Lalitteraturen'estpasmonfort : les problèmes communicationnels, partenaires officiels des dramiones depuis 1997 ! ^^ A très vite ! ;)

5 - Retour à la réalité

Je me réveillais avec l'impression de ne pas avoir assez dormi. Je me redressai péniblement et prenais le temps d'émerger. Autour de moi, beaucoup d'élèves étaient déjà en train de se préparer. Seul Nott était encore enseveli sous les couvertures. Tous les matins, il se laissait cinq minutes, grand maximum, pour s'habiller et nous rejoindre dans la salle commune avant de monter à la grande salle pour le petit déjeuner.

Une fois attablé, je pris un énorme bol de thé au citron, espérant ainsi sortir de mes vapes. Mais alors que je venais de lever le récipient à la hauteur de mon visage, une centaine de hiboux entrèrent dans la grande salle, relativement chargés. Pansy était déjà en train de rapprocher son verre et son bol et d'écarter d'elle les plats à proximité pour éviter toutes projections causées par la chute du courrier.

-Je rêve de la poste moldue, marmonna-t-elle.

-Il semble que tout le monde ait acheté le journal du jour…

Soudain, le hibou de Nott, qui avait pris un abonnement à l'année chez la gazette du sorcier, lâcha le journal qui atterrit dans un plat contenant quelques scones nature. En une se trouvait une grande photo d'un homme aux cheveux blonds, presque blancs, échevelé, le visage émacié, habillé de l'uniforme des prisonniers d'Azkaban et qui levait progressivement vers le photographe un regard de tueur. Nous restâmes interdits. Je ressentis une forme de vertige : j'étais sensé comprendre quelque chose, ou plutôt j'avais compris quelque chose mais une partie de moi refusait que cette idée éclate à ma conscience. Le tournis s'accentua quand je remarquai que de nombreux élèves me cherchaient du regard et se laissaient aller à des messes basses.

-C'est ton père ? demanda Nott mais cette question sonna pour moi comme une révélation.

Le fait était que je ne le reconnaissais pas. Mal rasé, les cheveux coupés courts, amaigri au possible. Puis, le déclic. Je le reconnus avec son regard mauvais. Celui qu'il avait pendant qu'il me « corrigeait ».

Avant que je n'aie eu le temps de lire le titre de l'article, un hibou fit tomber dans mon breuvage une lettre estampillée « Magenmagot ». Cela me sortit de ma torpeur. Je retirai prestement la lettre de mon thé, alors que l'encre avait à peine commencé à déteindre. Je l'ouvris précipitamment sous le regard interrogatif de mes camarades. Cette lettre du juge m'indiquait que le procès de mon père commencerait en janvier et que j'y étais convoqué en tant que témoin. C'était aussi en cette qualité que je devais me présenter à une reconstitution du kidnapping et séquestration du trio, au manoir de ma famille. Ce fut comme une douche froide. Je m'y attendais, bien sûr, mais pas tout de suite, plutôt dans un futur qui ne devait jamais arriver. Je levai les yeux vers Pansy qui me regardait avec un air anxieux.

-Alors c'est arrivé…

Je n'eus pas la force de répondre. Une immense lassitude se saisit de moi. J'opinai seulement du chef tout en me replongeant dans la lecture de cette lettre très concise.

-Il faut te préparer, reprit Nott d'un air sombre. Si tu veux…

-Je veux qu'il paie, coupai-je avec les restes de ma voix brisée.

Soudain, un accès de rage me submergea :

-Il n'est pas question qu'il s'en sorte, martelai-je sur la table. Nous avons bien trop souffert ma mère et moi. Elle m'en voudra c'est sûr, mais qu'importe. Elle a choisi un mari, je n'ai pas choisi mon père.

Je me levai et quittai la salle précipitamment en oubliant mon thé refroidi. Je marchai d'un pas rapide dans les couloirs sans savoir où aller. Il me restait une demi-heure avant le début des cours. J'avais besoin d'un endroit retiré où je pourrais me calmer, je portai donc naturellement mes pas vers les toilettes abandonnées de Mimi Geignarde. J'accélérai jusqu'à courir, ouvris la porte avec fracas et, sans que je puisse dire pourquoi, je frappai avec mon poing droit de toute mes forces le miroir au-dessus du lavabo qui se brisa à l'impact.

