13 Juin : Dépravé

Le prince n'en était un que par accident.

Son père et sa mère étaient tous les deux de lignée impériale. Ce double sang le qualifiait tout juste pour être considéré techniquement comme un prince malgré la distance qui le séparait de l'Empereur actuel. Lorsque l'Impératrice était encore là, il avait été nettement plus près du trône. Il aurait même eut une chance s'il avait eut plus de moyens, donc plus de soutiens. Malheureusement, ce n'était pas son cas. Il était un prince perdu au milieu de la masse à l'époque et avait été repoussé encore plus loin avec le nouvel Empereur. Au moins avait-il encore la chance d'en être toujours un. Il n'avait pas été forcé de quitter son petit domaine du Palais Intérieur. Ses épouses avaient été soulagées aussi. Être un prince lui garantissait un traitement annuel qui faisait vivre toute la famille. Le Prince n'était plus de première jeunesse mais il avait toujours la même faim de chair fraiche que dans ses jeunes années. De sa vingtaine d'épouses et concubines, il lui en restait une douzaine encore en vie. Les autres avaient été soit répudiées, soit étaient mortes en couche ou juste après. S'il avait été chassé du Palais Intérieur en perdant son statut de prince, il n'aurait jamais eut les moyens de subvenir aux besoins de ses épouses et de ses enfants encore trop jeunes pour se débrouiller seuls. Ca aurait signifié l'abandon automatique des concubines et de leurs enfants. Peut-être même de la plus basse des épouses. En plus, celle là n'avait jamais eut que des filles, donc pas vraiment utile ou intéressante. Quoi que, il aurait pu les envoyer dans un bordel pour qu'elles travaillent pour lui et paye pour leur entretient après les avoir répudiées. C'était une idée à garder dans un coin de la tête. Il n'y avait jamais assez d'argent dans une maison. S'il y avait pensé avant, il aurait vendu les concubines dont il s'était débarrassé avant au lieu de juste les jeter dehors avec un petit pécule.

L'un des autres avantage à être un prince était qu'il était par défaut invité à toutes les célébrations de la cour. Il n'était pas assez fin politiquement pour réaliser que ces invitations étaient de la pure politesse et qu'il aurait du y répondre avec la même retenue en déclinant. Il ne le faisait jamais et passait pour ce qu'il était : un pique-assiette mal éduqué.

Son sans-gêne finissait même par amuser certains, dont le nouvel Empereur.

C'était la raison de la présence de l'homme pour la célébration du jour.

Les quatre dieux gardiens avaient été longuement honorés par l'Empereur, les prêtres divers et variés dont il se fichait éperdument et quelques individus bizarre auxquels il n'avait pas fait attention. Ils n'étaient que des péons, il était un prince.

Après les célébrations, il y avait eut le repas. Pour une fois, ce n'était pas un diner à table mais une espèce de buffet prévu pour que les invités passent de groupes en groupes pour discuter. Le tout était prévu pour la diplomatie et la politique. Chacun était venu avec son épouse la plus importance, elle-même utilisée comme vitrine de sa richesse. Le prince se sentait un peu humilié d'être seul et de ne pas avoir pensé à prendre sa quatrième épouse avec lui. Elle n'était pas la plus importante, mais elle était la plus agréable à regarder. C'était la seule chose qui l'intéressait. Elle avait la jambe longue, la taille fine et des gros seins moelleux bien comme il les aimait. Plus c'était gros, plus il appréciait. Il pouvait passer des heures à pétrir les seins de ses épouses et de ses concubines. C'était même le seul critère qu'il avait pour ses concubines. Pour ses épouses, c'était leur dot qu'il regardait avant leurs seins.

La salive lui monta soudain à la bouche lorsque son regard s'arrêta sur une femme à l'anatomie stupéfiante. Elle était habillé entièrement en blanc, elle était aussi grande qu'un homme, semblait solide comme un roc et surtout, elle avait une poitrine tellement touchante qu'elle semblait à deux doigts de s'échapper de ses robes, quand bien même elle ne laissait pas une goute de peau à la vue. Cette femme était un trésor interdit qu'il désira immédiatement. Il voulait cette femme comme concubine. Ou à défaut, il la voulait dans son lit. Il s'en contenterait d'ailleurs.

