Chapitre 11 - Hermione Granger, Professeur dubitative

Le début du mois de mai fut marqué par une autre conférence moldue consacrée aux signatures de réponse aux immunothérapies. La conférence avait lieu à Trinity, aussi Malefoy ne jugea pas nécessaire d'accompagner Hermione.

Elle y fit un exposé sur l'avancée de ses recherches sur de nouveaux biomarqueurs qui pourraient permettre de traiter des cancers jusque là réfractaires. Son travail fut accueilli avec enthousiasme et donna lieu à de nombreuses questions, notamment venant d'un homme massif à l'accent scandinave qu'Hermione n'avait jamais croisé auparavant dans des conférences.

Puis ce fut le tour du Dr. Johan Driessen de parler des applications de son nouvel outil permettant d'identifier les signatures multimodales, dont les fonctionnalités furent discutées et débattues.

À la fin de la conférence, Hermione salua les docteurs invités, qui pour la plupart étaient les mêmes qu'à la conférence du mois de février.

"Ton ami pilote n'est pas là aujourd'hui ?" demanda Johan.

"Heu… Non, il est en vol aujourd'hui, il n'a pas pu venir," répondit Hermione en sentant ses joues rougir.

"Dommage," dit Johann, l'air absolument pas désolé.

"Docteur Granger ?" dit une voix à l'accent scandinave dans son dos.

Hermione se retourna pour se retrouver face à l'homme qui l'avait interrogée pendant son exposé. Il était grand, pas loin de deux mètres, une montagne de muscles affublée de cheveux blond-roux et d'une imposante barbe assortie.

"Gunnar Larsen, enchanté," dit-il en lui tendant la main. Hermione la serra en croisant ses yeux d'un bleu pénétrant. "Je dirige une entreprise pharmaceutique au Danemark, Apotech. J'ai été très impressionné par vos recherches, voyez-vous. Nous développons actuellement un traitement à base de nanoparticules et j'ai des raisons de croire que les biomarqueurs auxquels vous faisiez référence pourraient être détectés dans les tissus grâce à des nanoparticules."

Enchantée par cette perspective, Hermione plongea dans une conversation avec le nouveau venu, discutant des applications possibles de ses nanoparticules. C'était une technologie qui venait d'émerger et dont les promesses étaient extrêmement enthousiasmantes.

Finalement, ils décidèrent de fixer un rendez-vous le jeudi suivant au café de Trinity pour discuter d'une éventuelle collaboration. Au-delà des nanoparticules, Hermione allait avoir besoin d'un laboratoire pharmaceutique pour synthétiser en grande quantité son traitement une fois qu'il serait au point. Si une collaboration se mettait en place avec ce Larsen et Apotech, cela lui donnerait l'opportunité de lancer rapidement les tests cliniques.

Avant le rendez-vous, Hermione prit soin d'enquêter sur Gunnar Larsen pour s'assurer qu'il était bien celui qu'il prétendait être. Avant d'envisager une collaboration, surtout sur un sujet aussi sensible que son traitement sur la lycanthropie, elle prenait toutes ses précautions afin d'être certaine de ne pas être menée dans un piège. Bien sûr elle n'avait aucune intention de parler des détails de son projet, de toute façon Larsen était un Moldu et n'avait aucune idée de l'existence de la lycanthropie. Simple principe de précaution.

L'homme avait étudié à l'Université Louis-et-Maximilien de Munich et était titulaire d'un doctorat en Biologie Humaine. Elle trouva des dizaines de publications à son actif, dont des brevets. Elle lut le tout avec attention. Ses travaux sur les nanoparticules étaient fascinants. Il avait ouvert son entreprise l'année précédente et son chiffre d'affaires traduisait une intense activité.

C'est donc confiante et nourrissant l'espoir d'une collaboration fructueuse qu'Hermione rencontra Larsen au café de Trinity le jeudi suivant.

Il était déjà arrivé quand elle entra dans le café, installé dans le fond, sa forme massive adossée au mur. Il se leva pour l'accueillir.

"Dr. Larsen," le salua-elle.

"Gunnar," corrigea-il en souriant.

"Gunnar," répéta Hermione. "Merci d'avoir fait le déplacement une nouvelle fois pour me rencontrer."

"Tout le plaisir est pour moi, Dr. Granger."

"Hermione," dit-elle en s'asseyant. Gunnar avait commandé un café et une crème brûlée pour elle.

