Ccassandre24 : Salut ! Ahahah, j'avais écrit le chapitre avant que nous commencions nos échanges, mais il est clair qu'en publiant il m'était impossible de ne pas y voir un clin d'œil ! XD En fait, j'adore cette figure mythologique, que je trouve vraiment fascinante et c'est une expression que j'utilise assez fréquemment tant à l'oral qu'à l'écrit. C'est presque surprenant qu'elle n'apparaisse qu'au chapitre 38 de cette fanfiction ! ^^ En effet, il y en aura ! Merci encore pour ton soutien qui compte toujours énormément pour moi ! J'espère que ce chapitre te plaira ! Il est assez nouveau concernant le style, qui se fait plus relâché, oralisant... On va dire que c'est... expérimental ! X) Je ne sais pas vraiment si j'aime ce chapitre ou pas. En tout cas, j'espère que la partie "post-Poudlard" t'intéressera ! Bonne lecture ! :)
Avis aux lecteurs : Voici le début du nouvel arc qui se déroulera donc Post-Poudlard. J'espère qu'il vous plaira ! N'hésitez pas à me faire un retour concernant un chapitre car j'avoue naviguer vraiment à vue ! ^^ Je vous souhaite une bonne lecture et à bientôt ! ;)
38 - « Il dit non avec la tête mais il fait oui avec le cœur» («Le Cancre», Prévert)
Les mains moites et la bouche sèche, j'attendais Zabini devant la porte d'entrée de Sainte Mangouste.
Tous les élèves de septième année avaient obtenu leurs vœux. Nous étions d'ailleurs tellement peu nombreux l'année dernière que des places étaient même restées vacantes.
En ce moment-même, Nott devait se sentir bête parmi les moldus, Pansy devait chercher une place dans son amphithéâtre, Harry et Ron devaient se faire tout petit dans le bâtiment des aurors et Hermione... je l'imaginais au secrétariat demander s'il elle pouvait déjà s'inscrire à des cours optionnels avant la date d'ouverture.
Je regardais les aiguilles de ma montre compulsivement : dans un quart d'heure, nous serions en retard. Qu'est-ce qu'il foutait, bon sang ?!
Elle m'avait parlé hier soir de ce projet, alors que nous prenions notre dîner dans le hall du manoir : elle voulait tout suivre et malgré mes avertissements précautionneux concernant la charge de travail et la compatibilité des emplois du temps, elle avait décidé de n'en faire qu'à sa tête. Soit ! Elle verrait bien ! Sa combativité m'amusait et j'aimais cette manière qu'elle avait de s'impliquer entièrement dans les choses qui comptaient pour elle. Il n'y avait pas de demi-mesure...
Et Zabini qui n'arrivait toujours pas ! Avec ou sans lui, dans cinq minutes, je rentrais dans le hall de l'hôpital, lieu de rendez-vous donné aux premières années. Tant pis !
Nous étions déjà en septembre... L'été était passé si vite, entre le manoir et le Terrier ! J'avais laissé reposer le chapitre «Greengrass» jusque là, ayant d'autres chats à fouetter. Je m'en préoccuperais quand la rentrée et tous ses chamboulements seraient passés. Déjà, se familiariser avec la vie à deux.
Pendant ces deux mois, tout s'était parfaitement déroulé. Hermione et moi étions sur un petit nuage. Elle avait trouvé dans les innombrables autres pièces du manoir une armoire qui lui plaisait pour y ranger ses vêtements et l'avait déplacée dans notre chambre. Elle avait ajouté un de ces fameux tapis à poils longs, véritables nids à poussière en descente de lit, de son côté. On avait aussi disposé un bureau et une bibliothèque pour ses livres à côté des miens. Je lui avais bien proposé d'avoir sa pièce à elle mais elle n'en avait pas voulu. Elle voulait que nous restions ensemble et j'espérais que cela ne soit pas une conséquence de sa crainte des fantômes Malfoy. Nous n'en avions pas revu, depuis février car nous évitions soigneusement les pièces où il était de notoriété publique qu'il y en avait : le bureau de ma grand-mère, la chambre violette, la chapelle, les chambres des domestiques ou encore la nursery.
Elle n'avait pas voulu toucher aux tentures ni aux rideaux des baldaquins-Le vert sapin lui plaisait-Mais elle avait souhaité qu'on y accroche des photos encadrées de son trio, d'abord et ensuite, bien sûr, des Weasley et de ses parents... et puis celles que j'avais cachées sur le côté de ma table de nuit et enfin... des miens... de parents.
Pour elle, j'aurais pu les renier parfaitement et m'efforcer de les oublier mais elle ne m'en demandait pas tant. Elle comprenait, je crois, qu'ils faisaient partie de moi, quoiqu'il se passe et sans que je puisse y faire quoique ce soit. Et, parce qu'elle les acceptait ainsi, tous comme elle acceptait cette cicatrice sur mon bras gauche, je l'en aimais encore plus.
Une minute. Une minute et je me tirais sans lui.
Je sentais bien que l'absence de ses parents lui pesait. Hélas, à part lui servir de famille comme elle le faisait pour moi, lui donner tout l'amour et la tendresse que je pouvais ressentir pour elle, je ne voyais pas quoi faire de plus. Dans un peu moins de trois semaines, c'était son anniversaire. Le troisième sans eux désormais. Je devais essayer de trouver quelque chose à faire. Inviter les Gryffondors au manoir sans doute. Et puis... un cadeau ? Si elle avait visé juste en m'offrant du matériel que je ne pouvais pas m'acheter pour mes études, je ne me voyais pas faire la même chose avec un code civil magique. Tout le monde, strictement tout le monde, devait lui offrir un livre à Noël et ses anniversaires et ce depuis qu'elle savait lire. Non. Je voulais quelque chose qui s'adresse à une autre partie d'elle. Une que les autres pouvaient négliger parfois ou méconnaître... Bon. C'était bien beau ce principe... Mais alors quoi ?
-Désolé ! S'écriait Zabini, essoufflé. Je voulais accompagner Pansy à son amphithéâtre.
Je me rigidifiais. Est-ce que c'est ce que j'aurais dû faire avec Hermione ? Je m'en voudrais plus tard. Pas le temps.
-Dans cinq minutes, on est en retard !
-Je sais ! S'exclama-t-il.
