Et voilà le prochain chapitre, qui clôt en quelque sorte la première partie de l'histoire. Par conséquent, la fiction va connaître une (petite) pause, le temps d'organiser la suite des aventures d'Hermione.
Je reste figée et pendant quelques secondes suspendues, nous nous dévisageons mutuellement. Il a l'air mal en point mais son regard est toujours aussi perçant. Sans plus réfléchir, je me précipite sur lui et essaye de décrocher les chaînes sans succès. Mes mains sont tremblantes et le métal est bien trop épais.
- Qu'est-ce que vous faites là, Hermione ? murmure Drago.
Sa voix est rauque, comme s'il n'avait pas parlé depuis longtemps.
- Je vais vous sortir d'ici !
Me rappelant enfin que je suis une sorcière, je pointe ma baguette sur le sol, là où la chaine rejoint le plancher.
- Arrêtez !
C'est davantage le ton de sa voix qui me stoppe que ce mot. Je le dévisage, interloquée. Drago poursuit :
- Arrêtez ces simagrées, Hermione, je ne tomberai pas dans votre piège.
Je réalise alors, que son visage est dur et ses yeux froids. J'ai l'impression de perdre pied.
- Mais... Non, ce n'est pas un piège, je veux vraiment vous sauver !
- Je sais que vous êtes avec eux. Votre... fiancé m'a tout dit. Je ne sais même pas pourquoi j'ai été surpris, vous m'aviez prévenu depuis le début.
Il me crache ces mots avant tant de colère que j'en oublie la chaîne qui le retient.
- Non Drago, ne croyez pas cela, je ne suis pas...
Ces explications se perdent dans un grand fracas : la porte du grenier vient de s'ouvrir à la volée et elle sort presque de ses gonds sous l'impact.
- Expelliarmus !
Ma baguette s'envole de ma main et vient rejoindre celle de Sirius Black. Derrière lui, je reconnais Ron, Harry et Remus Lupin. L'état de choc dans lequel je me trouve se dissipe un peu et l'horreur de la situation me frappe alors de plein fouet. Drago doit être enfermé dans ce grenier depuis l'attaque du manoir. Comment ai-je pu être assez idiote pour ne pas m'en rendre compte ? La colère monte en moi comme un volcan et finit par exploser :
- Qu'est-ce que vous lui avez fait ?
Sirius fonce sur moi et m'attrape par le bras sans aucune douceur. Je continuer à crier :
- Répondez moi ! Vous êtes des malades ! Relâchez le !
Harry a l'air bouleversé et Ron dans une fureur extrême. Je n'ai jamais eu autant envie de les gifler. De tous leurs mensonges et toutes leurs trahisons, celle-là est la pire. Le parrain de mon meilleur ami me traîne sans ménagement jusqu'aux escaliers et commence à les descendre. Harry essaye de le calmer :
- Sirius, fais attention !
Cela a le mérite de desserrer un peu la main qui emprisonne mon bras. Je continue à cracher :
- Vous vous croyez au-dessus d'eux mais vous êtes pires !
Je me sens projetée violemment contre le mur, à côté de la porte de la chambre de Regulus Black. Sirius a le visage blanc de colère.
- Pire ? PIRE ? Qu'est-ce que tu crois espèce d'idiote, que la famille Malefoy c'est juste un joli château et des réceptions ? Tu n'étais pas là lors de la guerre contre Voldemort, tu n'as pas perdu la moitié de tes amis à cause des mangemorts !`
- Drago n'est pas comme ça, vous ne le connaissez pas.
J'ai mal à la tête à cause du choc. Harry essaye de retenir son parrain mais c'est peine perdue. Mes derniers mots ont encore augmenté sa colère, si c'était possible.
- Tu croyais quoi ? Que tu allais devenir la future princesse ? Tant pis si des gens continuent à crever tant que toi tu rejoins l'Élite ?
Il est dans un tel état de rage que je suis en train de me demander si tout cela ne va pas très mal tourner. Heureusement, Remus Lupin finit par prendre les choses en main et ceinture son ami de ses bras :
- SIRIUS ! Arrête tout de suite ça, c'est une adolescente, tu dois te calmer.