-Qu'il se fasse aspirer une bonne fois pour toute, par Merlin !

A ce moment-là, toutes mes pensées se concentrèrent alors sur la douleur physique et je pus enfin oublier mon père et son foutu procès. Alors que je laissais couler malgré moi quelques larmes de rage, les mâchoires serrées à s'en briser les dents, je contemplais le sang de mes plaies ouvertes ruisseler dans le lavabo. Je fermais et ouvrais mon poing pour constater les conséquences de mon inconséquence. J'avais déjà vécu ce moment, à deux ans d'intervalle et malgré tout, ma détresse ne se faisait pas moins forte. J'avais espéré une accoutumance, mais je me trompais.

Soudain, j'entendis un bruit de verre crisser : la vitre se reformait ! Dans le miroir, je vis derrière moi une silhouette tendre le bras et faire le geste du « reparo » avec sa baguette. Lorsque la vitre fut parfaitement reformée, je me rendis compte qu'il s'agissait d'Hermione. Nous échangeâmes un bref regard à travers la surface polie. Je me retournai vivement, sur mes gardes et honteux d'avoir été surpris dans un tel moment de faiblesse. Elle venait visiblement de sortir d'une des cabines des toilettes, les yeux rougis et tenant à la main une lettre du Magenmagot. Elle aussi avait dû recevoir cette invitation à comparaître. Nous échangeâmes un long regard. Je n'arrivai pas à déchiffrer ce qu'elle semblait vouloir me dire dans son silence. Quelle interprétation pouvait-elle donner à mon geste ? Il fallait que je parle, qu'elle comprenne que nous allions témoigner au procès de notre même bourreau.

-Je vais tout faire pour qu'il paie, je te le promets.

J'avais l'impression qu'il y avait une nouvelle familiarité entre nous. C'était la première fois que je faisais une promesse à quelqu'un et j'étais bien résolu à la tenir. Elle avait l'air surprise par mes paroles. Je fus soudain frappé par la même impression que dans le train. Je ne sais pas trop pourquoi : l'éclairage peut-être ? Malgré ses yeux rougis et son air triste, pour moi, elle rayonnait, simplement. Et cette fois encore, je me sentais propulsé vers elle, avec une telle force, une telle énergie que j'aurais presque pu appeler cela de l'espoir. Ses yeux couleur ambre me fixaient et je me sentais complètement mis à nu. Sans que je ne sache pourquoi ni quelle suite donner à ce geste, je fis un pas en avant. Je fus sorti de mon état rêveur lorsqu'elle me demanda en essuyant ses larmes :

-Tu seras aussi à la reconstitution j'imagine ?

-Je suis un témoin.

Elle acquiesça d'un hochement de tête. Nous nous perdions dans le regard de l'autre pendant que le temps s'écroulait silencieusement avec l'espace. Je ne sais pas exactement ce que nous attendions. Soudain :

-Pourquoi ? Pourquoi nous as-tu sauvés dans le manoir ?

Surpris, je mis un temps pour formuler ma réponse.

-Je... il fallait que vous gagniez... Que le Seigneur des Ténèbres perde...

Puis la honte de me livrer me gagna et mon naturel ironique repris le dessus :

-C'est à dire qu'il ronflait comme pas permis et que je dormais juste à côté...

Elle esquissa un léger sourire mais je sentis sa déception. Il n'était plus le temps de fuir et je lui devais bien la vérité... sur ce point. Elle, me regardait attentivement. Ses larmes avaient séché sur ses joues. Je devais être le plus précis possible afin qu'elle comprenne tout. J'en étais presque à vouloir lui donner mes souvenirs, mais c'était peut-être un peu violent pour elle, que je sentais encore toute traumatisée de ce qu'elle avait pu vivre au manoir. Je pris un temps pour réorganiser mes idées puis je repris :

