Disclaimer: les personnages appartiennent à Haruichi Furudate

Auteur: LilaCookies

Titre: Liaisons professionnelles, Chap. 16 "Franchir le pas au-delà du fantasme"

Genre: UA, romance, humour, yaoi

Rating :T

Commentaires : Peut-on publier la suite d'une histoire 6 ans après la parution du dernier chapitre? Mon style a probablement un peu changé depuis, il est probable que quelques incohérences apparaissent, l'histoire va peut-être s'orienter différemment… Je pourrais retravailler et republier l'ensemble de l'histoire mais je n'en n'ai pas le courage. En revanche, j'ai envie de vous proposer une fin, même si ce n'est pas parfait et même si plus personne n'espérait le dénouement! Qu'en pensez-vous?

En tout cas, je vous souhaite une bonne lecture.


Le séminaire touche à sa fin. Demain matin, ils reprendront le train après trois journées de modules, de conférences, de travaux pratiques, de jeux et d'ateliers de développement personnel. Trois journées que Keiji Akaashi a vécues comme un marathon sans fin, où chaque conversation ressemblait à un sprint vers une ligne d'arrivée inexistante.

Keiji est épuisé. Cela fait beaucoup trop de monde sur une période beaucoup trop longue. Sa tête est pleine, sa langue est sèche, ses yeux lui piquent. Solitude, je te désire. Même lorsqu'il dort, il n'est pas seul. Kei est certes discret, mais il est là. Il est grand, il prend de la place malgré lui. Un peu comme ce budget annuel qui refuse obstinément de se boucler malgré toutes ses tentatives de coupe budgétaire.

Il est de mauvais poil, et s'il tâche d'être sincère, cela n'est pas dû qu'à la fatigue. Éviter Koutarou n'est pas un jeu qu'il trouve drôle. Keiji est bien trop authentique pour aimer le jeu du chat et de la souris, surtout quand il a l'impression d'être la souris prise dans un piège à émotions.

«Plus qu'une soirée…»

Le jeune homme débarque dans la grande salle destinée à les accueillir pour cette soirée de clôture. L'espace est parsemé de tables rondes, devant une estrade où les différentes animations de la soirée se dérouleront. La scène ressemble à un terrain de jeu pour adultes, un terrain miné où chaque sourire peut cacher une bombe à retardement : les collègues.

Il repère rapidement Bokuto, le directeur commercial, en pleine conversation animée avec quelques collègues, un sourire éclatant sur le visage.

Typique.

Toujours le centre de l'attention, toujours celui qui illumine la pièce. On dirait qu'il est alimenté en électricité solaire. Pas étonnant, vu la façon dont il rayonne…

Keiji soupire et se dirige vers le buffet. C'est un véritable festin qui se présente devant ses yeux, mais il n'a pas vraiment faim. Son esprit est trop embrouillé pour ça. Il se sert un verre d'eau, le sirote comme s'il cherchait à se dissoudre dedans.

- Keiji !

«Merde.»

La voix de Koutarou résonne derrière lui. Il n'a même pas besoin de se retourner pour savoir que cet appel enthousiaste s'adresse à lui. Après tout, qui d'autre aurait une énergie suffisante pour alimenter une centrale nucléaire à cette heure-là ?

- Ah, Koutarou, murmure-t-il pour lui-même, avant de se tourner légèrement pour croiser ce regard familier.

Le grand brun lui sourit, un sourire large, éclatant, comme si rien de tout cela ne le troublait. Comme si leur baiser et leur dispute dans le train n'était qu'un chapitre oublié d'un livre qu'on n'a jamais fini de lire.

- Alors, Keiji, tu t'amuses ? demande Bokuto en s'approchant, un verre de vin rouge à la main.

- Je réfléchis encore à la définition du mot 'amuser', mais je te tiens au courant dès que j'ai une réponse, réplique Keiji, un demi-sourire aux lèvres.

- Ah, tu es dans ton mode 'contrôleur de gestion'. Toujours à faire des calculs. Tu devrais peut-être diversifier ton portefeuille d'émotions, investir dans un peu de joie ?

Piqué au vif, Keiji hausse un sourcil.

«Il est con ou il me prend pour un con?!»

Depuis leur conversation tendue dans le train, leur relation est compliquée et le malaise s'est installé entre eux.

Pourtant, ce soir, il sent une tension différente, une énergie qui vibre entre eux. Cette tension est bien plus forte qu'une simple querelle entre collègues.

