Douces tentations
Eddie Diaz se leva tôt ce matin-là, comme tous les autres.
La lumière douce de l'aube commençait à peine à effleurer les champs, enveloppant tout dans une lueur dorée et paisible. La maison modeste qu'il partageait avec son fils était déjà animée par les bruits familiers du début de journée. Il se sentait étrangement nerveux à l'idée de la journée qui l'attendait.
Buck.
Ce jeune homme aux yeux d'un bleu hypnotique, qui semblait totalement hors de place dans ce décor rural et brut, commençait à l'obséder. Il était évident qu'il venait d'un milieu noble. Ses manières raffinées, sa façon de parler, et même ses vêtements, bien qu'usés par l'épreuve, trahissaient son origine. Eddie devait rester sur ses gardes, malgré la douceur apparente de Buck.
Il ne lui faisait pas tout à fait confiance même s'il le voulait plus que tout.
Il l'attirait d'une façon dont il ne s'était jamais permis de désirer personne. La veille, il l'avait surpris à la rivière en contrebas de ses terres, en train de se baigner, nu comme un ver et jamais Eddie n'avait rougit autant. Il n'avait pas pu non plus détacher son regard de l'eau ruisselant de son corps si parfait.
Eddie avait dû lutter contre son envie de le rejoindre de passer sa langue sur la totalité de sa peau. Il se sentait coupable de l'avoir observé avec gourmandise sans que le jeune homme ne se doute de rien mais il avait été bien puni pour son péché.
Il était devenu dur si vite qu'il avait mit une éternité à redescendre.
Buck était étonnement musclé pour un noble mais après tout peut-être que Eddie extrapolait à cause de son éducation. Buck avait dit avoir passé plus de la moitié de sa vie parmi les sœurs. N'importe quel enfant quelque soit son statut en serait ressorti avec la même éducation.
Après un petit déjeuner rapide, Eddie sortit de la maison, prenant soin de ne pas faire de bruit pour ne pas réveiller Buck, qui dormaient encore dans la petite chambre qu'ils lui avaient aménagée et Christopher qui comme d'habitude ronflait doucement dans son sommeil d'enfant.
Il se dirigea vers l'étable pour commencer ses tâches matinales.
Ses pensées dérivèrent vers les derniers jours passés avec Buck. Chaque interaction avec lui était un mélange de défi et de fascination. Buck était une énigme, une contradiction vivante. Comment un noble pouvait-il être aussi gentil, aussi humble ? Eddie ne voulait pas se laisser amadouer, mais il ne pouvait ignorer l'attraction qu'il ressentait.
Buck était devenu une partie intégrante de leur vie.
Il essayait dans la mesure du possible de rendre sa vie à la maison plus facile, il tentait, avec plus ou moins de succès, de leur préparer à manger, il rangeait la maison, la rendant plus agréable même si Eddie avait remarqué qu'il bannissait systématiquement les fleurs que laissait Ana, pour lui depuis des années maintenant.
– Ça me fait éternuer, avait-il seulement répondu quand il le lui avait fait remarquer.
Et puis, il y avait ces moments d'entraînement, quand Eddie apprenait à Buck à se défendre. Buck se montrait déterminé, même lorsqu'il mordait la poussière. Il se relevait toujours, plus résolu que jamais, et Eddie ne pouvait s'empêcher d'admirer cette ténacité.
Eddie se souvint avec un sourire tendre d'une des sessions d'entraînement particulièrement marquante.
– Encore, avait dit Eddie, regardant Buck se relever du sol, essoufflé mais déterminé.
Buck s'était redressé, ses yeux bleu brillant de détermination.
Il avait attaqué Eddie avec toute la vigueur qu'il pouvait rassembler. Eddie avait esquivé facilement le coup, attrapant le poignet de Buck et utilisant son élan pour le projeter au sol. Buck grogna, mais se releva presque immédiatement.
– Mais où as-tu appris à faire ça ? bougonna le jeune homme aux yeux bleus, ses magnifiques yeux qui lançaient des éclairs de frustration.
Eddie avait simplement souri de satisfaction.
– Encore, avait-il dit simplement.