Il le pousse sans ménagement et demande à Harry d'accompagner son parrain jusqu'en bas. Le brun à lunettes hoche la tête en signe d'assentiment et attrape Sirius par les épaules. Ron, qui n'a pas dit un mot depuis le début, me jette un regard assassin et leur emboîte le pas. Remus vient doucement vérifier si ma blessure n'est pas trop grave. J'ai l'impression d'avoir un tambour dans le crâne mais je reste stoïque.
- Ce n'est rien, conclut le sorcier. Reste tranquille Hermione et je ne te ferai aucun mal.
Il sort un carré de chocolat de sa poche et me le tend. Étrangement, la sucrerie me permet de rependre mes esprits. Comprenant que rien ne sert d'aggraver mon cas, je me résigne à suivre Remus sans plus d'esclandre.
Je me retrouve parquée dans ma chambre, sans baguette et avec la porte fermée à double tour. J'ai désormais le même statut que Drago : celui de prisonnière. J'inspecte mes blessures. Ma tête me fait atrocement mal et j'ai un énorme bleu au bras. La colère que je ressens m'aide à supporter la douleur.
Après environ une heure, Lily Potter me rejoint dans la chambre. Elle entreprend avec douceur de me soigner à l'aide de sortilèges et de potions. Elle grimace à la vue de ma plaie sur la tête.
- Sirius a toujours été soupe au lait. Essaye de ne pas lui en tenir trop rigueur, Lucius Malefoy a tué un de ses meilleurs amis lors de la dernière guerre.
Je ne réponds pas. Nous n'avons visiblement pas la même définition de soupe au lait. Lily continue son sortilège de guérison, concentrée sur sa tâche. Au bout de quelques minutes, je finis pas reprendre la parole :
- Qu'est-ce que vous allez faire de moi ?
- Je ne sais pas, avoue Lily. Nous savons par nos sources que la famille royale est persuadée que tu es responsable de l'enlèvement de Drago. Tu ne peux donc pas sortir d'ici. Mais ne t'inquiète pas, le pire qui puisse t'arriver est de rester au 12 square Grimmaurd.
Formidable. Je suis condamnée à rester coincée dans cette horrible baraque.
- Pourquoi ne m'avez-vous rien dit à propos de Drago ?
- Qu'est-ce que tu aurais fait si tu avais su ?
Je ne réponds pas car la question n'appelle pas de réponse. Si j'avais su que Drago était enfermé à quelques mètres au dessus de moi, j'aurais tout fait pour le sortir de là. Est-ce que cela fait de moi une traître ? Est-ce que cela suffit à confirmer les soupçons de tous ceux qui me prenaient pour une « créature du manoir Malefoy » ? Mais ils ne comprennent pas que ce n'est pas le prince que j'aurais essayé de libérer mais Drago tout simplement.
- Et voilà ! Prends cette potion tous les soirs avant de dormir et dans quelques jours tout ira mieux.
J'attrape la fiole qu'elle me tend. Lily se lève, se dirige vers la porte puis pivote vers moi, l'air gêné.
- Il... Il y a quelque chose que je voudrais te demander depuis longtemps.
Je lui jette un regard étonné, la poussant à continuer.
- Quand tu étais au manoir, il y avait un homme du nom de Severus Rogue, non ?
- Euh, oui. C'est le majordome de Drago.
- Est-ce qu'il va bien ?
Je reste bouche bée. Est-ce que la mère de Harry connaît Rogue ? Elle répond d'elle-même à cette question.
- Nous étions voisins enfant. Malheureusement, la vie nous a fait prendre des chemins très différents.
- Hum, il avait l'air d'allez bien oui.
- Est-ce qu'il est... heureux ?
Je ne sais pas quoi répondre à cette dernière question. Lily me regarde, pleine d'espoir, mais l'amertume du majordome du manoir me laisse penser qu'il n'est pas la personne la plus épanouie du monde. Je ne souhaite cependant pas lui faire de peine et je répond d'un air assuré :
- Oui, il est très impliqué dans son travail.
