bonne lecture ;)


« Bien joué, Happy ! » s'écria Natsu, surexcité. Il était sur le point de chuter la tête la première, mais comme à son habitude, le chat fut rapide à la réception. À peine Happy eut-il le temps de stabiliser Natsu que ses ailes commencèrent à flancher.

« Tu pourrais pas accélérer un peu ? » Natsu, impatient, se mit à gigoter dans tous les sens pour essayer d'aller plus vite, mais dans le processus, son coude heurta directement la mâchoire de Happy. Ce dernier s'évanouit aussitôt, perdant de l'altitude.

« Hé, Happy, qu'est-ce qui se passe ? » Voyant que le chat ne répondait pas, Natsu commença à paniquer. Il jeta un regard alarmé vers le sol et constata qu'ils allaient bientôt s'écraser. Sans réfléchir, il enflamma ses poings dans l'espoir de ralentir leur chute. Par chance, un arbre se trouvait juste en dessous, amortissant leur chute. Ils glissèrent le long du tronc, arrachant les feuilles au passage, et finirent par s'écraser au sol, provoquant un bruit sourd qui fit fuir les oiseaux alentour.

Natsu se redressa péniblement pour s'assurer que Happy allait bien, mais il se rallongea aussitôt, sa jambe droite lui faisant atrocement mal. Tout l'impact de la chute avait été absorbé par cette jambe. Frénétiquement, il porta la main à sa jambe et commença à la masser, tentant de dissiper la douleur. Une branche craqua sous le poids de Happy, qui, lors de la chute, s'était retrouvé suspendu. Celui-ci tomba tête la première sur la jambe déjà meurtrie de Natsu.

« Tu veux me tuer, Happy ? » grimaça Natsu.

« Natsu... » murmura le chat, visiblement étourdi. Oubliant sa douleur, le chasseur de dragons se redressa rapidement, laissant tomber le chat.

« Ce n'est pas le moment de faire la sieste ! » Il scruta l'horizon. L'endroit semblait désert, à l'exception de quelques arbres les encerclant et de blocs de pierres uniformément disposés. « On doit vite rattraper ce fumier... »

Il commença à avancer.

« Je suis épuisé... »

« T'inquiète, Happy, on va bientôt l'avoir. » Natsu attendit que le chat se relève, mais celui-ci resta allongé. « Je vais y aller sans toi, alors attends-moi ici, d'accord ? »

« Non, ne me laisse pas ici tout seul ! » Happy se redressa tant bien que mal sur ses petites pattes, mais il semblait avoir du mal à tenir debout.

« Tu vas me ralentir, Happy, et en plus, à cause de toi, on a perdu sa trace. Alors tu restes ici. »

Natsu regretta aussitôt ses paroles. Le félin se mit à sangloter.

« Je... suis désolé, Natsu... »

Pris de remords, Natsu s'accroupit pour se mettre à sa hauteur et lui caressa la tête.

« C'est moi qui suis désolé, Happy. Je n'aurais jamais dû te dire ça. » Les sanglots de Happy se transformèrent en faibles reniflements. « Je ne vais nulle part sans toi. On est partenaires, non ? » Le petit chat hocha la tête, essuyant maladroitement son visage.

Natsu esquissa un faible sourire. Cela faisait une semaine qu'ils étaient partis en mission pour retrouver un voleur de bijoux dans une ville du nord de Fiore. Ce dernier avait dérobé une pierre précieuse à un riche entrepreneur, et leur mission consistait à la restituer à son propriétaire. La récompense offerte n'était pas la principale motivation de Natsu pour prendre cette mission ; elle tombait simplement à point nommé. Il voulait s'éloigner de Fairy Tail en compagnie de Happy, juste eux deux.

Pensant qu'il ne s'agirait que d'une simple formalité, comme tant d'autres missions qu'il avait accomplies, il ne s'attendait pas à ce que celle-ci se transforme en un véritable cauchemar. Cela faisait sept jours qu'ils tentaient d'attraper ce voleur, sans succès.

Natsu commençait sérieusement à perdre patience. À force de tout détruire sur son passage, les dégâts risquaient de coûter plus cher que la récompense. En temps normal, il se fichait de ce genre de détail, car l'équipe entière assumait les responsabilités. Mais cette fois, il était seul avec Happy, et il n'avait plus un rond. Son orgueil l'empêchait d'abandonner la mission, même s'il devait la prolonger. Un bruit le tira de ses pensées. Le ventre de Happy gronda, et Natsu se sentit encore plus coupable. Happy n'était pas en grande forme. Lui non plus, d'ailleurs.