Ces moments étaient devenus un rituel pour eux.
Eddie appréciait réellement ces sessions, bien plus qu'il ne l'aurait admis. Il aimait voir Buck essayer si fort, se relever malgré les chutes, et il aimait encore plus entendre sa voix douce et patiente enseigner à Christopher la lecture et l'écriture avec une patience et une douceur qui faisaient fondre son cœur.
Il se souviendrait toujours de la première leçon qu'il avait donné à son fils. Eddie était resté à l'entrée les regardant sans qu'ils ne s'en rendent compte.
Il lui apprenait à lire et à écrire, utilisant des méthodes simples mais efficaces. Christopher, malgré son handicap, montrait une grande intelligence et une curiosité insatiable.
– Tu vois, Chris, avait dit Buck en tenant une plume. Chaque lettre a sa propre histoire. Par exemple, la lettre « A » ressemble à une petite maison avec un toit pointu.
Christopher avait souri, concentré sur ses exercices.
– Et « B » ?
– « B » ressemble à une colline double, comme deux bosses séparées par un chemin, avait expliqué Buck avec enthousiasme.
Et Eddie avait passé l'après-midi à se remémorer les paroles de Buck pendant qu'il s'occupait de ses champs.
Depuis ce jour, Eddie observait souvent en silence, absorbant chaque technique, chaque méthode que Buck utilisait, trop fier pour demander à Buck de lui enseigner à lire et écrire à lui aussi, mais désespéré d'apprendre, de comprendre.
Les après-midis étaient souvent réservés aux histoires.
Christopher adorait ces moments où Buck lui racontait des fables et des légendes, ses yeux brillaient de curiosité et d'émerveillement, qu'il se plaisait à lui raconter dès son retour et Eddie devait admettre qu'il appréciait ces moments avec son fils.
C'était apaisant.
– Raconte-moi encore l'histoire du chevalier courageux, demandait souvent Christopher.
Et Buck s'exécutait, recréant avec passion les aventures épiques et les batailles héroïques, mimant parfois les combat à l'épée et imitant les voix des différents personnages. Chaque jour, il le sentait de plus en plus intégré dans leur petite famille, trouvant un sens à sa présence ici et ne voulant plus le laisser partir.
Le soir, après une journée épuisante, Eddie retrouvait Buck pour leur entraînement quotidien. Malgré la fatigue, ces moments lui donnaient une étrange satisfaction, une sensation d'accomplissement et de connexion. Il savait que Buck finirait par partir, mais il ne pouvait s'empêcher de savourer chaque instant passé avec lui.
Eddie s'écarta pour observer Buck, ses muscles tendus et son regard concentré.
Il avait accepté d'enseigner à Buck les rudiments de l'art du combat, et bien que ce dernier soit déterminé, ses progrès étaient lents. Pourtant, Eddie ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine admiration pour la ténacité du jeune homme.
– Encore une fois, Buck, dit-il en ajustant sa position. Essaie de mettre plus de force dans ton coup.
Buck acquiesça, essuyant la sueur qui perlait sur son front.
Il se remit en position, ses jambes légèrement fléchies, prêt à attaquer. Ses yeux étaient fixés sur Eddie, et il cherchait à anticiper ses mouvements. Eddie savait que la douleur de ses blessures récentes se faisait encore sentir, à ses rictus lorsqu'il tirait trop, mais il l'ignorait autant que possible, déterminé à prouver sa valeur.
D'un mouvement rapide, Buck attaqua, visant le flanc d'Eddie. Ses mouvements devenaient de plus en plus fluides, mais il manquait encore de vitesse et de précision. Eddie, avec son expérience et son agilité, para facilement l'attaque. Il tourna légèrement son corps, utilisant l'élan de Buck contre lui, et d'un geste calculé, il le projeta au sol.
Le souffle coupé, Buck se retrouva sur le dos, fixant le ciel bleu au-dessus de lui. Eddie se tenait au-dessus, tendant une main pour l'aider à se relever.
– Tu dois être plus rapide, dit-il, ses yeux perçants ceux de Buck. Si tu hésites, tu donneras à ton adversaire l'opportunité de te battre.