Elle le remercia de nouveau et ils discutèrent longuement des applications des nanoparticules sur les biomarqueurs. Gunnar se révéla être des plus sympathiques malgré son physique intimidant.

Il souriait beaucoup et écoutait Hermione avec grande attention lorsqu'elle parlait. Il la fixait de son regard pénétrant et Hermione se surprit à penser que celui de Malefoy était beaucoup plus perçant, bien que le dannois fut de carrure bien plus impressionnante. Ce n'était pas les yeux en tant que tels, mais le regard de Malefoy qui la faisait se sentir à nu et qui la déstabilisait. Cette façon qu'il avait de la regarder droit dans les yeux, comme s'il plongeait dans son âme… Hermione cligna des yeux, revenant à la conversation.

Finalement, Gunnar et elle se mirent d'accord pour qu'Hermione envoie un échantillon de ses biomarqueurs aux laboratoires d'Apotech afin de faire quelques essais et de se rencontrer de nouveau pour établir une collaboration officielle si les résultats étaient bons.

Au moment de se séparer, Hermione lui toucha deux mots à propos d'une hypothétique collaboration si elle avait un jour besoin de synthétiser un traitement et Gunnar se révéla extrêmement intéressé.

"Bien sûr que nous serions ravis de travailler avec vous, même si les nanoparticules se révèlent inefficaces pour détecter vos biomarqueurs. Il faut que vous veniez visiter nos laboratoires, je pourrais vous montrer les différentes chaînes de production que nous avons. Bien sûr, il est toujours possible de développer une nouvelle chaîne de production si besoin est. Vous avez un traitement particulier en tête ?"

"Rien de concret pour le moment je le crains," éluda-elle. "J'espère réussir à arriver à quelque chose avec mes biomarqueurs, pourquoi pas à l'aide de nanoparticules justement. Je travaille également sur les thérapies géniques en parallèle pour d'autres projets. Si ça aboutit à quelque chose également il est possible que je puisse breveter un traitement, mais je n'en suis pas encore là, je demandais par simple curiosité, vraiment."

Gunnar hocha la tête avec un air compréhensif.

"N'hésitez pas si vous avez besoin de quoi que ce soit, je serais honoré de travailler avec vous à l'élaboration de n'importe quel traitement, Hermione. Vos travaux sont tellement avant-gardistes et innovants, j'ai une grande admiration pour vous."

Hermione balbutia des remerciements, gênée, avant de saluer Gunnar et de regagner son laboratoire. Elle sentit le regard du dannois sur son dos jusqu'à ce qu'elle disparaisse de sa vue.

ooo

Quelques jours plus tard, Hermione était en train de donner un cours d'Immunologie dans le Cambridge moldu quand elle sentit son Carnet vibrer plusieurs fois dans sa poche. Occupée à tracer des séquences génétiques au tableau, elle l'ignora.

Elle acheva son cours dix minutes plus tard et, tandis que les étudiants sortaient de la salle, elle rangea ses feuilles de cours dans sa mallette. Quand le dernier étudiant fut sorti, elle attrapa son Carnet dans sa poche et vit que Malefoy était l'auteur des messages. Curieuse de voir ce qu'il voulait, elle ouvrit le Carnet.

Quelqu'un a essayé de passer tes protections. Il faut qu'on parle.

Suivi de Je viens te voir.

Hermione fronça les sourcils, perturbée. Quelqu'un avait essayé d'entrer chez elle ? Elle commençait à rédiger une réponse - Qu'est ce qu'il s'est passé ? Je suis à - quand Malefoy se matérialisa juste devant elle comme un foutu fantôme.

Elle poussa un cri d'effroi en sursautant en arrière, heurtant sa chaise. Elle faillit trébucher et tomber de l'estrade, mais Malefoy enroula ses doigts autour de son poignet, l'empêchant de tomber complètement. Hermione atterrit tant bien que mal sur la chaise.

Malefoy posa le sac qu'il avait à la main, s'appuya nonchalamment contre le bureau et dit sur le ton de la conversation : "Tu sais, je regrette que tu n'aies pas saisi ta baguette et jeté un sort au lieu de crier. Tu as vu mon message ?"

Hermione essaya de retrouver une contenance, son cœur battant encore à mille à l'heure après cette apparition soudaine.

"Tu viens juste de me foutre la trouille de ma vie ! Depuis quand es-tu là ? Préviens-moi, la prochaine fois !"

