Dorea faisait les cent pas de long en large, dans la chambre, depuis plus de dix minutes.

Elle tentait, tant bien que mal, de se convaincre que Voldemort ne voulait rien de plus que de parler à Drago. Aussitôt, elle se mit à pouffer d'un air désabusé.

Drago était allé trop loin en torturant Greyback cette nuit, et Voldemort allait lui faire certainement payer son geste.

D'ailleurs, comment avait-il pu torturer l'un des loups-garous les plus dangereux du pays ? Il devait être dans un tel état de fureur. D'ailleurs, il l'était encore lors de la réunion.

La respiration saccadée, elle se frotta le front nerveusement, les minutes s'envolant à toute vitesse. Et toujours pas de Drago. Peut-être… Peut-être qu'elle devrait aller jeter un coup d'œil ?

À l'instant où elle se décida, la porte s'ouvrit finalement.

Après un bref examen, Dorea, avec soulagement, constata que le blond n'avait subi aucune torture corporelle. Il était fidèle à lui-même : froid et distant.

Il referma la porte dans un claquement sec qui fit sursauter la rousse. Le jeune Malefoy lui fit alors front, les mains plongées dans les poches. Il faisait toujours cela lorsqu'il était en colère. Sauf que là, devant elle, ne se trouvait plus le jeune homme persifleur, profitant des faiblesses des autres pour s'en moquer. Non… Devant elle, se trouvait un homme, indécemment beau, charismatique, et surtout une aura menaçante qui l'enveloppait tout autour.

-Sais-tu, commença-t-il en s'avançant lentement vers elle, ce que j'ai ressenti hier soir en te découvrant complétement nue, recroquevillée sur toi-même, alors que Greyback gisait au sol, non loin de toi ?

Dorea se recula de quelques pas, alors que Drago s'approchait progressivement. Il attendait une réponse. Elle secoua donc le chef, ne sachant que dire.

-J'ai imaginé le pire des scénarios, Dorea, murmura-t-il.

Il s'arrêta et Dorea aussi.

-Je suis désolé, chuchota-t-elle.

Drago l'observa durant un long moment. Une minute, deux ou bien cinq… Elle ne savait combien de temps s'écoula alors qu'il restait tout à fait immobile, un combat intérieur se débattant en lui. Finalement, il éclata :

-TU ES DÉSOLÉ ! vociféra-t-il en happant les quelques mètres qui les séparaient. TU ES DÉSOLÉ ! répéta-t-il. C'EST TOUT CE QUE TU TROUVES À ME DIRE ?! JE T'AVAIS DEMANDÉ DE TE CACHER DANS CETTE PUTAIN DE SALLE COMMUNE POTTER !

Dorea tiqua sur le nom qu'il utilisa. Lorsqu'il l'appelait ainsi, c'était mauvais signe.

-TU N'EN AS FAIT QU'À TA TÊTE ! UNE FOIS DE PLUS ! PUTAIN DOREA, MAIS QU'EST-CE QU'IL T'A PRIS DE FAIRE ÇA ?! dit-il en l'attrapant par les épaules pour la secouer.

Elle le repoussa de toute sa force et il fut contraint de se décaler. La serpentard s'éloigna de lui puis le contourna pour s'introduire dans le dressing, souhaitant se changer pour une tenue confortable.

-RÉPONDS-MOI ! exigea Drago en la talonnant.

-JE NE TE DOIS RIEN MALEFOY ! hurla-t-elle à son tour en se retournant vers lui.

-SI ! TU ME DOIS UNE EXPLICATION !

-TU EN VEUX UNE D'EXPLICATION ? articula-t-elle en s'approchant de lui à son tour. BIEN, JE VAIS TE LA DONNER ! TU ALLAIS ÉCHOUER CETTE MISSION ! TU ALLAIS MOURIR ! C'EST LA SEULE OPTION QUE J'AI TROUVÉE POUR TE SORTIR DE CETTE MERDE ! LA VOILÀ L'EXPLICATION !

-J'allais échouer cette mission ?! reprit le blond en fronçant des sourcils. TU ME PRENDS POUR UN FAIBLE, C'EST ÇA ?

