Dépourvue de tout bon sens, Candice heurta rapidement le sol, s'asseyant sans retenue sur ce sable refroidi par la descente du soleil. Antoine venait de quitter les lieux, énervé, et donnait l'air de vouloir tout arrêter entre eux, par sa faute... Mais qu'est-ce qu'elle croyait au juste ? Qu'Antoine allait l'attendre et l'accueillir bien sagement dans ses bras alors qu'une fois de plus elle s'était montrée égoïste ? Qu'il allait la féliciter de s'être retrouvée au poste et d'en être sortie indemne ? Sûrement pas… Et au lieu de ça, c'était le jackpot ! Candice avait tout gagné… Et la soirée s'annonçait mouvementée. Alors la blonde tenta de rassembler ses esprits avant d'oser se lever et faire demi-tour jusqu'à leur logement. La porte jaune s'ouvrit doucement, laissant apparaître des enfants concentrés sur leurs écrans.

« Coucou… lança-t-elle faussement enjouée.

- Candiiice ! s'enthousiasma Suzanne en jetant sa tablette sur le canapé. Regarde comme j'ai trop bronzé aujourd'hui !

- Wouah ! Pas mal…

- Je tiens de papa, on bronze super vite nous…

- La chance ! se désola Emma. Non parce que la peau de blonde de maman, j'aurais préféré éviter hein…

- T'es toute seule ? s'étonna Jules.

- Oui ! Antoine est parti appeler la brigade. Y avait un problème sur un dossier… mentit-elle en raccrochant ses affaires sur le porte-manteau.

- Ah ok…

- Bon ! Alors cette journée ? »

Et Suzanne se lança dans le récit d'une journée qu'elle estimait presque parfaite. Bah oui, tout était dans le presque parce qu'il avait manqué quelqu'un à leur promenade maritime ! Souriante, Candice l'écouta avec attention, riant aux quelques interventions des plus grands qui venaient compléter l'histoire avec des précisions supplémentaires. Et en effet, leur journée avait tout l'air d'avoir frôlé la perfection… Mais leur soirée s'annonçait bien moins joyeuse et les propos d'Antoine refirent surface dans son esprit. Attristée, Candice attendit la fin de l'histoire pour s'isoler dans leur chambre. Elle s'affala sur le lit et essuya les quelques larmes qui avaient osé franchir la frontière de ses yeux bleus avant de gagner la salle de bain. Et coton en main, Candice ne tarda pas à rencontrer sa fille dans le reflet du miroir. Accolée au chambranle de la porte, Emma l'observait avec dureté. Honteuse, sa mère se contenta d'un maigre sourire avant de frotter ses yeux avec un coton.

« Avec cette chaleur… le mascara a coulé ! mentit-elle en souriant faussement.

- Bien sûr… répondit-elle peu convaincue.

- Ça va toi ?

- Le gros problème à la brigade… C'est un mito, pas vrai ?

Candice la fixa à travers le miroir, les yeux embués par les larmes. Elle finit par baisser la tête, démasquée.

- Il est parti faire un tour… avoua-t-elle à voix basse.

- Vous vous êtes parlé ?

- Il m'a dit des choses horribles…

- C'est normal, il était super énervé…

- De là à me lancer au visage que je méritais pas d'être aimée ?!

- Mais c'est parce qu'il est blessé… Tu lui as menti, tu l'as planté ce matin et tu t'entêtes avec cette histoire, sans te rendre compte que c'est en train de tout gâcher…

- Je voulais juste aider ces gens…

- Et lui voulait juste passer une semaine tranquille en famille et profiter avec toi…

- Mais on m'a piégé cet après-midi ! Sinon, j'aurais fait ce que j'avais à faire et vous l'auriez même pas remarqué…

- Ou alors t'aurais pu limiter le risque en allant prendre soin de toi à la piscine, par exemple…

- Sauf qu'il sait bien que je sais pas rester en place !

