Et voilà la suite ! Merci pour les reviews, ça m'a bien plu de lire vos suppositions sur le comportement de Drago : un début de réponse dans ce chapitre.
Je me réveille dans un immense lit à baldaquin incroyablement confortable. L'oreiller en soie verte pâle me chatouille agréablement la joue. En temps normal, cette sensation suffirait à me mettre de bonne humeur mais les évènements de la veille viennent rapidement plomber mon moral. Le mariage. Drago. Le retour au manoir dans une atmosphère glaciale. Malheureusement pour moi, je n'ai pas rêvé tous ces évènements... Sitôt arrivé dans ce lieu où je croyais ne jamais revenir, mon nouveau mari a filé sans un mot. C'est Winky qui m'a accueilli et montré mes nouveaux appartements. Bien que ravie de revoir l'elfe de maison, j'étais dans un tel état de fatigue hier que je me suis rapidement écroulée sur mon lit.
Winky est de nouveau là ce matin avec un large sourire et un plateau garni de mets succulents. Je réalise que je n'ai pas touché au buffet la veille et que j'ai atrocement faim.
- Bonjour Milady !
Je croque avec ardeur dans un scone encore chaud : je ne vais tout de même pas me laisser mourir de faim. Je jette un coup d'oeil à ma chambre. Tout est décoré dans une couleur vert d'eau, assez jolie. La chambre me fait l'effet d'un agréable havre de paix après le tumulte des derniers jours. Je suis en tout cas soulagée d'avoir des appartements personnels, une cohabitation avec Drago aurait été trop difficile à supporter après ses mots de la veille. Vous êtes la dernière personne que j'aurais souhaité épouser. Formidable.
- Je suis ravie de te revoir Winky, tu as pris de tels risques pour me faire passer le message de Ron lors de l'attaque ! Que s'est-il passé ensuite ?
Enfin une personne qui va pouvoir répondre à quelques unes de mes questions.
- Monsieur Rogue est arrivé lorsqu'ils ont constaté votre disparition, il a voulu savoir où vous étiez mais je n'ai rien dit Milady, je vous jure que je n'ai rien dit !
Les yeux ronds de l'elfe sont encore plus écarquillés que d'habitude. Moins embrumée par mon réveil, je réalise que son aspect n'est pas des plus rassurants. Il y a d'étranges marques sur ses bras et sa tête comme des anciennes brûlures. Je n'avais pas remarqué cela hier. Je repose mon scone, l'appétit coupé par cette vue.
- C'est Rogue qui t'a fait ça ?
- Fait quoi Milady ?
- Il est toujours au manoir ?
- Oui.
Je comprends que Winky ne m'en dira pas plus, probablement terrifiée par le majordome du Manoir Malefoy. Je sens une colère sourde monter en moi. Voilà un premier sujet dont je vais pouvoir discuter avec le nouveau roi. Je saute sur mes pieds avec entrain et fouille ma penderie à la recherche d'une tenue plus confortable que ma robe de la veille.
- Milady, où est ce que vous allez ? Vous avez rendez-vous avec Miss Patil pour qu'elle vous présente le programme de la journée.
Merlin, quel enfer.
- J'ai un bien meilleur programme.
J'attrape une robe toute simple de couleur verte et l'enfile sans trop me préoccuper de mon apparence finale.
- Miss Patil ne va pas être contente, couine Winky.
- Tu lui diras que je suis partie me promener.
L'avis de Parvati sur mes allées et venues est bien le cadet de mes soucis à cet instant. Une fois dans le couloir, je réalise que je ne sais absolument pas où se trouvent les appartements de Drago. C'est malin. Il va falloir que j'apprenne à me repérer un peu mieux dans cet immense manoir. J'erre un peu au hasard et finis par tomber sur un auror à la mine patibulaire qui m'indique que le roi est dans son bureau au premier étage. Suivant ses indications à la lettre, j'arrive devant une superbe porte en acajou. Drago et Rogue sont seuls et visiblement plongés dans l'étude d'un sujet difficile. Ils pointent plusieurs papiers étalés sur le bureau en discutant à voix basse. La pièce est plutôt petite mais bien aménagée et confortable.
- Hermione ?
