Réponse aux reviews :

Phyladelphia : merci ! j'espère que le chapitre 2 te plaira

Crisalidedange : héhé moi aussi j'aime bien les deux univers donc je me suis bien amusée à les croiser

Note :

Ce chapitre a une illustration qui est dispo sur mon site (lien dans mon profil).


Ma mère s'affole dans tous les sens en époussetant des meubles pourtant parfaitement propres.

- Ils vont arriver Hermione ! Ils vont arriver !

Je reste totalement inerte, me contentant de regarder par la fenêtre de la cuisine. Ron. Voilà une semaine - depuis les résultats de la Sélection - que je n'ai pas eu de ses nouvelles. La plus longue semaine de ma vie. De mon côté, il m'est absolument impossible de le contacter : une horde de badauds et de photographes fait le pied de grue devant ma maison et j'ai beaucoup trop peur qu'un hibou puisse être intercepté.

Dans un coin traîne l'horrible Gazette du Sorcier de la semaine dernière. Celle avec ma tête en première page et mon sourire radieux. Le sourire d'une fille qui rêve d'un avenir paisible avec l'amour de sa vie. L'idiote. Je sais bien pourquoi le journal a choisi de me mettre en avant : je dois être probablement la seule Sang-de-Bourbe de la Sélection, le quota nécessaire à la supercherie. Je dis « probablement » car je n'ai même pas regardé qui étaient les autres Sélectionnées. Pourquoi moi ? Probablement parce que je ne suis pas assez jolie pour faire de l'ombre aux autres Sélectionnées mieux nées. Tout ça me dégoûte et je ne veux pas y penser, préférant ruminer l'absence de Ron. J'aimerais tellement pouvoir lui dire au revoir avant de partir pour le manoir Malefoy. Dans ma tête mon plan est très simple : faire deux courbettes, expliquer au prince Drago qu'il ne me plaît absolument pas et me faire éjecter au premier round. Je rentrerais à la maison et trouverais bien une solution avec Ron. On se mariera et on s'enfuira loin de ce royaume pourri. Ce plan est certes puéril, mais il me laisse au moins une lueur d'espoir dont j'ai bien besoin en ce moment.

Mes grands plans d'avenir sont interrompus par l'arrivée fracassante dans notre cheminée des représentants officiels du Royaume. Ma mère se retient de hurler devant le spectacle de notre salon, parfaitement propre il y a une minute, maculé par la suie. Deux hommes se relèvent péniblement en toussant. Le premier est petit et trapu et son visage ressemble fortement à celui d'un rat. Le deuxième est grand et a de longs cheveux noirs qui lui retombent sur le visage. Il frappe la tête de son acolyte en pestant :

- Espèce de décérébré ! Je t'avais bien dit que ces cheminées moldues ne sont pas adaptées à la poudre de Cheminette !

- Oui maître, couine l'autre représentant.

L'homme aux yeux aussi sombre que son manteau noir jette un regard dédaigneux à notre salon et finit par me dévisager sans aucune retenue.

- C'est vous la Sélectionnée ?

- Hermione Granger, dis-je en tendant la main.

Pas question d'oublier mes bonnes manières. Malheureusement pour moi, le sorcier n'a pas le même sens de la politesse et se contente de renifler avec un air de dégoût :

- Cette Sélection devient vraiment n'importe quoi...

Puis il claque des doigts avec autorité.

- Pettigrow : inspectez moi cette maison et revenez faire votre rapport.

Le petit homme au crâne dégarni s'incline et s'empresse de déguerpir. J'ai l'impression qu'il a l'air assez content de s'éloigner de son maître, qui, de son côté, a enfin décidé de se présenter à ma mère.

- Je suis Severus Rogue, représentant officiel du Royaume Sorcier de Grande-Bretagne. Veuillez m'excuser pour notre arrivée brutale, Pettigrow n'a pas l'habitude des cheminées moldues.

