Merci pour les encouragements ! Je vois que vous avez aimé voir Hermione se battre ^^ Ce chapitre est un tournant dans l'histoire à plus d'un titre, mais je n'en dis pas plus. Enjoy !
Les arbres du parc m'abritent de leurs larges branches mais cela ne me suffit pas. J'aimerais creuser un trou et m'enterrer dedans pour au moins une dizaine d'année. Après le petit épisode du duel, je suis restée quelques minutes immobile, à essayer de reprendre mes esprits, puis j'ai filé au fin fond du parc dans l'idée de ne surtout pas croiser Drago. Le calme et la beauté du lieu où je me trouve n'arrivent cependant pas à m'apaiser.
J'aimerais tellement oublier cet incident mais malheureusement c'est impossible. Si après notre premier baiser, j'avais réussi à me trouver des excuses, je réalise que cela va être plus difficile. J'ai répondu à ce second baiser. Pire, cela m'a plu. Je dois être honnête avec moi-même, fini les faux-semblant. Est-ce que Drago me plaît vraiment ? Est-ce que c'était juste la tension du moment ? Je ne sais même pas répondre à ces questions, je sais juste que le simple souvenir de ce baiser m'emplit d'un mélange de désir de recommencer et de souffrance.
J'erre sans but dans la forêt. Ce qui me fait le plus mal, c'est de penser à Ron. Aucun de ses baisers ne m'a fait autant d'effet. Merlin, est-ce que je vais laisser ce simple moment d'égarement remettre en question tout ce que nous avons construit ? Je m'accroche à l'idée que Ron et moi, nous avons quelque chose de bien plus fort, de bien plus profond. Je me souviens de la première fois qu'il a évoqué l'idée de notre mariage. Nous étions dans ma chambre et de but en blanc, il a commencé à me parler de la cérémonie, de la tenue qu'il porterait, de l'endroit où on habiterait après. Rien que le fait d'en parler faisait briller ses yeux bleus. Moi de mon côté, je le réfrénai, expliquant à quel point notre union était impossible. Mais malgré tous mes arguments, rien ne pouvant anéantir son enthousiasme et surtout cet éclat dans son regard. Ces souvenirs me torturent.
Il faut que je parte. Cette certitude m'envahit d'un coup. Je dois partir, retrouver Ron et l'épouser sur le champ. Je suis une sorcière maintenant, je peux le faire ! Qu'importe qu'il ne m'ait pas donné signe de vie jusqu'à présent, qu'importe que je ne sache pas ce que je trouverai chez moi à mon retour. Je vais allez voir Drago et lui expliquer que je m'en vais, il n'osera pas me retenir de force tout de même ?
- Mademoiselle, qu'est-ce que vous faites là ?
La question vient d'un auror à la corpulence fine et élancée, qui patrouille dans la forêt. Malgré son gabarit, son air patibulaire et la baguette qu'il tient d'une main ferme me refroidissent. J'ai dû m'éloigner un peu trop, perdue dans mes pensées. Je lui bredouille des excuses et retourne vers le manoir d'un pas rapide. Malgré mes progrès en duel, je ne tiens pas à affronter un auror surentraîné.
Le dîner est un véritable supplice. Je n'ai absolument pas faim et me contente de jouer avec ma nourriture. Drago et Daphné se sont lancés dans un débat passionné sur la musique classique, dont je ne comprends pas un mot. Malgré sa conversation, le prince me lance des regards que j'évite avec soin. À un instant, nos yeux se croisent pourtant et je suis parcourue d'un frisson. Merlin. Quelqu'un va forcément se rendre compte du trouble dans lequel je me trouve. Pourquoi suis-je incapable de me contrôler ? Je prétends ne pas me sentir bien et quitte la salle à manger sous l'oeil goguenard de Pansy.
Les jours suivants, nous reprenons nos balades avec Drago, sans évoquer le fameux duel. Nous enchaînons aussi les séances avec Rogue, qui, à mon grand plaisir, nous fait reprendre les entraînements de sortilège. Cela a le mérite de me vider la tête et de me défouler contre Parkinson. Mon duel avec le prince m'aura au moins permis de progresser à ce petit jeu là.