Drago a relevé la tête et m'adresse désormais un regard aussi amène que ceux de la veille dans le carrosse. Rogue de son côté se contente de lever l'un de ses sourcils assez haut. Me revoir n'a pas l'air de lui faire particulièrement plaisir et c'est plus que réciproque. Je m'adresse directement à lui.
- Qu'est-ce que vous avez fait à Winky ?
- Qui est donc cette... Winky ? réplique le sorcier en plissant son nez crochu.
- Mon elfe de maison.
Drago prend un air perplexe et se retourne vers son majordome.
- Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
- L'elfe de Miss Granger...
Je le reprend aussitôt avec un malin plaisir.
- Lady Malefoy à présent.
- L'elfe de Lady Malefoy, reprend avec répugnance Rogue comme si chaque mot lui brûlait les lèvres, a été interrogé par nos soins lors de l'attaque du manoir afin de savoir où s'était réfugiée celle qui était alors Miss Granger. Nous pensions que cela nous mènerait également à vous, mais nous n'avons pas réussi à suivre la piste jusqu'au bout.
- Comment cet elfe peut-elle encore être à notre service ?
J'en reste interloquée. C'est la seule question qui lui vient ?
- Nous n'avons pas pu choisir le personnel nous même, renifle Rogue. Ordres d'en haut.
Sa main s'agite mollement en pointant vers le plafond. Je ne compte pas en rester là.
- Vous l'avez torturé !
- Elle venait de se rendre coupable de haute trahison, réplique le majordome d'un ton sec.
- Ce n'est pas une raison !
Le sorcier ouvre la bouche pour me répondre mais Drago l'interrompt d'un geste.
- Merci Severus, je vais poursuivre cette conversation seul avec la reine.
Très digne, Rogue se redresse et sort de la pièce en prenant bien soin de ne pas croiser mon regard. Je reste seule face à un Drago passablement énervé mais toujours aussi froid et maître de lui même.
- Hermione, nous allons devoir mettre en place quelques règles pour que cette... cohabitation se passe au mieux. Comme le fait que je déteste qu'on vienne me déranger le matin pour des sujets aussi futiles.
Ses yeux me fixent sans hésitation, quand j'ai dû mal à soutenir son regard. Je fais quelques pas dans le bureau pour reprendre contenance.
- Futile ? Vous avez pour majordome un taré qui a torturé un elfe de maison. Et vous appelez ça un sujet futile ? Je veux que vous renvoyez Severus Rogue. Voilà ma seule règle.
- Certainement pas ! Cessez immédiatement vos caprices.
J'ai l'impression que je suis en train de m'étouffer de rage, mes mots n'arrivent plus à sortir. Drago de son côté a les mains tellement serrées autour de son bureau que ses jointures en sont blanches.
- NE ME DITES PAS QU'IL S'AGIT D'UN CAPRICE !
J'ai crié un peu plus fort que ce que je souhaitais mais à mon grand étonnement cela fonctionne plutôt bien puisque Drago reprend après un silence.
- Calmez vous Hermione et reprenez vous. Vous me demandez des comptes sur un évènement alors que je n'y étais même pas présent. Que voulez-vous que je fasse ? Que je renvoie mon plus fidèle serviteur pour avoir un peu malmené votre elfe ? Qui sait dans quelles circonstances cela s'est produit... Pendant ce temps, votre charmant fiancé en faisait de même avec moi dans cet horrible grenier, il me semble que nous sommes quittes.
- Quoi ? Qu'est-ce que Ron vous a fait ?
Drago plisse ses lèvres comme s'il regrettait d'avoir évoqué ce sujet.
- Cela ne vous regarde pas. Pour votre elfe, faites venir un médicomage au manoir pour l'ausculter et lui prescrire des soins. Voyez cela avec Severus, cela lui donnera l'occasion de se racheter.
Le blond s'assoit sur son fauteuil, comme épuisé par notre échange. Je comprends que la conversation est finie mais j'ai déjà obtenu plus que ce que je ne pensais possible et je ressens moi même le besoin de m'éloigner pour faire le point.
