Bonjour à tous!
J'espère que vous êtes encore la ? Si oui, je vous remercie infiniment ! C'est un réel plaisir de continuer à partager cette histoire avec vous ! Alors merci, merci et encore merci ! Je sais que cela fait très très TRES longtemps que je n'ai pas passé une tête par ici. Il s'est passé énormément de choses depuis 4 ans. Tout d'abord, comme vous le savez tous, il y a eu le COVID et ses différents confinements. Je terminais mes études à ce moment-là et ça n'a pas été facile à vivre. Beaucoup de remises en question. Je me suis finalement engagée dans un service civique en début 2021. Qui s'est mal passé. Très mal passé. Je vous passe les détails sur ces 8 mois d'enfer mais j'ai terminé ce service civique sur un arrêt de travail car j'étais au bord de la dépression et du burn-out. J'ai presque tout de suite déménagé à Grenoble pour prendre de la distance et le temps de guérir. Pourquoi Grenoble? Car mon compagnon commençait sa thèse là-bas. Je n'avais plus d'attaches, plus d'obligations alors j'ai saisi cette opportunité de me concentrer sur ma vie personnelle. Mais comme il faut bien gagner sa vie, un travail est devenu nécessaire. Chose faite toute fin 2021. Beaucoup de nouveautés et de choses à apprendre. De fil en aiguille, le temps passe à une vitesse hallucinante. Ce qui nous amène en septembre 2022 où je me suis fiancée avec mon compagnon. (Oui, oui. Toujours le même) Et si certaines d'entre vous sont déjà passées par là, vous savez que la préparation d'un mariage est complexe et chronophage. J'ai donc été extrêmement occupée pendant 1 an et demi. J'avais peu de place pour ne serait-ce que penser à l'écriture. Et finalement… Nous voilà donc en septembre 2024. Presque 5 mois de mariage, encore un déménagement imminent (nous troquons nos chaussures de randos et nos skis pour les maillots de bains et les planches de surf de la côte bordelaise) et enfin un peu de temps pour moi. Ce qui nous donne… ça!
J'espère que ce nouveau chapitre vous plaira et comme toujours n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez dans les commentaires.
A bientôt!
POV Maxon
- Quelle sale fouine à l'égo surdimensionné ! Pour qui il se prend au juste? Pesta Aspen à l'autre bout de la ligne.
Le surnom était amplement mérité et je savais, de la part de mon ancien Général, que c'était loin d'être sa pire insulte. Il se retenait.
Dès la fin de l'entrevue avec Wyrrens, j'avais convoqué une session extraordinaire dans une des nombreuses salles de réunion ultra-sécurisée du palais et avais appelé le Gouverneur de Caroline du Nord, Aspen, sur la ligne réservée aux urgences étatiques. Comme convenu dans le protocole, il avait immédiatement décroché. Je leur avais donc raconté fébrilement toute l'histoire dans les moindres détails, encore un peu sous le choc. Carter et lui étaient les seuls à qui je faisais suffisamment confiance pour leur demander conseil sur cette affaire. Et ils m'avaient religieusement écouté, ne m'interrompant pas un instant pendant toute la durée de mon récit.
- Je ne te le fais pas dire… Soupirais-je, lourdement en enfonçant mes doigts dans mes cheveux.
- Fouine ou non, le plus important maintenant, c'est de décider quelle réponse nous allons lui donner. La voix de la sagesse venait de Carter.
- Tu ne comptes quand même pas céder à son chantage odieux ?! S'écria Aspen.
- Bien sûr que non mais nous ne pouvons pas non plus le prendre à la légère.
- Ce n'est qu'une rumeur et vraisemblablement montée de toutes pièces. Sans réaction, elle s'essoufflera d'elle-même et sera remplacée par une autre, plus récente et plus croustillante. C'est ainsi que le jeu fonctionne et je suis sûr que ce Wyrrens en a parfaitement conscience.
- Justement! Ne crois-tu pas qu'il a pris ses précautions pour nous empêcher d'envisager cette solution? C'est de la famille royale dont il est question! Le sujet préféré d'une majorité de la population d'Illéa, si ce n'est mondiale. Cette rumeur ne disparaitra pas aussi facilement, juste parce que nous avons décidé de l'ignorer.