Elle se mit soudain à rire doucement à ce que lui dit l'homme à ses côtés. Son mari ? Le prince en ressentit une soudain bouffée de colère jalouse qui se transforma en haine.

Yuan Boya…

L'épine à son flanc depuis plus de vingt ans.

Yuan Boya.

Son fils ainé.

Son ainé à trois jours près.

Il avait regretté de ne pas battre sa mère assez fort pour qu'elle perde son enfant. Quand elle avait résisté à ses coups, il aurait du la faire tuer avant qu'elle n'accouche mais il avait été sentimental. Il n'avait pas encore de rejeton à l'époque. Avoir plusieurs rejetons en peu de temps était un moyen facile de frimer devant les autres. Elle aurait du mettre bas après sa première épouse mais s'était précipitée. Tss. S'il avait su… Il l'avait chassé quelques années plus tard avant de louer les services d'un assassin pour se débarrasser des deux mais seule la putain était morte. Boya avait été récupéré par JingYun et il s'en était lavé les mains. Et voila que plus de vingt ans plus tard, ce résidu d'erreur revenait lui mettre le nez dedans.

Le prince grinça des dents. On lui avait dit à l'époque qu'il faisait une erreur de faire d'une simple musicienne de cours sa concubine. La sœur de la donzelle avait protesté qu'elle était trop jeune, qu'elle n'était pas ce qu'il fallait à un prince mais il n'avait vu que les gros seins de la musicienne de seize ans. Il l'avait prise avec lui sans vraiment lui demander son avis. Elle devait être honorée d'avoir été repérée par un prince alors pourquoi lui demander ce qu'elle en pensait ? Le beau frère de sa concubine avait tenté de protester lui aussi mais il l'avait fait battre par ses gardes. L'homme aurait du mourir mais il avait survécut, il ne savait pas comment. Alors la fille s'était résignée et avait supplié sa sœur et son beau-frère de ne pas insister. S'il avait sut, il aurait laissé cette fille dans sa fange. Mais ca aurait été du gâchis. Elle avait des seins tellement énormes et confortables quand il se frottait entre… Bref. Il fallait qu'il se tienne un peu ou on allait le surprendre à baver autant sur ses souvenirs que sur la femme au bras de son fils.

Un sourire malsain lui monta aux lèvres. Son fils n'était qu'un misérable prêtre de JingYun sans plus de statut que celui que le temple lui donnait. Dans la grande marche des choses, il n'était rien. Ca faisait plaisir à son père. Cette femme était bien trop belle pour un homme comme son fils. Il fallait du bien pour s'occuper d'une femme comme ca. A moins que ce soit une courtisane. Et dans ce cas, elle accepterait n'importe qui avec assez d'argent. Il était un prince. Il pouvait promettre beaucoup. Il pouvait même lui promettre de racheter ses dettes. Elle serait à lui et à sa merci.

Le prince aurait presque pu en ronronner de plaisir à l'idée d'enfermer une pareille beauté chez lui et de faire d'elle tout ce qu'il voulait jusqu'à ce qu'il se lasse ou qu'une grossesse lui fasse perdre tout son intérêt. Une fois accouchée, elle aurait des seins encore plus fantastique. Il pourrait attendre qu'elle finisse de nourrir son rejeton avant de les mettre tous les deux dehors.

Les étoiles étaient visiblement du côté du prince lorsqu'il vit la femme se pencher à l'oreille de son fils puis sortir.

Il se faufila à sa suite.

La lune rendait la peau d'albâtre de la jeune femme plus diaphane encore. Il était impossible qu'une femme pareille ne soit pas une courtisane.

"- Bonsoir."

Elle sursauta, surprise. Elle le salua d'un signe de tête. Sa retenue irrita le prince. Elle aurait du s'incliner devant lui. Son statut était supérieur au sien.

"- Je suis le prince Jin ErShiLiu." Sourit-il, sur de lui.

"- Salutations." Mais elle ne réagit pas davantage.

"- C'est la première fois que je vous vois ici."

"- Je ne suis pas très attirée par ce genre de réception."

Le prince s'approchait lentement. Il entrait lentement dans la zone de confort de la jeune femme qui reculait lentement aussi. Il prenait plaisir à son inconfort. Dominer des inférieures était un plaisir que son fils ne comprendrait jamais.