Et nous nous précipitâmes vers les vitrines du vieux magasin de vêtements désaffecté derrière lequel se cachait l'établissement, comme si nous avions la mort aux trousses.
-Nous sommes les nouveaux médicomages stagiaires, chuchotais-je au mannequin de la devanture.
-Passez.
Dans le hall, l'agitation habituelle, mais personne en particulier pour nous accueillir. Alors que je me retournais pour refermer délicatement la porte sur le monde moldu, j'entrevis Cho Chang et Hannah Abbot courir vers moi. Je retins de justesse la porte qui se refermait.
-Merci, me chuchota Chang, avec un air de petite fille gênée.
-Merci, répéta Abbot à sa suite, tout aussi mal à l'aise.
Est-ce qu'elles avaient été retenues elles aussi en tant que stagiaires ? Si c'était le cas, ça allait être l'horreur. Ça allait être Gnangnanland ! La première pleurait tout le temps et la seconde était le genre de fille à se plaindre sans arrêt.
-De rien finis-je par leur lâcher, contrit.
-C'est vous, les quatre stagiaires ?
Je me retournais vivement vers l'origine de la voix grave qui venait de poser la question.
-Oui, répondit efficacement Zabini avec l'air le plus sérieux du monde.
Notre interlocuteur était un homme grand d'une certaine carrure. Grisonnant et le visage aux rides burinées, il semblait pourtant encore être dans la fleur de l'âge.
-Je suis Hippocrate Smethwyck, directeur de cet hôpital.
Il nous dévisagea un par un, s'attardant davantage sur moi, puis, il reprit la parole pour nous expliquer le fonctionnement de l'hôpital sans autre forme de cérémonie. Saluer les gens et leur souhaiter la bienvenue, c'est pour les faibles.
-L'hôpital se sépare en six services : Accidents matériels au rez-de-chaussée, morsures par créatures vivantes au premier, virus et microbes magiques au deuxième, empoisonnement par potion et plantes au troisième, pathologie des sortilèges au quatrième et maternité au cinquième.
Son regard était revenu sur moi et me scrutait d'un air patibulaire, alors qu'il poursuivait son exposé. Je me rigidifiais mais soutins son regard. Je n'allais pas me laisser intimider par quelqu'un qui ne me connaissait qu'à travers les journaux et les rumeurs.
On s'était dit, avec Blaise, la semaine dernière, que ça allait être dur... Mais que ça irait quand même. Ça devait.
-Vous êtes au seuil de trois années d'études exigeantes. Si vous êtes ici, c'est que vous avez un très bon niveau en potion, botanique, défense contre les forces du mal, sortilèges et métamorphose. Ainsi, vous faites sans doute partie des meilleurs de votre génération... mais cela ne suffira pas. Car il faudra viser l'excellence, à défaut de pouvoir être parfaits. Vous recevrez des cours théoriques donnés par les différents chefs de service tous les lundi Salle Grunhilda de Gorsemoor, de 8h30 à 19h00. Lors de votre troisième année, on vous demandera de vous spécialiser. Vous pouvez dès à présent commencer à réfléchir.
Abbot s'agitait à côté de moi, sans doute impressionnée par ce discours énoncé d'une voix rude.
-Vous serez encadrés par des chefs de service qui seront chargés de vous enseigner ce qu'ils savent et de vous évaluer. Vous serez également tutorés par des élèves plus âgés. Ne négligez pas leur aide. Comme l'année dernière, nous n'avons pas reçu de nouvelles recrues, ce seront les troisièmes années qui s'en chargeront. L'année prochaine, ce sera votre tour de guider les premières années.
Il nous jeta un regard interrogatif et je me sentis obligé d'hocher la tête.
-Je vais constituer les équipes. En premier, je nomme les chefs de service puis en second les troisièmes années. Chang, avec Mage Abasi et Sarah O'Kelly aux accidents matériels ; Abbot, avec Mage Pye et Tracy Roberts aux morsures par créature vivante ; Zabini, avec Mage Whright et Joseph Andersen en maternité ; et... le dernier, dit-il en contractant sa mâchoire, avec Mage Wood, et Alexander Joyce aux empoisonnements...
Ça allait être dur, mais ça irait.
-Dans trois mois, vos changerez de service mais pas de référents. Dans un an et demi, vous aurez fait le tour de l'hôpital et vous pourrez commencer à vous positionner concernant votre spécialisation de troisième année.
Ensuite, voici quelques règles de conduite dans cet hôpital. Interdiction de se retrouver seul avec un patient, à moins d'y être autorisé. Vous observez uniquement pour l'instant. Vous commencerez vos consultations progressivement, au fur et à mesure de l'année, toujours avec votre encadrant pour vous superviser. Vous devrez toujours porter l'uniforme. Vous commencez vos journées à l'hôpital à huit heures. Les vendredis soirs et veilles de jours fériés, un binôme sera de garde. Vous vous répartirez les dates. Je compte sur vous pour que cela reste équitable. Il vous faudra faire des compromis.
Maintenant, nous allons aux vestiaires pour l'attribution de vos casiers. Vous mettrez vos uniformes puis vous rejoindrez votre encadrant.
Alors qu'il s'apprêtait à nous montrer le chemin, il se stoppa net et se retourna vers nous, comme s'il avait oublié quelque chose :
-Bienvenue, ajouta-t-il d'un ton que l'on emploierait plutôt pour souhaiter le contraire ; puis nous lui emboîtâmes le pas.
-Il est encore temps de s'enfuir, chuchota Blaise.
Je souris. L'année dernière aussi, il avait été question d'avoir le temps de s'enfuir... Mais rester m'avait plutôt bien réussi.
-Souviens-toi. Ça va être dur... mais ça va aller.
-j'en suis plus si sûr...
-On est ensemble, c'est tout ce qui compte. Tu flanches pas si je flanche pas.
-On aurait du faire commerce ou... droit, ou...
-Des métiers chiants à mourir.
-C'est clair ! esclaffa mon acolyte.
-Bon, alors on est bien là où on est !
Nous arrivâmes enfin aux vestiaires, vides.
-Vous trouverez vos uniformes dans vos casiers. Je vous laisse vous débrouiller pour trouver vos services.
Sur ce, il nous laissa tandis que je me dirigeais vers mon casier, entre celui de Lam et O'Brien. Étonnamment, ici, j'avais un nom.