Aspen était sur le point de répliquer mais je l'interrompis d'un geste, invitant mon secrétaire particulier à continuer.
- A mon avis, rester muet sur cette affaire ne fera que l'alimenter et donnera encore plus de crédit à ce journaliste aux yeux de l'opinion publique. Plus nous tarderons à démentir et plus cette rumeur paraitra vraie.
- Pfff… C'est n'importe quoi! Vos parents qui auraient adopté un orphelin pour en faire leur héritier? Personne ne croira jamais de telles sornettes! Interrompis une nouvelle fois, Aspen.
- N'as-tu pas écouté ce qu'a dit Sa Majesté, il y a quelques instants, Aspen? S'il n'y avait que ça qui était en jeu, ce serait facile mais il a été plus malin sur ce coup-là. Il y a également mêlé des secrets d'Etat.
- Carter a raison. Il m'a clairement fait comprendre qu'il n'hésitera pas à révéler l'existence de la lignée d'Illéa au monde entier si je ne cédais pas à son chantage. Rappelais-je.
- Et alors? N'ont-ils pas signé une renonciation à prétendre à la succession royale?
- Cela pourrait ne pas suffire face à un peuple en colère quand il apprendra que leurs dirigeants ont menti pendant des décennies. Ce n'est qu'un bout de papier face au sang de famille. L'Histoire nous a démontré que l'existence de plusieurs prétendants au trône, même si l'un n'en veut pas, n'étaient jamais très propice à la stabilité d'un pays. Et si un soulèvement se forme pour restaurer la famille Illéa, nous ne serons pas de taille à lutter. Ils ont le bon nom et la légitimité directe malgré toute signature sur quelconque document. Je ne suis que le descendant de leur cousin. Certes, le plus proche mais un cousin tout de même.
Je m'interrompis un instant.
- Et je dois dire qu'à la façon dont il a raconté son histoire sur mes parents, j'aurais presque pu y croire. Alors messieurs, si moi-même je peux me laisser prendre au piège, pensez-vous réellement que je resterais le seul?
- C'est vrai que son histoire d'adoption est tout à fait plausible. Ou en tout cas, elle peut complètement faire sens pour quelqu'un qui voudrait y croire. Réfléchis à haute voix, Carter.
Se faisant, il se prit un regard noir de la part d'Aspen.
- N'aviez-vous pas dit que Spencer avait fui parce qu'il ne souhaitait plus cautionner la politique de fer de son père ? Ne pouvons-nous pas jouer sur ce tableau ?
- On pourrait… Mais n'oublions pas que la plupart voient encore en Grégory Illéa le sauveur de la nation. Révéler la vérité maintenant ne nous apportera rien de bon. Il faut toute une vie pour construire une croyance et des générations pour la détruire.
- Ou une révolution… Ajouta sombrement, Apsen.
Je confirmais d'un simple signe de tête.
- C'est impossible. Le peuple vous est fidèle, Votre Majesté! Il vous connait, vous soutient et vous aime depuis que vous êtes enfant. Il ne vous abandonnera pas aussi facilement au profit d'un autre sous le simple prétexte qu'il porte le bon nom de famille. Vous avez fait vos preuves, d'abord en tant que prince puis en tant que roi. Et que ferait-il à votre place, cet August? Ferait-il mieux ? Peut-être serait-il même pire? Personne ne le sait. Je peux vous garantir qu'aucun être sensé ne serait prêt à parier l'avenir de ce pays sur un inconnu sorti de nulle part.
- Je n'en mettrais pas aussi facilement ma main à couper, Carter. Comme dans toute politique, il y a des mécontents et cette information est du pain béni pour n'importe qui nous est hostile. Comment pourrons-nous ensuite justifier du fait que, nous, la famille royale, n'étions pas au courant de l'existence de la survie de la lignée Illéa ? Comment pourrons nous justifier d'avoir gardé et de garder le trône et le pouvoir aux dépends de l'héritier légitime ?
- Autrement dit, nous sommes coincés. Soit nous cédons à son chantage, soit il fait sauter vos têtes.
- Et je ne risquerais pas la vie d'America et de mon enfant, juste pour une histoire de fierté.