-En fait, dès la première année je n'avais pas la conscience tranquille... Mais j'essayais de ne pas y faire attention... Et puis... je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas comment, j'ai eu un déclic... Lors du bal de Noël de quatrième année je crois. J'étais désespéré. Mais le vrai cauchemar a commencé à partir de la renaissance de Tu-Sais-Qui. En sixième année, on m'avait confié la tâche de tuer Dumbledore... Et je priais pour que toutes mes tentatives hasardeuses tombent en échec. Je redoutais l'aide de Severus, car il aurait bien pu me faire réussir... A juste titre, puisque c'est bel et bien lui qui l'a tué. Et puis, en septième année, vous n'êtes pas venus à Poudlard. Je me doutais que vous prépariez quelque chose... Alors j'ai mis tous mes espoirs en vous. Je savais que vous arriveriez à arrêter cette horreur.. Tous les ans, il vous arrive un truc et pourtant... Vous vous en sortez toujours...

L'image de Harry au visage boursouflé me revint en mémoire, puis celui de Ron et enfin Hermione, inconsciente sur le sol du Hall. Je fis une nouvelle pause pour reprendre contenance et reconstituer ma voix que je sentais brisée. Je n'avais jamais autant souffert que ce jour-là. Quand je fus certain que mon émotion fût correctement entravée, je poursuivis :

-En réalité, je ne pouvais pas accepter qu'il t'arrive, qu'il vous arrive du mal à cause de moi... Vous étiez mon seul espoir.

Enfin, je réussis à formuler des paroles qui me brûlaient les lèvres :

-C'est grâce à toi. C'est toi qui les sauve à chaque fois. Sans toi, ils ne sont rien.

Elle eut un air surpris :

-Merci, répondit-elle avec un sourire triste.

Il illuminait son visage strié de larmes qui s'étaient remises à couler. Je croisai les bras contre ma poitrine pour réprimer l'envie de la sentir près de moi et me raclais la gorge en gardant les yeux fixés sur mes pieds.

-Mais de rien.

Cette réponse de mufle maladroit la fit pouffer. Ses pleurs s'apaisèrent et à nouveau ce feu dans la poitrine me reprit, j'aurais peut-être du m'y habituer depuis le temps, mais rien n'y faisait, cette sensation me surprenait toujours. Elle me considéra un instant d'un air rêveur, puis reprit la parole :

-Tu dirais que tu es quelqu'un de maladroit ?

Surpris par sa question qui sonnait plus comme une affirmation, je gonflais mes joues dans une moue perplexe et répondis :

-Qui ne l'est pas ?

Elle sourit :

-C'est vrai.

Brusquement, comme si elle émergeait d'un rêve :

-C'est l'heure du cours de métamorphose.

Et elle prit la fuite comme Cendrillon. Je la laissais s'éloigner silencieusement. Je ne voulais pas que l'on nous voit arriver ensemble dans cet état. Moins nous serions questionnés, mieux cela serait.

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Ce moment avec elle agit sur moi comme une éclipse. Il avait occulté toute la peine que j'avais en moi. Le feu dans ma poitrine ne voulait résolument pas s'éteindre. Je brûlais mais je n'aurais pas su dire si c'était agréable ou pas. Le trajet pour aller à la salle de cours me parut interminable. Tous les regards étaient posés sur moi. On chuchotait sur mon passage. Je devenais paranoïaque. Je ressentais chaque parole échangée, chaque rire comme une agression. Alors que j'avançais dans un couloir assez large et que je devais dépasser un groupe de sixième années de différentes maisons, un Gryffondor se détacha du lot sous le pouffement de ses camarades :

-Moi, j'ose !

Il se rapprocha de moi en roulant des mécaniques. C'était bien une manière de Gryffondor, ça.

-Malfoy ! Eh Malfoy ! Tu connais le point commun entre les détraqueurs et ta mère ? Ils…

Il n'eut pas le temps de finir car j'avais déjà sorti ma baguette et lançai un sortilège informulé, sans prendre le temps de m'arrêter. A leur grande surprise, il fut brusquement pris d'une étrange nausée jusqu'à ce que soudain il se mit à cracher des limaces. Je jubilais intérieurement : j'avais une affection toute particulière pour ce sort.