Ma mère lui fait un grand sourire et ne semble pas le moins du monde gêné par l'attitude rustre dudit Severus. Ce dernier sort une longue baguette de bois sombre terriblement élégante. Il va sans dire que cette baguette a été faite sur mesure. Nous les Sang-de-Bourbe, de notre côté, devons nous contenter de baguettes d'appoint peu efficaces. Le représentant se contente d'agiter négligemment sa baguette dans un geste vif et précis et tous les objets se remettent aussitôt en place. Un autre mouvement et la cendre regagne sagement la cheminée. J'en reste bouche bée : c'est vraiment de la très belle magie. Et il n'a même pas prononcé la formule ! Il doit sûrement avoir appris tout ça à Poudlard car ce n'est pas à St Brutus, l'institution des Sang-de-Bourbe et Sang-Mêlé, qu'on nous apprend ce genre de sortilèges !

Severus Rogue sort ensuite un long parchemin et s'assoit avec autorité sur le meilleur fauteuil du salon.

- Je vais maintenant devoir vous lire le règlement officiel de la Sélection.

Je tourne la tête vers l'endroit où se trouvait ma mère mais elle est partie dans la cuisine pour préparer du thé. Je m'assois donc sur un fauteuil pour écouter ce fameux règlement.

- Article 1, commence le sorcier d'une voix monocorde, les Sélectionnées sont désormais considérées comme étant la propriété de la famille royale et ce pour toute la durée de la Sélection.

Je manque de m'étouffer. La propriété ? Mais pour qui se prennent-ils ? Le représentant ignore mon indignation et poursuit sa lecture avec le même ton monotone. J'apprends ainsi que je n'ai pas le droit de sortir du manoir sans l'autorisation du prince, que je ne peux pas solliciter d'entrevues avec lui, ni lui adresser la parole sans qu'il m'y invite. Génial. Je deviens une sorte de meuble en fait.

- Bien entendu, poursuit le sorcier, il vous est interdit de porter atteinte à l'intégrité physique des autres Sélectionnées, sous peine d'être exclue de la Sélection.

La situation devient gênante quand Severus Rogue passe aux derniers articles :

- Les Sélectionnées doivent être célibataires, libres de cœur et toute correspondance ou conversation intime est formellement interdite.

Je lui fais un grand sourire innocent. Il ne manquerait plus que quelqu'un découvre que je suis tout sauf libre ! Je n'ai pas besoin de ce stupide règlement pour comprendre que cela m'attirerait des ennuis. Avant de poursuivre, le sorcier tousse et prend un air gêné :

- Je vais passer à un article un peu plus... personnel. La Sélectionnée jure sur l'honneur être saine de corps et d'esprit et... intimement intacte.

Le visage pâle de mon interlocuteur devient inhabituellement rouge. Je comprends qu'il doit être atrocement gêné et j'en profite pour le provoquer en disant d'une voix forte :

- Si je suis vierge, quoi !

- Voilà.

Je pousse un soupir exaspéré. C'est moi qui devrait être gênée par cette intrusion inacceptable et pas lui. Mais après cette suite de règlementations débiles et choquantes plus rien ne m'étonne.

- Je le suis, rassurez vous, dis je avec un grand sourire. Vous pouvez le noter sur votre parchemin et même l'annoncer à tout le royaume si ça vous chante.

L'homme m'ignore et poursuit d'un ton plus léger :

- Passons aux avantages et récompenses. La Sélectionnée sera nourrie, logée et vêtue durant toute la Sélection. Les six dernières prétendantes intègreront l'Élite et accèderont au grade de Sorcier ou de Sang-Pur selon leur condition initiale.

Je lève les yeux au ciel. C'est avec ça qu'ils appâtent les 35 prétendantes à leur jeu tordu ? Des jolies robes et une belle situation tant qu'elles se comportent comme des petits chiens ? Severus Rogue me fait ensuite signer le règlement avec une plume magique. Je m'exécute sans aucun enthousiasme. Le dit Pettigrow revient à ce moment là et annonce que la maison est sécurisée.

- Très bien, répond Rogue en roulant son parchemin, de notre côté nous avions fini.

Ma mère déboule à ce moment là avec un plateau de thé et de scones et prend l'air atrocement déçue en voyant nos invités prêts à partir.

- Ce ne sera pas la peine, renifle Rogue sans un regard pour le plateau.

Il est décidemment aussi aimable qu'un scroutt-à-pétard. Il se tourne ensuite vers moi :

- Désormais un auror assurera votre protection. Vous aurez la visite d'une styliste qui s'occupera de vous habiller et de vous préparer le jour de votre départ pour le manoir Malefoy qui se fera à 16h précise. Des questions ?