-Bien évidemment que non, mais…

-POURTANT, C'EST-CE QUE TU AS FAIT ! tempêta-t-il de nouveau. TU M'AS FAIT PASSÉ POUR UN FAIBLE AVEC TES CONNERIES.

-MOI, JE T'AI FAIT PASSÉ POUR UN FAIBLE ?!

-EXACTEMENT !

Son visage était si déformé par la colère que Dorea le reconnaissait à peine.

-MAIS ÇA, CE N'EST PAS LE PROPRE DU PROBLÈME ! LE PROBLÈME, C'EST QUE TU AS SUBITEMENT DÉCIDÉ DE REJOINDRE LES RANGS DE CE PSYCHOPATHE DE MEDEUX ! beugla-t-il la voix déraillant sur le dernier mot.

Il hurlait tellement fort que Dorea eut peur qu'on les entendît à l'autre bout du Manoir. Elle resta plantée au centre de la pièce tandis que Drago lui tourna le dos, passant une main dans ses cheveux pour les recoiffer en arrière.

-Je n'ai pas cru un seul instant à ce retournement de situation, déclara ce dernier, la voix enrouée.

Son ton était redevenu à un niveau sonore des plus normal. Cependant, il resta invariablement dos à elle, incapable de lui faire face. La jeune femme préféra attendre, sachant pertinemment qu'ils en avaient loin d'avoir fini.

Dorea observa fixement la carrure du serpentard, ne sachant ce qu'il convenait de faire.

Sauf que… leur relation, dès le départ avait été basée sur un mensonge. Était-ce réellement ce qu'elle voulait une fois de plus ?

Drago lui lança un regard indéchiffrable par-dessus son épaule puis refit face à elle. Sa volonté était sur le point d'éclater en mille morceaux.

Cette fois, c'est elle qui lui tourna le dos. Une seconde de plus et elle lui révélait tout.

Refoulant la culpabilité qui la rongeait depuis des semaines maintenant, elle préféra se déshabiller, ayant dépassé sa pudeur depuis longtemps à son égard.

Elle enleva sa veste, puis défit sa chemise, balança ses talons et ôta son pantalon, qu'elle jeta négligemment au sol. Elle sentit alors l'atmosphère s'alourdir comme le regard du blond se dilatant à vue d'œil. Mais il ne bougea pas.

Dorea, ignorant délibérément le serpentard - qui inspirait fortement - se dirigea vers une étagère où ses hauts avaient été soigneusement pliés. Elle prit sans réfléchir le t-shirt de Quidditch qui avait appartenu à son frère, floqué du nom de ce dernier au dos.

Elle le déplia et un ricanement moqueur s'éleva. Elle haussa donc ses prunelles vers Drago.

-Tu viens tout juste de te trahir.

Il fit alors demi-tour et sortit de la pièce. Dorea enfila le t-shirt précipitamment et le poursuivit, alors qu'il se dirigeait vers la porte d'entrée.

-Tu vas me balancer ? C'est ça ? cracha-t-elle avec véhémence.

Il balança la porte qui se referma violemment et s'approcha d'elle jusqu'à ce qu'ils ne soient plus qu'à quelques centimètres.

-Si tu penses ça de moi, alors je donne peu de chance à notre couple, siffla-t-il entre ses dents.

-Oh ! On est un couple, maintenant ?! railla-t-elle d'une voix haut perchée. Mais vas-y ! Puisque nous sommes un couple à tes yeux, alors nous n'avons plus de secrets l'un pour l'autre.

-Ça, ça ne dépend que de toi !

-Ne retourne pas l'hyppogriffe Drago ! Tu as également tes tors dans toute cette affaire.

-Ah oui ? Et lesquels ?

-Tu sais très bien lesquels !

Drago la considéra un instant, puis contint un petit rire narquois.

-Je sais parfaitement ce que tu me reproche Dorea. Mais en toute franchise, tu as amplement ta part de responsabilité.

-Je ne vois pas en quoi je suis responsable dans l'intrusion des mangemorts à Poudlard.