Cette petite péripétie avait au moins l'avantage de chasser Hermione et ses yeux tristes de mon esprit. Je hâtais davantage encore mes pas pour ne pas arriver en retard. L'euphorie de cette petite correction retomba bien vite : je n'avais donc plus qu'à attendre patiemment la convocation de Slughorn ou de McGonagall dans la matinée. Je soupirais d'avance en entrant dans la salle de classe. Malheureusement, les regards impudiques des élèves et du professeur ne cessèrent pas une fois la porte passée. Rien. Absolument rien ne me serait épargné. Ma peine s'était muée en rage qui s'abattrait sur quiconque essaierait de me provoquer.

Je m'assis nonchalamment sur la chaise à côté de Nott. Je l'entendais grincer des dents. J'appréciais qu'il prenne autant à cœur cette histoire.

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Pour la troisième fois de la séance, Lavande Brown se retourna pour nous lancer de furtifs regards qui, je suppose, se voulaient discrets. Visiblement incapable de se concentrer, chaque tentative de dupliquer un livre précis de la bibliothèque se clôturait sur un échec. Alors qu'elle nous épiait, apparut dans son dos un livre à la couverture épaisse digne d'un vieux grimoire mais qui ne contenait tout au plus que cinq pages déchirées.

Elle se retourna prestement pour découvrir l'objet et ne put cacher sa déception.

-Cinq pages déchirées : l'étendue de ses connaissances en magie persiflai-je, ce qui provoqua un rire discret chez Nott.

Cette remarque fit se retourner le trio.

-Parce que vous vous croyez mieux que tout le monde vous ? Hurla Lavande en pleine classe, à la surprise de tous ceux qui n'avaient pas entendu l'échange.

-Bah… oui, dis-je en toute honnêteté en désignant le livre L'histoire du Quidditch à travers les siècles que je feuilletais depuis vingt minutes en attendant le succès de mes camarades.

Je remarquai également que le trio avait réussi dès leurs premières tentatives. Je me demandai quel était le livre d'Hermione.

Nott fut pris d'un fou rire devant ma franchise décomplexée. Il se cacha les yeux machinalement pour essayer de reprendre contenance.

-Que se passe-t-il mademoiselle ? On vous entend depuis le couloir !

Avant même que le professeur ait pu réagir face à la situation, McGonagall avait fait irruption dans la salle. Elle traînait dernière elle le Gryffondor cracheur de limace, visiblement mal en point et soutenu par deux de ses amis.

-M. Malfoy, je vous prie de me suivre, lança la vieille femme d'un ton sec et sans appel. Je pris prestement mes affaires et suivis l'étrange cortège, la boule au ventre. Nous avancions lentement du fait des limaces à cracher et étions régulièrement houspillés par la directrice qui nous sommait de marcher plus vite.

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La remontrance de McGonagall fut brève mais efficace. A ma grande surprise elle accepta d'écouter les deux versions de l'histoire et nous fûmes tous deux punis. Lui dans la forêt interdite avec Hagrid et moi à l'infirmerie. Je me félicitais d'avoir échappé à cette maudite forêt qui m'avait toujours profondément angoissé. J'allais devoir soigner les subits maux de tête des élèves survenant en histoire de la magie et qui guérissaient instantanément lorsque l'heure de cours touchait à sa fin. Mme Pommefresh travaillait sur un remède depuis des décennies sans succès.

Mcgonagall libéra les 6e années mais me retint :

-Vous l'avez déjà constaté, les nouvelles de… cette journée ont rendu tout le monde nerveux. Je ne veux pas prendre le risque d'avoir des élèves présents dans les couloirs cette nuit et avoir de nouvelles inscriptions. Vous et les autres préfets patrouilleront.

J'acquiesçai en silence, en accord avec cette mesure, et pris congé.

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Harry savait ce que contenait la lettre qu'il avait reçue. Les réactions d'Hermione et Ron avaient été assez éloquentes. L'ouverture du procès des Mangemorts devaient s'ouvrir dans deux mois. Deux mois à se préparer, à rassembler ses souvenirs, s'entraîner à les formuler clairement, à ne pas se laisser décontenancer. Il savait qu'il n'était pas un très bon orateur. C'était Hermione qui savait faire. Ron et lui n'étaient bons que dans l'action.