"Je t'ai averti que j'arrivais," dit Malefoy avec son sourire en coin. Il avait l'air très fier de son petit tour.

"J'ai lu ce message une milliseconde avant que tu te matérialises devant moi comme le foutu Baron Sanglant."

"Ce n'est pas ma faute si tu étais trop occupée à conjurer des anticorps."

"Je - quoi ?" dit Hermione avec confusion.

Malefoy pointa le menton vers le tableau noir. Hermione se retourna vers le tableau, fit le lien avec son commentaire, leva son index, et dit, "Ce n'est pas ce que ça veut dire -"

"Je suis là pour parler de qui fouine autour de ton cottage. Et pourquoi," l'interrompit Malefoy sans aucun scrupule. Hermione lui jeta un regard acerbe face à cet affront, prit une grande inspiration et se répéta plusieurs fois de ne pas encourager Malefoy à être une nuisance.

Elle croisa les mains sur le bureau avec tout ce qu'elle avait réussi à rassembler de sérénité. "Assieds-toi. Et raconte moi ce qu'il s'est passé."

Malefoy jeta un Collaporta à la porte de la classe, puis il fit léviter une chaise vers eux et s'assit dessus en face d'Hermione, de l'autre côté du bureau. Hermione réprima un sourire. On aurait dit qu'elle s'apprêtait à interroger un étudiant particulièrement bien coiffé. Elle croisa les bras et attendit, ses yeux fixés sur le visage de Malefoy.

Il se redressa, prit une seconde pour organiser ses pensées, puis parla.

"Une de mes protections a déclenché une alarme à l'arrière de ton cottage. Quelqu'un essayait soit de tester la protection, soit de la désarmer. Je suis arrivé en quelques minutes mais il était déjà parti. Hominem Revelio n'a rien révélé excepté ta voisine, mais j'ai trouvé une trace magique de lui."

"Comment ?" l'interrompit Hermione. Détecter une trace magique était un exercice particulièrement délicat.

"Un enchantement de détection magique," dit Malefoy, l'air très satisfait qu'elle ait posé la question. "Un des miens."

Hermione songea qu'elle aurait été curieuse d'apprendre un tel enchantement, mais ce n'était pas le moment d'aborder le sujet.

Malefoy poursuivit. "Si je me fie à sa taille, c'était certainement un sorcier ou une sorcière adulte. J'ai suivi la piste jusqu'au champ derrière ta maison. L'individu a transplané ou utilisé un Portoloin ; la trace s'arrêtait trop soudainement pour que ça soit en balai."

Hermione se leva, sa baguette dans la main, prête à transplaner. "Est-ce que la trace est toujours là ? Je veux voir -"

"Non. Ça se dissipe rapidement. Je ne l'ai vue que parce que je suis arrivé que quelques instants après - et que je connaissais l'enchantement."

Hermione se rassit, déçue. "Et tu es sûr qu'il a interagi avec la protection ? Ce n'était pas juste le facteur ?"

"Évidemment ce n'était pas juste le facteur. Je suis alerté par les interactions magiques, sinon j'aurai des alarmes à chaque fois qu'un rouge-gorge se pose sur tes glycines."

"La voisine pourrait-elle avoir vu quelque chose ?"

"Elle dormait et était du mauvais côté de ton cottage. Et si cet intrus valait quelque chose, il était au minimum Désillusionné pour faire une balade dans le Cambridgeshire moldu."

Hermione tapota le bureau en réfléchissant. "Tu as dit que les transplanages pouvaient être tracés. Ne pourrait-on pas tracer celui-là ?"

Malefoy leva les yeux vers elle. Il avait l'air las et résigné. "La rumeur - que tu ne tiens pas de moi - est que le Ministère trace les transplanages de certaines personnes d'intérêt spécifique. Je vais regarder, mais à moins que cette personne ne soit particulièrement vilaine ou intéressante, il n'y aura rien dans les enregistrements."

"Je regrette de ne pas avoir installé de caméras à la maison," dit Hermione, en colère contre elle-même. "J'en ai au laboratoire. Je vais rectifier ça immédiatement. As-tu vu quelque chose d'autre ? Des empreintes de pas ? Un bout de tissu ?"

Malefoy haussa un sourcil sardonique. "Non. Ce n'est pas un film Moldu où les suspects laissent des indices bien pratiques. Maintenant, si tu as fini de m'interroger, Professeur, j'ai quelques questions moi aussi. Ou devrais-je attendre tes heures de bureau ?"