Mais elle est aussi bien plus déroutante.

Il scrute un instant les yeux mordorés de son interlocuteur. La malice et les paillettes qui y étincellent le détendent et il se prend au jeuet le taquine:

- Et toi, tu devrais peut-être revoir tes priorités de gestion. Trop de dépenses en sourires inutiles, ça va finir par créer un déficit d'énergie.

Koutarou éclate de rire, un son chaleureux qui chatouille les oreilles de Keiji.

- Trop tard, je suis déjà en liquidation !

- À ce rythme, c'est ta dignité qui va finir en redressement judiciaire, murmure Keiji en secouant la tête, un sourire au coin des lèvres.

Ils se regardent et, pendant un instant, le monde extérieur semble s'évanouir. Le silence qui s'installe n'a rien de pesant. Plutôt comme une parenthèse dans cette longue phrase qu'est la vie professionnelle, une pause bienvenue entre deux bilans financiers.

Le souvenir des mots échangés dans le train lui semble très loin.

«C'est si facile d'être avec lui…»

- Bon, il est peut-être temps que j'aille à mon poste... d'observation!

Sans ajouter ni un regard, ni un mot, Keiji va prendre place à sa table se sentent un peu plus léger.

Keiji s'assoit à sa table, son verre d'eau à la main. Autour de lui, les conversations battent leur plein, le bourdonnement incessant des discussions se mêlant aux éclats de rire.

Il remarque que ses collègues sont déjà engagés dans des débats passionnés sur les meilleures méthodes de calcul pour réussir un audit ciblé. Le sujet est certainement intéressant, mais ce soir, Keiji a bien envie de mettre son cerveau en veille. Il a déjà assez trituré des chiffres pour trois vies.

- Akaashi, tu devrais vraiment essayer ce vin. Je te jure, c'est un investissement en plaisir gustatif! dit l'une de ses collègues, en posant une bouteille à moitié vide devant lui.

Keiji la remercie d'un hochement de tête, mais ne se précipite pas. Il n'a jamais été du genre à se laisser aller aux plaisirs simples sans d'abord les analyser sous toutes les coutures. Pourtant, alors qu'il sirote distraitement son triste verre d'eau, il se surprend à penser que peut-être, pour une fois, il pourrait se laisser porter par l'instant.

Soudain, la lumière se tamise et les jeux de la soirée débutent.

Le jeune homme reconnaît bien volontiers que la soirée est parfaitement orchestrée par la direction et se détend peu à peu pour se laisser porter par la bonne humeur générale.

Il observe, un léger sourire sur le visage, le ballet de ses collègues qui s'agitent lors du quizz inter-table.

Il se sent bien, comme s'il avait passé un cap. Sa brève conversation avec le directeur commercial l'a à la fois grisé et résigné.

C'est antinomique. Mais ça ne l'inquiète pas.

Il réfléchira demain.

Ou pas.

A quoi bon brasser de l'air?

La soirée se passe finalement de manière agréable et le vin lui monte doucement à la tête.

Il boit son troisième verre, ce sera le dernier, ça reste une soirée d'entreprise, nul besoin de se ridiculiser.

Alors qu'il termine son dessert et balaie distraitement la salle du regard, Keiji aperçoit le directeur commercial s'exclure du groupe et se diriger vers la sortie.

«Et si je le suivais?»

Enivrante idée qui lui coupe le souffle.

Son corps est soudain shooté d'adrénaline et son cerveau en train de bouillir.

L'idée de franchir le pas au-delà du fantasme le grise.

«Et si je le faisais? Et si je le suivaissans penser aux conséquences? Juste, je le fais!

Un quart de seconde.

Une demi-seconde.

Il se lève d'un coup.

Son cœur tambourine. Il ne s'entend plus penser.

«Ce que je vais faire doit se lire sur mon visage.»

Il n'est pas sûr de la couleur de ses joues: blanc comme un linge ou rouge comme une tomate?

«Est-ce que je vais le faire?»

En tout cas ses jambes le porte à travers la salle. Personne ne fait vraiment attention, ses collègues en ébullition commencent à danser.

Il a perdu de vu sa cible.

Non, il le voit dans l'embrasure de la porte de la salle de bain.

Il est là.

Il se lave les mains.

Keiji franchit la porte et la referme derrière lui. Il doit ressembler a un serial killer.

Le grand brun lève la tête et sourit en voyant le contrôleur de gestion dans le reflet du miroir.