« J'ai aperçu un lac pas loin d'ici », dit-il en se redressant sur ses jambes. « Ça te dit une partie de pêche ? »

Le chat, qui n'avait pas mangé de la journée, retrouva aussitôt son sourire et sa pleine capacité à l'entente de cette invitation.

« Oui, monsieur ! »

Après une partie de pêche mouvementée qui leur permit de rassembler plus de poissons que prévu, les deux partenaires installèrent un campement de fortune au milieu de la forêt pour passer la nuit à la belle étoile. Le soleil commençait à disparaître derrière les immenses arbres qui les entouraient. Happy était surexcité à l'idée d'engloutir tous ces petits poissons. Il en avait tellement l'eau à la bouche qu'il tenait à peine en place. Il partit récupérer du bois pour le feu et revint à toute vitesse.

Le feu allumé, Natsu s'assit sur une pierre, une brochette de poisson à la main, la faisant dorer au-dessus des flammes, tandis que son autre main était posée sous son menton. Les sourcils froncés, il réfléchissait aux événements de la journée. Encore une fois, le bijou lui avait filé entre les doigts. Depuis le début de la mission, il avait l'impression de ne pas être au meilleur de sa forme. Lui qui, habituellement, débordait d'énergie, se sentait à plat. Par deux fois, il s'était évanoui d'épuisement. Quelque chose en lui semblait pomper toute son énergie.

« Tu es en train de brûler mon poisson ! » s'écria Happy, mortifié. Il se précipita vers le feu, mais vacilla en voyant la brochette. On aurait dit qu'il allait perdre connaissance.

Alarmé par la voix de Happy, Natsu sortit de ses pensées et aperçut un voile de fumée.

« Merde... » Il tenta de souffler sur la brochette, mais il était trop tard : le poisson était calciné. Il renfila un autre poisson sur la brochette et croqua un morceau, qu'il recracha aussitôt.

« Ce truc est immonde... » Il jeta la brochette d'un geste de dégoût. Happy lui lança un regard noir. Son délicieux dîner venait de partir en fumée... littéralement. Le chat se laissa tomber au sol.

« J'en ai assez... je veux rentrer à la maison. » Il s'adossa contre la pierre, au bout de sa vie, les larmes commençant à perler au coin de ses yeux.

Ignorant les plaintes de Happy, Natsu commença à embrocher les poissons restants.

« Nous avons encore une mission à accomplir... on doit récupérer le bijou. » Son ton était froid, teinté de frustration. S'il avait utilisé son souffle de dragon sur la brochette, le résultat aurait été le même.

Le chat, maladroitement, se rapprocha doucement du feu qui crépitait. Il tendit son poing. Sa petite paume fermée s'ouvrit sous le nez de Natsu, qui lâcha la brochette, celle-ci étant aussitôt avalée par les flammes rouges. Il écarquilla les yeux.

« Qu'est-ce que... » souffla-t-il, choqué.

« Tada ! Je l'ai récupéré avant de voler à ton secours... » Le petit chat semblait avoir retrouvé sa bonne humeur. Dans sa paume, il tenait une pierre bleue qui étincelait sous les faibles reflets du soleil couchant.

« J'y crois pas... » lâcha Natsu avec un large sourire. « Tu es le meilleur, Happy ! »

Il souleva le chat sans difficulté pour l'étreindre, mais soudain, il cessa tout

mouvement, son sourire s'effaçant.

« Je peux savoir pourquoi tu me le dis que maintenant ? » À l'entente du ton presque menaçant de Natsu, Happy se raidit quelques secondes avant de reprendre ses esprits et de glisser au sol pour échapper à sa prise. Il tenta de se cacher derrière la pierre.

« Je t'écoute, Happy... » articula Natsu en faisant craquer ses doigts.

Le chat se stoppa net et déglutit.

« J-j'allais t'en parler... Je voulais te faire une farce parce que tu as été méchant avec moi... » Il baissa tristement la tête. « Mais maintenant, je veux rentrer à la maison... Les autres de la guilde me manquent... »

Attendri par la déclaration du félin, Natsu esquissa un sourire. Il avait bien mérité cette petite punition. C'était vrai qu'il n'avait pas été tendre avec Happy, et il s'en voulait vraiment.