C'est un demi-mensonge. La rousse prend un air soulagé, me remercie puis quitte la chambre. Les jours suivants se transforment en une routine très pénible. Ginny ou Harry viennent régulièrement m'apporter à manger dans ma chambre mais je n'ai plus le droit de sortir. Ron ne vient pas une seule fois. Je réalise avec surprise que cela m'est complètement égal. Je suis encore trop en colère contre lui. J'arrive à papoter avec l'un ou l'autre de mes visiteurs mais ces discussions sont toujours brèves. L'opération au ministère se rapproche, je sens Harry de plus en plus fébrile. J'essaye de lui arracher des informations sur l'état de santé de Drago mais sans succès. Il oppose à chacune de mes questions un air gêné ou des réponses vagues.
Ces longues heures de solitude ne m'aident pas à effacer de ma mémoire la vision du prince parqué comme une bête au fond de ce grenier poussiéreux. Qu'est-ce qu'il va devenir ? Est-ce qu'ils vont le tuer ? S'en servir comme monnaie d'échange ? Maintenant que j'ai vu la violence dont peut faire preuve l'Ordre, je ne suis plus sûre de rien. Malheureusement, sans baguette, impossible de m'échapper pour lui venir en aide.
C'est au moment où je sens que l'enfermement commence à vraiment peser sur ma santé mentale que tout change. Un matin très tôt, Maugrey Fol Oeil vient me chercher dans ma chambre et m'emmène à sa suite sans le moindre mot. Le 12 square Grimmaurd semble vide, pas un bruit ne trouble l'atmosphère à part celui de la jambe de bois du commandant de l'Ordre. Je réalise alors que cet étrange silence s'est installé depuis longtemps mais je ne saurais dire exactement depuis quand. À ma grande surprise, je comprends que nous quittons la maison des Black. Je ne sais même pas depuis combien de temps j'y suis, j'ai perdu le fil des jours.
- Où est Drago ?
-Il va bien, renifle Maugrey avec un air de mépris.
Cela ne répond pas à ma question. Sitôt sur le perron, nous partons en transplanage d'escorte. Une fois arrivés, je mets quelques secondes à réaliser où nous sommes. Je reconnais le muret en pierre, le jardin, la façade en grès clair. Ma maison. Je sens mon coeur se gonfler de soulagement. J'avance de quelque pas puis me retourne vers Maugrey :
- Alors... Tout est fini ? Vous avez gagné ?
- En quelque sorte.
Ses réponses laconiques m'agacent. Est-ce que l'opération au ministère a fonctionné ? Est-ce que Voldemort a vraiment disparu, complètement cette fois ? Apparemment, je ne mérite même pas une réponse.
- Qu'est-ce qui va se passer maintenant ?
Il me vrille de son oeil magique puis inspecte rapidement les alentours. Le quartier est encore endormi et les rues sont vides.
- Tu vas essayer de te faire oublier. Reste chez toi pendant quelques temps, évite de sortir.
J'ai encore milles questions à lui poser mais Maugrey transplane rapidement me laissant seule et désabusée. Je pousse la grille du jardin et remonte jusqu'à la porte principale. Je me souviens de mon départ précipité pour la sélection, la nuée de photographe, les pleurs de ma mère : j'ai l'impression que c'était il y a une éternité. Comme dans une vie antérieure. La maison est silencieuse. Je me décide à attendre le réveil de ma mère, dans cet instant un peu suspendu où le monde entier semble endormi.
Dire que nos retrouvailles sont joyeuses est un euphémisme. Ma mère est folle de joie de me retrouver et répète plusieurs fois à quel point elle s'est ennuyée sans moi.
- Tu vas bien ? Ils t'ont bien nourri ?
- Maman, pour la centième fois je vais parfaitement bien.
- Et comment était le prince ? Gentil ? Arrogant ?
Je sens mon coeur se pincer à ces mots.
- Très gentil. Je monte dans ma chambre, j'ai besoin d'un peu de calme.
- Bien entendu ! Va, je vais te préparer tes scones préférés.