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Hannah était au bord des larmes. Elle n'y arriverait jamais ! Pourquoi est-ce qu'elle avait choisi ça ? Sa mère lui avait bien dit pourtant : «Hannah, ce n'est pas pour toi enfin, voyons ! C'est trop difficile ! Tu ne vas pas y arriver !» Et son père ! Qui disait que ce n'était pas un métier de femme ! Mais elle n'en avait fait qu'à sa tête : la guerre lui avait donné une certaine force de caractère que ses parents n'acceptaient pas. Mais peut-être avaient-ils raison, après tout !? Elle était avec Drago Malfoy et Blaise Zabini, deux tronches qui réussissaient tout sans avoir à lever le petit doigt. Des hommes, pour qui tout semblait facile. Bien sûr, il y avait des exceptions. Hermione Granger ou Cho Chang par exemple. Mais elles, elles étaient au dessus de tout. Ce n'était pas pareil.
Hannah s'assit, les jambes tremblantes, sur le banc le plus proche d'elle, devant le casier de Malfoy. Plus loin à droite, celui de Zabini. Les deux se regardaient d'un air perplexe.
-Ici ? Comme ça ? demanda Zabini à l'autre Serpentard en considérant son uniforme qu'il tenait dans ses mains.
-Faut croire, répondit ce dernier en inspectant rapidement la pièce carrée qui devait faire quinze mètres carré tout au plus.
-Hannah, ça va aller.
Cho s'était accroupie devant elle et lui avait pris les mains, remarquant sans doute le tremblement de tout son corps et les larmes au coin de ses yeux.
-Quand faut y aller, soupira le blond en jetant un regard discret de gêne aux filles derrière.
Et il commença à déboutonner sa chemise blanche, laissant apparaître sa peau d'albâtre.
-Franchement, soupira à son tour le brun en l'imitant. Commerce, je te le dis !
L'autre pouffa en levant les yeux au ciel.
-Mais non ! Le rabroua-t-il gentiment.
Passé trois boutons, ils retirèrent leurs chemises pour révéler leurs dos sculptés tout en fermeté et finesse selon les exigences du Quidditch. Hannah se figea : elle n'avait jamais vu... de dos... comme ça.
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Remarquant la rougeur soudaine qu'avaient pris les joues de son amie, Cho se retourna. Elle se figea en découvrant les deux garçons à moitié déshabillés et prit à son tour une couleur écarlate.
-Vous pourriez au moins vous cacher ! Cracha-t-elle. Vous n'êtes pas tous seuls !
Malgré elle, elle sentait monter une bouffée de chaleur dû à l'immense gêne qu'elle pouvait ressentir à ce moment-là. Même Cédric, elle ne l'avait jamais vu ainsi.
-Et où ?! s'exclama Zabini ironiquement.
-Vous vous débrouillez !
-Eh ben débrouille-toi toi-même pour fermer les yeux, si la promiscuité te gêne, répliqua Malfoy en passant son haut.
Cho se crispa car elle n'avait rien à rétorquer à ce mufle.
-Dépêchez-vous et sortez ! Qu'on puisse se changer à notre tour ! Finit-elle par répondre alors qu'il baissait son pantalon sur ses jambes musclées en longueur.
Vraiment !
-Si non, tu nous tournes le dos et tu te changes en même temps, comme ça, personne ne regarde personne, s'impatienta le blond, une légère couleur rose semblait également gagner ses joues.
Ainsi, ce pauvre mec pouvait quand même ressentir un peu de honte ! Tourné vers elle, il ajustait désormais l'élastique de son nouveau pantalon autour de sa taille en sortant les pans de son haut qui s'y était glissés, révélant furtivement des abdominaux discrètement dessinés.
-Ton casier est seulement espacé de... quatre casiers du mien ! Éclata la Serdaigle. T'es crétin ou quoi ?!
Il se rapprocha alors, trop près, l'air exaspéré en levant les yeux au ciel. Elle n'aurait jamais dû l'insulter.
Une odeur de cèdre.
-Mais que veux-tu que je regarde, enfin ?!... Pour qui tu me prends ?!
-On est pas des sauvages ! Ajouta Zabini.
Le blond renchérit après avoir repris suffisamment contenance pour se forger un rictus mauvais :
-Et en tout cas, toi, pour quelqu'un de gêné, tu t'es sacrément bien rincé l'œil.
Et, avec un dernier regard assassin, il quitta la pièce suivi de Zabini qui ne put réprimer un pouffement discret.
Co-nnard.
Et dire que ça sortait avec Hermione Granger.
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Je m'arrêtais quelques pas après avoir passé la porte en regardant Zabini.
-C'était...
-Peut-être un peu violent.
-Ouais.
-Mais bien envoyé.
-Elle cherche, aussi !
-C'est clair !
-Bon... je suppose que j'irais m'excuser ce soir...?
Il acquiesça en silence puis de nouveau explosa de rire.
-Zabini ! Au boulot ! Tonna la voix Smethwyck. Et ton copain, pareil ! Vous vous chuchoterez des mots doux plus tard.
Nous nous raidîmes instantanément.
-J'y vais, murmurais-je dans un souffle, n'osant bouger les lèvres. Troisième étage.
-Je monte aussi. Quatrième étage.
-Cinquième.
-Toi ?
-Non, toi ! Maternité c'est au cinquième !
-Ah oui !
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J'arrivais au troisième étage, laissant Zabini poursuivre son ascension jusqu'à l'étage qui lui plairait. A chaque niveau, il y avait une sorte d'accueil où s'entassaient dossiers, grimoires et divers instruments de mesure. Des feuilles de parchemin se remplissaient seuls à l'aide d'efficaces plumes à papotes tandis que de temps à autre un objet se mettait à siffler ou à tourner sur lui-même. Un jour, je saurai tout ce que cela veut dire.
Une femme grande et forte d'une quarantaine d'année avançait vers moi avec une démarche assurée.
-Malfoy.
Ce n'était pas une question. Elle savait que c'était moi. On me reconnaissait à la minute même où j'entrais dans une pièce. Je ne comptais plus le nombre de fois où l'on m'avait dévisagé plus où moins discrètement depuis que j'avais passé les portes de l'hôpital. Exactement comme à Poudlard... où partout ailleurs. Protégé au manoir ou au Terrier pendant ces deux mois, j'avais presque oublié cette sensation de brûlure.
