ccassandre24 : merci pour ton soutien et tes compliments Je suis contente de savoir que la direction que prend le récit te plaît : il s'agira vraiment du cœur des intrigues désormais Allez, fin du suspens : bonne lecture !

20 - «Le prince des nuées ; qui hante la tempête et se rit de l'archer» («l'Albatros», Baudelaire)

Je restais interdit devant le corps sans vie de Nott, comme pétrifié. Il n'était pas vraiment mort, si ? Un sorcier aussi intelligent, doué, déterminé, ne pouvait pas vraiment mourir comme ça... N'est-ce pas ? Enfin... C'était Nott, quoi ! C'est à dire que, les amis ne meurent pas à nos âges... Pas en période de paix en tout cas ! C'était impossible ! C'était interdit ! Surtout pour une stupide marque. Surtout... pour moi !

Harry parcourut fébrilement le livre à la recherche d'une solution.

-J'aurais dû... ! J'aurais dû... ! J'aurais dû lancer mon patronus en renfort ! S'écriait-il.

Il jeta un sort révélateur de magie noire qui signala que Nott n'était pas ensorcelé. Quant à moi, je m'assis avec empressement près du corps en lançant le sort du vulnera sanentur d'une main tremblante.

Trois fois. Trois fois. La première pour arrêter le flux de sang. La deuxième pour cicatriser les blessures internes. La troisième pour refermer les plaies, m'expliquait Rogue l'année dernière.

Cette incantation, qui sonnait comme une comptine, avait sur moi le pouvoir d'une berceuse réconfortante. C'était elle qui m'avait sauvé, dans ces mêmes toilettes pour filles, après avoir reçu le Sectum Sempra de Potter, il y a deux ans. C'était la voix de Rogue, récitant la formule, qui m'avait retenu à la vie, comme un fil ténu et j'espérais que Nott l'entendait d'une manière ou d'une autre. Je voulais qu'à défaut de le soigner, au moins, elle l'accompagne où qu'il aille.

«Vulnera sanentur, sanguis recurrit, caro reparatur ; Vulnera sanentur, sanguis recurrit, caro reparatur ; Vulnera sanentur, sanguis recurrit, caro reparatur» Je relevais son T-shirt pour ausculter ses blessures. Le sort avait guéri les morsures mais malheureusement, il restait, au niveau de ses bras et de ses côtes, de nombreuses contusions, sans doute liées aux os brisés par le serpent.

Mais soudain, un bruit de respiration. Comme un noyé qui reprenait son souffle, Nott reprenait vie ! Sa respiration était désordonnée, chaotique, affolée, comme pour rattraper un retard et il se mit à cracher une écume sombre. Il voulait se mettre de côté pour pouvoir libérer plus facilement ses bronches de cette substance mais bouger lui était impossible. Je lui relevais la tête et lui lançais le sort d'anapneo pour ne pas qu'il s'étouffe. Il inspectait la pièce avec un air terrorisé.

-C'est bon, Nott, ça va aller.

Il finit par me regarder, toujours perdu et terrifié.

-Tu es revenu à toi, tout va bien, tu es vivant.

Après un temps, il finit par se calmer et ferma les yeux un temps en soupirant. Sa respiration devint profonde et il gémissait de douleur. Nous restâmes un moment, reccuillis, à écouter son souffle qui redevenait régulier comme s'il s'agissait du plus doux des concerts.

-Il est tiré d'affaire. Répondis-je au regard inquiet de Harry. Il ne reste plus qu'à réparer ses os. Ce ne sera pas une mince affaire mais un bien moindre mal.

J'appuyais mes paumes sur mes yeux pour me ressaisir : j'étais soulagé et d'un coup, la fatigue s'était abattue sur moi. A côté, j'entendis Harry soupirer à son tour de soulagement. Il se laissa tomber allongé sur le sol.

-Nuit de l'Enfer...

-C'est clair ! répondis-je.

Soudain, j'entendis un pouffement. Harry essayait tant bien que mal de contenir son fou-rire. Devant mon regard sans doute interloqué, il se sentit sans doute obligé de s'expliquer.

-C'était chaud ! Pardon, mais je suis tellement soulagé !

Et malgré moi, je ne pus me retenir de rire à mon tour, désolé pour Nott... Je dus même tenir fermement sa tête, posée sur mes genoux pour lui éviter d'être secouée par les spasmes de mon rire.

-Excuse-moi, je crois que c'est nerveux. C'est la fatigue ! réussis-je à articuler entre deux hoquets pour me justifier.

