon, la prochaine fois que nous nous croiserons, nous pourrons nous entre-tuer sans qu'aucune barrière ne vienne nous entraver. »
Un silence pesant s'installa entre eux.
Aucun des deux hommes ne bougea.
Loki, toujours aussi impassible, jeta un coup d'œil autour de lui, comme si le chaos qui les entourait ne l'affectait pas : « Change de Maître. Lucius. Tu sais très bien que Tom n'est plus qu'un mort en devenir. »
Lucius le contempla un long moment.
Loki ressemblait toujours à Loki.
Il avait toujours en lui cette insolence, cette audace et ce franc-parler qui l'avaient séduit. Un souffle moqueur s'échappa de son nez : « Vous étiez une parenthèse rafraîchissante de ma vie, Monsieur Potter. Une parenthèse, rien de plus. Et il est temps de la refermer. »
Le garçon soutint son regard, impassible : « Tu ne penses pas un mot de ce que tu dis. »
« J'ai une famille. Une femme. Un fils. Nos mondes sont incompatibles. »
« Mais tu as des sentiments pour moi. »
Lucius ferma les yeux un instant, rassemblant tout son contrôle pour ne pas laisser ces mots le briser davantage. Quand il les rouvrit, son regard était dur, froid, détaché : « Monsieur Potter. Nous ne pouvons pas tenter de concilier l'inconciliable. Je suis un mangemort. Je l'ai toujours été et le serais toujours. Et vous vous êtes… le Merveilleux Sauveur du Monde. »
« Un peu narcissique, non, comme formulation ? »
Lucius sourit enfin. Un véritable sourire, teinté de tristesse et d'ironie.
Et Loki se hissa sur la pointe des pieds pour déposer sur ses lèvres un baiser.
Le blond, presque malgré lui, passa un bras autour de sa taille pour le rapprocher encore, cherchant à prolonger ce moment.
Il sentit la main du garçon trembler sur ses épaules et il se demanda un instant s'il faisait le bon choix.
Ou s'il y avait jamais eu de bon choix.
Il se détacha avec difficulté et, quand il le fit, un sentiment de solitude le transperça violemment, plus froid et plus cruel que tout ce qu'il avait ressenti jusqu'à présent.
« Adieu, Monsieur Potter. Loki. Je vous souhaite sincèrement de ne jamais recroiser ma route. »
Harry sourit : « Est-ce que tu as jamais eu l'impression que j'écoutais tes conseils ? »
Lucius regarda le garçon un long moment.
Puis, sans un mot de plus, il tourna les talons et disparu dans la nuit, laissant derrière lui un souvenir qui, il le savait, le hanterait pour le reste de sa vie.
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