Oui, un mangemort médicomage, ça étonne.
-Je suis le Mage Wood. Joyce ! Clama-t-elle d'une voix forte. Viens ici !
Je commençais à me demander si, pour faire carrière ici, il ne fallait pas avoir une voix de stentor et une amabilité de bouledogue.
Alors un homme aux cheveux blonds mi-long, le visage parsemé de tâches de son et un sourire de biais rappliqua en trottinant comme s'il était en train de faire un footing. Son visage me disait bien quelque chose... J'avais du le croiser de temps à autre dans les couloirs de Poudlard. Il n'avait pas fait partie d'une équipe de quidditch, ni n'avait été préfet et ce ne devait pas être un Serpentard.
-Voici Joyce. Joyce, tu lui présentes le service puis vous me retrouvez devant la chambre de Mme Wilson.
-Très bien, Mage Wood, répondit-il d'un ton cajoleur.
Au secours.
Joyce me fit effectivement le tour de l'étage avec ses manières de poseurs. Je pouvais bien parier mon manoir que ce mec était un Gryffondor. Alors que nous passions dans la salle d'attente où, visiblement, quelqu'un avait... vomi (?) (Flaque bleue qui fut instantanément nettoyée d'un coup de baguette magique par Joyce), il finit par engager une conversation plus personnelle que le simple descriptif des salles.
-Et sinon... pas trop stressé Malfoy ?
-Stressé de quoi ? répliquais-je avec mon sourire narquois et ma nonchalance de combat qui servaient de paravent, occultant toute l'angoisse que je pouvais effectivement ressentir.
Il sourit d'un air entendu.
-Ça ne doit pas être facile...
-Quoi donc ? demandais-je ne feignant une nouvelle fois la naïveté. Je ne savais pas pourquoi, mais je me sentais particulièrement tendu.
-Bah plein de gens pensent que t'es un mangemort.
Les pieds dans le plats, donc. On a laissé le tact dans son casier avec ses chaussettes, à ce que je vois.
-Alors plein de gens se trompent, répondis-je froidement.
-J'étais là, en février, quand tu es arrivé, inconscient et brûlé au troisième degré. Service des accidents matériels. J'ai épongé une encre noire qui s'écoulait de ton bras, nuit et jour, sans s'arrêter. Aucun sort ne pouvait arrêter le flot, jusqu'à ce que la cicatrice blanche apparaisse.
Je déglutis difficilement.
-Si je suis un mangemort, pourquoi tu t'intéresses à moi ?
-Parce que je suis fatigué de la guerre et que je suis ton parrain.
-Être parrain, ça n'engage à rien.
-Si : y a une note de participation.
Je levais les yeux au ciel, désabusé. Peut-être Serdaigle, finalement.
-Mais au delà de ça ! reprit-il. J'ai lu le Sorcière Hebdo...
-Tu y as participé aussi, non ? ironisais-je en pensant qu'un indicateur travaillant à Ste Mangouste avait révélé à Skeeter qu'Hermione et moi étions ensemble.
-Comment ça ?
-Laisse tomber.
-Écoute : je te crois, c'est tout. Tu ne vas quand même pas m'en vouloir parce que je te crois, non ?
-Non.
-Tu vas avoir deux fois plus de choses à prouver que les autres. C'est comme ça. Je pense que la majorité n'est pas spécialement contre toi, mais elle est silencieuse. Ceux qui te haïssent, au contraire, ne manqueront pas de te le faire savoir. Tu en as déjà fait les frais, j'en suis sûr. Il faudra juste... relativiser... La nouvelle de ton arrivée a eu l'effet d'une bombe. Smethwyck a voulu refuser ton dossier mais McGonagall est restée ferme. C'est remonté jusqu'au ministre de la magie. Tu te rends compte ? La moindre erreur, crois-moi, et tu vires ! Alors... sors tes crochets de serpents, parce que tu vas devoir mordre. Smethwyck t'a collé avec Wood parce qu'elle a la réputation de briser ses étudiants.
-T'as l'air entier pourtant.
-Oui, je la flatte comme pas permis. Elle est la reine sur cet étage. Incline toi sur son passage. Elle ne résistera pas à ton ton cajoleur de Serpentard.
Je ne pus réprimer un rictus. Fayoter, je savais faire, même si cette pratique désormais me répugnais.
Ça allait être dur, mais ça irait.
-Autre chose...
Je lançais un regard interrogatif à mon parrain.
-Tu crois que y a moyen avec Cho Chang ?
Je pouffais : je m'attendais à tout sauf à ça.
-T'aimes passer des mouchoirs et tapoter des dos ?
-Toujours ?
-Oui, répondis-je, contrit, pas très fier de ma blague.
Mais j'étais toujours un peu en colère suite à notre dispute dans les vestiaires. Franchement ! Que voulait-elle qu'on fasse !?
-Changer d'endroit lui fera du bien.
Je levais vers lui un regard surpris.
-Bah quoi ? Je ne suis pas le seul ! Se sentit-il obligé d'expliquer. Tous les garçons de Serdaigle étaient amoureux d'elle à Poudlard ! Et pas seulement ! Son aura dépassait les frontières...
-N'importe quoi ! pouffais-je en levant les yeux au ciel.
-Je n'ai pas de moqueries à recevoir de quelqu'un appartenant à l'autre équipe !
-Quelle autre équipe ?!
-L'équipe Granger. Quand on est pas amoureux de Cho Chang, on est forcément amoureux d'Hermione Granger.
Je riais franchement. Il n'avait peut-être pas complètement tort.
-Joyce ! Malfoy ! Dépêchez-vous ! Hurla-t-on dans le couloir.
Alors Joyce prit de nouveau cette démarche de footing ridicule pour aller à sa rencontre et je me calquais sur lui. Je jouerais des claquettes s'il le fallait, déterminé à atteindre mon objectif.
Nous arrivâmes devant notre tutrice. Son corps massif cachait pratiquement tout l'encadrement de la porte.
-Joyce, le rapport, aboya-t-elle.
-Véronica Wilson, soixante-deux ans. A confondu des amanita virosa avec des coprinus comatus.