Mais ce dernier n'en parut pas gêné puisqu'un sourire se dessina sur ses lèvres.

-Bande de cons, vous me faites mal, grommela-t-il, grimaçant de rire et de douleur.

Cette première intervention de Nott ressuscité nous fit repartir de plus belle. Je réussis à me calmer un instant pour poser cette question vertigineuse d'une voix chevrotante de rire :

-On aurait fait comment ?

-Zou, dans la chambre des secrets avec le Basilisque, répartit Harry mort de rire et nous le suivîmes.

Il fallut quelques minutes pour nous reprendre.

-Il faut l'emmener à l'infirmerie, décrétais-je une fois redevenu sérieux.

Nott grogna pour contester.

-Trop risqué, réussit-il à dire malgré tout.

-Ce qui est risqué c'est de te laisser dans cet état.

-On va se faire virer...Juste du Réparos.

Je regardais Harry, indécis.

-Voler du réparos à l'infirmerie... on est plus à ça près, je pense, conclut-il.

-Merci Potter.

Je fis une moue peu convaincue, s'il y avait bien une personne à qui je ne confierais jamais ma santé c'était bien un Gryffondor, pas forcément réputés pour savoir doser le danger. En fait, je ne voyais qu'une personne sur qui me reposer. Bon, elle était Gryffondor, elle aussi... Mais elle, ce n'était pas pareil. Elle, elle saurait. C'était en son jugement que j'avais le plus confiance, peut-être même avant le mien.

-Que ferait Hermione, d'après toi ? demandais-je à Harry. Après tout, c'était lui qui la connaissait le mieux dans les situations de crise.

-Oh pitié, grommela de nouveau Nott.

-Elle nous arracherait la tête.

Un rictus se dessinait sur le visage de Nott. Décidément, il allait mieux. Harry reprit après réflexion :

-Elle prendrait le parti le plus raisonnable et elle suivrait le plus possible les règles... sauf qu'on s'est déjà beaucoup trop écartés... des règles.

-Je n'ai que des os cassés, rien de plus, insista Nott qui grimaçait de douleur.

-Ce n'est pas «quelques os», Nott, tu ressembles au fond d'un paquet de chips !

-Toujours à dramatiser, me répondit-il. On est vendredi. En un week-end, mes os auront le temps de se remettre d'équerre !

Je soupirais. Peu convaincu.

-Bon d'accord. Mais tu n'auras pas intérêt à bouger ! Si tu bouges, tous tes os se recolleront de travers.

-On dirait Pomfresh quand tu parles... se moqua Nott.

-Et je suppose qu'elle connaît son métier, répliquais-je, un peu honteux d'être assimilé à cette vieille sorcière, quoique sympathique.

-Bon alors, il faut aller chercher la potion, recadra Harry.

-Je sais où c'est, dis-je, fort de cette petite après-midi passée à l'infirmerie.

Il n'en fallait pas plus pour qu'Harry me mette dans les mains sa cape indivisibilité.

-Vu le tapage qu'on a fait, je suis sûr que tout le château est au courant qu'on est ici, mais on sait jamais.

Je le remerciais d'un signe de tête puis, je sortis des toilettes sans autre forme de cérémonie, pressé d'en finir. Je traversais les couloirs en courant le plus silencieusement que je le pouvais. Cela dit, la discrétion n'était plus que le cadet de mes soucis. Je voulais réparer Nott le plus vite possible et surtout que cette nuit cauchemardesque se termine dans les plus bref délais.

J'aurais tout donné pour prendre Hermione dans mes bras et me laisser aller. J'avais besoin d'elle.

J'arrivais rapidement à l'infirmerie et m'introduisis sans difficulté. Personne. Je me dirigeais à pas de loup jusqu'à l'armoire où étaient rangées les potions, dans l'arrière salle, laissée négligemment ouverte. Je trouvais facilement la bouteille et repartis aussi vite que j'étais venu : il fallait bien qu'au moins une chose se déroule comme prévu ce soir, question de statistiques. Je constatais avec satisfaction que la bouteille était à moitié pleine, avec un poids plus difficile à jauger que si elle avait été complètement remplie ou pratiquement vide.

Je revins vite aux toilettes, accueilli avec étonnement par les deux autres. Nott prit la gorgée réglementaire de la potion âcre et je repartis aussitôt replacer la bouteille où je l'avais prise.

Quand je revins, Harry avait endormi Nott.

-A ton tour, maintenant, me dit-il.

-Mon tour ?