- Oui, une question importante me taraude. Au manoir, est-ce que j'aurais le droit d'aller aux toilettes sans l'accord du prince ou est-ce considéré comme inadmissible venant d'une propriété officielle du royaume ?

Ma mère prend l'air choquée mais le sorcier ne peut s'empêcher de faire un fin sourire sans joie sous son nez crochu.

- Miss Granger, commence-t-il d'un ton doucereux. Je ne pense pas que vous soyez idiote, malgré les apparences. Vous comprendrez vite qu'il est dans votre intérêt de rester le plus longtemps possible dans cette Sélection. Je sais que vous pensez n'avoir aucune chance étant donné votre condition et votre physique disgracieux mais suivez au moins ce conseil : n'éconduisez jamais le prince. Et ce quelque soit sa demande.

Il fait ensuit un bref salut à ma mère et repart aussitôt avec son acolyte par la cheminée. Je reste interdite par son petit discours : je sens que je vais détester chaque instant de la Sélection.

Le surlendemain, comme promis, une styliste du nom de Mme Guipure vient prendre mes mesures à l'aide d'un mètre magique tout en pérorant sur la chance exceptionnelle que j'ai de participer à la Sélection. On croirait entendre le charabia habituel de la Gazette du Sorcier. Elle me passe l'uniforme des sélectionnées : une robe noire classique et plutôt chic et des chaussures à talons qui me font trébucher comme un hippogriffe boiteux. À l'aide d'une panoplie impressionnante de sorts, elle lisse ensuite mes cheveux et les coiffe en une queue de cheval toute simple. Un maquillage discret vient compléter la panoplie. En me voyant dans le miroir qu'elle me tend, je suis soulagée : j'arrive encore à me reconnaître et je me sens même... jolie.

Ces pensées sont vite balayées par la précipitation du départ. J'embrasse ma mère en larme – ma mère pas moi bien entendu – et suis projetée sans ménagement au milieu d'une foule de curieux et de photographes qui hurlent mon prénom. Je m'efforce de sourire tandis que la poigne douce mais ferme de Mme Guipure me traîne jusqu'à un immense carrosse doré. J'ai juste le temps de voir sur la portière le blason de la famille royale - un paon blanc sur un fond émeraude - avant de me faire pousser à l'intérieur, où un troupeau de fille me dévisage avec avidité.

- Hermione !

J'aperçois alors avec étonnement le visage rayonnant de Ginny Weasley. La sœur de Ron se précipite pour m'enlacer et m'indique ensuite une place au fond de la banquette. Je m'assois encore surprise de voir la rousse parmi les Sélectionnée. Pourquoi n'ai-je pas regardé l'intérieur de cette stupide Gazette ? Me voilà bien punie. Les autres jeunes filles forment un groupe bruyant et hétéroclite : il y a des brunes, des blondes, des filles timides, des beaucoup plus extraverties. Elles viennent de tout le royaume. Le choc passé, je réalise la chance que j'ai d'avoir Ginny à mes côtés : c'est une alliée potentielle et surtout elle aura des nouvelles de Ron ! Je m'efforce de ne pas la harceler de questions et l'écoute me parler avec enthousiasme de ses propres préparatifs.

- Ma mère était tellement heureuse ! Tu te rends compte qu'on va aller au manoir Malefoy, ça va être génial !

Je ne partage pas son enthousiasme débordant mais cela me remonte un peu le moral de la voir aussi heureuse. Nous n'avons jamais été particulièrement proches, étant donné qu'elle était dans la classe en dessous de la mienne, mais le trajet me donne l'occasion de mieux la connaître. Au bout de ce qui me parait un temps infini, la rousse aborde enfin le sujet qui me brulait les lèvres :

- Oh mais je ne t'ai pas dit ce qui arrivait à Ron ! Comment ai-je pu oublier ? Il va se marier !

Je reste un instant beaucoup trop choquée pour ne serait-ce que faire semblant que cette annonce n'est pas en train de me briser le cœur. J'articule difficilement :

- Quoi ! Mais... Mais avec qui ?

- Lavande Brown ! C'est une sorcière dont le frère travaille au ministère dans le même service que Percy, c'est lui qui l'a présenté à Ron. On est tous tellement contents. C'est une chance immense pour lui. Et puis elle est très gentille même si personnellement je ne la trouve pas très maligne.