Drago émit un sourire en coin accroché à ses lèvres. Il se recula légèrement puis poursuivit :

-Parce que tu crois qu'ils sont rentrés dans l'école par le saint esprit ? Non, Dorea. Ça faisait des mois que je tentais de réparer l'armoire à disparaître.

-L'armoire… à disparaître ? répéta Dorea sans comprendre. C'est ce que tu faisais dans la salle sur demande ? Réparer l'armoire à disparaitre ?

-Sa jumelle se trouve chez Barjow et Beurk, précisa Drago.

La jeune femme, jaugeant le blond, ingéra les informations qu'il venait de lui donner.

0o0

Dorea revêtait son jean, après s'être habillé de son t-shirt, puis s'accroupit pour lacer ses baskets.

-Bon, tu t'occupes de ton frère et je m'occupe des trois autres, résuma Drago d'un ton nerveux.

Il répétait ceci depuis qu'ils avaient décidé qu'il était temps d'affronter la réalité. Cette salle-sur-demande avait été une parenthèse durant les deux derniers jours et c'était avec déception qu'ils étaient contraints de la quitter. Néanmoins, Dorea ressentait une légèreté à laquelle il lui était pénible de s'habituer depuis qu'elle était entrée dans cette salle. Drago et elle avaient décidé d'officialiser leur relation – du moins auprès de leurs amis et de son frère – et bien que tous ses problèmes ne soient pas réglés, avoir Drago à ses côtés pour affronter la suite lui redonnait la force de croire à nouveau en eux.

-Ne t'inquiète pas, ça va bien se passer, rassura Dorea. L'école entière n'est pas obligée de savoir quoi que ce soit à propos de nous. Notre entourage suffira amplement.

Elle se redressa, pendant que Drago finissait de boutonner sa chemise.

-La dispute entre Astoria et moi a déjà certainement dû faire le tour, dit Drago avec dépit.

-Laisse-les parler, ils sont stupides ! rétorqua la rousse en fixant l'armoire.

-Tu as raison, souffla le blond.

-Exactement, j'ai toujours raison, dit la jeune Artwood en s'avançant vers l'armoire avec détermination.

Elle saisit alors la poignée et la sortit d'un coup sec.

-Qu'est-ce que tu fais ?! s'exclama Drago scandalisé.

-Je remets la poignée, dit Dorea avec une simplicité qui décontenança le blond. Je viens de comprendre que cette armoire a été montée à l'envers, dont les poignées. Je n'arrivais même pas à les tourner l'année dernière avec mes pouvoirs quand j'ai voulu – elle suspendit la poignée dans l'autre sens dans l'encoche – sortir Henry de là-dedans.

Dorea ne remarqua pas l'état de choc de Drago alors qu'elle ouvrait une seconde fois la porte.

0o0

Le cœur de Dorea rata un battement en saisissant ce que son initiative avait engendrée comme conséquence.

-Je constate que tu viens de comprendre ta bévue. D'ailleurs, merci chérie, sans cela, j'aurais tout simplement échoué la mission, dit Drago sur un ton tout à fait ironique.

-Espèce de…

Dorea serra les poings de rage. Ce qu'il avait le don de l'énerver quand il faisait ça…Lorsqu'il avait réponse à tout. Dans une attitude tout à fait puérile, elle enleva le bijou de son annulaire et le jeta sur le visage de Malefoy. Il eut un mouvement de recul et lorsque la bague retomba au sol, il l'observa, écarquillant les yeux de surprise.

Tous deux se jaugèrent, la respiration haletante. Plusieurs minutes passèrent sans que ni l'un, ni l'autre n'amorce le moindre mouvement.

Puis se laissant submergée par ses émotions, par le soudain désir qu'elle éprouvait, elle se jeta sur lui, le tirant par le col de sa veste et plaqua sa bouche, l'embrassant avec force. Drago y répondit sans attendre, engageant un baisé féroce. Les mots n'ayant plus d'effet, leur combat se poursuivait alors à travers ce baiser, chacun espérant prendre le dessus sur l'autre.