Des yeux, il désigna mon bras, violacé, recouvert de sang coagulé et de chairs brûlées. L'adrénaline m'avait complètement fait oublier ce détail. C'est vrai, maintenant que j'y pensais, que la douleur me lançait des doigts jusqu'à l'épaule. Je me lançais le vulnera sanentur.

Je dois vraiment apprendre ce sort, sourit Harry.

Je lui souris en retour sans arrêter l'incantation. Malheureusement, la blessure, encore sous le coup de quelque magie, ne se referma pas complètement et mon bras restait couvert de plaies, qui, bien que moins profondes, ne restaient pas jolies à voir.

-Il faut bander, décrétais-je et je lançais le sort de Ferula qui fit surgir de ma baguette des bandages qui s'enroulèrent étroitement autour de mon bras.

-Tu as l'air doué en sort de guérison... remarqua le Gryffondor.

-Question de survie, répondis-je évasivement pour ne pas m'étendre sur les deux dernières années avec le Seigneur des Ténèbres en colocataire.

Nous fîmes léviter Nott jusqu'à notre dortoir. Avant de nous séparer, je serrai chaleureusement la main d'Harry.

-Merci... Vraiment... Merci ! Dis-je, un peu ému de voir jusqu'où il avait pu nous suivre.

Il sourit :

-Prends soin de lui.

J'acquiesçais et rentrais avec Nott dans la salle commune.

000

-Il a été bien long ce tour de ronde... Commenta Zabini avec un ton plein de reproches en nous voyant arriver.

Éclairé par le feu de cheminée, il semblait nous attendre, un livre à la main. Son côté jovial et expressif me faisait parfois oublier qu'il était un observateur et enquêteur hors pair. Il devait avoir remarqué nos manigances avec Potter depuis le début. Après tout, c'était un Serpentard, malin et stratège. Cependant, il ne devait pas tout savoir puisqu'il sursauta en constatant l'état de Nott et en voyant mon bras.

-Qu'est-ce qu'il vous est arrivé ?!

Je n'eus pas le cœur de lui mentir et lui contai toute l'histoire. Depuis ma stupide manche qui descend sous les yeux d'Hermione, lors de cette nuit passée ensemble, jusqu'à l'instant présent, Nott endormi au milieu de la salle commune. Il m'écouta attentivement de bout en bout puis il ferma les yeux avec un air sérieux qui lui était rare. Je m'attendais à me faire houspiller et je ne fus pas en reste :

-Est-ce que tu te fous de moi ?

-Je sais, nous n'aurions pas dû...

-Tu aurais dû nous le dire ! Pansy et moi n'aurions pas été de trop ! Il était évident qu'à trois vous auriez eu besoin d'aide !

-Je voulais vous protéger : si ça se sait, on est virés !

-Nous protéger ? Et qui protège Théodore maintenant ?!

-Écoute, je sais qu'on a fait une erreur...

-Une ? Une ? Parce que tu penses que pour en arriver là, il suffit d'une ?!

-Bon, d'accord, plusieurs, mais...

-Un tas tu veux dire ! Et Hermione ? Tu ne penses pas que tu aurais du en parler à Hermione ? Parce qu'après tout, c'est pour elle en premier lieu, qie tu te charcutes le bras !

-Je ne lui dirai rien. Je ne veux plus qu'elle soit mêlée à quoi que ce soit en rapport avec le Seigneur des Ténèbres.

-Elle est héroïne de guerre, Drago ! Elle nous défonce tous ! Elle s'est enfuie de Gringotts à dos de dragon ! Elle a éclaté des horcruxes ! Rien ne saurait l'inquiéter ou l'impressionner !

-Et justement, elle a droit à un peu de paix ! Ça fait sept ans qu'elle lutte. Tu te rends compte ? Sept ans ! Alors oui, je veux la préserver et gommer tout ce qui pourrait la faire souffrir. Elle mérite qu'on prenne soin d'elle... Plus que quiconque !

Il fit une pause en me considérant pensivement. Il se réinstalla confortablement dans son fauteuil et croisa les mains, les avant-bras reposant sur les accoudoirs. Il soupira, levant les yeux au ciel, vaincu.

-Harry a raison, il faut être plusieurs à lancer le sort. Je vous aiderai la prochaine fois...

-Tu es sûr ? Je ne veux pas que tu...

-Oui, je suis sûr. Maintenant, tais-toi et aide moi à coucher Théodore.

C'était sans appel : je me tus et aidais Zabini à déshabiller Nott pour le coucher dans son lit puis nous nous couchâmes à notre tour. Dans l'obscurité j'eus enfin le courage de prononcer :

-Merci, Blaise.