Au bout d'une semaine, Drago et moi avons épuisé un nombre considérable de sujets de conversation, du plus sérieux au plus léger, mais nous n'avons toujours pas évoqué notre second baiser. Il se contente de m'adresser des regards sibyllins qui me font tressaillir. Je ne sais pas si le fait qu'il fasse comme si de rien n'était m'énerve ou me soulage. De mon côté, malgré ma décision dans la forêt, je ne suis toujours pas partie. Je n'y arrive pas. D'une part, cela nécessiterait d'expliquer ma décision au prince et cette explication m'apparaît insurmontable; d'autre part, je réalise peu à peu que j'en suis incapable. Je n'arrive pas à imaginer ne plus le voir, ne plus passer du temps avec lui. J'aime ces moments que nous passons tous les deux, j'aime me sentir spéciale à ses côtés. Je ne sais pas quels sont mes sentiments à son égard, ni si cette relation un peu étrange est tout à fait normale mais qu'importe.
Au fur et à mesure des jours, je sens que notre lien se renforce et je repousse d'autant mon départ. Drago ose maintenant me partager des choses personnelles comme sa relation difficile avec ses parents, son appréhension à l'idée de la fonction qui l'attend ou encore l'organisation du royaume magique. C'est lors d'une de nos promenades, qu'il me pose une question un peu particulière :
- Dites moi Hermione, quand est-ce que vous avez su que vous aviez des pouvoirs magiques ?
Je ne m'y attendais pas mais le souvenir est tellement gravé dans ma mémoire, qu'il n'est pas très difficile à convoquer.
- Quand j'avais neuf ans. Ma mère m'avait confisqué mon nounours. Je l'ai fait léviter jusqu'à moi quand elle avait le dos tourné. Elle a mis un peu de temps à comprendre ce qui se passait. Au début, elle pensait que j'étais possédée par démon, ou quelque chose de ce genre.
- Possédée par quoi ?
J'écarte la question de la main :
- Un truc moldu. Disons que c'est assez effrayant. Le problème, c'est que jusqu'à ce que je reçoive ma lettre pour St-Brutus, nous n'avions aucune idée de ce que c'était. Pour les moldus, les manifestations magiques peuvent être franchement terrorisantes, ils n'y sont pas du tout préparés.
- Je n'avais jamais pensé à cela, dit Drago d'un air pensif.
Si cela peut le faire réfléchir sur le danger qu'il y a laisser les nés-moldus avec des pouvoirs dans une relative ignorance et à les traiter comme des moins que rien, c'est toujours bon à prendre. Il poursuit :
- Jusqu'à ce que je vous rencontre, je pensais que les Sang-de-Bourbe étaient dotés de très faibles pouvoirs.
J'en reste soufflée. Qui a pu lui raconter des idioties pareilles ?
- Et vous avez changé d'avis ?
- Disons qu'un jet d'eau dans la figure et une violente chute en arrière ont achevé de me convaincre, si ce n'était pas déjà fait.
Il m'adresse un regard complice. J'essaye de ne pas sourire trop largement, je me sens quand même un peu coupable de ce petit incident. Je prends un ton faussement apeuré :
- Vous allez me dénoncer pour cette agression inqualifiable ?
Drago me répond du tac au tac :
- J'hésite plutôt à vous nommer à la tête de ma brigade d'auror, vous auriez quelques petites choses à leur apprendre sur les techniques de combat.
Après un silence amusé, je le relance :
- Et vous, comment avez-vous découvert que vous aviez des pouvoirs magiques ?
- Oh moi c'était l'inverse, mes précepteurs ont guetté pendant toute mon enfance la moindre manifestation de mon pouvoir. Mes parents étaient très inquiets de ne rien voir arriver. Comme j'ai un esprit de contradiction assez développé, je leur ai caché ce que je savais faire pendant plusieurs années. Cela les a rendu fou.