Je passe le reste de la matinée à me balader dans le parc du manoir. J'ai besoin de me remettre des émotions qu'a provoquées ma dispute avec Drago. Il y a tellement de zones d'ombres entre nous, tellement d'explications manquantes. Si chaque conversation prend cette tournure, nous n'allons jamais nous en sortir. Je ne m'attends pas à ce que Drago revienne aux sentiments qu'ils semblaient exprimer lors de la Sélection mais simplement à ce qu'il comprenne que je n'ai jamais été son ennemie. J'ai l'impression d'être une traître dans les deux camps, ce que je ressens comme une profonde injustice.
Je retrouve au déjeuner une Parvati au bord de l'apoplexie face à ce qu'elle appelle ma « disparition inexpliquée ».
- Hermio... Milady, nous avons tant de chose à voir ensemble ! Ce n'est pas raisonnable.
Je décide de prendre le ronflak par les cornes. Je ne vais pas supporter bien longtemps ce type de relation.
- Parvati, je t'en prie, appelle moi Hermione et arrête de me tutoyer. Nous nous entendions bien toi et moi, ce protocole commence vraiment à me peser.
Celle qui est désormais mon assistante personnelle se mordille la lèvre.
- Tu as raison Hermione, mais tu es reine à présent, je ne peux pas te traiter comme une camarade.
- Alors traite moi comme une collaboratrice. Voyons ce fameux programme.
Je mords avec application dans un délicieux sandwich apporté par Winky tandis que, revigorée à l'idée que je sois plus coopérative, Parvati m'explique les différentes tâches de mes prochains jours. Outre plusieurs dîners protocolaires, j'ai un programme chargé de différentes visites de courtoisie dont une à l'hôpital Sainte-Mangouste, afin d'encourager le personnel, très mobilisé suite aux combats de ces derniers mois. Sur ma longue liste, assez peu d'obligations sont communes avec Drago. Je ne sais pas à quel point, il a été consulté de son côté.
Parvati se révèle néanmoins d'une compagnie beaucoup plus agréable, passé l'hystérie des préparatifs du mariage. Elle m'explique tout ce que j'ai besoin de savoir avec efficacité et gentillesse. J'ai l'impression d'avoir retrouvé une alliée dans cet univers hostile, qui n'en compte pas beaucoup. Je le réalise au dîner, qui outre Drago et moi comprend un diplomate du ministère qui passe un long moment à nous faire un résumé de la politique étrangère du royaume. Cela pourrait être intéressant si je pouvais en placer une mais les regards réprobateurs de Rogue, debout derrière Drago, me font vite comprendre que je ne suis pas censée ouvrir la bouche lors de ces dîners, à part pour dire des platitudes.
- Les troubles qui ont agité notre pays sont assez bien connus à l'étranger, c'est une situation à risque pour nous car nos ennemis pourraient exploiter cette fragilité. C'est pourquoi il était si important de rétablir un régime stable aux yeux du monde. Mais il nous faut aller plus loin.
- Qu'est-ce que vous proposez ? interroge Drago en piquant sa fourchette dans une part de tourte.
- Un déplacement officiel. Par exemple en Chine. Cela donnera du poids et de la légitimité à la nouvelle monarchie et cela permettra d'apaiser les tensions politiques. Merlin sait que nous avons besoin de calmer les choses avec l'Empire Magique Chinois.
Drago sirote désormais son vin d'un air pensif.
- Cela me semble risqué de quitter le pays alors que l'équilibre des forces est encore si fragile. Et puis notre sécurité serait moins bien assurée lors d'un déplacement, je ne veux pas nous mettre en danger moi et mon épouse.
J'en tousse dans ma serviette, sous le regard désapprobateur de Rogue, qui ne doit pas considérer ce comportement comme conforme à l'étiquette. Bien malgré moi, la phrase de Drago m'a touché. J'essaye d'intercepter son regard, mais comme depuis le début du repas c'est peine perdue. La conversation se dirige ensuite sur les nouvelles nominations au ministère, sujet qui m'intéresse beaucoup moins. À la fin du souper, nous passons tous dans un petit salon, où crépite un feu de bois, pour déguster du whisky pur feu. J'en profite pour m'attaquer à ma deuxième cible : Rogue.
- Drago m'a dit que vous connaissiez de très bons médicomages spécialisés en blessure des elfes de maison, il faudra que vous me donniez leur contact.