-De rien, Drago.

000

Hermione remuait rêveusement son thé en pensant aux deux heures qui l'attendaient le soir avec Drago quand soudain elle vit Pansy faire irruption devant elle. Elle s'installa à côté d'elle et en face de Ron qui lui lançait un regard furieux. Ginny haussa les sourcils, passablement surprise et Harry, mal réveillé sursauta.

-Bah quoi ? répondit-elle aux regards interloqués des quatre Gryffondors. Les autres sont encore en train de dormir : ils ont dû se coucher à pas d'heure...et j'ai vraiment trop faim ! Mais... j'ai trop de dignité pour accepter de petit-déjeuner seule.

-Pfff n'importe quoi, commenta Ron, il n'y a rien de honteux à manger seul.

-Tu as de la confiture sur l'oreille, mon bon ami, lui dit-elle et il prit une teinte cramoisie en essayant d'essuyer à plusieurs reprises une tâche qui n'existait pas.

Puis, elle scruta Harry.

-Et toi Potter tu as une mine affreuse ! Tu as vu tes cernes ?! On dirait que toi aussi...

Mais soudain, elle s'interrompit, un éclair de génie traversa son regard.

-Oh non Potter...

Ce dernier piqua du nez dans son bol pour éviter le regard perçant de la jeune fille.

-Qu'est-ce qu'il y a Harry ? Demanda Ginny d'un ton suspicieux, sans doute guidée par son excellent instinct qui lui venait de sa mère.

-Rien du tout, réussit-il à articuler dans un sourire qu'Hermione savait factice.

Il était clair pour Hermione que Pansy avait mis le doigt sur quelque chose. Ils devaient s'être retrouvés le soir pour réaliser elle ne savait quel projet délirant. Et ce projet, elle comptait bien le découvrir. La réponse de son cher et tendre ne sembla pas non plus convaincre la jeune rousse et elle regarda ses deux voisines de table avec un air déterminé.

Hermione était mi-inquiète, mi-furieuse d'avoir été mise de côté. Elle avait toujours été de la partie quand il s'agissait d'agir : elle savait en découdre ! Mais depuis que les Serpentards faisaient irruption dans leur vie, elle se sentait progressivement délaissée... Comme si elle n'était pas de taille !

Le petit déjeuner se termina dans une tension palpable et Harry battit vite en retraite prétextant un travail à faire en bibliothèque, suivi de près par Ron qui voulait fuir Pansy comme la peste.

-Je n'ai jamais vu Harry aussi pressé de se mettre au travail, se moqua Hermione.

-C'est un miracle qu'il ne se soit pas étouffé en buvant son thé, commenta Ginny, mauvaise.

-Est-ce qu'on va se laisser faire ? Est-ce qu'on va les laisser se foutre ouvertement de nous ? demanda Pansy qui espérait galvaniser les deux Gryffondors.

Mais ses efforts étaient inutiles : Hermione et Ginny étaient déjà tout à fait acquises à sa cause.

-Il faut d'abord trouver la raison de leur petite aventure, décréta Hermione.

-Des quatre, qui est la plus grosse balance selon vous ? demanda Ginny.

Pansy eut un petit rire qui ne laissait rien envisager de bon pour les garçons :

-Le mien sans hésiter. Il n'aime pas les secrets. Et Drago et Théodore sont hélas les plus grosses têtes de mule que je connaisse. Il s'imaginent être de vieux loups solitaires fiers, tourmentés et héroïques alors qu'en réalité ce sont juste deux gros inadaptés sociaux.

Les deux Gryffondors ne purent se retenir de rire devant cette description caustique mais réaliste.

-Non mais c'est vrai ! Quelle patience tu as ! Reprit Pansy en s'adressant à Hermione. Enfin, je suppose qu'un Gryffondor drogué à l'adrénaline, ça ne doit pas être de tout repos non plus !

-Il a déjà dû faire preuve de plus de patience encore avec moi, adoucit Hermione.

-Et l'adrénaline n'est pas toujours une mauvais chose, compléta Ginny en rosissant.

-Oh non ! Vous les défendrez plus tard ! Là on est en colère ! S'exclama Pansy.

-Alors que fait-on ? demanda Ginny qui avait repris son air déterminé.

-Au réveil de Blaise, j'essaie de lui tirer les vers du nez et on avise ?

-Il faut les avoir par surprise, qu'ils n'aient pas le temps de se concerter avant, remarqua Ginny.