Il déglutit, sa respiration est forte et fait bouger sa poitrine.

Son regard est intense, presque fou.

Koutarou perd son sourire et se retourne pour lui faire face.

Il va parler mais Keiji ne lui en laisse pas l'occasion et se jette sur sa bouche.

Le directeur commercial ne flanche pas sous l'attaque et y répond avec volontarisme.

Encouragé, il passe sa main derrière la nuque de Koutarou, appuyé contre le lavabo, et s'attache à son dos.

Les mains de l'autre viennent sur sa taille.

Après ce moment d'euphorie, Keiji a l'impression de se liquéfier. Il a été spontané pour une vie entière.

Ses jambes flageolent et il interrompt l'échange.

Ils se fixent.

- Ça va?

- Je…

- On dirait que tu vas tomber dans les pommes.

L'intensité du moment, le choc de ses propres actions, tout cela le submerge. Il n'arrive pas à croire ce qu'il vient de faire.

Il se tient là, face à Bokuto, dont le regard est maintenant partagé entre inquiétude et incrédulité.

— Je... je vais bien, balbutie Keiji, même si ses jambes disent le contraire.

Koutarou, toujours avec ses mains sur sa taille, l'attire doucement contre lui pour le soutenir et rassure son vis-à-vis:

- Hé, respire, dit-il d'une voix calme, presque murmurée. Il n'y a pas de précipitation.

Keiji prend une profonde inspiration, essayant de reprendre le contrôle de ses émotions.

Le contrôleur de gestion a clairement perdu le contrôle.

Leurs corps sont si proches que chaque respiration semble synchronisée. Pour la première fois depuis des jours, il se sent presque en paix.

«Mais, merde, qu'est ce qui m'a pris?!»

- Je ne voulais pas... enfin si… mais non, commence Keiji sans pouvoir achever sa pensée.

- Tu n'as pas à t'excuser, Keiji. C'est à moi de le faire, c'est moi qui suis à l'origine de tout ça…

- Et, tu sais... commence-t-il sans terminer

Keiji relève la tête, le cœur un peu plus lourd qu'il ne voudrait l'admettre.

- Oui, je sais… Ce n'est cependant pas une bonne idée.

Koutarou acquiesce, l'air pensif:

- Pas avec un collègue. Je ne suis pas prêt à franchir cette ligne. Je suis désolé de l'avoir initialement fait. Ça complique tout, tu vois ?

- Oh, je vois très bien. Tu veux garder le bilan des interactions professionnelles parfaitement équilibré, n'est-ce pas ? dit Keiji avec un sourire ironique.

Le directeur commercial sourit, mais c'est un sourire plus doux, plus sincère.

- Exactement. C'est juste que... je ne veux pas que tout devienne... confus.

Keiji lève les yeux au ciel: «Comme si ça ne l'était pas déjà!»

Il hoche la tête et poursuisbon joueur :

- Ne t'inquiète pas. J'ai déjà intégré ça dans mes calculs. Les sentiments sont en phase de dépréciation.

Koutarou éclate de rire à cette blague inattendue:

- Keiji Akaashi, tu es vraiment unique.

- Oui, c'est ce que mon bilan de compétences dit aussi, répond Keiji, en se forçant à garder son ton léger malgré le pincement qu'il ressent au fond de lui.

Un autre moment de silence s'installe, mais cette fois, le contrôleur de gestion sent une certaine mélancolie planer dans l'air. Il fait un pas en arrière, rompant leur proximité et prend une inspiration.

Bokuto sourit, cette fois un sourire sincère, comme pour lui dire que tout ira bien.

Leur moment est interrompu par des voix qui se rapprochent de la porte, et ils échangent un regard complice, partagé entre l'amusement et une légère panique.

- On devrait retourner là-bas.

Koutarou acquiesce, mais son regard trahit une hésitation.

- Keiji... merci. Pour tout. Je veux dire... pour tout ce que tu fais. Tu es vraiment... précieux.

Le jeune homme incline la tête, un sourire en coin.

- Tout le plaisir est pour moi. Et tu sais quoi ? Si jamais tu changes d'avis sur les collègues... j'accepterai volontiers une réévaluation d'actifs.

Keiji s'éloigne, un sourire indéchiffrable sur le visage. Qui sait ? Peut-être que les bilans émotionnels ont aussi leurs marges d'erreur. Peut-on être résigné et pleins d'espoir à la fois?

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