« La maison me manque à moi aussi. » Il rangea la pierre précieuse dans sa poche. « Demain, on rentre ! »

« Lucy me manque aussi... C'est ennuyeux sans elle. Pourquoi elle n'est pas venue avec nous ? »

Le regard de Natsu se voila aussitôt à la mention de la blonde. Ses poings se crispèrent, sa respiration s'accéléra. Il détourna les yeux. C'était le sujet qu'il tentait d'éviter depuis une semaine... ou plutôt, la personne qu'il fuyait. Il avait cherché toutes les distractions possibles pour ne pas y penser. Et maintenant que la question était posée, il ne savait pas quoi répondre à Happy.

Happy était très attaché à Lucy. Il ne voulait pas se retrouver pris entre deux feux. Cette situation le concernait personnellement, et le félin n'avait pas besoin d'en connaître les détails. Heureusement, Happy, qui n'attendait pas vraiment de réponse, semblait perdu dans ses propres pensées, son attention fixée sur la seconde brochette de poisson qui se consumait lentement dans les flammes.

Elle me manque aussi, tellement. Si tu savais à quel point...

Il ne faut pas que j'y pense. Je ne dois pas…


Soudain, Natsu ouvrit les yeux, pris d'une sensation glaciale qui naissait au plus profond de lui. Cette froideur s'enroula autour de son cœur, engourdissant tout son être. Il se redressa précipitamment, sa panique grandissant à mesure que l'obscurité l'enveloppait. Les ténèbres s'épaississaient autour de lui, et il ne savait plus quel chemin emprunter. Était-il égaré ? Alors qu'il s'interrogeait, une lueur scintilla au loin, attirant son regard comme un phare dans la nuit. À mesure qu'il avançait, la lumière s'intensifiait, le guidant jusqu'à elle. Il finit par l'étreindre, réchauffé par sa clarté.

Devant lui, une porte apparut, dont seule la poignée était visible. Intrigué, il la poussa. Un grincement résonna, le faisant sursauter. Mais, étant un homme d'action plutôt que de réflexion, il franchit la porte sans hésitation. Ce qu'il découvrit de l'autre côté le laissa sans voix : un immense jardin s'étendait devant lui, vêtu d'un feuillage vert émeraude, parsemé de fleurs dansant gracieusement au rythme d'une musique imperceptible. La lune, suspendue comme une auréole éclatante dans le ciel, inondait un long sentier de sa lumière argentée, un passage qui l'appelait irrésistiblement.

Il répondit à cet appel, s'avançant sur le chemin étroit, guidé par des lanternes qui s'illuminaient au gré de ses pas. Chaque pas semblait scellé par un destin auquel il ne pouvait échapper. Même s'il l'avait voulu, il lui était impossible de changer de direction ou de faire demi-tour. Sa présence en ces lieux mystérieux n'avait de sens que pour une seule raison : trouver une réponse. Attiré par l'inconnu, sa démarche se fit plus pressante. Le passage se termina au milieu d'un champ de mille et une fleurs, un tableau d'une beauté saisissante.

Il s'arrêta, ébahi par ce paysage à couper le souffle. Il inspira profondément, laissant l'odeur des fleurs envahir ses sens et l'envelopper dans un cocon de bien-être rare. Cette sensation atteignit son paroxysme lorsqu'il aperçut la plus belle, la plus féerique des créatures.

Ses yeux s'écarquillèrent devant l'apparition d'un être aux traits angéliques. Son cœur s'emballa. À quelques mètres de lui, se tenait une femme à la chevelure d'un blond étincelant, flottant délicatement sur des épaules gracieuses, soutenant une silhouette frêle et élégante, enveloppée dans une robe rose saumon qui lui rappela étrangement la couleur de ses propres cheveux.

LUCY ?

Il rougit.

Lorsqu'elle s'aperçut de sa présence, elle sursauta légèrement, un son mélodieux s'échappant de ses lèvres, le faisant frissonner de la tête aux pieds. La surprise de la « fée » ne dura qu'un instant avant que son visage ne s'éclaire d'un large sourire. La beauté des lieux n'était rien en comparaison de la sienne. Hypnotisé par sa présence, Natsu sortit de sa torpeur lorsqu'elle se mit à danser.

Tout en elle n'était que grâce et volupté. Une irrésistible envie de la toucher l'envahit. Comme si elle avait lu dans ses pensées, elle cessa de tournoyer et s'approcha de lui, tendant sa main. Il voulait tant la saisir, se lier à elle pour l'éternité, mais l'hésitation le retint. Vexée, la jeune femme se déroba, se détourna, puis s'éloigna. Il ne put atteindre qu'une mèche de ses cheveux flottants, qui glissa entre ses doigts.