Il pensa à Narcissa Malfoy qui l'avait sauvé lors de la bataille. Il lui devait tout, mais cette gratitude lui laissait un goût amer… celui de l'opportunisme. Si elle avait su son fils en sûreté, l'aurait-elle tout autant épargné ?

Un frisson le parcourut. Il jeta un regard de biais vers Ron qui semblait également se débattre avec ses propres pensées.

L'heure d'étude terminée, il rangea précautionneusement sa plume et ses rouleaux de parchemin dans son sac et partit chercher son éclair de feu. Il était à nouveau désigné comme capitaine de l'équipe de quidditch des Gryffondors et il avait réservé le terrain le plus vite possible, convaincu que cela changerait les idées à beaucoup de monde. L'équipe était au complet et avait hâte d'en découdre.

D'un coup de pied, Harry décolla du sol sur son balai. Il fit plusieurs tours de piste pour renouer avec ses sensations de vol. Il monta en spirale et ce n'est qu'à une vingtaine de mètres de hauteur qu'il commença à lâcher prise. Il fut pris d'un fou-rire incontrôlable qui faillit lui faire perdre plusieurs fois l'équilibre. Ginny arriva à son auteur, partagée entre l'inquiétude et la perplexité. Mais face à ce rire incontrôlable elle n'eut d'autre choix que de baisser la garde. Ce même rire impérieux la saisit malgré ses résistances. Ils se prirent les mains et tournoyèrent face à face en continuant de s'élever dans les airs avec ce rire qui ne semblait jamais vouloir finir.

Il fallut quelques minutes pour s'apaiser. Ils se rapprochèrent, front contre front et se sourirent. Pris par l'instant grisant, Harry guida Ginny dans des figures acrobatiques improvisées. A des montées en chandelle se succédaient des descentes en piquet, des roulades, des loops ou un ou deux mouvements de toupie. Ginny se laissa complètement aller. Elle oublia les autres et l'entraînement, appréciant le vent sur son visage et le caractère impromptu de ce ballet.

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La nuit commençait à tomber et les lumières de la bibliothèque s'étaient allumées. Nott passait un agréable moment avec lui-même et un manuel de métamorphose. Il rêvait de devenir animagus mais l'incertitude du résultat l'inquiétait. Si on se transformait en chien, en chat ou encore en rat, c'était assez facile à assumer mais imaginez : vous vous transformer en pachyderme ou en bigorneau… Il méditait sur cela quand il vit par la fenêtre passer dans la cour à la fontaine Justin Finch-Fletchley. Il se mit aussitôt sur le qui-vive. Ce Justin avait un je-ne-sais-quoi qui ne revenait pas à Nott. Il le savait bête et rancunier et c'était bien suffisant pour s'en méfier. Mais pour trouver quelque chose, il faudrait au moins le prendre en filature des semaines ! Difficile à mettre en place…

Nott essaya de se raisonner. Le fait était qu'il était révolté par le traitement de l'affaire des inscriptions. Rien n'avait été fait et lui, cherchait un coupable. L'excitation de la journée avait réveillé son angoisse. « Autant prendre le problème à la racine. » pensa-t-il.

Sur un coup de tête, il rangea ses affaires et quitta d'un pas rapide la bibliothèque. Il traversa la cour à la fontaine et dirigea ses pas directement vers la tour où se trouvait le bureau de la Directrice. Il récita le mot de passe et sauta prestement sur la première marche de l'escalier qui s'élevait dans un bruit de pierres frottées l'une contre l'autre. Il trouva McGonagall en train de siroter un thé en parcourant une paperasse qui semblait assommante.

-M. Nott, Vous n'étiez pas attendu.

L'air sévère de la vieille femme ne désarçonnèrent en rien le Serpentard qui prit le temps de s'avancer jusque devant le vieux bureau sous le regard bienveillant des anciens directeurs.

-Je viens vous voir concernant les insultes retrouvées sur les murs le soir de la rentrée.

D'un air ennuyé, la directrice abandonna sa lecture et s'adossa contre son siège. Elle poussa un soupir et retira ses lunettes.

-M. Nott, cela m'inquiète autant que vous. Il n'est pas impossible que cela recommence mais il est tout aussi possible que cela ne se reproduise pas.