Hermione se raidit à l'usage du titre. Dans la bouche de Malefoy, c'était extrêmement perturbant. "Eurk. Ne fais pas ça."

"Ne fais pas quoi, Professeur ?"

"C'est profondément troublant," dit Hermione.

"J'aime plutôt ça."

Hermione lui jeta un regard noir. Évidemment, il aimait tout ce qui était susceptible de la contrarier. Il fallait qu'elle cesse de lui donner des munitions.

"Tu as l'air fâché. Vas-tu me donner une retenue ?" demanda Malefoy avec impertinence.

"C'est l'université - on ne donne pas de retenues. Peut-on passer à tes questions ?"

Malefoy pinça les lèvres puis redevint sérieux.

"Le meilleur cas de scénario, c'était l'unique visite d'un voleur sorcier qui voulait voler des Gallions et qui a été effrayé par la protection. Mais on va traiter ça comme si c'était le premier contact d'une organisation possiblement hostile. As-tu insinué à quelqu'un, récemment, que tu avais fait une découverte ?"

"Non," dit Hermione en se redressant. Elle était toujours très prudente à ce sujet. "Depuis la réaction disproportionnée de Shacklebolt, je n'ai rien dit. Le projet est entièrement auto-financé et a de toute façon toujours été sous le radar - attend, tu ne sais pas ce qu'est un radar - toujours été discret. Je n'en ai rien mentionné à mes amis ou collègues. J'ai plusieurs projets de recherche en cours - plus qu'assez pour justifier de mon temps."

"Alors pourquoi maintenant ? Pourquoi aujourd'hui ?"

"Je ne sais pas," dit Hermione, un peu agacée par la situation. "N'est-ce pas ton travail de découvrir ça ?"

"C'est ce que je suis en train de faire, Professeur." Hermione lui jeta un regard noir. "L'incident a eu lieu il n'y a pas plus de vingt minutes, donc si tu veux bien me laisser le temps, plutôt que de m'interrompre -"

"C'est toi qui parle d'interruption," s'emporta Hermione.

"Qui est Larsen ?"

Elle se figea, surprise.

"... Gunnar ? Comment as-tu -?"

Malefoy fit léviter l'emploi du temps d'Hermione vers elle. "J'en suis malheureusement venu à bien connaître ton emploi du temps et c'est le seul élément nouveau de ces deux dernières semaines."

"Je l'ai rencontré quand - jeudi dernier ? C'est le directeur d'une entreprise pharmaceutique danoise. Ils développent une nouvelle sorte de médicaments. Des nanoparticules. Le potentiel clinique est extrêmement intéressant dans mon domaine."

"Donc c'est un Moldu ?"

"Oui."

C'était maintenant au tour de Malefoy de tapoter le bureau d'Hermione du bout des doigts alors qu'il réfléchissait. "Et tu as été un modèle de discrétion, sinon ?"

"Oui. L'Auror qui me protège n'est même pas au courant."

"Oh, j'en suis bien conscient, ainsi que de sa frustration à ce propos." Les doigts de Malefoy tapèrent le bureau plus fort. "Ça rend bien plus difficile de savoir contre quoi diable je dois te protéger."

"Contre rien. Personne ne sait."

"Et pourtant, quelqu'un est venu à ton cottage aujourd'hui."

"Oui. Mais tu as dit toi même que ça aurait très bien pu être un cambrioleur qui rôdait."

Elle ne croyait pas vraiment à cette hypothèse, mais il était strictement impossible que quelqu'un soit au courant de son projet.

"Mais pourquoi spécifiquement ton cottage ?"

"Je ne sais pas."

"Je ne crois pas aux coïncidences, pas quand tu es impliquée."

"Moi non plus."

Cette visite demeurait extrêmement troublante. Et il était très agaçant de ne pas savoir qui en était l'auteur et pourquoi. Est-ce que c'était les prémices d'une attaque de plus grande envergure à venir ? Mais c'était impossible. Elle n'avait rien dit à personne. Ses données étaient protégées. Alors comment ?

"Si quelqu'un a laissé fuiter quelque chose, et qu'il y a des gens qui sont aux aguets, cette situation n'est plus la même qu'en janvier quand on ne faisait que prendre des mesures de précaution. On appellera ça un incident isolé, mais si ça se reproduit, Granger, je vais avoir besoin de savoir ce que tu mijotes. Tu peux me soumettre à un Serment du Secret si c'est nécessaire."