- Vous ne songez sérieusement pas à lui donner ce qu'il veut, Votre Majesté?!
- Et que veux-tu que je fasse d'autre ! Je me levais d'un bond et frappais du plat de mes mains sur la table, les faisant sursauter. Je ne suis pas seul dans l'histoire! Une vie innocente dépend des choix que je vais faire dans un futur proche !
Ce constat me fit me rassoir lourdement dans ma chaise.
- Ne vous laissez pas abattre, Majesté. Nous allons trouver une solution.
Lorsque je raccrochais et sortis enfin de la salle de réunion, le soleil était bien avancé dans le ciel. Mon ventre émit soudainement un gargouillement sonore.
J'avais été tellement obnubilé par notre conversation que j'en avais oublié de déjeuner. Et comme les domestiques n'avaient pas les accréditations pour venir librement dans ces salles lorsqu'elles étaient occupées, le seul moyen aurait été que j'exige qu'un repas nous soit servi.
- Je monte me reposer quelques instants dans mes appartements. Fait-moi apporter quelque chose à grignoter. Je serais de retour à mon bureau dans deux heures.
Complètement exténué, je n'attendis pas la réponse de mon secrétaire particulier pour prendre congé. Un garde s'approcha à grandes enjambées et s'inclina alors que je n'avais parcouru que quelques mètres.
-Votre Majesté, la reine vous cherchait.
- Est-ce urgent ou important ?
- Comme elle n'a pas insisté quand je lui ai dit que vous étiez en réunion, je suppose que non. Mais elle a tenu à être informée dès que vous en sortiriez.
- Et bien, dites-lui que je la verrais plus tard.
Et je coupais court à la conversation.
Une fois la porte des appartements royaux refermée, je n'eus même pas le temps d'atteindre la chambre et m'écoulais dans le canapé du salon.
Je parcourais la galerie tout en observant les gigantesques portraits accrochés au mur. Je m'arrêtais devant le dernier et examinais mon reflet dans la peinture. En simple chemise blanche, légèrement entrouverte, je tenais ma fiancée par la taille. America était vêtue d'une robe bleue, délicatement scintillante, sa chevelure de feu savamment relâchée. Sa main posée sur mon torse, mettait en valeur sa bague de fiançailles. Nous étions jeunes et rayonnants. Mon cœur rata un battement au souvenir ému que cette image provoqua en moi.
Puis sous mes yeux ébahis, le portrait se transforma, comme animé d'une vie propre. Aux deux fiancés tout sourire et heureux, se succédèrent deux jeunes mariés. Cette fois-ci encore, le peintre avait choisi de mettre en avant notre amour dans une mise en scène d'une magnifique simplicité. Dans les bras, l'un de l'autre, nous observions nos toutes nouvelles alliances à nos mains, entremêlées. Mais je n'eus pas le temps de m'extasier devant la scène que le tableau changeait déjà pour nous montrer en souverains, drapés dans nos costumes d'apparat. Encore une fois et toujours trop rapidement la peinture se métamorphosa.
La nouvelle toile adoptait un angle de vue inédit. Alors que tous les portraits précédents nous montraient de plein pied, ce dernier coupait la silhouette de ses modèles à la taille. Tandis que la peinture se clarifiait et se stabilisait, mon souffle se bloqua alors dans ma gorge et des larmes me montèrent aux yeux. Elle ne représentait plus simplement un couple. Une troisième personne était présente. America était assise au premier plan. Elle portait une robe d'une légèreté sans pareille et dans ses cheveux toujours détachés était désormais posé un fin diadème fait d'or et de diamants. Son visage attendri était penché sur la forme enveloppée de langes qu'elle tenait dans ses bras. Je me tenais debout derrière eux, une main posée sur son épaule, l'autre soutenant la tête de l'enfant, veillant sur eux avec un regard aussi attendri que celui de ma femme.
- Quelle belle famille, n'est-ce pas ?
Je sursautais et me retournais. Un homme d'âge mûr se tenait derrière moi.
- Qui êtes-vous ?
Il haussa les épaules.