Dorea mordit alors sa lèvre inférieure jusqu'au sang et Drago émit un feulement de douleur. Sans hésiter et avec une sensualité que le blond ne lui connaissait pas, elle lécha le sang du bout de sa langue. Puis profitant de l'état hagard du garçon, elle le repoussa contre le fauteuil derrière lui. Il se laissa tomber contre et elle se glissa contre lui pour le chevaucher.

Puis soudainement, des coups furent frappés contre la porte, ce qui les ramena aussitôt à terre, telle une chute vertigineuse et brutal.

-Drago, c'est moi, disait la voix de Narcissa à travers la porte. Je souhaite te parler avec ton père. Nous serons dans son bureau. Rejoins-nous dans cinq minutes.

Puis des pas s'éloignèrent dans le couloir et les deux jeunes gens se dévisagèrent les yeux écarquillés. Dorea prit conscience de ce qu'ils allaient commettre comme erreur.

Ils étaient sous le propre toit des parents de Drago, par Merlin ! Des parents qui logeaient dans leur appartement, tout juste à côté.

Se reculant du jeune homme pour se redresser, elle laissa Drago se lever du fauteuil puis se diriger vers la porte et sortir de la chambre sans lui adresser le moindre regard au passage.

0o0

Dorea, étant restée cloîtrée dans la chambre du blond, ne le revit pas de la journée. Elle n'était pas même descendue déjeuner, ne souhaitant pas affronter ce dernier après les événements de la matinée et leur dispute.

Heureusement pour la rousse, elle réussit à penser à autre chose en se plongeant donc dans ses notes, faisant bouillir son cerveau d'une réflexion accrue, tout en fixant le dessin du médaillon de Salazar Serpentard.

Ce médaillon lui disait vaguement quelque chose. Elle était certaine de l'avoir déjà aperçue. Mais où ? C'était bien cela qu'il restait à savoir. Elle tourna la page et un autre dessin apparu : celui de la coupe d'Helga Poufsouffle. Elle se souvint de l'expression avide qu'avait affichée Voldemort dans le souvenir qu'elle avait observé avec Dumbledore. Elle était certaine que c'était un horcruxe…

Elle se redressa du lit soudainement et revint sur la page du médaillon. Bien évidemment ! Le médaillon, elle l'avait aperçu dans le souvenir de Bob Ogden lorsqu'il avait rendu visite aux Gaunt. Gaunt lui-même qui avait traîné sa fille par le médaillon… La mère de Lord Voldemort. Mais… Non, à ce moment-là, l'impression de déjà vu l'avait titillée…

Dorea retomba mollement sur les coussins, soupirant d'exaspération et tourna la tête vers la descente de lit, un reflet émeraude attrapant son regard. La bague que lui avait offerte le jeune homme et qu'elle lui avait lancé le matin même était toujours au sol. Dorea se leva du lit, puis se dirigea et s'accroupit pour attraper le bijou.

Mais la serpentard s'immobilisa, un choc électrique passant à travers son corps. Mais bien sûr…

Brusquement, la jeune femme se releva, le cœur battant, et se précipita vers le bureau du blond pour attraper une plume qu'elle trempa dans l'encrier déjà ouvert, puis nota sur son carnet qu'elle tenait toujours entre ses mains, près du dessin du médaillon de Serpentard, dans une écriture griffonne :

« Au Manoir des Black ».

Elle posa la plume, souriant fièrement. Elle savait enfin où il était nécessaire de chercher. À présent, il fallait trouver un moyen pour qu'elle mette la main dessus ou bien qu'Harry lui-même retrouve le médaillon. Et le seul qui pouvait l'aider se prénommait : Kreattur.

Mais avant tout, il fallait récupérer cette fichue épée. Toutefois, elle ne pouvait pas agir tout de suite sans soulever quelques soupçons de la part des mangemorts ou bien même de Drago.