Hermione soupira. Elle détestait cette situation. En apprenant les détails de son projet, Malefoy réagirait probablement aussi mal que Kingsley, voire pire, étant donné la paranoïa dont il avait tendance à faire preuve alors même qu'il n'y avait aucun danger.

"Je comprends," dit-elle néanmoins. "Et j'espère qu'il n'y aura pas d'autre incident. Je préfère que personne ne soit au courant de rien tant que je ne suis pas prête à publier. Tu me forceras probablement à me cacher ou quelque chose de tout aussi excessif."

Malefoy la dévisagea, l'air grave. "Si tu penses que je vais devoir te forcer à te cacher, alors ça doit être quelque chose d'Énorme."

"C'est Énorme. Mais c'est aussi Bien. Mais ça va fâcher quelques personnes."

Malefoy ne répondit pas. Il avait l'air perdu dans ses pensées. Elle espérait qu'il n'était pas en train de réfléchir à un moyen de l'enfermer - ou de lui extorquer des informations.

"Si cette personne en avait après mes recherches, elle serait venue au laboratoire plutôt que chez moi, non ?" avança-elle.

Malefoy croisa son regard, semblant hésiter.

"Aller directement chercher l'information à la source - dans ton cerveau - dans un coin paumé du Cambridgeshire est plus facile et discret que de fouiller un laboratoire plein de monde à la recherche d'informations potentiellement cachées," finit-il par répondre.

Hermione frissonna. Elle se frotta les mains sur les bras pour chasser la chair de poule. "Je trouve toute cette affaire inquiétante. Je n'aime pas ça. J'espère vraiment que ce n'était qu'un stupide cambrioleur."

"Si ce n'était pas un stupide cambrioleur, hé bien - les méchants savent maintenant que tu es bien protégée."

"Est-ce que c'est une bonne ou une mauvaise chose ?"

Malefoy haussa les épaules. "Les deux. Ça leur révèle que tu - ou le Ministre - es consciente des risques et que tu as pris tes précautions. Que tu es sous protection. Ça, ça pourrait leur faire peur. Ou ça pourrait les pousser à des manœuvres plus offensives."

"Je pensais plutôt à cette seconde possibilité," dit Hermione en fronçant les sourcils. "Cependant, j'ai la bague et je t'ai toi. Ce n'est pas rien."

Malefoy sembla embarrassé face à cette remarque mais elle l'ignora.

"Je ne suis pas non plus une imbécile sans défense," continua-elle dans une tentative de se rassurer. "Crier et tomber sur des chaises à cause de toi mis à part. Et j'ai les meilleures protections qu'on puisse avoir sur un domicile. Enfin - sur la plupart des domiciles. Je suppose que pour les Manoirs et les Châteaux de la vallée de la Loire on est sur un tout autre niveau."

"Il y a des avantages à avoir une ancienne demeure," dit Malefoy avec un air suffisant.

Tout allait bien, elle était bien protégée, et de toute façon il était impossible que des informations aient fuité. C'était forcément un cambrioleur de passage à son cottage. Soudain, elle se souvint que Pattenrond était là-bas.

"As-tu vu mon chat ?" demanda-elle à Malefoy.

"Non," dit Malefoy. "Mais je n'ai pas cherché. Je suis sûr que le bougre va bien."

"Je ne lui dirai pas que tu l'as appelé comme ça," dit Hermione en pinçant les lèvres. "Il vient juste d'arrêter de feuler quand je lui parle de toi."

"... Tu parles de moi à ton chat ?" demanda Malefoy avec étonnement.

"Il aime être tenu informé. Aide le à décider quelle quantité de poils te faire manger."

"Dis-lui que je pense que c'est un animal convenable."

"Je le ferai."

"Le spécimen de demi-Fléreur le plus impressionnant que je n'aie jamais vu."

Hermione retint un rire. Elle se leva et se remit à remplir sa mallette avec les copies des étudiants. "Je ferais mieux d'y aller."

Malefoy se leva aussi et fit flotter sa chaise à sa place. Puis il se tourna vers Hermione qui refermait sa mallette et lança :

"Qu'est ce qu'un docteur de l'amour ?"

Hermione se figea et regarda Malefoy. Elle devait avoir mal entendu.