- Ce n'est pas important. En revanche, ce qui l'est plus, c'est ça…
Il fit un signe du menton vers la toile. Depuis le cours instant où je l'avais quitté des yeux, le portrait de famille s'était de nouveau transformé. Cette fois-ci et pour une raison qui m'échappait encore, il me donna des frissons dans le dos. Alors que le fond utilisé dans chaque représentation antérieure était clair et chaleureux, parfois avec un décor, celui-ci était d'un noir d'encre. Enfin, le détail qui m'avait glacé le sang jusqu'alors m'apparut comme une évidence. Les bras d'America étaient vides. Nous étions de nouveau deux. Je cherchais avidement notre enfant des yeux. Où était-il? Toutes les autres toiles s'étaient succédé par ordre chronologique. Pourquoi celle-ci serait différente? Je fouillais du regard le portrait, paniqué, jusqu'à ce que ma vision se floute et se dédouble. Malgré tout, il ne bougea pas d'un pouce.
- Où est-il passé ? Où est mon enfant ? Demandais-je, paniqué.
- Sois plus attentif.
J'étudiais alors plus précautionneusement le tableau, comme le vieil homme me le suggérait. Au premier abord, rien n'avait changé. America était toujours assise. Je me tenais toujours debout derrière elle. Droit, raide. Ma main, auparavant tendrement posée sur son épaule la maintenait désormais fermement à sa place. Mon regard fixait le peintre. Il était froid, dénué d'émotion. L'expression de ma femme était, elle, lugubre. Toute la joie et la vie que je lui connaissais s'étaient envolées. Elle n'était plus qu'une coquille vide.
- Que…
Mais je n'eus pas le temps de terminer ma question. J'écarquillais les yeux alors que sous mon regard, les traits de mon propre visage se remodelaient imperceptiblement. Mon cœur rata un autre battement. Alors qu'un instant auparavant, j'étais le sujet du peintre, c'était désormais mon père qui se tenait au-dessus d'America.
Je pivotais de nouveau vers l'inconnu et eu un mouvement de recul.
- Je savais que tu serais mon digne successeur, mon fils. Tu rends fier tous tes ancêtres.
Il posa lourdement une main sur mon épaule.
Je me réveillais en sursaut.
- J'ai entendu crier. Tout va bien, Votre Majesté? Interrogea le garde en passant la tête dans l'entrebâillement de la porte.
Le monde autour de moi tournait comme une toupie. J'étouffais et j'avais chaud.
- Votre Majesté ? S'alarma-t-il, entrant totalement dans la suite.
- Ça va. Croissais-je.
Me relevant péniblement, je desserrais ma cravate et remarquais que ma chemise était trempée. Loin d'être reposé, j'avais, au contraire, l'impression d'avoir couru un marathon. Lorsque je me mis finalement debout, un vertige me prit. Le garde se précipita pour me soutenir mais je l'arrêtais d'un geste. Cependant, son regard soucieux ne me quitta pas.
- Sauf votre respect, Votre Majesté, mais vous n'avez pas l'air dans votre assiette.
Je croisais mon regard dans un des miroirs de la suite. Mon reflet était à faire peur avec mon teint blafard et des cernes grands et noirs sous mes yeux.
- Voulez-vous que j'aille faire quérir la reine, Votre Majesté?
Mon sang ne fit qu'un tour. Il ne fallait surtout pas qu'America me voie dans cet état. Elle s'inquiéterait sûrement pour moi et elle n'avait pas besoin de ça en plus du reste.
- Non! M'écriais-je, véhément.
- Elle souhaiterait sûrement être au courant…
Je m'approchais du garde, assez près pour distinguer le nom écrit sur sa broche. «Claymount». Je le toisais de haut en bas avant de lui demander.
- Dites-moi, Officier Claymount, êtes-vous marié?
- Non, Votre Majesté.
- C'est bien ce que je me disais. Lui glissais-je d'une voix froide. Dans ce cas, vous êtes mal placé pour me dire ce que ma femme doit savoir ou non. Je vous prierais donc de vous mêler des affaires qui vous regardent.
- Mais la reine…
- La reine a déjà bien des choses à se préoccuper. Dois-je vous rappeler que vous êtes là pour assurer ma protection, non pour me donner des leçons sur comment mener ma vie conjugale. Me suis-je bien fait comprendre ?