Je l'entends chantonner jusqu'à la cuisine. Elle n'a pas l'air au courant de ma fuite ni de l'ensemble des troubles qui ont agité le monde magique et c'est très bien comme cela. Je vais devoir broder une histoire satisfaisant pour expliquer la durée de mon absence et mon retour, seule. Sur mon lit, je trouve un long parchemin envoyé par Harry. Il a au moins la décence de me donner quelques nouvelles.
J'apprends ainsi que leur mission au ministère a réussi au-delà de leurs espérances. Cette victoire, largement relayée, a galvanisé les poches de résistance contre le système en place. Lucius et Narcissa ont fuit le pays, probablement en Europe de l'Est. Les meilleurs aurors sont à leur recherche. Un nouveau ministre de la Magie, Rufus Scrimgeour, a pris la tête d'un Gouvernement de transition avant l'organisation d'élections.
Cependant, la situation reste troublée, Harry m'explique que l'Ordre a fort à faire pour ramener le calme dans le pays. Dans de nombreux endroits, la guerre fait encore rage entre les partisans de la famille royale et leurs opposants. Je n'aurais pas beaucoup plus de détail sur leurs activités. Je commence à m'habituer.
Je repose la lettre. Je n'arrive même pas à me sentir heureuse ou soulagée, ces jours de solitude m'ont comme coupé du monde qui m'entoure. Il n'y a pas un mot sur Drago, la seule personne à laquelle je pense en ce moment. Mon estomac se noue. Maugrey a bien dit qu'il était en bonne santé, mais venant du commandant de l'Ordre cela ne me rassure pas particulièrement. Maintenant que la monarchie est renversée, je ne vois pas comment les choses pourraient bien tourner pour lui. Les derniers instants que nous avons partagé me hante. Et si j'étais resté au manoir ? Si je ne m'étais pas enfui ? Est-ce que les choses auraient pu être différente ? Je secoue la tête : rien ne sert de ressasser le passé. Mais si je n'ai aucun problème à me « faire oublier », comme la demandé Maugrey, je ne vois pas comment les derniers évènements pourraient s'effacer de ma mémoire.
Les jours suivants se transforment en une espèce de nouvelle routine, assez déroutante après tous ces évènements. Ma mère est au petit soin pour moi, c'en est presque étouffant. J'ai des nouvelles de Harry et Ginny de temps en temps, mais c'est mon seul lien avec le monde extérieur. Je sens que je m'enfonce dans une mélancolie de plus en plus profonde dont rien ne semble pouvoir me sortir. Je me ressasse mes quelques semaines au manoir et au 12 square Grimmaurd. Chaque moment, chaque conversation est scanné et analysé. J'ai tellement l'impression d'avoir traverser cette période comme un rêve.
C'est un exemplaire de la Gazette du Sorcier qui m'apporte un électrochoc inattendu. Le journal, sentant le vent tourner, a en effet pris le parti du nouveau ministre en place avec enthousiasme. Mais la une ne concerne ni les actions de Rufus Scrimgeour, ni le compte-rendu hebdomadaire de la recherche de Lucius et Narcissa, l'article s'intitule : « Drago Malefoy et Hermione Granger aperçut en Écosse ».
Mon coeur fait un bond. La photo, qui illustre l'article, est floue et de très mauvaise qualité, on devine deux silhouettes mal définies sur le ponton d'un lac écossais au milieu de la brume. L'article est du même acabit :
« Le couple, toujours en fuite suite aux derniers évènements, aurait été vu aux alentours du Loch Lomond, au coeur de l'Écosse. Nos meilleurs journalistes sont sur place et mènent l'enquête. Allistair MacLean, le gérant d'une auberge locale nous confie : « Je les ai hébergé sans le savoir ! Ils avaient dû utiliser un sortilège de Dissimulation. Quelle publicité pour mon établissement ! » Plusieurs habitants du petit village n'ont pas caché leur excitation face à cette nouvelle, les soutiens du couple sont en effet nombreux dans cette région alors que le ministère est toujours à leur recherche. »
Je laisse retomber le journal. Qu'est-ce que c'est que ce tissu de mensonges ? Comment cette rumeur a-t-elle pu apparaître ? J'imagine que le ministère ne se vante pas d'avoir Drago dans ses mains, mais de là à imaginer une fuite rocambolesque en ma compagnie ! Comme si l'article avait été un signe avant coureur, j'ai la surprise de découvrir le lendemain dans mon salon, James Potter en chair et en os en train de papoter tranquillement avec ma mère, comme si de rien n'était. Il est vêtu d'une grande cape noire. Son visage a l'air fatigué mais joyeux. Quand il me voit, il arbore aussitôt un large sourire :
- Hermione, ravie de te revoir !