"As-tu vraiment dit docteur de l'amour ?"

"Oui."

"Comment as-tu pu possiblement entendre parler de ça ?"

"Un vilain distillateur de Potions prétend en être un. Qu'est ce que c'est ?"

"Ils prétendent être capable d'aider les gens seuls à trouver l'amour avec les bêtises habituelles - lire dans les pensées, les cartes de tarot, les feuilles de thé. Ce sont des fraudeurs qui volent l'argent des personnes vulnérables."

"Hé bien celui là obtenait des résultats. Magiquement assisté, vois-tu."

"Non. Potions d'amour ?"

"Oui."

"Pour des Moldus ?"

"Oui."

"C'est horrible," dit Hermione. "Il faudra garder un œil sur les pauvres victimes. Les Potions ont des effets très différents sur les populations non-magiques."

"Je sais. Les victimes sont surveillées par nos équipes médicales pendant deux semaines."

"Bien. C'était quoi comme potions ?"

"Je n'en ai aucune idée," dit Malefoy en remuant son sac. "Je n'ai pas encore fait l'inventaire."

"Ooh, tu les as ?"

Elle jeta un œil dans le sac de Malefoy. "De la contrebande ! Comme c'est excitant !"

Il sortit quelques fioles sombres et sans étiquette. "Je crois que les plus grosses sont des Breuvages de Cupidon. Les plus petites - Amortentia ?" Il fit sauter le bouchon de l'une des fioles et la tendit à Hermione. "Est-ce que ça a l'air nacré à ton avis ?"

"Dur à dire," dit Hermione, regardant dans la fiole sombre. Elle la passa sous son nez. L'odeur était fraîche, comme celle d'un parfum de luxe aux notes d'agrumes et de quelque chose de plus végétal "Ça ne sent pas comme l'Amortentia. Ça sent comme de l'eau de Cologne de luxe."

"Quoi ? Donne-la moi," dit Malefoy, et il sentit à son tour.

"Alors ?" demanda Hermione, une main posée sur sa hanche. "Es-tu certain que tu n'as pas perquisitionné une parfumerie ?"

"Ça sent comme du café pour moi," dit Malefoy. "C'est de l'Amortentia."

Perplexe, Hermione renifla la fiole une nouvelle fois. L'odeur était toujours la même. "Mais l'Amortentia sent comme de l'herbe coupée pour moi… ça c'est de l'eau de toilette* pour homme. Voyons voir sa couleur."

Elle métamorphosa l'un des papiers sur le bureau en une assiette plate, sur laquelle elle versa une quantité de potion. Le liquide émergea de la fiole sombre, gloss chatoyant et nacré. Une légère spirale de vapeur s'en dégagea quand elle entra en contact avec l'air, confirmant sans aucun doute que c'était en effet de l'Amortentia.

Hermione la fixa pendant un long moment, les bras croisés. L'odeur d'un parfum de luxe ? À vrai dire, maintenant que la potion était à l'air libre et qu'Hermione pouvait mieux la sentir, elle se rendit compte que ce n'était pas n'importe quel parfum de luxe. C'était tout à fait celui de Malefoy. Elle sentait même des notes de sous-bois, d'iode et de fumée de feu de tourbe mélangées avec l'odeur des agrumes et du romarin. Pourquoi l'Amortentia sentait-elle comme Malefoy à présent ? Ça n'avait aucun sens.

"Hé bien," dit-elle finalement, devant se rendre à l'évidence. "C'est de l'Amortentia."

"Quand as-tu senti de l'Amortentia pour la dernière fois ?" demanda Malefoy.

"Euh… celle de la classe de Slughorn."

"L'Amortentia est censée avoir l'odeur de quelque chose que tu trouves séduisant ou attirant," marmonna Hermione. "Alors pourquoi…?"

"Pourquoi quoi ?"

"Qu'est-il arrivé à mon herbe coupée et mes parchemins neufs ?" demanda Hermione d'un air accusateur. Ce changement des plus déstabilisant était forcément de la faute de Malefoy.

"Tes goûts en matière d'homme ont évolué," dit Malefoy en haussant les épaules. "Tu peux prétendre à mieux que l'assistant du jardinier, certainement…"

Hermione fronça les sourcils. Ses goûts en matière d'homme n'incluaient certainement pas les utilisateurs de parfums de luxe. "Ne soit pas condescendant. Est-ce que l'odeur a changé pour toi ?"