Il m'adresse un petit sourire en coin, comme pour me dire qu'il s'agit d'un secret que je ne dois pas révéler. Je me sens alors comme son alliée. C'est paradoxal quand on repense à l'étrange marché que nous avons passé lors de mon deuxième jour au manoir. Je croyais avoir été bien stratège à l'époque mais je commence à comprendre que Drago n'a besoin de personne dans cette quête dans laquelle il s'est lancé. C'est seulement son affection pour moi qui m'a fait rester jusqu'à présent, pas les hypothétiques renseignements sur les autres Sélectionnées. Renseignements que je ne lui ai jamais vraiment fournis d'ailleurs. Petit à petit, je commence à un entrevoir un avenir où Drago et moi serions véritablement amis et cela m'emplit de joie. Peut-être que cette Sélection n'est pas qu'une parenthèse, peut-être que nous pourrons nous revoir ensuite.
Pourtant, tout bascule le jour suivant, alors que je me décide à faire un tour à la bibliothèque. Je n'ai pas réouvert le carnet de Tom Jedusor mais l'objet m'intrigue. Il doit bien y avoir quelque part, un ouvrage qui mentionne le sorcier, et s'il existe, il a toute les chances d'être au manoir. Comme toutes les enquêtes, celle ci m'obsède et je suis prête à tous les risques pour assouvir ma curiosité. Je suis en train de traverser le couloir qui mène à la bibliothèque quand j'entends le léger rire si reconnaissable de Daphné, celui qui ressemble au pépiement d'un oiseau. Qu'est-ce qu'elle peut bien fabriquer ici ? D'habitude la jeune femme reste dans l'aile des Sélectionnées avec Pansy, Romilda, Parvati et Cho. Je suis la seule qui ose vadrouiller ainsi dans le manoir.
Suivant le rire de Daphné, qui se mêle désormais aux chuchotements d'une conversation, je tombe sur une sorte de bureau richement décoré et trouve la jeune fille assise sur un canapé doré, en compagnie du prince Drago. Ils ont l'air d'être dans une de leur conversation passionnée. Je n'entends pas ce qu'ils disent, mais je vois distinctement la main de Daphné sur la cuisse de Drago et cette vision ne me plaît pas du tout. Soudain, elle glousse à nouveau en passant une main dans ses longs cheveux blonds puis se penche vers le prince et l'embrasse. Je sens comme une pointe s'enfoncer dans mon estomac. Le jeune homme, loin de la repousser, pose sa main sur son visage et répond à son baiser. La pointe remonte me vriller le coeur.
Après une courte étreinte, le couple se sépare en souriant et je vois le visage un peu rougissant de Daphné et ses yeux qui se baissent avec pudeur. J'ai une furieuse envie de la gifler. Ses yeux se relèvent bien vite et se plantent soudainement dans les miens. Son beau visage prend un air choqué :
- Hermione ?
Drago se retourne vers moi en un mouvement alors que je bredouille :
- Pardonnez moi... Je ne voulais pas...
Je recule de quelques pas en baissant les yeux et me cogne dans un buffet en marqueterie alors que le couple, surpris, se lève. Daphné a vite repris ses esprits et me pointe d'un doigt accusateur :
- Tu nous espionnais !
Je ne réponds pas et tourne les talons. Je suis tellement confuse de ce qui vient de se passer que Drago ne met pas longtemps avant de me rattraper. J'avance d'un pas rapide dans un couloir quelconque, sans savoir où je vais, et il me suit d'un pas ample :
- Hermione, où est-ce que vous allez ?
Je finis par m'arrêter et par me tourner vers lui. Je ne vais pas pouvoir fuir éternellement. J'ai déjà passé trop de temps dans ce manoir à l'éviter, pas question que cette situation se reproduise. Moi qui était si fière de l'équilibre auquel nous étions arrivés, tout est en train de voler en éclat.
- Vous êtes encore venus pour vous excuser ? dis-je d'une voix accusatrice. Vous passez votre temps à ça.
J'aimerais ne pas avoir un ton aussi accusateur. Bien malgré moi, je repense à notre dernier baiser, ce qui m'empêche de réfléchir correctement. Drago a un air surpris gravé sur son beau visage :
- M'excuser ? Mais de quoi ? Je ne vous ai rien promis Hermione. C'est plutôt vous qui devriez expliquer votre intrusion dans mon bureau.
Je baisse les yeux. Il a raison sur toute la ligne. Je voudrais juste que cette conversation se termine et pouvoir rentrer dans ma chambre m'ensevelir sous ma couette pour réfléchir à ce que je viens de voir. Je marmonne d'une voix basse :
- Je suis désolée.