- Euh... bonjour Monsieur Potter. Qu'est-ce que vous faites là ?
Je ne partage pas son enthousiasme : ma méfiance envers l'Ordre du Phénix s'est étendue à tous ses membres, qu'importe que James soit le père de Harry.
- Je suis ici au nom du ministre de la Magie, il souhaiterait grandement te rencontrer.
Ma mère me fait une expression réjouie dans le dos du sorcier, comme si c'était une très bonne nouvelle. De mon côté, je reste de marbre.
- Maman, peut-être que Monsieur Potter voudra du thé ?
Avant que le père de Harry ait pu répondre, ma mère, qui s'est auto-proclamée grande prêtresse du tea time, se précipite pour faire chauffer de l'eau. J'en profite pour glisser :
- Je croyais que le ministre avait envoyé ses aurors me pourchasser en Écosse ?
James a la décence de prendre un air un peu gêné :
- Il ne faut pas croire tout ce que raconte le journal.
J'ai un ricanement désabusé, me dire cela à moi, c'est comique.
- Et qu'est-ce qui vous fait croire que je vais vous suivre ?
- Le ministre a une très belle proposition a te faire, crois moi Hermione.
- Quelle genre de proposition ?
- Je ne peux rien te dire mais je t'assure qu'elle vaut la peine que tu l'entendes.
Je regarde ses yeux marrons, il semble sincère. Est-ce que je suis encore en train de me faire avoir ? Mais la curiosité est bien trop forte, j'ai tant de questions, qui mieux que le ministre pour y répondre. Alors encore, une fois, j'accepte de le suivre. Je n'ai rien à perdre.
Sur le chemin, James est encore plus attentif qu'à l'ordinaire et prend bien soin de ne croiser personne, nous faisant emprunter des détours étranges. Arrivés au ministère, nous parcourons un nombre impressionnant de couloirs et descendons plusieurs escaliers. Je ne sais plus du tout où je me trouve. Enfin, après un temps qui me semble infini, le père de Harry s'arrête devant une porte en acajou de toute beauté. Un écriteau doré indique : « Bureau du ministre de la Magie ». James pousse la porte et une voix grave et chaude m'accueille :
- Bienvenue Mademoiselle Granger.
Le ministre est assis derrière un vaste bureau encombré de parchemins en tout genre. Il est doté d'une impressionnante crinière de cheveux fauves et de sourcils broussailleux. Ses yeux brillent derrières ses lunettes cerclées de fer et me scannent de haut en bas. Je l'ai déjà vu en photo dans le journal mais cela n'a rien à voir, je me sens comme écrasée par sa présence et son charisme. J'ai l'impression qu'il occupe toute la pièce. James me pousse doucement dans le dos pour m'inviter à avancer tandis que le ministre déclare :
- Je suis Rufus Scrimgeour, le nouveau ministre de la Magie. Asseyez vous ! Vous êtes notre invitée.
Je balaye la pièce du regard avant d'avancer vers le fauteuil qu'on me tend. Il y a là Minerva McGonagall, Arthur Weasley, Alastor Maugrey et un homme assez jeune aux cheveux bruns ébouriffés que je ne connais pas. Ils ont tous l'air particulièrement grave et sérieux. Arthur Weasley tente un sourire en ma direction mais je l'ignore avec application. J'entends James Potter fermer la porte et venir se positionner à côté du reste de l'Ordre.