- Mais y a ne pas savoir rester en place et finir chez les flics… franchement…

- La situation a dérapé, c'est tout… Mais j'ai jamais voulu en arriver là moi…

- Bah, si c'est un peu de ta faute quand même hein… Tu sais maman, si y a bien un truc que j'ai compris depuis qu'Éloïse est née c'est que dans la vie y a des priorités, et visiblement Antoine a l'impression qu'il en est pas une à tes yeux.

- Sauf qu'il se trompe… Mais quoique je dise j'ai tort de toute façon… Il me voit comme une égoïste qui ne l'aime pas…

- Alors essaye de lui prouver que c'est pas le cas ! »

Emma déserta rapidement la pièce, laissant une mère de famille désemparée. Au fond, Candice savait qu'elle avait raison. Mais c'était trop tard… Alors il fallait désormais essayer de réparer…

...

Depuis le canapé, Jules conseillait sa mère concernant la préparation du repas de ce soir. La blonde avait finalement enfilé une robe fuchsia avec un joli décolleté, espérant attirer le regard de son chéri qui n'était toujours pas rentré… depuis plus d'une heure... En parallèle, Candice s'était investie dans le dressage de la table, faisant en sorte que tout soit prêt pour son retour. Et justement, la baie-vitrée ne tarda pas à grincer…

« Salut ! lâcha Antoine en entrant dans le salon.

Candice sursauta et se contenta de lui jeter un faux sourire avant de se remettre à sa préparation.

Lina te cherchait Suzie !

- Ah bon ? Elle était où ?

- Je l'ai croisé au café. Je discutais avec sa mère quand elle est arrivée… »

Et hop ! Un deuxième coup pour Candice qui encaissait. Donc après le câlin avec Maya, les mots méchants et leur engueulade, voilà le verre avec Fanny…

Soirée de merde ! songea-t-elle avant de se rappeler qu'elle en était responsable.

« Ah ? répondit Suzanne sans entrain.

- Mais j'ai dit que t'étais fatiguée…

- Ouais…

- D'ailleurs, je dois appeler mamie en visio. Ça fait deux jours qu'elle réclame de te voir… On va se mettre dehors ! Tu viens ?

- Tu la salueras pour moi, Antoine ! tenta Candice en souriant.

- Ouais ! »

Sans plus attendre, Antoine rejoignit la terrasse et réceptionna sa fille sur ses genoux. Évidemment, Suzanne milita pour faire la manipulation et déclencha la caméra. Et bien sûr, c'était elle qui devait tenir le téléphone ! Ordre de la petite ! Antoine la laissa faire, ne tardant pas à apercevoir sa mère à l'écran.

« Oh ! Bonjour ma chérie !

- Bonjour à toi aussi maman ! ironisa Antoine. J'suis là hein !

- Roooh ! Bonjour à tous les deux ! T'es content ?

- Hum…

- Alors, comment ça va là-bas ?

- Ça va trop bien ! Il fait chaud…

- Ouais ! Et c'est dingue tu sais, ça n'a quasi pas changé depuis qu'on est venus.

- Ah oui ?

- Je t'enverrai des photos. Je crois que notre hôtel n'existe plus mais, franchement ça a pas trop bougé.

- Bon ! Et alors qu'est-ce que vous faites de beau ?

- Moi je vais tout le temps dans l'eau parce qu'elle est super chaude. Et cet après-midi, on a fait du bateau avec les enfants de Candice !

- Ah mais c'est super ça ! Et Candice, elle va bien ?

- Oui oui ! Et elle te passe le bonjour d'ailleurs !

- Tu parles ! Ils arrêtent pas de s'engueuler et là ils se parlent plus !

- Suzanne ! Les gros mots !

- De se disputer, pardon…

- Qu'est-ce qu'il s'est passé encore ?

- Mais rien ! Tout va bien, t'inquiète pas !

- C'est parce qu'elle s'est retrouvée en prison et que papa a pas voulu aller la chercher.

- Hein ?! Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

- Mais non ! Tu racontes n'importe quoi Suzanne. Elle était pas en prison, c'était juste pour un contrôle…

- Eh bah décidément, on a un sérieux problème avec les flics sur cette île. Surtout si y a quoique ce soit, tu m'appelles et je m'en occupe hein !

