« Ok… acquiesça-t-elle sans engouement. T'as pas envie de me raconter, je comprends. Mais ça te ferait du bien… Je te connais et, je sais que quand tu gardes les choses pour toi, ça donne rien de bon…

- Gondar t'a dit l'essentiel. Je suis tombé sur des braconniers.

- Et vu ton état, ils n'ont pas été tendre avec toi…

- Ils ont joué à la roulette russe.

- Avec ta tête ?

Il hocha positivement la tête, retenant ses larmes.

Oh… Mon amour… chuchota-t-elle en se blottissant dans son cou. Je suis désolée…

- Ça va… Ils l'ont pas eu finalement… ironisa-t-il faussement. »

Mais Candice n'avait clairement pas envie de rire. Pas quand elle apprenait que son chéri avait failli crever d'une balle dans la tête. Il avait dû vivre un enfer, et ça, c'était difficile à accepter parce que c'était en partie sa faute. Et oui, sa curiosité mal placée l'avait fait courir un énorme danger. Et chaque fois c'était pareil. La blonde s'en rendait compte sur le moment, prenait conscience de ses agissements mais l'oubliait très vite… Puis elle recommençait, bêtement. Chaque fois le schéma se répétait : engueulades, résignation, danger, désolation. En même temps, qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire à part être désolée ? Elle ne pouvait plus rien changer à l'histoire, ni même la réécrire. Alors à part essayer de réparer… Elle n'y pouvait finalement pas grand-chose… !

« C'est toi qui pleures alors que c'est moi qui ai failli y passer… souligna-t-il presque amusé alors qu'elle se redressait doucement.

- Et tu l'as dit à Gondar ?! s'emporta-t-elle. T'as donné leur nom ? On peut pas les laisser continuer comme ça, faut qu'on…

- Eh ! la calma-t-il. T'inquiète pas, j'ai tout raconté. Mais ils feront ce qu'ils veulent… J'ai plus envie de m'en mêler. Je m'en suis sorti, c'est l'essentiel.

- Et comment t'as fait ?

- Les gars étaient complètement bourrés. Ils étaient 3. Au début ça allait. Ils ont essayé de m'intégrer à leur soirée en me proposant à boire, du rhum bien sûr. J'ai refusé et ça a dégénéré. Ils ont commencé à m'insulter, à me cracher dessus. Je me suis retrouvé attaché à un palmier et ils voulaient que je ferme ma gueule. J'ai obéi. J'étais tout seul, paumé dans une forêt, face à 3 mecs ingérables, je… J'ai pas osé riposter…

- T'as bien fait ! acquiesça Candice avec émotion. Enfin, on sait pas ce qu'ils t'auraient fait si t'avais tenté quelque chose quoi…

- Nan… Et honnêtement je faisais pas le fier… Je… J'ai vraiment cru que j'allais pas m'en sortir. Ils ont descendu 2 bouteilles de rhum super vite. Moi je pensais qu'après ils allaient dormir et que je serai pénard, que… que la pression allait retomber.

- Mais c'est pas ce qu'il s'est passé… compléta-t-elle abasourdie.

- Pas quand Jojo a lancé le jeu de la roulette russe nan… confirma-t-il la gorge nouée. »

Antoine ferma les yeux, sentant encore le froid du métal posé sur sa tempe. Chaque coup avait été un vrai supplice. Un supplice où sa vie reposait sur l'unique chance de ne pas tomber sur la munition fatale. Alors oui, Antoine était flic et avait rencontré pas mal de tarés dans sa carrière. Oui, plusieurs fois, sa vie avait été mise en danger. Mais chaque fois il avait eu un pouvoir de contrôle qui lui avait manqué la nuit passée. La veille, il n'était plus qu'une infirme chose soumise à la dure loi du destin. Il n'était plus ce flic solide qui pouvait décider. Simplement l'esclave de la fatalité. Et visiblement cette dernière n'avait pas voulu sa mort.