- Pardonnez-moi, Votre Majesté. J'ai oublié qu'elle était ma place pendant un instant.
- Vous avez encore beaucoup à apprendre sur le fonctionnement du palais royal, Officier. Que cette erreur ne se reproduise pas ou je vous renvoie à vos instructeurs.
Pour toute réponse, il s'inclina. Je vis cependant dans son regard, un mélange de déception, de tristesse et d'interrogation. Je l'ignorais et me dirigeais vers la salle de bain.
Une fois la porte refermée derrière moi, je m'appuyais au lavabo. Je pus ainsi examiner mon état plus en détail. En plus des cernes, mes yeux étaient injectés de sang. Ma peau était terne et de nouvelles rides se formaient sur mon front. Incapable de soutenir plus longtemps ma propre image, je me déshabillais et entrais sous la douche. Celle-ci me fit m'apaisa et lorsque je ressortis de la salle de bain, je remarquais le plateau qu'on avait déposé à mon attention. Je jetais un œil à ma montre et jurais. Carter était sûrement déjà en train de s'impatienter en m'attendant au bureau. Du pain, du fromage ainsi que quelques fruits me firent ainsi mon déjeuner.
Avant de sortir de la suite, je m'arrêtais près de l'Officier Claymount.
- Oh. Et une dernière chose. Si vous tenez à votre poste, cela va sans dire que vous ne parlerez à personne de ce qui vient de se passer aujourd'hui.
Et je sortis sans même attendre sa réponse.
Ce soir-là, je restais dans mon bureau. Avec les événements de la journée, j'avais accumulé énormément de retard. Peu avant minuit, America vint me rendre visite.
- Maxon ? Tu viens te coucher ?
- Bientôt, ma douce. Bientôt. Lui répondis-je sans lever les yeux des papiers que j'étudiais. Ce faisant, je sentis le regard, que je devinais sans peine dubitatif, qu'elle me lança.
- J'ai une réunion du Conseil, demain. Je dois terminer d'étudier ces rapports. Précisais-je, comme pour m'excuser.
Je ne pouvais pas lui dire qu'outre la charge de travail, c'était également la peur des cauchemars m'assaillant constamment, qui me retenait ici.
- Alors laisse-moi t'aider. A deux nous irons beaucoup plus vite.
Elle tirait déjà une chaise près de moi.
- NON ! M'écriais-je. Ce ne sont que des chiffres et des graphiques, tu n'y comprendrais rien. Repris-je, plus doucement.
- Je peux peut-être t'avancer sur d'autres tâches, dans ce cas.
- C'est vraiment gentil, mon amour, mais je m'en sortirais seul. Va te reposer. Tu en a plus besoin que moi.
- Cela fait des semaines que je n'ai pas d'autres tâches à faire que de prendre le thé avec mes dames de compagnie ou de me promener dans le jardin. Je suis plus que reposée.
- A cette heure ? Haussais-je un sourcil, sceptique.
- Ce n'est pas un petit rapport qui va me tuer, bien au contraire… Et puis… Ce n'est pas juste si tu t'amuses tout seul dans ton coin…
Elle essayait visiblement de me taquiner mais je n'avais vraiment pas la tête à ça, ce soir.
- Si tu crois que c'est une partie de plaisir…
Son petit sourire en coin disparu immédiatement et ses yeux perdirent de leur éclat espiègle.
- Non, sans blague… Parce que je me suis tourné les pouces pendant ces 8 dernières années, peut-être?
- Ce n'est pas ce que j'ai dit, America. C'est juste que… que la situation a changé depuis.
Et à bien des égards, pensais-je.
- Oui. Je suis tombée enceinte. Ce n'est pas une maladie à ce que je sache ? Ca ne m'empêche pas de faire tout un tas de choses et notamment de travailler. Au moins un peu… Reprit-elle, adoucie.
- Je sais que tu veux bien faire, mais je t'assure. Je n'ai pas besoin d'aide.
- Maxon… Me crois-tu aveugle à ce point ?! Tu crois que je ne vois pas les cernes qui s'accumulent sous tes yeux ? Les heures indues auxquelles tu viens te coucher et les repas que tu sautes ?
