Granger

"LE DUEL DES AURORS"

"C'est officiel, l'auror Tudor Humphrey annonce sa candidature pour le poste de Ministre de la Magie. En compétition directe avec Kingsley Shacklebolt qui prône la réhabilitation, Monsieur Humphrey désapprouve les méthodes employées jusqu'à aujourd'hui et affirme que sous sa gouverne, la justice serait plus encadrée et plus sévère contre les criminels.

Sa soeur, Barbara Humphrey, dirigeante du mouvement "la justice pour la paix" clame haut et fort son soutien pour son frère : "Je sais qu'il souhaite, comme moi, comme vous, retrouver un monde meilleur, un monde d'harmonie où le statut du sang n'est plus remis en cause par des sorciers limités et où les crimes qui ont été commis sont réellement punis."

Approuvez-vous les décisions de justice qui ont été prises jusqu'à présent ? Trouvez-vous que les moyens mis en œuvre pour retrouver les derniers mangemorts fugitifs sont suffisants ? Pensez-vous que chacun mérite une seconde chance ?

Chers sorciers, chères sorcières, dans quelques mois ce sera à vous de décider. Les élections ministérielles auront lieu au printemps de l'année suivante. D'ici, là, continuez à suivre l'actualité pour en savoir plus sur vos candidats favoris."

Hermione Granger reposa le journal à côté d'elle et colla son front sur la vitre un peu sale du Poudlard Express. Le paysage défilait devant ses yeux mi-clos alors qu'elle repensait à l'été mouvementé qu'elle venait de passé. Sa dernière soirée, particulièrement, lui pesait sur le cœur.

Après un mois sans s'être vu, Ron ayant commencé son nouveau travail et Hermione vivant chez ses parents, ils avaient trouvé le moyen de passer un moment en tête à tête avant le dîner du soir au Terrier. C'était en quelque sorte une soirée d'au revoir pour Harry, Ginny et Hermione avant leur départ pour Poudlard. Tout le monde était affairé à préparer le repas ou les bagages pour le lendemain, mais la jeune Gryffondor, toujours en avance, avait proposé au rouquin une petite balade dans le jardin pour « profiter une dernière fois d'une douce soirée d'été ». C'est ainsi qu'ils s'étaient éloignés de la cohue familiale pour n'être qu'enfin que tous les deux. Main dans la main, ils avaient marché en silence jusqu'à un tronc d'arbre couché près des marécages. Là, assis côte à côte avec le soleil descendant progressivement vers l'horizon, la brune s'était lancée : « Ce sera très étrange sans toi cette année... »

« Je sais... » avait soufflé Ron. « On ne s'est pas beaucoup vu cet été non plus. » Hermione se tourna vers lui.

— J'y ai beaucoup réfléchi d'ailleurs...

— Le contraire m'aurait étonné !

Elle avait souri.

— … Et je sais qu'une relation à distance n'est pas l'idéale, on va tous les deux être très occupés. Mais nous avons traversé bien pire que ça ! Je... J'aimerais vraiment essayer avec toi. Il faudra qu'on s'envoie des lettres bien sûr, qu'on communique. Parce que c'est ça le plus important dans une relation, non ? La communication ! Je veux dire, peut-être que ça ira ou peut-être pas, mais il faudra qu'on se le dise... Qu'est ce que t'en penses ?

Elle avait rougi pendant sa petite tirade, et regardait vers le roux avec incertitude.

— Je pense que tu me plais, Hermignonne, alors on va essayer.

Ils s'étaient embrassés à ce moment-là. Ça avait été doux, un peu triste parce qu'ils savaient que ce serait la dernière fois avant très longtemps. Une larme avait coulé le long de la joue de la jeune fille et les bras de Ron l'avaient serrée un peu plus fort. Puis, quelqu'un les avait appelés pour passer à table.

Le matin du départ, Ron était partis très tôt au travail, il ne l'avait pas réveillée. Elle savait qu'ils s'étaient dit au revoir la veille, et qu'il n'avait pas voulu risquer de réveiller d'autres personne de la maisonnée, notamment Ginny avec qui elle partageait la chambre, mais elle n'avait pas pu s'empêcher d'être un peu déçue de ne pas l'avoir vu une dernière fois.

En y repensant, le nez de la jeune fille commença à lui picoter. Elle avait souvent envie de pleurer ces derniers temps.

— Nous n'avons qu'à demander à Hermione ! Qu'est ce que tu en penses ?

La jeune fille sortie de ses pensées moroses quand Neville, assis à sa droite, s'adressa à elle. Elle cligna des yeux pour chasser les larmes sur le point d'apparaître. Elle n'aimait pas se montrer ainsi, préférant afficher un sourire devant ses amis.