Je n'écoute déjà plus. Je me fiche totalement de savoir qui est cette Lavande Brown. Elle est une sorcière. Elle pourra offrir un avenir à Ron, un autre avenir que ce qui l'attendait avec moi, une Sang-de-Bourbe. Je passe le reste du voyage dans un espèce de brouillard, laissant Ginny sympathiser avec son autre voisine, une blonde à l'air rêveur du nom de Luna. Ron va se marier. J'ai beau me le répéter je n'arrive toujours pas à y croire, cela ressemble à un cauchemar.

Arrivées au château, nous sommes accueillies par un gardien à l'air revêche qui nous ouvre l'immense grille en fer forgé. Au bout d'une impeccable allée d'ifs, s'étale sous nos yeux le manoir : une imposante bâtisse faite de pierres sombres. Malgré la magnificence du lieu, je me sens comme prise au piège.

- Admirez ma future maison les filles, lance l'une des Sélectionnées avec aplomb avant d'emboiter le pas au gardien.

Nous échangeons un regard consterné avec Ginny avant d'exploser de rire. La jeune fille qui a parlé a des cheveux courts et noirs et s'est visiblement arrangée pour raccourcir sa robe magiquement. Nous lui emboitons le pas puis tout s'enchaine assez vite. Nous sommes accueillies dans le hall par Severus Rogue, toujours aussi peu aimable :

- Vos elfes de maisons attitrés vont vous mener à votre chambre dans l'aile réservée aux Sélectionnées. Vous vous y habillerez et serez ensuite conduite au Boudoir pour votre première interview officielle. Puis nous nous retrouverons pour le diner dans la Salle à Manger. Le couvre-feu est à 22 heures précise. Il vous est formellement interdit de quitter vos chambres après cette heure.

J'ai l'impression qu'il passe son temps à proférer des interdictions.

- Et quand allons nous voir le Prince ? demande une Sélectionnée.

Rogue la regarde comme on aviserait une bouse de dragon sur son chemin.

- Le prince vous sera présenté officiellement demain. Il a souhaité vous laisser ces quelques heures pour prendre vos marques et vous habituer au lieu.

- C'est adorable à lui, soupire une blonde derrière moi.

Je retiens difficilement un rire. Une armée d'elfes de maison déboule ensuite et chaque elfe emmène sa Sélectionnée. Je dis au revoir à Ginny avec regret et fais la connaissance de Winky, une minuscule elfe aux yeux globuleux qui me prie de la suivre d'une toute petite voix. Nous gravissons un escalier imposant recouvert d'une épaisse moquette verte. Les murs sont presque entièrement dissimulés par des tableaux représentants des sorciers majestueux qui nous toisent avec autorité. Ma chambre se trouve au bout d'un couloir pour l'instant encombré par les Sélectionnées et leurs elfes. La porte est surmontée d'un tableau représentant une jeune bergère aux joues rouge et aux nattes blondes.

- Le mot de passe ? dit-elle d'une voix fluette.

- Rubis, répond Winky.

La porte s'ouvre sur une chambre entièrement tapissée de rouge. J'en reste bouche bée. Un énorme lit à baldaquin trône au milieu de la pièce et la pile impressionnante de coussins et d'oreillers qui le recouvre me donne envie de me jeter dedans sans plus de ménagement. Je me retiens et m'avance dans la pièce, découvrant au fur et à mesure un délicat mobilier de bois clair : la chambre est vraiment meublée avec goût. Dans un coin, une coiffeuse surmontée d'un miroir contient un ensemble de poudre, de flacons et de produits dont j'ignore totalement l'utilité. J'ai à peine le temps de me remettre de cette vision que Winky ouvre une porte coulissante qui dévoile une penderie entièrement remplie de robes, de chaussures et d'accessoires.

- Bienvenue dans votre chambre, Miss Granger. Vous pouvez m'appeler à n'importe quelle heure du jour et de la nuit, il vous suffit de prononcer mon nom à voix haute.

Un tel luxe commence à me faire tourner la tête. Je pense avec nostalgie à la modeste maison que je partage avec ma mère et à ma petite chambre simple mais confortable sous les toits.

- J'ai un peu chaud... murmuré-je en me dirigeant vers la fenêtre.