Je ne la pensais pas aussi observatrice, ces derniers temps. Ou étais-ce moi qui avais plus de mal à le cacher…
- Je vois bien que ça ne va pas et nous pourrions aisément trouver une solution, ensemble. A condition que tu me parles, tout simplement.
- Nous avons déjà essayé cette méthode à de nombreuses reprises, America… Soupirais-je, sarcastique. Les mots ne peuvent pas toujours tout résoudre.
- Qu'essayes-tu de me dire, au juste ?!
Je soupirais, sachant parfaitement que si je nous lançais sur ce sujet, nous en aurions encore pour longtemps.
- Rien. Rien. Si ce n'est que ma journée a été longue et qu'elle est encore loin d'être finie. Alors si tu veux vraiment m'aider, j'apprécierais que tu me laisses tranquille pour que je puisse terminer mon travail et ainsi venir me coucher à une heure moins indue. Assenais-je.
Elle resta plantée là quelques instants, visiblement en proie à une lutte intérieure.
- Maxon… Je t'en prie… Parles moi. Me supplia-t-elle. Dis moi ce qui se passe. Dis moi ce qui ne va pas.
- Je te l'ai dit. J'ai du travail à terminer et il se fait tard.
J'agitais une petite clochette et le garde à l'extérieur de mon bureau entra. Cela faisait déjà plusieurs heures que Carter était parti se coucher.
- Votre Majesté?
- Veuillez raccompagner ma femme dans nos appartements, s'il vous plaît.
Je soutins le regard blessé de mon épouse un instant avant de me replonger dans l'étude du rapport qu'elle avait interrompu.
- Venez, Votre Majesté. Dit doucement le garde.
- Maxon… Souffla America d'une voix brisée.
Comme je ne répondais pas, elle finit par suivre le garde, me laissant enfin seul avec ma culpabilité.
Quelques jours plus tard, je découvris sur mon bureau les gros titres des journaux. Accompagnée d'une courte note.
« Je tenais à vous prévenir. Pour preuve de ma bonne foi et de mon amitié. Wyrrens »
- Carter! Appelais-je.
Mon secrétaire particulier accouru immédiatement. Je lui tendis les coupures de journaux, dégoûté.
«LA LIGNEE DU ROI REMISE EN QUESTION »
«UN ILLEGITIME SUR LE TRONE!»
«A-T-IL REELEMENT LE DROIT D'ETRE ROI?»
- Convoque Wyrrens. Je dois lui parler.
- Maxon, tu ne penses pas qu'il faudrait en discuter avant de faire quelque chose d'irréfléchi ?
- Il faut empêcher ces articles de paraître. Quoiqu'il en coûte. Si nous le laissons faire, de quoi sera-t-il capable la prochaine fois ?
- Mais…
- IMMEDIATEMENT ! Hurlais-je, faisant tressaillir mon secrétaire particulier.
Une fois seul, je me laissais tomber lourdement dans mon fauteuil et me massais les tempes, voyant déjà le mal de crâne arriver.
Moins d'une heure plus tard, j'étais en tête à tête avec le journaliste.
- Votre chantage ne repose que sur une histoire tirée par les cheveux et les dires de témoins, vous n'avez en fait aucune preuve de ce que vous avancez. C'est votre parole contre la mienne. Alors, je vous suggère d'appeler vos petits copains pour leur dire de ne pas publier ces articles.
- Je suis désolé, Votre Majesté. Mais je ne peux en aucun cas faire ça.
- Et pourquoi cela ?
- Parce que, vous savez… Les machines d'impressions ne peuvent pas s'arrêter d'un simple claquement de doigts parce qu'une seule petite personne le souhaite. Et puis, que vont publier les journaux demain matin, si je leur dis de tout arrêter maintenant ?
- Oh. Je suis sûr que vous avez une solution de secours.
- Peut être… Ou peut-être pas. Vous croyez vraiment que nous n'avons que cela à faire de travailler pour rien ?
- Et…
- Et puis, de toutes les façons, je n'en ai pas envie. Me coupa-t-il.
- Je vous demande pardon ?!
- Vous m'avez très bien entendu. Je n'en ai pas envie. Après tout, pourquoi le ferais-je alors que vous êtes sur le point de me donner ce que je veux ?