Les narines du nez crochu du majordome s'écartent légèrement d'exaspération.
- Mais bien entendu... Milady. Avez-vous d'autres consignes à me transmettre. Je me ferais un plaisir d'exaucer vos souhaits.
Sa déférence sonne extrêmement faux. Le pouvoir que j'ai désormais sur lui est assez agréable après ces longues semaines de Sélection à subir ses cours interminables et ses remarques acerbes.
- Pas une consigne, plutôt un message d'une personne qui vous connait.
J'ai attiré son attention. Les yeux sombres du sorcier me dévisagent avec surprise. Je poursuis :
- Lily Potter. Elle m'a chargé de vous transmettre ses amitiés.
Je vois la main de Rogue se serrer autour de son verre et son visage déjà crayeux pâlir un peu plus. Après un temps considérable, il me répond d'une voix froide :
- Je ne connais pas cette personne.
Il s'éloigne de son pas hautain. Au fond du salon, devant la cheminée, Drago et le diplomate sont en pleine conversation sur la situation du pays. J'ai l'impression qu'ils parlent volontairement à voix basse pour ne pas que je m'entende. Cette soirée est décidément passionnante. Me sentant inutile, je prends congé et remonte dans mes appartements. J'ai survécu à cette première journée. C'est déjà cela... J'espère que les autres ne seront pas aussi éprouvantes et surtout que le froid polaire qui subsiste entre moi et Drago se réchauffera quelque peu au fil des jours. J'en viens presque à regretter notre dispute de ce matin : au moins j'ai eu l'impression d'exister à ses yeux et de ne pas être un meuble du manoir...
À ma grande surprise, la semaine se passe plutôt bien. Guidée par Parvati, j'arrive à ne pas faire trop d'erreur de protocole et à ne pas complètement me ridiculiser devant la nuée de photographe qui m'accompagne à chacun de mes déplacements. Plus surprenant encore, j'en viens presque à apprécier mon rôle. Ma visite à Sainte-Mangouste est particulièrement passionnante : les médicomages me font visiter les différents services et répondent avec empressement à chacune de mes questions. J'adore apprendre tant de chose et découvrir ces nouvelles personnes, c'est plus que rafraîchissant après ces derniers mois. Nous passons un long moment dans le service des enfants et je réalise, à ma grande surprise, qu'ils me vouent une adoration sans borne. Cela me tue de l'avouer mais le ministre a raison : tout le monde me considère comme une sorte d'héroïne romantique et m'alloue un bien plus grand rôle dans le rétablissement d'une relative paix et l'abolition du système caste, que celui que j'ai réellement joué.
Le rôle n'est pas désagréable et l'est en tout cas bien plus que les dîners protocolaires interminables où personne ne s'attend à ce que j'ouvre la bouche. À part ces moments pénibles, je jouis d'une plus grande liberté que pendant tous les derniers mois réunis. Je vois à peine Drago, qui me laisse donc vaquer à mes occupations sans se préoccuper de moi, et j'ai accès à bien plus de pièces du manoir que lors de la Sélection. À commencer par la merveilleuse bibliothèque, où je passe le plus clair de mon temps libre, essayant de combler l'immense retard de mes connaissances en magie.
Outre les livres, je peux aussi consulter librement le journal, ce qui est un luxe dont je profite avec plaisir. C'est dans l'un des numéros de la Gazette du Sorcier de la semaine que je déniche pourtant l'article qui fait voler en éclat le semblant d'assurance que j'avais réussi à me reconstituer. Le titre racoleur est le suivant : « Le couple royal : conte de fée ou conte pour enfant ? ». Je suis alors confortablement installée dans mon lit, calée par plusieurs coussins en soie, une bonne tisane à la main. L'article est signé Rita Skeeter ce qui ne me rassure pas du tout sur son contenu. Qu'est-ce que cette vipère a encore inventé comme mensonges ?