-Vous savez que l'annonce du procès a replongé l'école dans le chaos. De nombreux Serpentards ont été de nouveau victimes de moqueries et de bousculades.

Elle considéra un instant le jeune homme avec son regard perçant.

-J'ai déjà demandé aux préfets de patrouiller cette nuit… J'espère que cela sera suffisamment dissuasif.

La mâchoire de Nott se crispa. Il passa une main nerveuse dans ses cheveux. McGonagall reprit :

-Quoi que vous pensiez, je sais que j'ai fait tout le nécessaire pour retrouver les coupables, en vain. J'ai interrogé tous les portraits mais ils dormaient. Ceux qui ont écrit ces insanités se sont montrés discrets. Je ne peux rien faire de plus. Vous êtes en colère mais cela ne changera rien.

Nott resta interdit. Il craignait les paroles qui lui brûlaient les lèvres. Elle s'accouda à son bureau dans une attitude attentive. Elle scruta le visage du jeune homme.

-Il y a autre chose, n'est-ce pas ?

Nott ne put rien formuler. Il acquiesça en serrant les dents. Il crut ne jamais réussir à dénouer ce nœud qu'il avait dans la gorge. Pendant ce temps, elle attendait patiemment avec un regard plein de bienveillance. Il prit une grande inspiration et se lança sans savoir ce qu'il allait dire ni s'il allait réussir à terminer ce qu'il avait commencé.

-Pourquoi …

Il se ravisa, sachant qu'il n'arriverait pas à tenir, décidant alors de changer d'angle d'attaque.

-Poudlard, c'est aussi chez moi. C'est chez Pansy et Blaise aussi…

Après un temps, il reprit :

-Nous aurions pu le protéger nous aussi.

La vieille femme saisit enfin ce que voulait le petit qui se trouvait devant elle. Elle poussa un nouveau soupir et eut un sourire douloureux.

-Je n'en doute pas, M. Nott. En temps de guerre, on prend des décisions radicales. On fait des sacrifices et la confiance est mise à rude épreuve. On ne peut pas faire dans la demi-mesure et tous ceux qui ne sont pas dans notre camp de manière certaine sont des ennemis.

-Cette décision de nous enfermer n'était que le résultat d'un amalgame. C'est ce même amalgame qui fait écrire des insultes sur les murs.

-Oui, c'est vrai. J'ai été victime de mes préjugés et sans doute le suis-je encore. Je n'ai pas quitté Poudlard depuis mes onze ans. J'ai vu Tom Jédusor s'élever et monter son groupe de Mangemorts. Tous appartenaient à la maison Serpentard. Et chaque génération avait sa propre terreur venant de cette même maison. Dans une moindre mesure, M. Malfoy remplissait parfaitement ce rôle. Alors, bien sûr, on se méfie. C'est un mécanisme tout à fait humain mais il faudrait être vigilent à ne pas tomber dans le piège. Malheureusement, en temps de guerre, on fait plus souvent des erreurs que des choses justes et il y a bien assez d'ennemis à combattre pour s'occuper de ses propres préjugés.

Nott acquiesça une nouvelle fois silencieusement. Il comprenait ce que disait McGonagall mais cela ne calmait pas pour autant sa colère. Il ne trouvait rien à dire, pour une fois. Il était complètement pris de cours. Soudain il prit conscience de la situation. Lui, à l'accusation. McGonagall, dans son bureau de directrice, à la défense. L'audace d'un côté, une sorte sérénité et d'acceptation des remords d'autre part. Elle reprit la parole :

-Ecoutez, je vous propose d'enquêter vous-même sur cette affaire. Sans doute ferez-vous mieux que moi. Vous viendrez régulièrement dans mon bureau pour faire un point sur l'avancée de vos recherches. Vous avez carte blanche. N'hésitez pas à vous faire seconder par les préfets. Je suis sûre que Miss Granger et M. Malfoy vous seront utiles.

Il releva la tête et croisa le regard perçant de son interlocutrice. Son air strict et sérieux lui firent comprendre que cette proposition n'était pas faite à la légère. Il prit congé rapidement. En descendant l'escalier, il sentit son cœur un peu plus… léger ?