Un silence s'installe. Je reprends mes esprits et plante mon regard dans le sien avec plus d'assurance :
- Vous pouvez... aller rejoindre Daphné, je ne ferais plus intrusion dans votre bureau.
Pourquoi ma voix tremble-t-elle d'émotion ainsi ? A la vérité, je ne sais même pas ce qui me met dans un état pareil. Drago prend son temps pour répondre, en me regardant de ces insupportables yeux qui me donnent l'impression qu'il lit dans mon esprit :
- Vous êtes incompréhensible Hermione... Est-ce que vous êtes... jalouse ?
- Bien sûr que non !
J'ai parlé un peu trop fort pour que ce soit naturel. Drago hausse un sourcil :
- Si j'avais su, j'aurais joué cette carte plus tôt...
- Joué ? C'est un jeu pour vous ?
- Hermione... sourit le prince. Je vous ai déjà dit lors de notre première rencontre que tout cela n'avait rien d'un jeu pour moi.
Flûte, j'avais oublié cette fameuse conversation. Tant de choses ont changé depuis... Drago reprend d'un air assuré :
- Vous semblez fâchée. Vous ne pouvez pas m'en vouloir d'apprendre à connaître les autres Sélectionnées. C'est l'objectif de ce processus.
Je déteste quand il parle de la Sélection d'une manière aussi rationnelle et aussi froide.
- Il y a d'autres manières d'apprendre à connaître quelqu'un, dis-je d'un ton pincé.
Drago s'est considérablement rapproché de moi pendant cet échange. Sa voix prend une tonalité persuasive :
- Allons, Hermione, vous et moi savons très bien qu'il suffirait d'un mot de votre part pour arrêter tout cela
Pardon ? Est-ce qu'il me propose... d'arrêter la Sélection ? Je ne me sens pas du tout prête pour cette conversation. Il continue d'une voix toujours plus douce :
- Je ne prétends pas vous offrir une belle vie Hermione. Vous avez vu à quoi ressemble mon quotidien. C'est une existence solitaire, entourée de personnes qui ne verrons en vous que votre fonction, qui ne se préoccuperont jamais de ce que vous pouvez ressentir. Je passe mes journées à régler des problèmes diplomatiques, à parler à la presse ou à subir des réceptions ennuyantes où chacun de mes mouvements est régi par le protocole.
J'ai la bouche sèche. Je n'arrive plus à parler. Drago poursuit :
- Mais malgré tout cela, je pense pouvoir vous rendre heureuse, Hermione. Vous êtes tellement intelligente et audacieuse. Vous avez toute les qualités requises pour être une parfaite reine. Je pense qu'à nous deux nous formerions une belle équipe. Pensez à tout ce que nous pourrions accomplir ! C'est cela qu'il vous faut, une existence où vos idées auront de l'impact, où vous pourrez faire entendre votre voix. Vous n'êtes pas faites pour une vie dans l'ombre.
Malgré moi, ces paroles commencent à faire leur effet. C'est la première fois que quelqu'un me fait de tels compliments. Je balbutie :
- Vous... Vous pensez vraiment ce que vous dites ? Vous seriez prêt à faire passer des décrets assouplissant le système de caste du Royaume ?
Cela me semble trop beau pour être vrai.
- Hermione, vous êtes la plus belle preuve qui soit que ces séparations entre sorciers sont stupides et arbitraires.
Nous n'avions jamais évoqué aussi directement les injustices du système dans lequel nous vivons. J'avais perçu dans nos discussions que Drago était loin d'être aussi fermé que ses parents mais cela va beaucoup plus loin que tout ce que j'imaginais. Le prince se rapproche encore un peu plus de moi, ce qui m'empêche de réfléchir.
- Et puis, être ma femme ne sera pas si désagréable que cela.
Il a son fameux sourire en coin. Nous restons un instant immobile à nous regarder sans un mot. Mon coeur bat plus fort que lors de notre dernier baiser, ce que je ne croyais pas possible. Je suis incapable de dire ou de faire quoi que ce soit. Puis, un auror déboule dans la pièce. C'est le même que j'ai croisé dans la forêt. Drago se retourne vers lui et lui assène un regard mortel.