— Euh... Je n'écoutais pas, désolée Neville...

Le jeune homme agita sa main devant lui comme pour chasser ses excuses.

— Je t'explique... Ginny affirme que les vivets dorés existent toujours, alors que c'est une espèce éteinte n'est ce pas ?

L'air penaud, la brune répondit :

— Il me semble que Ginny a raison, le monde sorcier les a longtemps cru disparu après qu'ils aient été chassés en masse, mais il y a une dizaine d'années, il en a été recensé quelques groupuscules. Il existe des lieux protégés et maintenus secrets spécialement pour eux désormais.

— Ha ! Ha ! C'est ce que j'avais dit ! Mais tu ne veux jamais me croire !

— Je préfère vérifier.

Ginny leva les yeux au ciel.

— Au fait, où est Ron ? questionna Luna de sa voix légère.

Instantanément, les picotements se rappelèrent à Hermione. C'est la rousse qui répondit.

— Il a trouvé un bon travail au Ministère durant l'été, il ne reviendra plus à l'école.

— Oh ! C'est super ! s'exclama Neville

— Oui, on était tous très contents pour lui.

La discussion commença à rentrer dans les détails et Hermione peinait à suivre tout en contenant les larmes qui menaçait de s'échapper.

Alors c'est à cet instant que la porte coulissante s'ouvrit, laissant apparaître un Harry Potter agacé.

— Il y avait un monde fou aux cabinets, par Merlin !

Il s'affala sur la banquette au côté de Ginny et passa un bras autour de ses épaules.

— Oh Mione j'allais oublier ! J'ai croisé McGonagall, elle t'invite à la rejoindre pour la réunion des préfets.

Hermione se leva d'un bond.

— Harry ! Il fallait me le dire !

— Quoi ? Mais c'est ce que...

La jeune fille n'entendit pas la fin de la phrase de son ami, elle était déjà sortie dans le couloir du train, en direction du wagon avant.

Ayant été préfète lors de sa 6e année, c'était sans surprise qu'elle avait appris, par un courrier de la directrice de Poudlard reçu en même temps que la liste de ses fournitures scolaires, être élue préfète en chef.

Ce rôle impliquait des responsabilités, et la première consistait à assister à une réunion de présentation pendant le trajet jusqu'à Poudlard. Hermione ignorait quels autres élèves avaient été choisis, elle espérait seulement qu'ils seraient aussi justes et sérieux qu'elle-même espérait l'être.

Alors qu'elle avançait dans l'allée du train, elle nota qu'elle devait souvent se faufiler derrière un groupe de personnes ou éviter de bousculer un élève qui passait d'une cabine à l'autre. La plupart parlait à voix basse. Mais alors qu'elle passait devant un groupe de 6e année qui s'exprimait un peu plus fort, son attention fut attirée par la conversation. Elle ralentit le pas.

— Je trouve ça quand même incroyable que ce serpent soit parmi nous cette année, s'insurgea une fille aux longs cheveux bruns.

— Surtout qu'il a été jugé et condamné par le ministère de la justice magique ! renchérit une autre.

Hermione sut qu'elles parlaient d'un élève de Serpentard. Nombreux avaient été vus par le Ministère au cours de l'été et reconnu coupable parmi les plus âgés. La Gryffondor en avait aperçu certains sur le quai de la gare. Mais elle savait que beaucoup ne reviendraient pas.

— Je crois que Harry Potter lui-même a plaidé en sa faveur... tempéra un garçon à lunettes.

Malefoy. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi Harry avait été témoigner en sa faveur devant le magenmagot. Cette fouine aurait mérité de finir en prison. Hélas, il n'avait écopé que d'une peine d'un an impliquant des travaux d'intérêt général.

— Il n'empêche ! Son père est enfermé à Azkaban !

— Ça fait peut-être partie de sa peine de faire sa dernière année d'école, qui sait ?

— Quoiqu'il en soit, je ne manquerais pas d'envoyer un hibou à mes parents dès que nous arriverons. Ils ne vont pas du tout apprécier que leur fille fasse sa scolarité avec un criminel.

Alors que les autres approuvaient les dires de la jeune fille, Hermione s'éloigna méditant sur ce qu'elle venait d'entendre.