Je haussais les sourcils malgré moi : quand même ! Ces champignons n'avaient rien à voir l'un avec l'autre ! Elle n'avait pas remarqué cette odeur de rose fanée si caractéristique de l'amanite ? Et son pied pelucheux ? Et sa couleur blanche immaculée qui tranchait tant avec celle bordée de noire du coprin ?!
-Une remarque ? cingla-t-elle en me regardant.
-Une question seulement, Mage Wood : je me demandais quelle avait été la quantité ingérée, répondis-je avec mon ton le plus mielleux.
-On y vient, grommela-t-elle, peut-être embêtée de ne pouvoir me réprimander. La suite, Joyce.
-Elle en a ingéré... soixante-douze.
C'était une blague ! Je revêtais vite mon masque de marbre alors que Wood me guettait du coin de l'œil.
Quand même, en manger soixante-douze... Il fallait le vouloir à ce stade ! ... Il fallait... le vouloir ?
-C'est elle qui s'est présentée à l'hôpital ? demandais-je spontanément, sans réfléchir, oubliant bien vite le principe de précaution fondamental qui consistait à tenir sa langue.
-Une voisine l'a trouvée dans la cuisine en train d'en manger, préparés en omelette, en salade et en soupe. Elle l'a emmené tout de suite à l'hôpital.
Je me redressais, le regard perdu vers le plafond, pensif. Sa voisine. Je frissonnais en l'imaginant prendre son temps pour préparer tout ça...
-Que sait-on sur elle ? Elle est mariée ? Des enfants ? Son travail ?
-Quel rapport ? coupa Wood d'un ton agacé.
-Aucun, je vous prie de bien vouloir m'excuser, souriais-je de nouveau.
Je pensais toujours à Hermione lorsque je m'excusais ainsi.
Me concentrer. Et se taire, par Merlin.
-Malfoy, quels sont les symptômes d'un empoisonnement à l'amanite vireuse ?
-De fortes nausées, des douleurs gastriques, des diarrhées et des vomissements qui apparaissent entre quatre et seize heures après l'ingestion. La destruction du foie commence à partir du 6e jour. Puis la mort.
Wood préféra grogner pour confirmer plutôt que de dire que j'avais raison. Ça lui aurait sans doute écorché la bouche.
Optimal en botanique, magueule.
-Combien faut-il manger d'amanite vireuse pour que la dose de toxine ingérée soit létale ?
-Une seule.
-Le premier champignon a été ingéré une heure avant son admission. Nous avons lavé l'estomac. C'est le cinquième jour d'observation. Nous allons l'ausculter. Joyce, tu t'en charges.
Joyce acquiesça silencieusement et frappa trois coups secs contre la porte. Il l'ouvrit sans attendre de réponse.
Véronica était assise dans son lit et regardait par la fenêtre, l'air rêveur. Cette vision me serra le cœur. Elle me faisait penser à ma mère pendant la période de la guerre, je ne sais pas trop pourquoi.
-Bonjour, Mme Wilson. Comment vous sentez-vous aujourd'hui ?
-Bonjour... Oh, ça va, sourit-elle timidement en lissant le drap rabattu sur la couverture.
-Pas de douleur à l'abdomen ? Demanda Joyce en se rapprochant.
Elle dodelina de la tête doucement pour signifier la négative. Il sortit un stéthoscope de la poche de sa blouse pour écouter son cœur et ses poumons, de manière tout à fait routinière.
-Pas de nausées, de diarrhées ?
De nouveau, elle fit «non» de la tête. Il enchaîna par une prise de sang et un prélèvement d'urine.
-Très bien ! Dans ce cas, je pense que tout à l'air en ordre ! On va analyser tout ça quand-même pour être sûrs !
Elle sourit faiblement.
-Au revoir, Mme Wilson !
-Au revoir...
Et nous sortîmes de la chambre aussi vite que nous étions venus.
-Bon tu apportes ça rapidement au laboratoire et tu nous rejoins directement devant la porte de M. Winter, finit par dire Wood au sortir de la chambre en plaquant les échantillons contre ma poitrine. Je gardais ce sourire poli dont la fiabilité avait largement fait ses preuves depuis McGonagall à Ombrage, en passant par Rusard et Lockhart. Je sentais que j'allais en faire, des aller-retours, pendant cette année. Qu'importe. J'en ferai moins lorsque je serai moi-même chef de service.
-Allez, on a du pain sur la planche, reprit-elle en s'adressant à Joyce alors que je m'éloignais, les tubes encore chauds de leur contenu dans les mains. Une intuition, peut-être bête, celle d'un débutant, me faisait croire qu'il fallait creuser un peu plus. Je devais la voir seul.
Je fis un crochet au cinquième étage pour intercepter Zabini qui changeait une couche sous les cris d'un bébé joufflu. Au moins je n'étais pas le seul à me faire hurler dessus lors de cette matinée.
-Tu ne regrettes rien, n'est-ce pas ? lui soufflais-je, un sourire en coin.
-Qu'est-ce que tu fais là ? Tu vas encore te faire reprendre.
-Juste, ce midi... j'aurais sans doute un peu de retard...
-Pourquoi ?
-Je te raconterai tout.
-A peine deux heures que tu es là et déjà tu n'en fais qu'à ta tête ! Ce n'est pas sérieux !
-Je gère.
-Tu gères rien du tout !
-Mais si, ça va le faire ! M'exclamais-je, légèrement vexé de sa méfiance.
Il leva les yeux au ciel alors que je me détournais pour retourner au troisième étage.
Je sentais bien l'épée de Damoclès au dessus de ma tête... «La moindre erreur et tu vires» ; mais, d'un autre côté, il était hors de question que pour des questions politiques je me contente d'un travail bâclé.
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Midi arriva bien vite. Wood partit manger avec Joyce alors qu'elle me confiait le nettoyage de la salle d'attente. C'était ma chance. Je nettoyais tout d'un coup efficace de baguette magique. Après avoir fait place nette, je me glissais dans les couloirs jusqu'à la chambre de Mme Wilson. Je frappais deux coups brefs, l'oreille collée à la porte.
-Entrez.
Je m'exécutais. Je la trouvais les yeux rougis, cachant comme elle pouvait les mouchoirs usagés sous le drap.
-Pas besoin de cacher, vous savez.
Elle se figea, comme une petite fille prise en faute. Je m'approchais doucement et fis le tour du lit pour m'asseoir sur un tabouret, dos à la fenêtre, à sa gauche. Elle me regardait avec un air interrogatif et peut-être un peu inquiet. Incertain, je commençais :
-Qu'est-ce que vous faites dans la vie ?