-Mais Harry sait déjà qu'on les suspecte... réfléchit Hermione à voix haute. Ginny et moi allons le rejoindre à la bibliothèque pour nous assurer qu'il n'essaie pas de communiquer avec les autres.

-Rendez-vous à midi pour faire un point, suggéra Pansy.

Le deux autres acquiescèrent puis elles se séparèrent pour occuper chacune leur poste.

000

Blaise sourit de plaisir en voyant Pansy l'attendre dans la salle commune. La lumière verdâtre de l'eau du lac traversant les vitraux déposait sur sa peau des reflets changeants qui transformaient la jeune femme en créature fantastique. C'était comme une vision irréelle, ensorcelant tous les marins de passage. En tout cas, lui, étendu sur la plage, avait attendu sagement que la marrée ne l'emporte et que les courants ne le noient complètement. Ça avait pris du temps, mais il avait toujours été serein. Il était comme ces navigateurs expérimentés qui savent très bien que si la mer se retire, c'est pour mieux revenir et qui patientent sur leurs navires échoués d'être emportés au loin.

Elle lui sourit à son tour, lorsqu'il vint s'asseoir à côté d'elle. Elle se blottit contre lui et il passa un bras autour de ses épaules de sirène apprivoisée.

-Bien dormi ? Demanda-t-elle.

-Oui, j'étais bien fatigué de cette semaine mentit-il à contre cœur.

Il avait les mensonges en horreur et espérait que Drago aurait le courage de tout révéler rapidement.

-Oh, tu étais fatigué...

Il sentit immédiatement l'ironie de sa dulcinée et une bouffée de chaleur le submergea instantanément. Elle reprit :

-C'est étrange que Théodore, Drago et Potter soient aussi touchés par cette... fatigue.

Le sorcier se figea tandis qu'elle se délova de ses bras pour lui faire face. Elle l'avait attirée dans ses filets et la voila qui passait à l'attaque, Ondine sans pitié. Il sentit des gouttes de sueur de former sur son front.

-Étrange en effet... Je ne sais quoi te dire...

Et cette fois-ci ce n'était pas un mensonge. Elle pouffa et cela le glaça encore un peu plus. Elle plongea son regard sombre dans le sien. Un regard charmant.

-Allons, mon chéri, tu ne veux rien me dire ?

Il soupira de dépit et il allait sincèrement craquer quand Drago arriva dans la pièce. Il s'installa à côté d'eux en leur jetant un coup d'œil suspicieux.

-Hein que toi aussi tu es fatigué, Drago, tenta Blaise pour le rassurer.

-Très, répondit-il avec sa réserve habituelle. D'ailleurs, il est midi, on pourrait tranquillement aller dans la grande salle ?

-Et Théodore ? Il dort encore ?

-A poings fermés, répondit le grand blond. Il a veillé tard. Je lui ferai une petite assiette pour qu'il puisse manger à son réveil.

Pansy se leva d'un bond, ses yeux lançaient des éclairs.

-Allez-y seuls. Je dois aller à la bibliothèque et de toute façon, je suis de trop je crois. Mettez-vous bien au point sur vos mensonges pendant ce temps-là.

Elle se défit des bras de Blaise et ne se retourna pas malgré les appels du pauvre humain qu'elle laissait sur le rivage. Une fois la porte refermée avec fracas et essuyé le regard désapprobateur des tableaux, Blaise se retourna vers Drago, furieux.

-Les mensonges, c'était pour éviter qu'elles s'inquiètent et se mettent en colère, c'est bien ça ?

Drago passa nerveusement une main dans ses cheveux.

-Voilà pourquoi je déteste les mensonges, c'est tout a fait contre-productif. De toute façon, elle vont finir par tout découvrir, alors...

Drago soupira :

-Tu as sans doute raison...

Ils restèrent assis, sans rien dire, contemplant leur propre ruine approcher. Ils se levèrent, las, malgré leur longue nuit de sommeil et rendirent une dernière visite à Nott. Il souffrait mais ses os s'étaient bien recollés pendant la nuit. Une journée encore et il serait d'aplomb pour le dimanche. Drago nettoya la bassine souillée du fait des effets secondaires de la potion et lui donna à boire. Puis, il l'endormit pour une heure, le temps qu'ils reviennent avec de quoi manger. Enfin, ils se dirigèrent d'un pas pesant vers la sortie.

Une fois la porte ouverte, il tombèrent nez à nez avec Harry et Ron essoufflés. Ce premier parlait avec précipitation et de manière décousue, comme s'il avait la mort aux trousses.