Malefoy observa Hermione pendant un moment, semblant estimer si oui ou non elle était digne de cette information personnelle. "Peut-être."

"C'était quoi avant ?"

"Je ne me souviens pas. Des bonbons au citron, ou quelque chose comme ça."

"Et maintenant c'est du café ?"

"Oui," dit Malefoy. "Et du caramel."

"Ça t'arrive de penser à autre chose que la bouffe ?"

"Non."

"Le romantisme est mort."

"Tu prêches un converti, Granger."

Malefoy fit disparaître l'échantillon d'Amortentia qu'Hermione avait versé. Puis, alors qu'elle rendait à l'assiette sa forme de papier d'origine, il remit les fioles dans son sac.

"Je vais aller chercher un café, et incidemment, mon âme sœur," déclara Malefoy.

"Le café du rez-de-chaussée a une panna cotta café-caramel. Peut-être que ton âme sœur est une crème anglaise.

"Montre-moi."

Ils quittèrent la salle de classe ensemble et descendirent quelques étages jusqu'au rez-de-chaussée. Hermione masqua l'insigne d'Auror qui brillait sur les robes noires de Malefoy d'un coup de baguette. Le reste de sa tenue ne détonnerait pas parmi les étudiants et les universitaires Moldus.

Elle le mena au petit café. Il ne restait qu'une panna cotta dans la vitrine.

"C'est un signe," dit-elle.

Hermione acheta la panna cotta pour Malefoy (qui n'avait toujours pas d'argent moldu), et pris un cappuccino pour elle.

"Merci de me laisser partager ce jour spécial pour tous les deux," dit Hermione, plaçant le dessert dans les mains de Malefoy avec une grande solennité. "Voilà pour une vie de joie et d'amour."

Puis elle lui tendit une petite cuillère en plastique. "Mon cadeau de mariage pour l'heureux couple."

Malefoy faisait ce sourire en coin, mi amusé, mi indigné.

Ils sortirent du bâtiment dans le chaud soleil de mai. Hermione savourait son cappuccino quand Malefoy lui donna un coup de coude, désignant un jeune homme bien charpenté en train de tondre la pelouse.

"Regarde, Granger - ton jardinier tond le square. Tu veux que j'aille lui parler pour toi ?"

"C'est une cour, pas un square. Et ne -"

"Salut," dit Malefoy au garçon baraqué sans laisser à Hermione le temps de protester. "Avez-vous un mobile ?"

"Euh - oui ?" dit le jardinier.

Malefoy saisit une Hermione mortifiée par les épaules, se tenant derrière elle pour l'empêcher de fuir. "Elle est un peu timide, mais ce Professeur ici présent aimerait vos numéros."

"Mes quoi ?"

"Vous savez," dit Malefoy, imitant quelqu'un qui téléphonait.

"Oh !" dit le jardinier. "Mon numéro."

Hermione dégagea rageusement les mains de Malefoy d'un coup d'épaules. "Ignorez-le," dit-elle au jardinier. "C'est un imbécile."

Le jardinier avait l'air à la fois confus et plein d'espoir. Il observait Hermione de la tête aux pieds. "Voulez-vous quand même mon numéro ?"

"Non. Je suis désolée pour le dérangement. Je vous en prie, continuez."

Il eut l'air déçu. "Très bien. Vous savez où me trouver si vous changez d'avis, Professeur … ?"

"Granger," dit Malefoy, toujours très doué pour être nuisible.

"Ça ne sera pas nécessaire. Comme je le disais, cet homme est un imbécile."

Elle saisit fermement Malefoy par le coude et l'entraîna loin du jardinier avant qu'il ne puisse faire davantage de dégâts. Il était hilare, apparemment très satisfait de sa petite blague.

"Le pauvre homme avait l'air affreusement triste, tu sais," dit-il d'un air faussement désolé.

Hermione serra les dents et ne répondit pas.

"Dégoûté, Granger," insista Malefoy.

"Oh, chut."

"Où allons-nous ?"

"Dans un endroit où je peux transplaner et m'éloigner de toi."

Ils arrivaient en vue de l'alcôve ombragée derrière un massif d'arbustes qu'Hermione utilisait habituellement pour transplaner. Elle sortit sa baguette, transforma discrètement d'un sort informulé la panna cotta en mucus de veracrasse, et avec un dernier regard irrité pour Malefoy qui ricanait toujours, transplana chez elle.