Je parcours fébrilement les colonnes qui décrivent en termes élogieux notre mariage avec force description de « l'incroyable connexion qui semble exister au sein du nouveau couple royal ». Ironique. L'article est d'ailleurs illustré par une photo de moi et Drago en train de danser. Superbement vêtus, nous avons en effet fier allure. Malheureusement, la suite est moins réjouissante : la plume acerbe de Rita Skeeter peint ensuite un tableau étrangement juste de notre première semaine, déclarant que Drago et moi « se voient à peine, absorbés par leurs tâches respectives, et font même chambre à part » mais surtout que « le couple n'a pas le moindre geste de tendresse l'un envers l'autre, ce qui interroge sur le consentement des parties à ce mariage ». L'article se conclue par une formule lapidaire : « si le peuple anglais s'est réjoui d'avoir un nouveau couple royal, il devra attendre longtemps avant d'en avoir un héritier, à moins que quelqu'un se dévoue à expliquer au roi et à la reine que les enfants ne sont pas apportés par les hiboux. »
Je jette rageusement le journal qui va atterrir piteusement sur la table basse de ma chambre. Comment ce poison de Rita Skeeter a-t-elle autant d'information ? C'est à croire qu'elle a une cape d'invisibilité et passe chaque instant avec nous, ce qui n'est pas une perspective agréable. J'ai l'impression que mon intimité a été piétinée. Pire, si personne ne croit à la crédibilité de notre mariage, que va-t-il nous arriver ? Le ministre aura-t-il encore besoin de nous ou va-t-il s'arranger pour nous faire disparaître ? J'espère que Drago n'a pas lu ce torchon. La situation est déjà bien assez compliquée entre nous.
Comme s'il lisait dans mon esprit c'est à cet instant qu'on toque à ma porte. Après avoir invité mon visiteur à entrer, la silhouette de Drago s'avance. J'essaye de reprendre contenance même si sa venue me rappelle trop bien les lignes que je viens de lire. Que vient-il faire dans cette chambre où il n'a pas mis un orteil depuis notre arrivée ? Difficile pour moi d'être digne, affalée sur ces coussins. J'essaye de me redresser un peu dans mon lit et prend un air neutre et poli.
- Bonsoir, Drago.
- J'ai une nouvelle à vous annoncer Hermione.
Il se tient droit comme un balai au milieu de la pièce et cette vue est presque dérangeante tant cette chambre est devenu mon refuge au cours de cette semaine. Qu'est-il venu me dire ?
- Une bonne nouvelle j'espère.
- Je vais vous laisser en juger. Le ministre a été beaucoup plus enthousiaste que moi devant la proposition d'un voyage officiel. Je viens d'échanger directement avec lui et son équipe. Nous partons lundi prochain pour la Chine.
- Déjà ? Pour combien de temps ?
- Cela n'a pas été précisé mais j'imagine que quelques jours sur place suffiront. Néanmoins, le voyage ne sera pas rapide car nous emprunterons la nouvelle ligne ferroviaire du Magic Orient Express. Il y aura plusieurs escales sur le chemin pour nous permettre de rencontrer nos homologues à travers l'Europe.
En temps normal, l'idée de parcourir le monde à bord d'un train enchanté m'aurait enthousiasmé. Moi qui ne suis jamais sortie d'Angleterre ! Mais je vais devoir troquer le fragile équilibre instauré au manoir pour un voyage avec un homme qui me déteste et des journées probablement minutées. La perspective n'est pas réjouissante. J'aurais souhaité que notre séjour au Manoir soit un peu plus long avant de passer aux déplacements officiels.
- Qui nous accompagnera ?
- Quelques aurors, Severus, Miss Patil et Miss Chang. Nous serons une petite délégation.
Je prends le temps de digérer l'information. Au moins, il y aura Parvati, je ne serais pas seule avec Drago.
- Miss Chang ? Vous voulez dire Cho ?
- Elle a des liens avec l'aristocratie locale, cela nous sera très utile.
C'est logique. La nouvelle ne me ravit cependant pas plus que cela. Pourquoi continuons nous à être entouré des anciennes prétendantes de Drago ? Cela ne fait que rendre la situation encore plus bizarre.
- Très bien. J'imagine que ce n'est pas la peine de discuter les ordres du ministère. Il nous reste à préparer notre voyage. Je vous remercie de m'en avoir tenu au courant aussi rapidement. J'apprécie le geste.
Le blond se racle la gorge, l'air très gêné, et reste planté au milieu de la chambre. Un silence lourd se fait. Je le romps :
- Il y a autre chose ? A propos du voyage ?