Elle pouffa d'un rire sans joie :
-Apothicaire.
-Vous êtes bien étourdie comme apothicaire, me moquais-je gentiment.
-On m'a toujours dit ça.
-Et puis... c'est surprenant d'aimer les champignons au point d'en manger soixante-douze.
-En soupe, pourtant, c'est excellent.
-Vous me donneriez votre recette ? Sans Amanite, bien-sûr.
Elle pouffa encore, mais pour de vrai cette fois, je crois.
-C'est simple : plus vous mettez de crème fraîche, meilleur c'est !
-Je suis toujours déçu, lorsque je me rends compte que les choses les plus simples sont les meilleures, souriais-je.
-Vous aimez quand c'est compliqué ?
-C'est plus intéressant quand c'est compliqué, non ?
Elle acquiesça en silence, me transperçant de son regard couleur de nigelle.
-Je vous crois bien, Drago Malfoy.
Nous nous sourîmes. Pas besoin de badge : elle aussi, comme tout le monde, elle m'avait reconnu.
-Mon mari est mort pendant la guerre. Il était né-moldu. Tué pendant une rafle. J'ai réussi à m'enfuir à temps. On venait d'acheter une maison en Écosse. Il n'y a plus rien qui me retienne.
J'acquiesçais en silence, bien incapable de répondre. Je me souvins soudain que dans les faits, j'étais mauvais lorsqu'il s'agissait de réconforter les gens. J'avais seulement réussi, par miracle, avec Hermione... Et c'était bien la seule.
-Je suis désolé, pour votre mari, réussis-je à articuler et un silence s'abattit sur nous.
Elle fut la première à briser cet état.
-Je m'attendais à ce que vous essayiez de faire la liste de ce qu'il pouvait me retenir...
-La soupe aux champignons, déjà, ironisais-je du tac au tac sans réfléchir.
Elle pouffa.
-C'est vrai.
Un nouveau silence s'étendit.
-... Mais ça ne fait pas vivre, la soupe au champignon, reprit-elle après un temps.
-Non.
De nouveau, le silence.
-Peut-être... que vous pourriez essayer d'autres soupes. Comestibles, j'entends.
-Essayer ?
-Accepter de passer à une autre soupe, même si c'est votre préférée. C'est la saison des potimarrons, bientôt.
-Avec des châtaignes dedans.
-Par exemple.
-Je ne promets rien.
-Je n'attends rien. Mais en sortant, vous pourriez aller chez un bon maraîcher qui saurait vous conseiller, plutôt que de partir cueillir des champignons en forêt toute seule.
-Je ne connais pas...
-Je vais me renseigner pour vous.
Elle me sourit de nouveau.
-C'est gentil à vous, M. Malfoy. Merci.
Je lui rendis son sourire sans savoir quoi répondre. C'était bien la première fois qu'on me disait que j'étais gentil. De nouveau un silence contemplatif s'insinua entre nous, mais il n'était pas gênant. Juste, être là devait suffire.
-Vous avez sans doute d'autres choses à faire, reprit-elle soudain dans un sursaut. Je ne voudrais pas abuser de votre temps.
Je profitais de cette ouverture pour m'engouffrer dedans, bien incapable de prendre congés d'une autre manière.
-Je reviens demain !
-A demain, me sourit-elle.
Alors je me levais et sortis de la pièce le plus doucement possible.
000
J'arrivais à la cafétéria et pris le premier sandwich qui me tombait sous la main sans trop réfléchir, payais à la caisse et entrais dans la salle de pause du personnel. Il me restait moins d'un quart d'heure pour manger. Ça irait.
Du premier coup d'œil, je trouvais Zabini, en discussion avec son parrain. Le premier me sourit tandis que le deuxième détourna le regard.
-Bon Zabini, tu viens ? Je vais te montrer le reste des services, dit-il en se levant, s'essuyant les mains alors qu'il mâchait encore sa dernière bouchée.
Après une hésitation, Blaise se leva à son tour alors que je lui souriais pour lui signifier que je comprenais.
-T'inquiètes, lui soufflais-je.
Ça allait être dur, mais ça irait.
Dans un sens, c'était une hostilité moins violente que celle de l'année dernière. Pas d'inscription, d'insulte ou de provocation : juste de l'ignorance. C'était bien moins brutal, certes, mais cette fois-ci j'étais seul. Si Joyce n'était pas hostile, je ne le sentais pas fiable... mais peut-être me trompais-je ? Quant à Zabini, comme d'habitude, il n'aurait aucun mal à s'intégrer. Alors, je sentais qu'on allait me laisser sur le carreau. Je ne doutais pas de sa fidélité mais je devinais que, rejeté par les autres, je peinerais à le rejoindre et je ne pouvais pas décemment lui demander de faire bande à part.
C'était moi aussi, qui déjà, jouait la carte du solitaire, en désobéissant pour voir une patiente sans personne. J'aurais dû lui dire, à Blaise. J'étais un con.
-Malfoy !
Je relevais les yeux et vis Joyce me faire un signe. Il déjeunait avec Chang et Abbot. Il n'avait pas perdu de temps. Belle efficacité. Les deux premières années me jetèrent un regard noir.
Y aller ou ne pas y aller ? Bon, je ne pouvais pas me plaindre de la solitude que je craignais voir poindre trente secondes plus tôt et ignorer ensuite l'appel de mon parrain. Y aller.
J'arrivais tout sourire à leur table, gêné au possible. M'enterrer vivant, sérieux.
-Bon appétit ! Leur lançais-je alors qu'ils commençaient tout juste leur sandwich.
Abbot leva les yeux au ciel et Chang souffla de dédain.
-Qu'est-ce que tu foutais Malfoy ? Je t'ai attendu je sais pas combien de temps !
-Je sais, j'avais des trucs à faire...
-UN truc. Tu avais UN truc à faire. Et ça se torchait en dix minutes ! Pas en quarante-cinq !
-Ecoute... commençais-je ennuyé, à la fois pressé par le temps mais aussi obligé à une certaine discrétion. Est-ce que tu connaîtrais... un bon psychomage ?
Abbot et Chang se redressèrent, soudainement intéressées par la conversation. Fouineuses.