Buck hocha la tête, attrapant la main d'Eddie pour se relever. Il savait qu'il avait encore beaucoup à apprendre, mais la frustration commençait à monter en lui. Il s'essuya de nouveau le front, jetant un regard déterminé à Eddie.
– Encore une fois, murmura-t-il, sa voix teintée de détermination.
Eddie sourit légèrement, admirant la persévérance de Buck.
– Très bien. Prépare-toi.
Ils reprirent leurs positions, et cette fois-ci, Buck se concentra davantage.
Il observait les moindres mouvements d'Eddie, cherchant une ouverture. Il attaqua de nouveau, cette fois avec plus de force et de rapidité. Mais Eddie, anticipant ses mouvements, para une fois de plus facilement l'attaque et utilisa un contre pour envoyer Buck au tapis.
Cependant, cette fois, Buck ne resta pas au sol. Il se redressa immédiatement, ses yeux brûlant de détermination alors qu'il reprenait sa position de combat.
– Je vais y arriver.
Eddie le regarda avec une admiration renouvelée.
– Je n'en doute pas. Mais il ne suffit pas de vouloir réussir. Il faut comprendre comment réussir. Observe mes mouvements, apprends de tes erreurs, et surtout, ne te précipite pas.
Buck hocha la tête, prêt à recommencer.
Il savait que chaque chute le rapprochait un peu plus de son objectif. Eddie lui avait sauvé la vie, et il était déterminé à montrer qu'il valait cet effort. L'entraînement était dur mais Eddie ne voulait rien laisser au hasard. Il savait que Buck était prêt à tout pour devenir plus fort et prouver sa valeur.
Ils continuèrent leur entraînement, chaque coup, chaque parade, chaque chute rapprochait un peu plus Buck de son objectif. Et à chaque fois qu'il se relevait, Eddie voyait en lui un homme déterminé à surmonter ses faiblesses et à devenir plus fort.
La persévérance de Buck touchait Eddie plus qu'il ne voulait l'admettre. Derrière ses encouragements et ses conseils stricts, Eddie ressentait une connexion croissante avec ce jeune homme déterminé. Une connexion qu'il savait être plus que du simple respect ou amitié, mais qu'il n'était pas encore prêt à admettre. Ça lui faisait bien trop peur.
Une fois de plus, Buck attaqua, ses mouvements devenant de plus en plus fluides.
Eddie para une première attaque, mais Buck, plus rapide cette fois, feinta une seconde attaque avant de pivoter brusquement. Pris de court, Eddie sentit un coup précis lui frapper les côtes, déséquilibrant son centre de gravité.
Surpris par cette nouvelle agilité, il perdit l'équilibre et chuta durement sur le sol, regardant Buck avec un mélange de surprise et de fierté.
– Eddie ? appela Buck, se précipitant pour l'aider à se relever. Je suis des...
Eddie réagit instinctivement, ceinturant Buck avec ses cuisses et le faisant basculer au sol. Il se retrouva à califourchon que dessus de lui, le jeune homme encore sous le choc de ce retournement de situation.
– Comment… ? murmura Buck, les yeux écarquillés.
Eddie se pencha, ses lèvres tout près des siennes.
– Tu as encore beaucoup de choses à apprendre, Buck, souffla-t-il.
Buck était parfait ainsi, allongé sous lui, offert, si beau.
Ses yeux magnifiques le fixaient comme une biche, pas du tout effrayée, et Eddie voulait seulement prendre tout ce que Buck était prêt à lui offrir. Il voulait lui donner une raison de rester, de ne jamais repartir. Buck s'était tellement bien intégré à leur vie, comme s'il avait toujours été là.
Eddie savait qu'il ne pourrait plus jamais faire sans lui.
Eddie passa son pouce sur la jolie marque au-dessus de son œil, un sourire involontaire se dessinant sur ses lèvres lorsque Buck rougit. Il se pencha encore plus près, leurs nez se touchant presque, savourant le halètement désespéré de Buck, la douceur sucrée de son souffle mêlée à l'odeur salé de sa peau en sueur.
Il adorait cette odeur.