Un sentiment de solitude l'envahit brusquement. Il se mit à courir après elle, comme si sa vie en dépendait. Elle se retournait parfois, constatant sa progression. Il se lécha la lèvre, un sentiment étrange montant en lui. La voir vulnérable, courir pour lui échapper, l'excitait d'une manière qu'il n'avait jamais ressentie auparavant. Il ne l'avait jamais trouvée aussi belle…

Puis, soudain, elle se volatilisa. Comment cela avait-il pu arriver ? Il la chercha du regard, mais elle avait disparu. L'angoisse le saisit de nouveau, et son cœur s'emballa, cette fois pour des raisons bien différentes. Perdu au milieu de ce champ de fleurs, les ténèbres se mirent à jaillir autour de lui. Il se remit à courir, déterminé à la retrouver. Il ne pouvait pas la perdre. Elle représentait tout ce qu'il désirait et chérissait. Il regretta de ne pas avoir saisi sa main quand il en avait eu l'occasion. Maintenant, elle le narguait, le tentait pour mieux disparaître…

Dans sa course effrénée, il atterrit devant une demeure qui semblait abandonnée. Il y pénétra sans hésitation. À l'intérieur, il emprunta un long couloir qui le mena une nouvelle fois devant une porte. Cette fois-ci, il dut forcer pour l'ouvrir. Incertain de ce qu'il allait découvrir, il mit de côté sa raison et franchit le seuil.

Il se trouvait dans une immense pièce au plafond élevé, soutenu par d'énormes poutres blanches, éclairée par des torches vacillantes. Lucy n'était pas là. Il s'était trompé de chemin. L'endroit lui faisait froid dans le dos, mais il balaya tout de même la pièce des yeux. Au fond, un trône était posé, à peine visible dans la pénombre que les torches n'arrivaient pas à percer complètement. Il distingua une silhouette assise dessus, cachée dans l'ombre. Il voulut s'approcher, mais un bruit se fit entendre derrière lui. Instinctivement, il se cacha derrière l'une des poutres.

Deux hommes masqués pénétrèrent dans la pièce, traînant dans leurs bras... Lucy, inconsciente. Le visage de Natsu se glaça aussitôt. Elle était dans un état pitoyable, ses vêtements déchirés, ses beaux cheveux en désordre. Il voulut intervenir, mais son corps semblait figé, incapable de bouger. Enchaînée, elle fut conduite devant le trône. Les hommes s'inclinèrent profondément, et l'un d'eux parla : « Nous l'avons ramenée. » La silhouette sur le trône se leva, puis s'avança. La lumière révéla enfin son visage dur, marqué par une haine intense.

Natsu resta pétrifié. Son choc redoubla lorsqu'il reconnut ce visage. C'était le sien, à la perfection. Non… C'était lui. Comment cela était-il possible ?

Lucy, qui commençait à se réveiller, tenta de se débattre en vain. Elle leva les yeux vers celui qui se tenait devant elle, puis sanglota doucement, le suppliant : « Ne fais pas ça, Natsu ! »

Son cœur se brisa.

Tu seras mienne, bientôt…

Il se redressa soudainement, un cri angoissé échappant de sa gorge. Son corps tremblait de tous côtés, et sa respiration haletante semblait déchirer l'air autour de lui. Son regard paniqué balaya les environs, mais il n'y avait aucune trace de Lucy. À sa droite, Happy dormait profondément, marmonnant des mots indistincts, perdus dans ses rêves.

Était-ce un cauchemar ?

C'était la première fois qu'il faisait un tel rêve, si troublant, si... réel. Le visage de Lucy lui apparut, baigné de larmes, son regard suppliant gravé dans sa mémoire. Il secoua la tête, essayant de chasser cette image. Ce n'était pas la réalité... Jamais il ne laisserait quiconque faire du mal à Lucy.

Elle me suppliait… Je voulais tellement la protéger… Mais la protéger de quoi ? De moi…

Il prit sa tête entre ses mains, sentant la folie rôder à la périphérie de son esprit. Le poids de l'inquiétude l'écrasait. Happy se redressa doucement.

« C'est l'heure de partir, Natsu ? » demanda le chat, à moitié éveillé, en se frottant les yeux. Natsu sursauta. « Non, pas encore… rendors-toi, je te réveillerai quand ce sera l'heure », répondit-il en tentant de cacher son agitation. « Et toi, tu ne dors pas ? » « Je n'ai pas sommeil. »

Happy se recoucha, fixant le plafond d'un regard absent. « C'est à cause de Lucy ? Elle a des problèmes ? » « Hein ? » Le visage de Natsu se crispa. Comment pouvait-il expliquer ce cauchemar où il était à la fois protecteur et bourreau ?