Winky se précipite au devant de moi et ouvre la fenêtre en grand. Je m'avance sur un délicat petit balcon et admire la vue qui s'offre à moi : un beau jardin de buis entourant un bassin et, au loin, la forêt du domaine Malefoy. Tout ici est beau, imposant et mystérieux.

- Il faut vous habiller maintenant, Miss, me couine Winky de sa petite voix d'elfe.

C'est donc vêtue d'une sublime robe ivoire brodée de perles que je pénètre dans l'anti-chambre du Boudoir. Ginny est déjà là, dans une robe bustier bleu sombre, et papote gaiement avec Luna.

- Tu est très belle Hermione, me complimente la blonde.

Je lui souris et m'apprête à lui répondre quand je croise le regard noir de la brune qui s'est vantée tout à l'heure. Elle dit assez fort pour que je l'entende à sa voisine :

- Les Sang-de-Bourbe ne devraient pas être admises dans la compétition, c'est vraiment une honte.

Compétition. Au moins, c'est clair.

- Laisse tomber, chuchote Ginny. Elle s'appelle Pansy Parkinson et vient d'une des plus ancienne famille du royaume. Résultat, elle se considère déjà comme la grande gagnante et prend tout le monde de haut !

Grand bien lui fasse ! Je décide d'ignorer Pansy. Si sa seule ambition est de devenir la potiche du prince, je lui laisse le rôle avec plaisir.

Severus Rogue m'appelle ensuite dans le Boudoir et je me retrouve dans une pièce magnifique recouverte de dorure. Une femme à la tenue clinquante et dont la tête est recouverte d'une étrange montagne de boucles blondes m'accueille avec un grand sourire.

- Entre Hermione ! Je m'appelle Rita Skeeter et je suis chargée par la Gazette du Sorcier de faire ta première interview. Tu vas bien ?

Je hoche la tête et la journaliste me prend en photo puis m'indique un divan rose où je m'assois. Sans cesser de sourire - ça en devient presque effrayant - elle sort un nouveau rouleau à parchemin de son sac en peau de crocodile .

- Ça te dérange si j'utilise une Plume à Papote ?

Son ton est celui d'une femme qui a l'habitude qu'on lui obéisse. J'avise une plume d'un vert acide qui flotte dans l'air et secoue la tête.

- Parfait ! Alors Hermione, raconte moi tout sur toi, je veux tout savoir !

- Je...

Je m'arrête en voyant la plume gratter furieusement le parchemin. Je n'ai pas dit un seul mot ! Je lis en tendant le cou :

- « C'est une jeune fille timide mais confiante qui se tient devant nous. Hermione Granger a seulement 18 ans mais déjà toute la grâce d'une future princesse. »

Rita enchaîne sans jeter un seul regard à la plume :

- Tu es fière d'être la seule Sang-de-Bourbe de la Sélection ? Ça a dû être une surprise pour toi.

- Et bien...

La plume continue à écrire.

- « J'ai été surprise, bien sûr, mais aussi incroyablement émue. J'ai tellement de chance de pouvoir représenter les Sang-de-Bourbe dans cette Sélection. »

- Je n'ai jamais dit ça !

- Ne t'occupe pas de la plume, me coupe Rita.

Le simulacre d'interview se poursuit mais j'explose en voyant la plume indiquer que « j'aimerais tellement que mon père soit encore en vie, je vais aller au bout pour lui, pour qu'il soit fier de moi, là où il est ».

- Vous vous prenez pour qui ? Je vous interdis de parler de mon père !

Rita me jette un regard dédaigneux par dessus ses lunettes incrustées de pierres précieuses et ricane d'une voix tout à coup beaucoup moins aimable :

- Voyons Hermione, nous savons toutes les deux que tu as très peu de chance face à tes concurrentes. Le peuple veut de l'émotion, de l'espoir. Il faut que tu lui racontes une histoire. Là tu ne me donnes rien, je suis obligée de broder un peu.

- Je me fiche complètement de ce que veulent les gens !

- Détrompe toi ma petite, réplique Rita en haussant la voix, l'avis du peuple est très important pour la famille royale. Après tout, la Sélection est là pour asseoir leur légitimité. Tu ne gagneras certainement pas mais avoir la sympathie de la population te permettra au moins de ne pas te faire éliminer tout de suite.