-Elles se doutent de tout ! Elles me surveillent depuis ce matin ! J'ai pu m'échapper : je leur ai dit que j'allais aux toilettes. Pansy m'a fait croire que tu avais tout dit !

Et il saisit la chemise de Blaise par le col.

-Mais tu n'as rien dit, hein ? Tu n'as rien dit ?

-Non, j'ai rien dit ! S'exclama Blaise, se défaisant de l'emprise du Gryffondor.

-Je le savais ! Elles ont failli m'avoir !

Harry jetait des regards affolés en arrière et sursauta lorsqu'il aperçut trois ombres apparaître au fond du couloir. Elles s'approchaient avec lenteur, dans un bruit de chuchotement.

-Elles arrivent !

-Elles ont sûrement tout compris, reprit Blaise gagné par l'affolement d'Harry.

Un ricanement résonna dans la pénombre du couloir.

-Impossible, répondit Drago en essayant de garder la tête froide. Elles sont intelligentes mais pas omniscientes.

-C'est dans ces moments que tu regrettes Lavande Brown... se moqua Blaise.

-Mais qu'est-ce qu'il se passe ? Demanda Ron, complètement perdu.

-Ça, tu vas vite le découvrir, répondit Drago, ironiquement.

-Et que fait Lavande dans cette histoire ? Reprit le Gryffondor.

-Chut ! Ne prononce pas ce nom trop fort ! Prévint Harry. Ginny lui voue une haine mortelle.

Harry les regardait avancer, ralenties par sa perception effarée. Jamais il n'avait senti le temps s'écouler aussi lentement. Leur pas résonnaient dans le couloir et le sang battait aux tempes des trois garçons. Instinctivement, Harry et Blaise se reculèrent prudemment jusqu'à sentir le mur contre leur dos en laissant courageusement Drago devant. D'ailleurs, Harry crut voir ce dernier tenir discrètement sa baguette, comme s'il s'apprêtait à affronter une créature maléfique et sournoise.

-Cape d'invisibilité ? Chuchota Blaise.

-Dans le dortoir des Gryffondors, répondit Harry dans un souffle.

-Mais c'est vraiment n'importe quoi, grogna Ron d'une voix forte et agacée.

-Chut ! imposa Harry.

-C'est juste Ginny, Hermione et Parkinson. Rien de bien terrible.

-C'est ce que tu crois...

-Ce sont peut-être les sorcières les plus puissantes de leur génération. Qu'est-ce qu'il te faut de plus ? Fit remarquer Drago sardoniquement.

Cette remarque fit sursauter Ron : Ginny, c'était sa petite sœur, Hermione bah... c'était Hermione quoi... Quant à Pansy, il ne l'avait jamais envisagée.

-On est foutus, qu'est-ce qu'on fait ? Demanda Blaise tandis qu'elles continuaient à se rapprocher, leurs yeux luisant dans l'obscurité.

-Souhaitez-moi bonne chance.

000

Et sans crier gare, Harry, en bon Gryffondor, surgit du groupe et s'avança vers elles à pas comptés.

-Écoutez, on va tout vous expliquer...

-Oh, ça tombe bien, on est là pour des explications, répartit Ginny en croisant les bras.

Elles s'étaient arrêtées à quelques pas de nous.

-J'aurais dû être le plus rapide à avouer, se lamenta à voix basse Blaise à côté de moi.

-T'es complice, tu ne t'en sortiras pas mieux que nous, répartis-je, outré de son infidélité.

-Oui, mais faute avouée à moitié pardonnée.

-C'est vrai, on s'est retrouvés hier soir, finit par lâcher Harry.

-Mais encore ?

-C'était pour... c'était pour...

Et il regarda en notre direction pour trouver de l'inspiration. Je levais les yeux au ciel, exaspéré par cette situation ridicule et relevais ma manche pour révéler mon bandage. Puis, je me plaçais à la hauteur d'Harry.

-C'était pour faire disparaître ça.

Un silence de mort s'installa et le regard interloqué d'Hermione me transperça le cœur. C'était exactement ce que je voulais éviter. Elle me regardait en fronçant légèrement les sourcils, comme si j'avais dit une ineptie, quelque chose d'absurde ou d'impossible. Elle semblait ne pas réaliser. Quant à Pansy, qui savait à quel point cela me tourmentait, elle couvrit sa bouche de ses mains comme pour étouffer un cri, choquée.

-Faire disparaître quoi ? Demanda Ron.