« Tu parles dans ton sommeil, tu sais », lança Happy avec un sourire malicieux. « Depuis une semaine… » Merde. Natsu vira au rouge. « Bonne nuit, Happy », coupa-t-il sèchement.

Le chat haussa les épaules, puis retourna à ses rêves de poissons, laissant Natsu seul avec ses pensées tourmentées.


Pendant ce temps, Lucy, lasse de l'ennui qui la rongeait, décida de se rendre à la guilde. Le chemin, rendu traître par la fraîcheur mordante du matin, faillit la faire trébucher à plusieurs reprises. L'hiver s'annonçait déjà, et elle songeait à ranger ses vêtements légers pour sortir ses écharpes et ses gants. Le vent froid qui la traversait faisait écho à la grisaille du ciel, où le soleil semblait avoir oublié de briller. Elle frissonna, regrettant amèrement de n'avoir qu'une légère veste d'été pour se protéger du froid. Elle remonta la fermeture éclair et enfouit ses mains dans ses poches, pressant le pas pour se réfugier à la guilde.

Dès qu'elle franchit les portes, la chaleur réconfortante de l'endroit l'entoura, apaisant ses frissons. Lucy a toujours eu en horreur le froid, et cela se reflétait sur son humeur, alourdie par les températures glaciales. La guilde était presque vide à cette heure matinale, ce qui ne la surprit guère. Elle se dirigea vers le bar, où Mirajane, fidèle à elle-même, l'accueillit avec un sourire radieux. Peu importait le temps ou les circonstances, Mirajane ne perdait jamais sa bonne humeur, un baume rassurant pour Lucy.

« Bonjour, Lucy ! Déjà debout ? » lança la barmaid en essuyant la machine à café. Lucy se laissa tomber sur un tabouret, un soupir s'échappant de ses lèvres. « Hmm… » « Tu n'as pas l'air en forme », remarqua Mirajane, laissant son chiffon pour s'approcher du comptoir. « Ce n'est pas ça… Je m'ennuie, tout simplement », répondit Lucy, exaspérée. « Et pour ne rien arranger, je suis sortie avec cette foutue veste qui ne protège de rien. Je suis gelée… »

Mirajane lui adressa un sourire amusé. « Tu dois être bien préoccupée pour oublier de te couvrir par ce froid. Allez, raconte-moi tout ça pendant que je te prépare une bonne tasse de café. » « Merci ! » Lucy se méfiait un peu de l'intérêt soudain de Mirajane pour sa vie privée, mais l'idée d'un café chaud par un matin aussi glacial était trop tentante pour refuser.

« Et voilà, ton café », dit Mirajane en posant la tasse fumante devant elle. Lucy s'en saisit immédiatement, savourant la chaleur qui se diffusait dans ses mains gelées. « Pourquoi tu n'es pas partie en mission avec Natsu ? » demanda innocemment la barmaid.

Lucy, qui portait la tasse à ses lèvres, manqua de s'étrangler. Encore une fois, elle se retrouvait piégée dans une discussion qu'elle aurait préféré éviter. Elle se tortilla sur son tabouret, mal à l'aise. « J'avais… autre chose à faire », répondit-elle avec un air faussement détaché. « Et puis, j'ai assez d'argent pour payer trois mois de loyer. Pourquoi je me fatiguerais en mission avec cet idiot ? »

Elle savait qu'elle mentait, et mal. Il ne lui restait presque plus rien, à peine de quoi payer le loyer. Mais son orgueil l'empêchait d'avouer la vérité. Mirajane, avec son sourire énigmatique, la fixait avec une douceur désarmante.

« Quoi ? » Mirajane se contenta de hausser les épaules, conservant son sourire. « D'accord, j'avoue, j'ai menti. Cet idiot ne m'a même pas proposé de l'accompagner ! Il est parti sans rien dire. Il sait pourtant que je n'ai plus d'argent pour payer mon loyer. À ce rythme, je vais finir à la rue par ce froid glacial, et je mourrai d'hypothermie ! » fulmina Lucy, vidant sa tasse d'un trait, frustrée.