- Je pourrais facilement faire tourner court à toute votre petite entreprise. Ne croyez-vous pas que j'ai moi aussi des alliés ?
- Nous n'en serions pas là, si tel était le cas.
Je soupirais.
- Très bien, Monsieur Wyrrens. Inutile de jouer la comédie plus longtemps. Que voulez-vous de moi ? La restauration des castes ? Une place au Conseil ?
- Oh... Vous croyez que c'est cela qui m'intéresse ? Retourner à l'ancien système ? Je conviens que je n'ai pas été le premier convaincu par les débuts difficile mais désormais tout le pays a accepté la réforme. Même si je le voulais, je ne pourrais pas revenir en arrière. En admettant tout d'abord que cela soit dans mon intérêt.
- Ah non ?
- Que vous êtes naïf, Votre Majesté. Ria-t-il.
- Alors que voulez-vous ? Ma couronne? Vous avez soif de pouvoir ?
- Tout de suite les grands mots. Non. Non. Rassurez-vous. Je n'ai que faire de votre couronne. Tout ce que je veux, c'est un souverain qui entende raison.
- Vous voulez dire, qui vous entend, vous.
- Je ne veux que le meilleur pour Illéa. Tout comme vous. Après, si vous ne voulez pas de mes conseils, c'est à vous de voir… Mais je vous aurais prévenu.
Il se leva, nonchalant.
- Attendez! L'interpellais-je alors qu'il posait la main sur la poignée de la porte.
- Votre Majesté ?
- Je. Vous. Ecoute.
Les mots m'écorchèrent la langue tandis que je les prononçais et je baissais la tête, vaincu. Wyrrens ébaucha un sourire.
- Et bien pour commencer vous allez me donner, à moi et mon équipe, l'exclusivité sur tout sujet touchant à la famille royale.
- Vous plaisantez, j'espère ?!
- En ai-je l'air ? Et comme vous le savez, pour exercer notre métier correctement, il nous faudra également un accès libre au Palais royal à toute heure du jour et de la nuit.
- Je n'en ferai rien! C'est précisément pour cela qu'on a passé un accord avec l'Association de Presse. Notre intimité n'a toujours et ne regardera toujours que nous.
- Votre intimité est une affaire d'état. Vous le savez mieux que personne. D'autant plus maintenant que votre femme porte l'héritier du trône. Expliquez-lui simplement que vous avez changé d'avis et faites en sorte qu'elle vous croit. Attendez! Mieux. Faites en sorte qu'elle coopère avec toute sa grâce.
- Et si elle ne le fait pas ?
- Demandez-vous simplement pourquoi les journalistes n'ont pas été plus insistants sur sa grossesse. Pourquoi elle n'a pas fait l'objet de bulletin d'actualité chaque seconde de chaque minute pour le moindre de ses faits et gestes depuis l'annonce ? Pourquoi n'avez-vous pas eu d'incursions de journalistes prêts à tout au palais ? Ce n'est sûrement pas l'interdiction qui les a arrêtés. L'espoir d'avoir un potin croustillant aurait été plus fort.
- Contrairement à vous, ils respectent les limites qu'on leur a données par égard pour nous.
- C'est là que vous vous trompez lourdement, Votre Majesté. Vous vous souvenez de ce que je vous ai dit l'autre jour ? J'ai des connexions, de l'influence. Si vous avez été plus ou moins tranquille et pu profiter de votre famille balbutiante, c'est uniquement grâce à moi qui ai retenu mes confrères moins « respectueux ». Et il ne tient qu'à moi de les relâcher dès à présent. Vous savez ce qui se passera alors… Toute l'excitation et la frustration de ces derniers mois déferleront sur la reine et son enfant. Elle n'aura aucun répit. Voulez-vous vraiment prendre ce risque ? Pour elle ? Pour le bébé ?
Je secouais la tête.
- Je me disais bien… Je me fiche du moyen que vous emploierez et des explications que vous aurez à donner. Dans deux jours, je reviendrai pour installer les caméras et micros nécessaires. Deux jours.
Je le fusillais du regard et le congédiais d'un geste hargneux. Il s'inclina en une révérence grotesque avant de sortir.
Carter déboula dans mon bureau quelques secondes plus tard.