-Sa marque, Ronald ! Tu le fais exprès ou quoi ?! Hurla Pansy, au bord des larmes.

-Et Théodore ? Il... Bégaya-t-elle, tandis qu'Hermione ne quittait pas des yeux mon bras.

-Il va bien, répondis-je en baissant la tête, incapable de soutenir les regards. Mais il doit se reposer. On a eu affaire à un sort... coriace.

Pansy releva son visage et regarda la voûte du plafond, pour reprendre contenance. Elle finit par poser de nouveau les yeux sur moi et agitait la tête, comme si elle peinait à se représenter ce que je lui disais, dépassée. Elle s'était mise à ressasser pour elle-même :

-Du n'importe quoi ! Du grand n'importe quoi !

-Et ton bras... Il va guérir ? S'enquit Hermione qui s'était rapprochée doucement de moi. Elle avait cet air préoccupé qui me mettait irrémédiablement en colère contre moi-même. J'étais sûr qu'elle était déjà en train de réfléchir à mille et une solutions pour le soigner.

-Je suppose, oui, mais ça reste moche pour l'instant.

-La marque ? Demanda-t-elle d'une voix faible.

-Toujours là, réussis-je à articuler après un temps.

Elle posa sa main sur mon bras avec un air douloureux et ma colère se transforma en puits sans fond, me dévorant les entrailles. Mais petit à petit, son expression se modifia et lorsqu'elle reprit la parole, son ton avait changé. Il n'était plus peiné mais chargé de colère.

-Comment avez-vous eu accès à ces sorts ? demanda-t-elle en essayant de garder un ton à peu près neutre.

-La réserve, avant-hier soir, répondit Harry, penaud.

-De la magie noire, déduisit-elle et cela sonna comme une affirmation qui n'appelait pas de réponse.

Ses yeux désormais lançaient des éclairs. Et enfin, l'explosion que j'attendais :

-Est-ce que c'est possible d'être aussi inconscient ?! Hurla-t-elle d'une voix suraiguë en gesticulant en tous sens. Vous n'avez aucune connaissances réelles en magie noire ! Prersonne n'en a vraiment ! Vous auriez pu vous tuer ! Ou même vous faire virer ! Tout ça pour quoi ? Une marque qui ne veut rien dire !

-Hermione, repris-je sans réussir à rester parfaitement calme, je ne peux pas garder sur moi cette trace de ce qu'il y a de pire en moi. Comment pourrais-je supporter que tu l'aies constamment sous les yeux ? Et toi ? Comment est-ce que je ne pourrais pas te dégoûter ?

-Comment ça "constamment sous les yeux" et pourquoi il aurait peur de la dégoûter ? Interrompit Ron.

-C'est pas le moment, Ron, répondit Ginny.

-Et tu ne me crois pas capable de te voir autrement ? S'exclama-t-elle, le visage déformé par la colère. Je ne serais pas capable de voir au-delà de tout ça ? Cette marque, c'est comme une cicatrice : Ça fait partie de toi, ça témoigne de ton passé mais ce n'est pas toi tout entier ! Cette marque, je la connaissais avant qu'on soit ensemble et est-ce qu'elle change notre présent pour autant ?

-Et comment ça "ensemble" ? Reprit Ron.

-Chut ! Le houspilla à nouveau Ginny.

Elle se mit à faire les cents pas pour se calmer.

-Crois-moi, me chuchota Harry, elle a fait de gros progrès concernant la gestion de la colère.

Enfin, après une dizaine de soupirs et une vingtaine d'aller-retours elle finit pas s'arrêter, les yeux fermés, puis, elle me considéra pensivement. Après quelques minutes écoulées dans un silence de mort, elle se rapprocha finalement de moi pour inspecter mon visage fermé et tendu par la honte, comme si j'étais un mystère à élucider. J'avais l'impression qu'elle ne mesurait pas le mépris que je pouvais ressentir envers ce moi faillible du passé. Puis, elle se rapprocha encore et éleva une de ses mains pour caresser ma joue. La tête baissée, je n'osais la regarder dans les yeux. Cependant, elle suspendit son geste :

-Écoutez les gars, vous avez l'air d'avoir beaucoup de choses à vous dire, tout le monde est en train de manger, alors allez à la tour d'astronomie. On vous prendra quelque chose à manger.

Je sortis de ma torpeur :

-Il en faut aussi pour Nott !

Blaise acquiesça et le groupe s'éloigna en direction de la grande salle.

-Mais ils vont faire quoi, là, au juste ?

-Ça, ça ne te regarde pas, Ronald, répondit sèchement une Pansy qui avait repris ses esprits.