« Tu ne dramatises pas un peu ? Je suis sûre qu'il avait une bonne raison. »

Les paroles de Mirajane n'avaient fait qu'attiser la colère de Lucy. Elle brûlait de savoir pourquoi Natsu l'avait ignorée depuis leur retour des Jeux Magiques. Ce silence pesant était devenu une épreuve qu'elle ne savait plus comment affronter. Si seulement il lui expliquait son comportement, ils pourraient en discuter, mais non, il préférait l'ignorer complètement. Au début, elle avait cru que c'était le fruit de son imagination. Absorbée par son roman, elle n'avait pas prêté une grande attention à son partenaire. Mais peu à peu, elle avait remarqué qu'il agissait de manière étrange en sa présence.

Il se comportait comme si elle n'existait pas lorsqu'ils se retrouvaient seuls. Il trouvait toujours des prétextes pour s'éclipser en toute hâte, évitant soigneusement tout contact visuel avec elle. Le plus douloureux, c'était qu'il partait en mission sans elle, ce qu'il n'avait jamais fait auparavant. Son cœur se serra à cette pensée. Natsu était en train de changer…

Elle était prête à sacrifier son amour pour lui tant qu'ils restaient amis. Son amitié était précieuse, et elle ne pouvait supporter l'idée de la voir se détériorer. Et pourtant, peut-être était-il déjà trop tard. Les choses auraient été plus simples si elle n'était pas tombée amoureuse de lui. Elle aurait pu trouver quelqu'un d'autre dans cette ville, mais non, il avait fallu que ce soit cet idiot. Elle poussa un soupir exaspéré. Cela faisait presque une semaine qu'elle ne l'avait pas vu, et son corps commençait à ressentir un véritable manque.

Elle se gifla mentalement. Il ne manquerait plus qu'elle commence à attendre son retour avec impatience et à se laisser envahir par ses sentiments. Elle frissonna. S'il voulait faire bande à part, c'était son choix ; elle n'était pas prête à lui pardonner. Elle fut tirée de ses pensées lorsque Cana se posa brusquement à côté d'elle, manquant de renverser sa tasse de café. Vêtue de son habituel bikini bleu, Cana semblait de bonne humeur.

« Salut les filles ! » lança-t-elle, le sourire aux lèvres.

« Bonjour Cana, » répondit Mirajane. Lucy se contenta de lever la main en guise de salutation, ravie de l'interruption. Elle fut intriguée par la tenue vestimentaire de la cartomancienne, un frisson lui parcourut l'échine.

« Tu n'as pas froid comme ça ? » demanda-t-elle en désignant le bikini de Cana. Celle-ci haussait les épaules, nonchalante.

« Tu veux boire quelque chose ? » proposa Mirajane.

« Une bouteille d'alcool, la plus grande ! » répondit Cana sans hésitation.

« Je comprends mieux, » murmura Lucy en roulant les yeux. « Il n'est pas un peu tôt pour s'enivrer ? »

« Absolument pas, » répondit Cana en prenant la bouteille. « Il n'y a rien de mieux pour oublier ses problèmes. »

« J'ai du mal à suivre ta logique… » rétorqua Lucy.

Cana but plus de la moitié de la bouteille d'un trait, puis attaqua le reste avec détermination.

« Les boissons alcoolisées ont ce pouvoir, tu sais, » dit-elle avant de recommencer à boire.

« Tu as des problèmes, Cana ? » demanda Mirajane en lui tendant une seconde bouteille.

Si elle pensait qu'elle pourrait obtenir des révélations en lui offrant plus d'alcool…

Lucy arracha la bouteille des mains de Mirajane avant qu'elle ne puisse la donner à Cana.

« La routine, » murmura la brune, l'air sombre. « Un père absent, une maison vide et une vie amoureuse quasi inexistante. »

Cana tenta de reprendre la bouteille, mais Lucy se détourna.

« Une autre bouteille, Mira ! »

« Je dois d'abord servir un client, » répondit Mirajane en s'éclipsant, laissant Cana bouder.

Lucy se remémora le moment où Cana était venue la trouver pour lui demander de l'aide afin de révéler la vérité à son père. Sa propre vie avait été loin d'être facile, mais au moins, elle avait eu la chance de grandir avec son père, même si ce n'était pas le meilleur des exemples. Elle n'avait manqué de rien, sauf d'amour.

Son partenaire était parti en mission sans elle. Peut-être devrait-elle envisager de suivre la méthode de Cana, se tourner vers l'alcool pour oublier ses pensées. Elle fixa la bouteille un moment avant de pousser un soupir désespéré. Même l'écriture n'arrivait pas à la distraire, et elle savait qu'une bouteille d'alcool ne ferait pas le travail. Elle la rendit finalement à Cana.