- Mais oui ! T'inquiète pas, tout va bien se passer. Et Suzie va aller se doucher maintenant.

- Ok… Bisous mamie… lâcha la petite avant de quitter les genoux de son père.

- Bisous ma chérie !

- Je vais pas tarder non plus maman…

- D'accord. Tu m'envoies les photos hein ?

- Mais oui ! Et ça va ? Tout va bien chez nous ?

- Oui oui ! Comme d'habitude, rien à signaler. Ah si ! J'ai croisé ton père au tennis… Figure-toi que monsieur a retrouvé l'amour ! Je lui souhaite bien du courage à celle-là !

- Tu m'étonnes…

- Puis t'inquiète pas qu'elle a au moins 20 ans de moins que lui…

- Il va encore se faire avoir !

- Oui… Bon en même temps c'est plus nos histoires !

- C'est vrai… Bon j'y vais ! Bonne soirée… On te rappellera dans la semaine !

- Ok ! Et t'essayes de me retrouver le sourire et de m'arranger ces histoires. Tu vas pas gâcher ces vacances hein !?

- Comme si c'était moi le problème… marmonna-t-il avec agacement.

- Antoine !

- Oui ça va, c'est bon… Allez bisous maman.

- Bisous ! »

Antoine raccrocha et remis les pieds dans le salon où sa compagne demeurait. Elle leva la tête depuis le canapé et lui adressa un petit sourire auquel il répondit faiblement.

« Alors ? Comment elle va ?

- Ça va… Comme d'hab quoi… J'vais me doucher ! »

La blonde n'osa pas rétorquer, laissant son amoureux grimper les escaliers et déserter la pièce sans engouement. Jules lui jeta un regard désolé avant de se replonger dans son bouquin. Et à côté, sa mère hésitait à le rejoindre, consciente qu'une tentative d'approche aurait pu se montrer pertinente s'il n'était pas dans le refus total… Alors elle finit par attendre une bonne dizaine de minutes et se retrouva dans l'ouverture de la porte de leur salle de bain privée. Antoine lui jeta un œil à travers le miroir.

« Euh… J'ai préparé une petite salade composée avec Jules et y a de la quiche aussi. Ta préférée… osa-t-elle doucement. Ça te convient pour ce soir ?

- C'est très bien, oui.

- Ok… acquiesça-t-elle en souriant avant de fixer son torse nu. Oh… T'es un petit peu rouge aux épaules… montra-t-elle en s'approchant de lui.

- Je sais… J'ai oublié de remettre de la crème sur le bateau.

- Attends, je vais te mettre de l'après-solaire…

- Nan mais ça va…

- Si si ! On sait jamais… Vaut mieux hydrater maintenant…

Sans attendre son consentement, Candice s'empara du pot de crème et tartina son dos en souriant.

Ça va ? Je te fais pas mal ?

- Nan…

- Voilà ! conclut-elle en embrassant son épaule gauche »

Antoine la fixa à nouveau à travers le miroir, silencieux. Candice n'avait toujours pas décollé sa tête de son épaule et s'apprêtait désormais à enlacer sa taille de ses deux bras. Il la vit fermer les yeux et l'enserrer avec poigne.

« Je suis désolée mon amour… chuchota-t-elle contre sa peau.

- Candice… souffla-t-il.

- J'veux pas qu'on reste fâchés…

- Et pour ça, fallait réfléchir deux fois avant de te jeter dans la gueule du loup cet après-midi et te retrouver chez les flics !

- Je sais… J'ai agi bêtement. Je veux juste que tu me pardonnes et que t'arrêtes de me faire la gueule….

- Papaaaaaa ?! entendirent-ils crier depuis l'étage du bas.

- J'arrive ! cria-t-il à son tour en se décalant des bras de Candice pour quitter la pièce sans un mot. »

Et à nouveau, Candice se retrouvait isolée, seule avec ses bêtises, sa culpabilité et ses regrets… C'était clair, l'ex-commandante allait ramer, mais Antoine finirait par lui pardonner, elle en était certaine !