000

Ils se regardaient comme des chiens de faïence et elle sentait bien que sans son premier pas, la situation resterait bloquée. Lui, semblait être coincé dans une tempête dont il ne savait pas se dépêtrer, passant nerveusement une main dans ses cheveux. Négligemment adossé au mur avec son habituelle élégance, il avait son regard dur qu'elle avait appris à supporter et à apaiser. Elle se rapprocha de lui et lui prit les mains.

-Écoute, finit-elle par dire, marque ou pas, tu ne changes pas à mes yeux.

Il plongea son regard, déjà attendri, dans le sien, ce qui encouragea la jeune femme à poursuivre. Elle prit délicatement le bras blessé, ce qui arracha une grimace de douleur à son propriétaire. Elle essaya de défaire le bandage mais il posa la main de son côté valide sur sa main à elle pour l'arrêter. Cependant, elle ne se laissa pas démonter.

-Arrête de me sous-estimer.

Il sourit mais ne bougea pas sa main pour autant.

-Je ne te sous-estime pas, au contraire...

-Tu me fais confiance ?

Il fronça les sourcils, ne voyant pas le rapport.

-Bien sûr que je te fais confiance.

-Alors crois-moi, je sais très bien ce qui peut me blesser ou pas. Et cette marque n'en fait pas partie. Mais ta défiance, si. Alors laisse-moi voir : je veux juste constater les dégâts.

Alors il soupira et laissa tomber sa main. Elle défit le nœud et déroula avec précaution les bandes, le cœur battant, s'attendant au pire des aspects. Lui, trop mal à l'aise, s'était redressé et fermait les yeux en laissant sa tête reposer contre le mur.

Enfin, elle atteignait la dernière couche de tissu, tâché de rouge. Ce qu'elle pouvait déjà constater de la bande lui faisait douter de ses capacités à soutenir la vue des plaies. Une bouffée de fureur et de tristesse la submergea : quel degré de souffrance était-il capable de s'infliger ? Et tout ça... pour elle ?

La peau était comme brûlée et meurtrie. Mais malgré les blessures, la marque restait clairement visible. Elle essaya de contenir du mieux qu'elle put son haut le cœur.

-Tu vois, ça te dégoûte...

En guise de réponse, elle l'embrassa pour le faire taire et pour dissimuler son émotion. Dans le mouvement, elle lança un sort informulé de guérison. Il sursauta en sentant le sortilège s'appliquer sur sa peau et sourit. Il lui rendit enfin son baiser en étreignant sa taille de sa main valide et elle relança le sort.

Lorsqu'ils se séparèrent, ils virent que la blessure s'était légèrement refermée.

-Étrange, hier soir, ça ne guérissait pas.

Hermione n'y prêta pas attention : l'important était que maintenant, ça guérisse. Elle lança le sort une troisième fois puis une quatrième et une cinquième. La peau avait pris un aspect rose et brillant, comme celle des grands brûlés. Elle lança alors une dernière fois le sort et la peau parut comme neuve. Aussi neuve que la marque.

Elle garda le bras soigné dans sa main et de son autre main, caressa la marque en retenant comme elle pouvait les frissons que lui provoquaient la vue de ce signe.

-Tu vois, ce n'est rien.

-Je réessaierai pendant les vacances.

Hermione leva les yeux au ciel. Pansy avait raison : c'était une vraie tête de mule.

-Et à nouveau te charcuter le bras et blesser Nott ?

-On s'en est sortis pourtant. Je ne force personne à me suivre et si Nott ne veut plus, je ne lui en voudrai pas.

Elle s'écarta de lui, en colère, mais il la retint par la taille :

-Qu'est-ce qu'il y a ?

-Comment je suis sensée accepter que tu te fasses du mal ? Je voudrais prendre soin de toi, mais toi-même, tu ne sais pas le faire et j'ai l'impression de ne servir à rien.

Il se figea en la regardant intensément. Enfin, elle se rapprocha de lui et lui caressa le visage.

-Non ? Demanda-t-elle.

-Si, finit-il par avouer en resserrant son étreinte.

Elle comprit qu'elle avait gagné cette bataille mais pas la guerre et qu'il n'était pas encore prêt à abandonner son idée.

Soudain, on frappa contre le chambranle de la porte.

-On a fini de manger et j'ai entendu des Serdaigles vouloir réviser leur astronomie ici, prévint Pansy.

Alors il se séparèrent en se rappelant bien l'un l'autre que dans une semaine, le manoir les attendait.