- Ce n'est pas le moment de me déranger, Nott !
- Prince, la situation est grave, vous devez venir immédiatement !
Son ton est sans réplique. Les deux hommes échangent un regard lourd de signification et partent au pas de course. Je rejoins ma chambre comme un automate, encore abasourdie par ce qui vient de se passer, entre la proposition de Drago et l'interruption de l'auror. J'ai à peine refermé la porte que Winky apparaît dans un craquement sonore.
- Miss, couine-t-elle, vous devez partir immédiatement !
- Quoi ?
L'elfe prend mon manteau et me l'apporte.
- Mettez ça, partez le plus loin possible. Ils ne vous poursuivront pas dans un premier temps. Quand vous serez sortie des limites du parc suivez la marque. En cas de problème, rendez-vous au 12 square Grimmaurd à Londres.
Cela fait un peu trop d'informations d'un coup.
- Winky, qu'est-ce que tu racontes ? C'est Harry qui t'envoie ?
- Non Miss, couine l'elfe en écarquillant ses yeux, Harry Potter n'est pas au courant, c'est Ronald Weasley qui m'a demandé de venir vous trouver.
Ron. Mon estomac fait un bond. Il ne m'a pas oublié.
- Dépêchez-vous Miss !
Au même moment, un bruit d'explosion retentit dans le parc. Est-ce que la manoir est de nouveau attaqué ? Sans réfléchir plus, je récupère le carnet collé sous mon lit et le fourre dans la poche de mon manteau. Je jette un dernier regard à l'elfe de maison, attrape ma baguette et file de ma chambre. Je n'ai même pas pris cinq minutes pour réfléchir à la situation, le nom de Ron a suffit. Il m'attend. Cette idée suffit à me faire avancer plus vite. Dans le couloir, je croise Parvati, l'air affolé :
- Hermione, tu as entendu ce bruit, qu'est-ce que c'était ?
Je ne prends même pas la peine de lui répondre et me mets à courir. Partant dans la direction opposée au bruit qui a retentit tout à l'heure, je cours sans un regard en arrière. Après quelques minutes, le coeur au bord des lèvres, j'arrive enfin à la grille qui entoure la propriété. Merlin, comment je vais faire pour escalader ce truc ? Dégainant ma baguette, je tente plusieurs sortilèges qui arrivent à suffisamment écarter les barres de métal pour me laisser un passage. Malheureusement, c'est un peu trop facile pour être aussi simple, je suis sur le point de franchir l'obstacle, quand j'entends :
- Stupéfix !
J'arrive à réagir assez rapidement pour que le sortilège ne m'atteigne pas et me retourne vivement. C'est un auror beaucoup plus grand et massif que moi et qui a l'air assez décidé. J'aurais dû me douter qu'ils n'avaient pas totalement abandonné la surveillance du domaine, malgré l'explosion de tout à l'heure.
- Qu'est-ce que vous faites ? Retournez immédiatement dans votre chambre !
L'aurore est assez jeune, il a des cheveux bruns hirsutes et des yeux noirs. Il a l'air plus surpris de ma tentative d'évasion que véritablement en colère.
- Je... J'ai eu peur, c'est pour cela que je me suis enfuie.
Je joue volontairement les jeunes filles apeurées. Mon cerveau tourne à toute vitesse. L'auror abaisse sa baguette avec un regard plus doux :
- Ne vous inquiétez pas Mademoiselle, nous sommes là pour vous protéger. Retournez au château, c'est l'endroit le plus sûr pour v...
Il n'a pas le temps de finir sa phrase, coupé en plein élan par mon maléfice du saucisson. L'homme se fige puis s'écroule dans l'herbe dans un bruit sourd. Je lui jette à peine un regard. Une fois la grille franchie, je me retrouve sur un chemin qui s'enfonce dans la campagne environnante. Winky a parlé de suivre une marque. J'ai beau inspecter les environs, je ne vois rien de particulier et je commence à avoir peur d'être poursuivie par les autres aurors du château. S'ils me rattrapent, je suis morte, surtout après mon attaque sur l'un des leurs. Sans parler de la tête de Drago quand il se rendra compte que j'ai disparu.