-Tu déprimes déjà ?! S'exclama Joyce. Mais tu viens de commencer !
-Non, ce n'est pas pour moi, finis-je par lâcher, un peu gêné que tous puissent croire que j'aie besoin de ce genre d'aide.
-Il y a quelque chose, chez Mme Wilson.
-Tu es retourné la voir ? Comprit instantanément Joyce.
-Oui, fus-je obligé d'avouer.
-Mais on a pas le droit ! s'exclama Abbot.
-Je t'avais dit qu'au moindre faux-pas, tu te ferais virer ! Tu joues à quoi Malfoy ?!
-Je sais bien ! Mais c'est pas avec Wood que je peux discuter, avoue !
-Tu aurais dû me le dire avant !
-Mais ça presse ! Dès qu'elle sortira, on ne pourra plus l'aider !
-Ça pouvait pas attendre une heure, le temps que tu me retrouves ici et qu'on en discute ?!
-Peut-être bien... Réalisais-je.
Abbot secouait la tête d'un air outré et Chang avait dans son regard porté sur moi plus de jugement moralisateur que n'aurait pu en contenir le petit corps chétif de Percy Weasley.
-Bon, qu'est-ce qui te fait croire ça ? Reprit mon parrain, plus calme, en se rasseyant confortablement sur son siège.
-La quantité de champignon ingéré, déjà, et le fait que les deux champignons confondus ne se ressemblent absolument pas.
-Tu sors des ASPICS avec un Optimal en Botanique. Évident pour toi ne veut pas dire évident pour tout le monde... Contra Chang.
-C'est pour ça que je suis allé la voir ! Elle est apothicaire ! Elle savait très bien ce qu'elle faisait. Et de toute façon, elle me l'a avoué. Alors...
Leurs trois regards se braquèrent instantanément sur moi et je sursautais presque.
-Elles s'est confiée ? ... A toi ? Demanda la Poufsouffle avec des yeux ronds ; une moue incrédule sur le visage qui me blessa un peu.
-Je sais que ça peut-être surprenant, mais il peut m'arriver en de rares occasions d'inspirer confiance, répliquais-je, piqué, dans un rictus.
-Quel dommage nous n'ayons pas pu être là pour référencer un phénomène aussi exceptionnel, tacla Chang qui, visiblement, était allergique à mon ironie mais ne se privait pas d'user de la sienne.
Il était temps de jouer carte sur table.
-Bon, commençais-je un peu brusquement car déjà je me sentais m'échauffer, on a mal commencé la journée je crois. Je te prie de bien vouloir m'excuser pour ce que je t'ai dit en sortant des vestiaires...
-Et pour le reste ? Demanda-t-elle immédiatement, avec un air supérieur, passablement sur les nerfs.
-Quel reste ?
-Il s'est changé devant nous ! Rapporta-t-elle à Joyce, d'un air outré en me pointant du doigt.
Gamine.
Ce dernier me lança un regard en biais un peu surpris, coincé aussi peut-être dans son rôle de dragueur qui ne pouvait décemment pas lui dire qu'elle avait tort de jouer la chaste Serdaigle.
-C'est à dire que... ici... ça se fait, conclut-il. Tes collègues, que tu le veuilles ou non, partageront tes journées et tes nuits quand tu seras de garde. Alors, au fur et à mesure...
-Quoi ? Mais...
-Tu t'y feras. Au début, tu te caches dans un coin et puis...
-Il s'est pas du tout caché dans un coin !
-Mais t'avais qu'à pas regarder ! M'exclamais-je en perdant patience.
On allait repartir exactement comme ce matin sans avoir avancé d'un iota.
-Vous, les mecs, vous vous imposez sans demander l'avis de personne ! Comme si tout l'espace vous était acquis ! Comme s'il n'y avait que vous ! Et si, moi, j'avais pas envie de te voir ? Et si ça me dérangeait de savoir qu'il y a quelqu'un déshabillé dans la même pièce que moi ?
-Mais j'ai pas envie non plus que tu me voies et que tu penses à moi déshabillé, pouffais-je devant l'absurdité de la situation.
Elle me prenait pour quoi au juste ? Un exhibitionniste ?!
-Je me suis juste... changé, comme l'a demandé Smethwyck et c'est tout ! Et si chacun reste dans son coin... continuais-je.
-A Poudlard... interrompit-elle, bien décidée à ne pas me laisser le dernier mot.
-On n'est plus à Poudlard, coupais-je à mon tour, faut que t'apprennes à tourner la page.
Elle se figea. Abbot se figea. Joyce se figea. Et je compris que j'avais encore été trop loin. Cette phrase si anodine pour tout le monde, ne l'était évidemment pas pour Chang.
-Pardon, pardon, m'excusais-je aussitôt.
Mais elle se leva brusquement, les larmes aux yeux.
-Si seulement tu avais pu mourir à sa place ! Et elle s'enfuit, suivie d'Abbot.
Nous les regardâmes s'éloigner.
Puis, alors qu'elles avaient disparu, Joyce eut un soupir à fendre l'âme et mordit dans la dernière moitié de son sandwich à pleine dent. Un silence s'abattit sur nous et je l'imitais. Il ne me restait plus que cinq minutes pour engouffrer ma demi-baguette.
-'étais à deux doigt de 'ui propojer une vijite guidée de l'hôpital je joir, finit-il par dire, la bouche pleine.
-Pardon, répétais-je.
Il soupira à nouveau.
-Je ne sais pas si c'était tout à fait ta faute.
-De toute façon, elle n'est pas prête. Je t'ai fait économiser une carte.
-Pas faux. Magne-toi, on y va.
000
Le reste de la journée se déroula sans accroc. Une admission urgente à quatorze heures : un homme s'était enfilé toute sa potion d'aide à la repousse capillaire d'un coup, espérant une repousse plus rapide et s'était retrouvé avec des cheveux faisant trois fois sa taille et aussi épais que mon auriculaire. On avait dû les sectionner à coups de diffindo, en prenant garde à ne pas toucher la tête du crétin. Si d'abord, Wood m'avait strictement interdit d'approcher le patient, elle avait fini par accepter que je joigne mes efforts à eux, submergés. Je crus voir, même, une lueur appréciation lorsqu'elle vit la dextérité dont je pouvais faire preuve car, à n'en pas douter, je me débrouillais mieux que Joyce.