- Voulez-vous boire quelque chose ?
C'est encore le ministre qui s'exprime. Je secoue la tête en signe de dénégation. D'une part, j'ai la gorge bien trop serrée pour avaler quoi que ce soit, d'autre part je ne leur fais aucune confiance. Qui sait ce qu'ils pourraient glisser dans ma boisson ? Scrimgeour prend une voix particulièrement douce :
- Mademoiselle Granger, vous avez sans doute suivi l'ensemble des évènements de ces derniers jours. Vous ne serez pas surprise d'apprendre que la situation de notre pays est encore très délicate. La société magique est toujours fracturée des derniers évènements, nous devons retrouver une ambition commune, un cap. Nous devons recréer une communauté magique.
Je le regarde débiter son discours politique avec suspicion. Quel est le rapport avec moi ? Pourquoi m'a-t-il fait venir dans son bureau pour m'exposer son programme ? Scrimgeour poursuit :
- Nos aurors arrivent à contenir les foyers de contestations mais la bataille d'opinion est loin d'être gagnée. Nous avons toutes les peines du monde à constituer un nouveau Gouvernement. Comment pourrait-on organiser des élections dans ce contexte troublé ? Alors nous avons beaucoup réfléchi et nous avons trouvé la solution. Il n'est pas envisageable de changer de régime trop brutalement, le peuple britannique est bien trop attaché à la royauté. Il nous faut trouver un compromis, une manière de faire évoluer l'organisation du pays tout en préservant les intérêts de chacun.
Il me fixe de ses yeux à l'éclat doré. Je réalise que l'ensemble des personnes présentes dans la pièce semblent m'observer avec la plus grande attention. Je sens le rythme de mon coeur s'accélérer, je ne suis pas sûre de bien comprendre où il veut en venir. Le ministre reprend d'une voix lente et solennelle :
- Nous allons mettre en place une monarchie constitutionnelle.
Il y a un silence. Il semblerait qu'on attende une réaction de ma part. Je souffle :
- Euh, c'est très bien.
Rufus Scrimgeour poursuit :
- Le prince Drago ne semble pas, dans l'opinion publique, être mêlé aux agissements de ses parents. Une grande partie du royaume continue à le soutenir. Nous n'allons pas pouvoir tenir très longtemps cette histoire de fuite en Écosse. Mais surtout, il y a vous Hermione. Vous êtes... un miracle.
Il a dit ce dernier mot en écartant les mains. J'ai l'impression de sentir une goutte de sueur couler dans mon dos. Je ne suis pas sûre d'être ravie de ce qualitatif. Le ministre fait un signe de main en direction du jeune homme aux cheveux ébouriffés.
- Hopkins, expliquez lui.
Le jeune homme réajuste ses lunettes rondes et débite d'une voix rapide et enthousiaste :
- Une née-moldu, sortit de nulle part, qui atteint l'Élite puis s'enfuit avec le prince Drago. C'est une histoire incroyable. Les gens vous adorent Hermione. Ils s'identifient à vous. Vous êtes assez jolie pour attirer l'attention mais pas pimbêche. Intelligente mais pas prétentieuse. Née-moldu mais d'une grande puissance magique. Vous avez tenu tête au prince, vous vous êtes opposée au système des castes. Si vous vous associez à notre projet, tout le monde nous suivra.
J'interviens d'une petite voix :
- Je ne comprends pas.
Rufus Scrimgeour se redresse de toute sa hauteur dans son fauteuil.
- Nous avons besoin d'un souffle neuf, d'une monarchie transformée. Nous avons besoin d'une famille royale qui représente à la fois l'ancien et le nouveau monde, qui nous aide à redresser le pays. Nous avons besoin de vous Hermione.
On pourrait entendre une mouche voler mais le seul son est celui de Maugrey Fol Oeil qui se gratte discrètement la gorge. Je prends une voix plus assurée :
- Je ne vois toujours pas ce que vous attendez exactement de moi.
Rufus Scrimgeour prend un air agacé :
- Enfin, c'est évident. Nous voulons que vous épousiez le prince Drago.
à suivre...