Poussée par cette perspective peu séduisante, je m'engage sans plus tarder sur le chemin qui se met rapidement à grimper. Une fois arrivée au sommet d'une sorte de colline, j'inspecte l'horizon. Rien. Je me trouve au beau milieu de la campagne anglaise et, à part le manoir, il n'y a pas une habitation à l'horizon. Est-ce que Winky n'aurait pas pu être un peu plus précise dans ses indications ? Je commence à me demander si tout cela n'est pas une très mauvaise idée. Pourtant, au bout de quelques minutes, j'arrive à distinguer un peu plus loin, au dessus des arbres, une sorte de fumée qui semble flotter dans l'air. Est-ce que c'est cela la marque ? Si on regarde bien, la fumée a la forme d'un oiseau mais c'est assez flou. Comme je n'ai absolument aucune autre piste, je transplane à proximité. C'est quand j'arrive tout près du point indiqué par la fumée que je le vois.
- Ron !
- Hermione !
On court l'un vers l'autre comme dans les films moldus que ma mère adore et on se percute, il me serre dans ses bras très fort et pendant un instant merveilleux, j'oublie absolument tout ce qui m'entoure. Ron est là. Plus rien ne peut m'arriver désormais. Bien vite, je reprends mes esprits :
- Qu'est-ce que tu fais là ? Qu'est-ce qui se passe ?
Je passe ma main sur son visage et sur sa barbe de quelques jours. Il a un air soucieux et crispé qui m'inquiète.
- On s'expliquera plus tard, me dit mon roux avec autorité, il y a beaucoup trop de risque ici. Je dois y aller, va sous la marque du phénix, tu trouveras une vieille chaussure : c'est un portoloin. Et surtout n'oublie pas l'adresse, 12 square Grimmaurd.
- Tu dois y aller ? Où ça ?
- Au manoir. J'ai une mission à accomplir mais on se retrouve après, ne t'inquiète pas.
Une mission ? Je reste muette. Il m'embrasse rapidement, me regarde quelques instants, comme pour graver mon visage dans sa mémoire, puis s'éloigne à petite foulée vers le manoir que l'on peut voir au loin. J'ai l'impression désagréable que Ron et Harry n'ont fait que me mentir depuis le début et qu'ils en savent beaucoup plus que moi. N'ayant pas d'autres options, je suis ses instructions et trouve en effet une botte en cuir à l'aspect très abîmé. Je déteste les voyages en portoloin mais je n'ai pas trop le choix. Agrippant la chaussure, je ressens aussitôt la sensation désagréable mais si reconnaissable d'être comme aspirée par l'objet. L'atterrissage est un peu violent puisque je me retrouve par terre, le bras gauche endolori.
Relevant la tête, j'inspecte les environs et réalise avec surprise que je me trouve sur une sorte de place déserte au milieu d'une ville Je dois être à Londres. Le ciel est beaucoup plus gris et menaçant qu'au manoir. La placette est un endroit assez banal entouré de maisons à l'aspect défraichi. Je me relève et époussette mon manteau. Une vérification rapide m'apprend que le carnet est toujours dans ma poche. Déchiffrant les plaques, je réalise que je suis arrivée au fameux square Grimmaurd dont m'ont parlé Winky et Ron. Je me m'attendais pas à ce que cela soit aussi moche et aussi commun. J'arrive à trouver un numéro 11 et un numéro 13 mais pas de numéro 12. C'est le summum ! Est-ce que j'ai fait tout ce périple pour une maison invisible ? Je suis en train de rouspéter intérieurement quand le numéro 12 semble soudain apparaitre devant moi. Etonnée mais curieuse, je monte une sorte de perron et découvre une poignée d'argent en forme de serpent accrochée à une porte à la peinture qui s'écaille. Je toque.
Pendant quelques instants, absolument rien ne se produit puis j'entends des bruits de pas. Le lourd battant noire pivote et laisse apparaître la silhouette et les cheveux roux si reconnaissables de Ginny Weasley. La jeune fille me dévisage l'air abasourdi :
- Hermione ?
Après quelques secondes d'étonnement pur, elle referme la porte sans un mot de plus, me laissant seule sur le perron délabré, encore sous le choc.
à suivre...