Eddie se pencha encore, laissant leurs lèvres se frôler, prêt à s'abandonner à cette tentation si proche, à ses lèvres si rose et charnues juste à moins d'un centimètre des siennes et...
– Papa ? hurla la voix de Christopher.
Eddie sursauta, se redressant d'un bloc et fuyant la pièce, laissant Buck où il était.
Non, mais il était complètement fou ?
Qu'est-ce qui lui avait pris ?
Buck ne resterait pas, il ne devait pas s'attacher. Malheureusement, il savait que c'était déjà trop tard. Il était complètement parti pour le beau blond. Il tira sur son pantalon espérant que la bosse ne s'y attarderait pas. La tension sexuelle entre Buck et lui était à son paroxysme et il ne tarderait pas à lui sauter dessus.
Il allait avoir besoin d'un conseil.
Il rejoignit son fils à la porte de la maison pour découvrir Ana, un énorme bouquet de fleur à la main.
– Bonjour Eddie, dit-elle en souriant. Je t'ai apporté de nouvelles compositions florales.
Eddie soupira mais miraculeusement sa tension sexuelle retomba comme un soufflé.
Ce n'était vraiment pas le moment, pas avec ce qui venait de se passer entre lui et Buck, ce qui avait faillit se passer. Eddie avait besoin de temps et d'aide pour faire le tri dans ses pensées. Il ne voulait pas perdre Buck, il voulait le garder mais il avait peur que le jeune homme reparte, le laissant derrière lui le cœur en mille morceaux.
Eddie avait déjà vécu ça avec la mort de Shannon et il ne voulait plus jamais que ça lui arrive.
– C'est gentil, Ana. Merci.
Elle sourit tendrement et se dirigea vers la table mettant les fleurs dans un vase et s'amusant à l'arranger le plus joliment possible en chantonnant.
– Et je me disais, sourit-elle en se tournant vers lui. Que peut-être nous pourrions diner ensemble, ce soir.
– Diner ? sursauta Eddie.
– Oui, tu sais, avancer dans la cour.
– La… ? Oh Dios, grogna-t-il désespéré qu'elle puisse penser qu'il était intéressé à la courtiser. Je ne peux pas Ana.
– Diner avec moi ? s'étonna-t-elle. Mais pourquoi ?
Eddie ne voulait pas la vexer mais il pensait avoir été assez clair en repoussant ses nombreuses tentatives de le faire s'engager avec elle, tout comme il avait repoussé celles de Marisol mais apparemment Ana était tenance.
Il secoua la tête, essayant de cacher ses émotions.
– J'ai un invité, Ana. Je ne vais pas le laisser seul.
Elle haussa un sourcil.
– Oh oui bien sûr. Et combien de temps encore va-t-il rester ?
Eddie pensa à Buck, à la façon dont il s'était intégré à leur vie, comme s'il en avait toujours fait partie. A la douceur de sa peau, à ses lèvres charnues, à ses magnifiques yeux bleus, à son odeur qui le rendait fou de désir.
Non ne penses pas à ça maintenant, s'intima-t-il alors que son cerveau lui imposait des pensées dépravées, des scénarii dans lesquels Buck se retrouvait coincé sous son corps, à sa merci, complètement consentant. Il devait gémir si joliment, en plus.
Il se força à revenir à la réalité.
– Je ne sais pas, Ana. Le temps d'être entièrement guéri.
– Il semble aller bien, constata-t-elle. Tu devrais lui dire qu'il a dépassé son temps d'accueil.
– Cela me regarde, il me semble, gronda-t-il sèchement, outré qu'elle lui fasse cette remarque.
– Bien sûr, souffla-t-elle.
Eddie ouvrit la porte l'incitant clairement à sortir de la maison, ce qu'elle fit et il la suivit dehors sans se préoccuper de ce qu'elle disait. Il devait obtenir conseil et Athena était la plus sage d'entre eux.
Il se dirigea vers la maison d'Athena.
Il savait qu'il devait se détacher de Buck avant qu'il ne soit trop tard, mais il savait aussi que c'était déjà trop tard. Il avait un trou en forme de Buck dans le cœur, et il n'était pas sûr de pouvoir se remettre de son départ.