« Ils ont tiré 4 fois. Et au bout de la quatrième, y a un mec qu'est sorti de nulle part. Il a dit avoir entendu des bruits étranges de l'autre côté du campement. Ils ont pas réfléchi et se sont levés pour aller voir. J'ai compris qu'en fait, il avait inventé cette histoire pour qu'ils arrêtent leur jeu débile…

- Il t'a sauvé la vie…

- Ouais. C'était un jeune, le gosse du fameux Jojo je crois. Il les a entraîné plus loin et quand ils sont revenus, c'était comme si le jeu n'avait jamais existé. J'ai passé la nuit contre le palmier et le gamin s'est planté devant moi à l'aube. Il m'a détaché et m'a conduit à un chemin avec une bouteille d'eau. Mon ticket de sortie finalement… J'ai marché pendant des kilomètres jusqu'à enfin voir le bon bout. J'suis arrivé en ville, sale et complètement perdu. J'ai débarqué dans le premier commerce que je trouvais, à bout de force et je me suis effondré. Et… La suite tu la connais…

- Et à l'hôpital ? Ils ont dit quoi ?

- J'avais rien… J'étais juste déshydraté et affamé. J'ai eu de quoi me requinquer et Gondar a pris ma déposition. On a attendu l'autorisation du médecin et il m'a ramené ici.

- Quelle histoire… souffla Candice avec la chair de poule.

- Elle se finit bien, c'est tout ce qui compte.

- Je comprends mieux pourquoi t'étais si perturbé… C'est un miracle que tu sois encore là Antoine.

Il acquiesça doucement, ému.

Un vrai aventurier… sourit-elle finalement en l'embrassant tendrement.

- Aventurier contre mon gré ! rappela-t-il amusé.

- Hum… Au moins, t'es super prêt pour notre projet de trekking en Islande…

- Mouais… répliqua-t-il dubitatif. Pour l'instant, les vacances ce sera à Sète. Y a moins de risque…

Silence… Candice comprit bien vite qu'il faisait référence à son comportement abusif.

- Tu m'en veux ?

- Bah… C'est pas toi qu'avait la main sur la gâchette cette nuit…

- Non mais… C'est un peu comme si je l'avais eu, d'une autre façon… Mais tu sais, j'ai jamais voulu que ça finisse comme ça. Je…

- Je sais…

- Mais tu m'en veux…

- Honnêtement ?

- Oui ! confirma-t-elle en le fixant droit dans les yeux.

- Un peu... Tu vois, je sais que toi, la tranquillité, le repos, c'est pas ton truc… Mais moi, c'est pas comme ça que j'envisageais notre semaine de vacances. Alors oui, l'aventure c'est sympa, mais pas comme ça…

- Je sais… J'ai tout gâché… Je t'ai mis en danger aussi…

- Non. Tu nous as tous mis en danger, Candice. Toi y compris. Mais ça, t'as toujours du mal à t'en rendre compte.

- Et je finis toujours par regretter… acquiesça-t-elle les larmes aux yeux.

- Bah oui ! C'est fatiguant de t'aimer…

- Je te demande pardon… chuchota-t-elle sérieusement.

- Hum…

- Câlin ? »

Et à sa grande surprise, Antoine accepta et réceptionna une blonde rongée par la culpabilité. Qu'est-ce qu'elle aurait fait si l'homme de sa vie n'avait pas survécu à cet épisode cauchemardesque par sa faute ?! Mieux valait ne pas l'imaginer… L'essentiel c'était qu'Antoine soit de retour parmi eux, sain et sauf, et que toute cette histoire autour de la disparition de Joseph soit loin derrière eux. Alors oui, sans doute le commissaire allait garder les images de cette nuit d'enfer quelques temps dans sa mémoire mais… tout n'était plus qu'un mauvais souvenir. Et en parlant de souvenirs, il fallait désormais en récupérer des plus positifs. Et la session shopping proposée par les plus jeunes tombait donc à point nommé !