« Hé Lucy, » l'interpella la brune. « Et si je te tirais les cartes ? »

« Sans façon, » répondit Lucy sans hésiter. Elle savait où cela allait mener.

« T'es pas drôle. Je suis sûre que les cartes te prédiront une prochaine rencontre… peut-être un beau mâle en perspective. »

Elle fronça les sourcils, ne voyant pas ce qu'il y avait de drôle à lui vendre du rêve alors qu'elle était au bout du rouleau. Elle se fichait complètement du beau mâle ; elle voulait juste son… idiot.

Mais canon…

Elle se gifla mentalement.

« Pourquoi ne pas les tirer pour toi-même ? » proposa Cana.

« Les cordonniers ne sont-ils pas les plus mal chaussés ? »

« Tu es bourrée, Cana, » lança Lucy exaspérée.

« Tu ne veux pas savoir ce que te réserve ton avenir… avec Natsu ? » demanda Cana. Lucy s'étrangla avec sa salive. Le sourire de Cana s'élargit.

« Il n'y a pas d'avenir avec Natsu, » répondit Lucy tristement. « Du moins, pas celui auquel tu fais référence. »

« Tu n'es pas amoureuse de Natsu ? » demanda Cana comme si c'était une évidence.

« Non ! » s'écria Lucy avec véhémence.

« Tant mieux alors, » dit la brune en se levant de son tabouret. « Les cartes prédisent qu'il finira avec Lissana de toute façon. »

« Oui, bah c'est sup… » Le temps que la nouvelle parvienne à son cerveau, ses yeux s'écarquillèrent.

De quoi ?

Son cœur se tordit douloureusement. Elle se leva brusquement et saisit Cana par le bras, celle-ci était à la limite du fou rire.

« Oui ? » demanda la brune d'un air innocent en tentant de contenir son rire. Lucy lâcha son bras, embarrassée.

« Qu'est-ce que tu disais déjà à propos des cartes ? »

« Euh, voyons voir… » Cana sembla réfléchir. « Je suis trop bourrée pour me souvenir. »

Elle s'éloigna en laissant Lucy, figée comme une statue. Elle était plutôt fière d'elle, sachant que Lucy avait un penchant pour le dragon et venait de prouver son point.

« Qu'est-ce que c'était, au juste ? » murmura Lucy en regardant la brune sortir de la guilde en riant à gorge déployée. Elle murmura un juron et se laissa tomber sur le tabouret, s'affalant sur le comptoir. Mirajane choisit ce moment pour revenir.

« Où est Cana ? »

« Une bouteille d'alcool, s'il te plaît. Le plus fort que tu as ! » gémit-elle.

Que quelqu'un m'achève !


Il faisait nuit lorsque Natsu et Happy arrivèrent à Magnolia. L'air froid les gifla de plein fouet en sortant de la gare. Leur voyage en train avait été mouvementé à cause du mal des transports du dragon. Avant de monter à bord, il avait laissé passer deux ou trois trains. Bien que Happy ait insisté pour revenir par vol, Natsu avait refusé. L'idée l'avait séduit au début, mais il l'avait vite écartée en voyant l'état de son partenaire. Ils marchèrent en silence.

« Dis, Natsu, » commença le chat, rompant le silence. « J'aimerais passer à la guilde pour saluer Carla. »

« Tu veux y aller maintenant ? » demanda Natsu, las.

« Oui, elle me manque, » avoua Happy, gêné. « Je ne lui ai pas rapporté de poisson, mais le gentil monsieur m'a donné ça. »

Il sortit un petit bracelet de son sac vert et le montra avec enthousiasme. L'exceed était tellement excité par le cadeau qu'il n'eut pas le cœur de refuser.

« D'accord, Happy, allons-y… »

« Aye Sir ! »

En arrivant à la guilde, Happy s'envola avec enthousiasme à la recherche de Carla, laissant Natsu seul. Celui-ci se dirigea vers le bar, son estomac grondant de faim. À peine installé sur le tabouret, une odeur familière envahit ses sens. Menthe poivrée. Le simple arôme fit se contracter son corps, reconnaissant immédiatement cette fragrance qui lui était si chère. Il retint son souffle, essayant de maîtriser l'influence de cette senteur, mais c'était déjà trop tard. Son esprit était en proie à une agitation croissante. Il ferma les yeux pour tenter de se contrôler, sentant la montée de la fièvre émotionnelle.