Elle ponctue son petit discours par un grand sourire qui me donne envie de vomir. Je me contente de la toiser avec mépris et quitte le Boudoir, soulagée.

Durant le dîner, je reste muette et n'arrive même pas à apprécier les plats pourtant délicieux qui nous sont présentés. Je veux juste aller me coucher le plus vite possible. J'écoute pourtant malgré moi le bavardage des autres Sélectionnées. Ma voisine de droite est une blonde délicate aux traits fins et au port de tête altier. Elle vient sans doute d'une famille de Sang-Pur. Elle est l'archétype de la jeune fille de bonne famille et j'apprends au détour de la conversation qu'elle s'appelle Daphné Greengrass et que son père est un ami du roi. Sans aucun doute un très bon parti pour le prince. Rita Skeeter a raison : je vais me ridiculiser devant tout le peuple. Moi qui pensais sortir sans encombre de toute cette histoire, je suis en train de réaliser que la Sélection risque de ruiner ma réputation à tout jamais.

Le dîner se finit à l'heure précise indiquée par Rogue et je rejoins ma chambre avec soulagement. Je laisse Winky me changer et me passer une délicate chemise de nuit en soie avant de m'écrouler sur mon immense lit à baldaquin. Une fois la lumière éteinte, je reste une bonne heure à me retourner entre mes trop nombreux coussins. J'aimerais tellement revenir en arrière, quand ma vie était simple et que j'avais pour seuls problèmes mes devoirs à faire. Mais penser à St Brutus me ramène inévitablement à Ron. C'est là que nous nous sommes rencontrés. C'est là qu'avec Harry nous sommes devenus un trio inséparable, avant que le brun ne devienne sorcier-soldat et que des sentiments naissent entre Ron et moi.

Harry. Il doit se trouver quelque part dans ce manoir mais je n'ai aucun moyen de le contacter et lui sait bien que je suis ici. Si nous ne nous sommes toujours pas vus c'est que c'est probablement impossible de son côté aussi. Même cet espoir là s'amenuise et je me sens encore plus seule.

Lassée de ne pas trouver le sommeil, je finis par me relever et fais les cents pas dans ma chambre. J'ai trop chaud et je sens comme un poids qui oppresse ma poitrine. Je connais cette sensation, je l'ai déjà ressentie à la mort de mon père : je suis en train de commencer une crise d'angoisse. Ouvrant ma fenêtre, je laisse l'air de la nuit me rafraîchir mais sans succès. Le jardin est délicatement illuminé par des petits lampions dorés.

Ron. Comment ai-je pu me laisser embarquer dans cette histoire ? Il va se marier et quand je rentrerais chez moi il ne sera pas là pour m'accueillir et me réconforter de ses bras. C'était sans doute la dernière fois que je le voyais, ce soir là dans ma chambre, quand il m'a dit qu'il m'aimait. Le poids qui m'oppresse se fait plus lourd et je sers la balustrade avec force. Je ne pensais pas que ça pourrait me faire aussi mal. Comment a-t-il pu me faire ça ? Comment a-t-il pu me laisser espérer qu'il y avait encore un avenir possible entre nous ? Mais je n'ai plus d'avenir et je me sens totalement prise au piège.

Il faut que je parte. Je n'ai pas de baguette, pas d'affaire accessible et chaque entrée est gardée par des sorciers-soldats. Il va falloir revenir aux anciennes méthodes. Arrachant mon drap, je le noue à la balustrade et m'en sers comme corde. Le jardin est toujours calme et un peu trop lumineux à mon goût. Heureusement les sorciers qui gardent l'entrée la plus proche sont occupés à papoter sur la meilleure manière de réaliser un Stupéfix. J'avise un bosquet au loin : si j'arrive à l'atteindre je devrais pouvoir rejoindre la forêt sans me faire voir. Avec un peu de chance, les sorts qui protègent le manoir sont faits pour empêcher une intrusion mais pas une sortie. M'aplatissant sur le sol, je me met à ramper vers le bosquet, le cœur battant à tout rompre. C'est la chose la plus dangereuse et stupide que je n'ai jamais faite.

- Que faites-vous ici mademoiselle ? dit alors une voix plus surprise qu'inquiétante.

Je redresse la tête et reconnait sans aucune peine, à la lueur des lampions, le beau visage et les cheveux d'un blond presque blanc du prince Drago.

à suivre...