"- J'imagine que votre cavalier à loué vos services pour la soirée pour ne pas passer pour un idiot ?" Il n'avait jamais eut ni patience, ni diplomatie.

Les yeux de la jeune femme s'ouvrirent en grand. La stupeur était évidente. Il avait donc vu juste.

Il en profita pour presser son avantage jusqu'à ce que la femme ne puisse plus reculer, coincée entre la balustrade et le vide.

"- Je peux vous payer davantage. Je peux même racheter votre dette. Qu'en pensez vous ?"

Il était incapable de la regarder dans les yeux. Sa poitrine était trop attirante pour lui. S'il avait regardé son visage, il aurait vu le regard glacial de la jeune femme et l'étincelle de colère qui y brillait.

"- Je n'ai rien contre les professionnelles. Bien au contraire. Je prendrais soin de vous, je peux vous le promettre et…"

La femme se dégagea soudain brutalement. Elle ne le frappa pas vraiment mais la force de la poussée le fit reculer maladroitement de plusieurs mètres. Un peu plus et il serait tombé.

"- BOYA !" Appela la femme.

"- QingMing ?"

Son fils s'était comme matérialisé près de la putain. Comment avait-il pu fendre la foule aussi vite ? Mais le prince avait oublié que son fils était un chasseur. Boya avait simplement abandonné l'Empereur sur place et bondit par-dessus les gens.

Le Souverain, choqué, suivait. La foule s'écartait devant lui. La colère était évidente sur le visage de l'homme.

"- Ce… Ce… Ce goujat !" La femme montrait le prince du doigt avec un outrage évident.

Il allait devoir se justifier. Ce ne serait pas trop dur. Il restait un prince. Face à une courtisane, celui des deux qui mentait forcement n'était pas dur à trouver.

"- QingMing Daren, qu'est ce que le prince Jin à encore fait ?" S'inquiéta l'Empereur.

La bouche du prince s'assécha. Il avait peut-être mal comprit quelque chose ici.

A mesure que la femme s'expliquait, Boya passait d'inquiet à livide de rage. L'Empereur était tout autant scandalisé.

"- PRINCE JIN ! COMMENT OSEZ VOUS ?!"

"- Majesté… Cette courtisane n'a visiblement…"

"- COURTISANE ?" Le rugissement de son fils le fit tressaillir. "QINGMING EST UN MAITRE DU YIN YANG, ESPECE DE DEPRAVE !" Lui aussi avait reconnu son père." Majesté ! Je demande à ce que mon géniteur soit punit pour l'outrage qu'il à fait aussi bien au Yin Yang, qu'à JingYun, Zhuque et au trône !"

L'Empereur était d'accord.

"- Emmenez le ! Je déciderai de son sort demain."

Le prince ne comprenait pas. Qu'est ce qu'il avait raté ?

Il faillit hurler lorsque la femme plantureuse se transforma sous ses yeux en homme proche de la quarantaine.

"- Vous êtes un véritable abruti, Jin ErShiLiu." Siffla le garde qui venait de l'attraper par le col pour le conduire en cellule. Sa stupidité n'allait pas gâcher la fête. "Vous venez à une réception sans même vous soucier de ce qui se passe."

Concentré comme il l'était sur ses rêves dépravés et les seins des femmes, il n'avait même pas fait l'effort de se renseigner sur la situation. S'il l'avait fait, il aurait réalisé qu'il s'agissait du mariage de son fils et de l'homme en blanc et que le mariage avait été sanctifié par les quatre dieux gardiens. Et si le nordiste avait prit une forme féminine ? Juste pour simplifier les choses. Personne n'avait envie de devoir justifier l'union de deux hommes.

Le prince avala sa salive.

Ha… Il avait vraiment fait une erreur cette fois.

Il avait quelques heures pour se trouver une excuse. Il y parviendrait. Après tout, il était le père du marié. Il fallait bien qu'il s'assure que l'épouse de son fils était digne de confiance. Oui, c'était une bonne idée.

Un petit sourire lui échappa.

Le garde était écœuré.

Ce prince était une plaie depuis bien trop longtemps. Ils étaient nombreux à espérer que l'Empereur finirait par le remercier définitivement.

(Est-ce que j'ai sous entendu que la mère de Boya était la petite sœur de l'épouse de Sha ShengShi ? C'est possible. Je trouve l'idée marrante)