Une semaine s'était écoulée depuis qu'il avait été privé de ce parfum. L'absence l'avait laissé fébrile et vulnérable. S'il devait réagir ainsi à chaque fois qu'il sentait cette odeur, il savait qu'il ne tiendrait pas longtemps. Il se battait contre cette voix intérieure qui le poussait à céder. "Quelle odeur exquise..." La voix murmure, "Ne résiste pas. Tu finiras par céder."

Il sursauta en réalisant qu'il se parlait à lui-même, et cette voix inquiétante ne faisait qu'aggraver son état. Heureusement, Mirajane interrompit ses pensées avec son accueil chaleureux. "Bon retour, Natsu. Alors, cette mission ?"

Il tenta de sortir de ses tourments. Sa bouche était pâteuse, ses membres engourdis, et il lutta pour trouver ses mots. Heureusement, Happy revint à ce moment précis, se posant sur son épaule. "Carla n'est pas ici, je vais lui rendre visite directement chez elle."

Natsu hocha la tête sans vraiment écouter, son désir de quitter cet endroit était trop pressant. Il se tourna rapidement et sortit de la guilde, laissant Mirajane perplexe derrière lui.

Une fois dehors, il inspira profondément pour se débarrasser de l'odeur persistante de la blonde. Le froid mordant de la nuit l'enveloppa, mais ce n'était rien comparé à l'angoisse qui le tourmentait. Les paroles de Gajeel résonnaient encore dans sa tête, depuis les jeux magiques, il tentait de mettre de côté ces pensées, se persuadant que tout cela n'était qu'une illusion. Lucy était sa meilleure amie, une source constante de tourments et de plaisirs. Il avait juste besoin de temps pour clarifier ses propres sentiments.

Il marcha sans but, le vent glacial faisant crépiter la neige sous ses pieds. L'air frais était une distraction bienvenue alors qu'il enfouissait son visage dans son écharpe pour se protéger. Plongé dans ses pensées, il ne remarqua pas que Happy avait pris son envol pour retrouver Carla.

Ce n'est que lorsqu'il se rendit compte que le chemin ne menait pas à sa maison qu'il leva les yeux. Il vit la silhouette familière de Lucy devant lui. Il crut un instant à une hallucination, mais son odorat ne mentait pas. La vue de la blonde fit surgir en lui une vague de chaleur intense. Elle était là, face à lui, la vue d'elle lui serra le cœur. Il tenta de la contourner sans lui accorder le moindre regard, mais sa présence seule ravivait un désir brûlant et une douleur lancinante. Il devait l'éviter à tout prix.

Lucy, stupéfaite par son comportement, sentit une profonde tristesse l'envahir. Il ne pouvait pas la traiter ainsi après tout ce qu'ils avaient partagé. Les larmes commencèrent à perler à ses yeux glacés. « Natsu. » Sa voix tremblait.

Il s'immobilisa à quelques centimètres d'elle, la manière dont elle avait prononcé son prénom faisant écho à son rêve troublant. Il sentit son cœur se briser en mille morceaux. L'envie de la prendre dans ses bras était presque insupportable.

« Pourquoi tu fais ça ? » demanda-t-elle, sa voix pleine d'émotion. « Tu es tellement injuste. Tu pars en mission sans m'en parler et maintenant tu m'ignores ? Pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? » Sa colère monta, ses paroles devenant plus désespérées. « Tu ne veux plus être avec moi ou tu... »

Avant qu'elle ne puisse finir sa phrase, il la saisit par le bras et la retourna doucement. Si seulement elle savait à quel point il était torturé par cette séparation. Il aurait balayé toutes les excuses pour être simplement avec elle, mais il craignait qu'elle ne comprenne pas. Ses yeux se croisèrent avec les siens, et la vue de ses larmes provoqua une vague de culpabilité. Ils étaient si proches qu'il pouvait sentir son souffle chaud malgré le froid mordant. Il remarqua une odeur d'alcool. Avait-elle bu ? Son état était inquiétant.

En la voyant vaciller, il l'attrapa avant qu'elle ne tombe. Il paniqua, incertain de ce qu'il devait faire. Il la prit dans ses bras, sentant la chaleur de son corps contre le sien, en dépit du froid environnant. Elle était brûlante, et ses vêtements légers ne faisaient rien pour la protéger du froid. Elle tremblait, et l'alcool avait probablement trompé son corps sur la température.

Il la porta sur son dos, ignorant la sensation troublante dans son bas-ventre, et se dirigea rapidement vers un endroit où il pourrait la réchauffer. Il devait la mettre à l'abri, malgré le chaos émotionnel qui le déstabilisait.

Tu peux te mentir à toi-même, mais ton corps lui ne mens pas !


Deylie.