Il se racle la gorge à nouveau. Je crois ne l'avoir jamais vu aussi gêné.
- Non, pas a propos du voyage. Vous... vous avez dû lire les journaux comme moi.
Il indique d'un mouvement du menton l'exemplaire de La Gazette qui est resté sur ma table basse. J'en rougis légèrement. Est-ce qu'il veut évoquer... l'article de Rita Skeeter ?
- J'espérais que nous n'ayons pas à aborder ce sujet tout de suite mais les murs de ce manoir ont décidément des yeux et des oreilles. Je crains qu'il nous faille régler ce problème.
- Ce problème ?
Je ne comprends pas où il veut en venir.
- Et bien, nous devrions en effet, pour qu'il soit crédible, disons... consommer notre mariage.
Un silence de plomb s'abat sur la chambre. Est-ce que j'ai bien compris ce qu'il vient de me dire ? De tous les moments que j'ai vécu avec Drago, celui là est définitivement le plus gênant.
- Pardon ? Mais... non !
- Nous n'avons pas le choix Hermione, réplique Drago en osant enfin lever ses yeux vers moi.
Bien malgré moi, un frisson me parcourt devant son regard. Ma résolution n'en est pas moins identique : je ne vais certainement pas coucher avec Drago parce que le ministère l'a décidé ! Encore moins avoir un enfant avec lui ! C'est du délire. Je reprends d'une voix plus assurée :
- C'est hors de question. Vous allez faire quoi ? Me violer ?
Je rabats ma couverture sur moi comme une protection. Je ne l'en crois pas capable mais tout de même.
- Certainement pas, s'exaspère-t-il, la situation est suffisamment pénible comme cela.
J'émet un bruit indistinct puis réplique ironiquement :
- Je suis désolée que ce soit aussi pénible pour vous. Vraiment. C'est vrai que pour moi c'est très agréable de recevoir des propositions aussi romantiques. Quelle chance j'ai !
- Ce n'est pas un jeu ! s'énerve soudain Drago.
Il fait quelques pas nerveux sur le tapis olivâtre avant de se planter devant moi.
- Vous croyez que cela me plaît ? Ce mariage, ce rôle de pantin du ministère... J'en déteste chaque moment mais je n'ai pas le choix. Ils ont mes parents !
Ce dernier mot a été dit d'une voix plus forte, presque désespérée. Je me lève, abasourdie par cette révélation et m'appuie sur le rebord de la cheminée en marbre blanc, comme pour reprendre mes esprits.
- Vos... parents. Mais non, c'est impossible, ils sont encore en fuite et recherchés par tous les aurors du pays.
- Non. Ils sont détenus en ce moment même dans les geôles les plus sécurisées du ministère. Croyez moi, j'en viens.
- Mais pourquoi ils ne rendent pas cette information publique ? Qu'est ce que cela leur apporte ? C'est absurde...
- Qui sait comment la frange la plus anti-monarchie du peuple réagirait. Ils voudraient sans aucun doute une punition exemplaire, voire leur exécution.
Il a un ricanement désabusé :
- Et puis cela leur fait un merveilleux levier de chantage sur moi.
Je comprends mieux l'empressement de Drago à donner en public l'image de couple parfait que nous dicte le ministre. Il est aussi manipulé que moi dans cette histoire. Le blond poursuit d'une voix presque suppliante :
- Vous me promettez... de jouer le jeu lors de ce déplacement ? Que nous soyons un minimum crédible ?
- Je vous le promets.
Même si cette comédie ne m'enchante pas, je ne suis pas un monstre. Et de mon côté, j'ai aussi interêt à jouer selon les règles dictées par le ministère.
- Merci. Et pour cette histoire de... enfin vous savez... Nous en reparlerons à notre retour au manoir. Rien ne presse. Avec un peu de chance, notre voyage fera diversion.
Nous nous dévisageons pendant quelques instants. Le regard de Drago se fait plus doux. Le moment me trouble plus que je ne voudrais bien l'admettre.
- Vous aviez raison sur un point Hermione. Nous sommes dans le même bateau à présent.
Puis il quitte la chambre.
à suivre...