Ça allait bien se passer.
A dix-neuf heures, nous avions fini le tour de nos patients. Blaise m'attendait dans les vestiaires vides. Je me changeais efficacement avec Joyce, un peu stressé à l'idée que quelqu'un puisse rentrer à ce même moment. Chang n'avait pas tout à fait tort. Les vestiaires ouverts ainsi n'étaient pas l'idée du siècle. Pendant ce temps, Blaise me racontait sa journée : sa tutrice était adorable et lui donnait plein de conseils et son parrain, bien que peu bavard était tout à fait à l'écoute. Il s'excusa encore pour ce midi. Alors, Joyce se sentit obligé d'expliquer :
-Joseph, de toute façon, a toujours été bizarre. Même à moi il ne me parle pas. Il croit que prendre les gens de haut fait de lui un meilleur médecin.
-Tant pis pour lui, tranchais-je, en colère, finissant de boutonner ma chemise.
-On s'en fiche de toute façon, renchérit Zabini. C'est juste qu'il veut toujours m'avoir à l'œil et il me parle comme si j'étais un demeuré.
-Joseph tout craché, souffla Joyce. Je prie pour qu'il ne devienne pas un jour chef de service. L'enfer que ce serait !
-Ou pire : directeur d'hôpital ! Ajouta Blaise.
-Le problème, c'est qu'il est bon ! Répondit Joyce.
-Il faudra juste fuir la spé maternité.
-Ça m'intéresse pas, de toute façon conclut Joyce en mettant sa sacoche en bandoulière alors que nous quittions les lieux.
000
Lorsque je remontais l'allée pour rentrer chez nous, je vis la lumière percer les fenêtres du hall dans le crépuscule. Hermione devait déjà être rentrée et je ne pus m'empêcher de sourire. J'étais éreinté mais la perspective de la retrouver me fit accélérer le pas.
Elle était assise sur un fauteuil près du feu, à lire tout en prenant ponctuellement des notes à la main. Lorsque je refermais la porte derrière moi, elle leva les yeux et me sourit. Alors, envoyant mes affaires se ranger dans l'armoire, je me rapprochais d'elle jusqu'à me placer dans son dos pour m'écrouler sur ses épaules, ma joue contre la sienne.
-Ta journée s'est bien passée ? demanda-t-elle.
-Très bien, mais je suis mort, pouffais-je.
-Quel service ?
-Empoisonnement.
-Celui que tu voulais ! S'exclama-t-elle pleine d'entrain.
-Oui ! Répondis-je en la serrant plus fort dans mes bras.
-Tu es avec des gens que tu connais, en plus de Blaise ?
-Chang et Abbot.
-Ah oui ? Ça leur va bien !
-Et on a chacun un parrain. Tu te souviens d'Alexander Joyce ?
-En Serdaigle ?
-Euh... possible.
-Je crois oui. Mais je ne le connais pas bien.
-C'est mon parrain.
-C'est bien, sourit-elle en embrassant ma joue.
J'acquiesçais en silence. Il était clair que j'aurais pu tomber sur pire. Elle finit d'écrire une phrase à la va-vite, referma le livre puis se leva pour se blottir contre moi.
-Et les autres ? Comment ils étaient ? demanda-t-elle contre mon cou.
-Aimables comme des portes de prison quand ils ne m'ignorent pas. Joyce m'a dit que le directeur de l'hôpital ne voulait pas de mon dossier et qu'au moindre faux-pas, il me fichait à la porte.
-Ah... Bon... Et... comment va Cho ? Reprit-elle d'une voix soucieuse.
Je soupirais.
-C'est compliqué... Je crains d'avoir fait une bourde. Avec... Diggory... entre autres.
Elle se dégagea légèrement pour me regarder avec de grands yeux.
-C'est juste qu'elle n'accepte pas les vestiaires mixtes... Mais qu'est-ce que j'y peux, moi ?! Elle compare avec Poudlard alors... Je luis dis de tourner la page, c'est tout. Elle l'a mal pris.
Elle leva les yeux au ciel.
-Je sais, demain, je lui présente mes excuses. Je ne l'ai pas vue ce soir.
Elle acquiesça d'un mouvement de tête puis me sourit d'un air désolé.
-Bon. Et... les patients ?
-A part un qui n'a pas voulu que j'entre dans sa chambre, ça allait. Ah et une vieille m'a lancé sa soupe en me prenant pour mon père. Mais le reste du temps ils se contentent de me regarder avec un air effrayé, souriais-je, acceptant mon impuissance. Et puis... il y a Mme Wilson.
-Mme Wilson ?
-Une apothicaire suicidaire. Mais Wood ne veut rien voir.
-Wood ?
-Ma tutrice. Elle ne s'intéresse qu'au fait qu'elle ait mangé soixante-douze amanite vireuse.
-Soixante-douze ? Elle va s'en tirer ?
-Oui, elle repart après-demain. Je dois jouer des coudes pour la faire suivre par un psychomage. Je crois... que j'ai déjà enfreint quelques règles...
-Quoi ?! S'exclama-t-elle avec une certaine horreur dans le regard.
Elle se dégagea de mon étreinte. J'aurais dû me taire : je n'avais pas la force pour une énième dispute aujourd'hui. Surtout avec elle. Tout ce que je voulais c'était la sentir près de moi. Je repris, contraint d'expliquer :
-Je ne dois pas me retrouver seul avec un patient mais... je voulais la voir.
-Ce n'est pas sérieux !... Drago !
-Mais je ne peux pas la laisser partir et la retrouver dans les avis de décès le lendemain après qu'elle se soit enfilé une demi brouette de je ne sais quelle tubercule vénéneuse !
-Tu n'as enfreint que cette règle ?
-Oui !
Elle avait un regard satisfait, comme si elle s'attendait à bien pire puis elle me regarda intensément. Enfin, elle se jeta à mon cou et m'embrassa langoureusement.
-Et bien ! souriais-je contre ses lèvres, déjà légèrement essoufflé.
-T'imaginer faire consciencieusement ton travail au détriment du règlement, tu peux pas savoir l'effet que ça me fait !
Alors, en pouffant, je resserrais mon étreinte et lui rendais toute l'attention qu'elle pouvait m'accorder. Je suppose qu'elle me raconterait sa journée plus tard.