La plupart des élèves de Serpentard en dernière année ayant des parents partisans du mage noir avaient été condamné pour divers chefs d'accusation. De même pour une majorité de 6e année. Les autres niveaux, plus jeunes, avaient été reconnus non coupable du fait de leur âge et étant sous l'influence de leur parent. Une petite partie de ceux qui avaient été condamnés, comme Goyle pour ne citer que lui, se sont retrouvés à Azkaban. Les autres ont eu des travaux d'intérêt général et sont en liberté conditionnelle. Les Malefoy avaient figuré en première page de la Gazette du sorcier à plusieurs reprises durant l'été, il n'y avait rien d'étonnant à ce que l'école entière soit au courant des antécédents de Drago. Et à en croire les murmures qui s'échangeaient ici et là, il n'était pas le bienvenu. Ainsi, et par l'intermédiaire d'Harry, Hermione savait que Malefoy devait réaliser des travaux d'intérêt général à Poudlard durant l'année. Un détail que la gazette n'avait pas divulgué. Suivrait-il les cours par la même occasion ? Après tout, personne n'avait pu valider ses ASPICs l'année précédente.

Plongée dans ses pensées, le regard rivé sur ses chaussures alors qu'elle marchait, Hermione ne vit pas la personne qui sortait du compartiment juste à sa droite et le percuta de plein fouet.

Elle tendit les mains vers ce garçon qui faisait une bonne tête de plus qu'elle, inquiète de lui avoir fait mal.

— Je suis désolée... Je t'ai fait mal ?

Alors qu'elle allait le toucher, il se dégagea d'un coup.

— Bon sang ! Granger !

Hermione leva les yeux vers le visage de cet inconnu, focalisée qu'elle était sur ce corps qu'elle avait cru blesser.

— Ma... Malefoy ?

Elle avait dit son nom comme une question, surprise de tomber sur lui alors qu'il était justement l'objet de ses pensées. Apparu, face à elle, comme si elle l'avait invoqué.

La dernière fois qu'elle l'avait vu, ils étaient en guerre. Ennemis. La dernière fois qu'elle l'avait vu, il était rongé par la peur, creusé, sombre... Aujourd'hui, la peur avait disparu de ses yeux gris, encore plus clairs que dans son souvenir. Ou bien c'était le noir de ses cernes qui les faisait ressortir si intensément. Ses cheveux blonds, presque blancs, étaient coiffés-décoiffés et laissaient quelques mèches retombées innocemment sur son front. Sa mâchoire crispée faisait ressortir ses traits anguleux sous sa peau pâle. Drago Malefoy toisait Hermione de toute sa hauteur. D'instinct, elle porta sa main droite à son bras mutilé.

— Tu vas bouger ou pas ?

Plantée au milieu de l'étroit couloir, Hermione répondit vaguement:

— Oui… Oui bien sûr.

Elle se décala vers la gauche et Malefoy la dépassa en soufflant, laissant leur bras se frôler au passage. L'air s'emplit du parfum boisé du jeune homme et envahit les narines de la sorcière. Ce vil serpent sentait vraiment bon. Lentement, le cerveau d'Hermione se remit à fonctionner, sortant de sa torpeur. Le choc de revoir celui qu'elle détestait le plus l'avait laissé passive. Elle n'avait pas maîtrisé la situation. Elle regretta immédiatement sa façon de réagir. Il lui avait parlé comme à une moins que rien. Et qu'avait-elle répondu ? "Oui, bien sûr". Hermione se gifla mentalement et se promit de ne plus jamais se laisser faire de la sorte. Elle était une combattante, pas une victime.

Soudain, la raison de sa présence dans ce couloir se rappela à elle : McGonagall l'avait convoquée.

Un sursaut plus tard et la jeune fille marchait à grandes enjambées vers le premier wagon du train, celui des professeurs. Elle chassa dans un coin très reculé de son esprit toutes pensées concernant Malefoy.

Contre toute attente, elle fut la première à arriver. La professeur McGonagall, avec son chignon serré, l'accueillit chaleureusement.

— Miss Granger ! Comment se sont passées vos vacances ?

— Très bien, professeur.

— Parfait ! Cela tombe bien que nous ne soyons que toutes les deux, je voulais vous donner ça.

La directrice lui tendit un petit rouleau de parchemin.

— C'est votre autorisation. C'est un beau projet que vous prévoyez de faire, j'espère qu'il aboutira.

— Merci, professeur, j'espère aussi.

Hermione rangea le papier dans sa poche.

— Vous êtes une élève intelligente, vous apporterez certainement beaucoup à ce monde.

Hermione se mit à rougir. Elle avait toujours admiré Minerva McGonagall et recevoir des compliments de sa part était plus qu'agréable.

— Il me semble entendre des pas…

La porte du compartiment s'ouvrit dévoilant une demie-douzaine d'élèves.

— Entrez ! Allez-y ! Que nous puissions enfin commencer cette réunion.