Affligée à la pensée du blond, elle rangea son carnet dans le double fond de sa malle et constatant que c'était bientôt l'heure du dîner, sachant que cette fois-ci, elle n'était en mesure d'y échapper à nouveau, elle entreprit de se changer dans une tenue assez élégante pour faire illusion et encore moins satisfaire l'ego surdimensionné du jeune Malefoy.

Elle ferma la porte pour plus d'intimité et commença à chercher dans ses tenues suspendues aux côtés des costumes du blond, ce qui pourrait convenir.

Cela lui faisait étrange de voir ses habits soigneusement rangés entre les chemises et pantalons du jeune homme. C'était comme si…

Elle secoua le chef, ne souhaitant pas approfondir sa réflexion. De toute manière, ce n'était que temporaire. Elle allait rejoindre ses appartements sous peu.

À cet instant, la porte d'entrée s'ouvrit et des voix s'élevèrent dans la pièce d'à côté. Dorea, poussée par cette curiosité qui la caractérisait aussi bien que son frère, s'avança vers la porte du dressing et colla son oreille.

-… est furieux, disait la voix de Narcissa.

-Je me fiche de ce que père peut penser, rétorqua sèchement Drago.

La mère soupira de lassitude, puis elle reprit :

-Je vois donc que ça ne sert à rien d'aller plus loin dans cette discussion. Tu es autant borné que lui.

-Je ne lui pardonnerai jamais ce qu'il a fait. Ou d'ailleurs ce qu'il n'a pas fait. Il n'a même pas su nous protéger. Et regardez où nous en sommes aujourd'hui. Donc oui, il est inutile d'approfondir cette conversation. Il a perdu mon respect et plus encore, ma confiance.

Dorea entendit quelques pas, puis :

-Et… est-ce que tu vas te décider à me dire ce que le Seigneur des Ténèbres te voulais ce matin ?

Le silence s'abattu durant un instant. Drago l'interrompit enfin :

-Il m'a ordonné de faire preuve de retenue la prochaine fois, dit Drago d'un ton agacé. Sous peine de représailles. Il a besoin de Greyback.

-Il ne t'a pas…

-Non, pas cette fois.

Narcissa expira un soulagement qu'elle ne put retenir. Une minute passa et la voix de l'épouse Malefoy s'éleva à nouveau :

-Tu sais où elle est ?

-Je n'en sais rien moi, grogna Drago qui avait l'air d'être à bout de patience. Elle doit certainement errer à la bibliothèque ou bien dans le parc.

-Bien, alors quand tu la verras, tu lui diras que sa chambre a été de nouveau aménagée avec toutes les sécurités nécessaires. Elle pourra de nouveau l'intégrer dès ce soir. Ses affaires seront transférées durant le dîner.

-Bien, je m'en réjouis d'avance, ironisa le blond.

-Je ne suis pas née de la dernière pluie, Drago, répliqua Narcissa sèchement. Il est hors de question qu'elle passe une nuit de plus ici.

Des pas résonnèrent de nouveau sur le parquet puis la porte s'ouvrit :

-Je vous attends, tous les deux, pour le dîner dans vingt minutes.

Puis un claquement brusque indiqua que la mère était sortie.

Dorea retourna donc à ses préparatifs, songeant à ce qu'elle venait d'entendre. Ce fut quand elle s'habilla de sa robe, cinq minutes plus tard, que la porte du dressing s'ouvrit sur le blond.

-Tu étais là ? questionna-t-il surpris.

-Si ta question est : est-ce que j'ai tout entendu, alors oui, j'ai tout entendu, dit Dorea en retroussant ses bas pour commencer à les glisser sur ses jambes.

Drago, se maintenant contre le chambranle de la porte, l'observa revêtir ses bas, d'un œil contemplatif. Il resta silencieux, tandis qu'elle enfila la jambe gauche. Ce fut seulement lorsqu'elle attrapa ses escarpins et qu'elle les chaussa, qu'il ouvrit enfin la bouche.

-Tu es très belle, fit-il dans un murmure.

Dorea tourna la tête vers le blond et se figea devant le compliment qu'il venait de lui déclarer. Rarement, il lui avait fait ce genre d'éloge. Il était plutôt du genre à être dans l'action que déblatérait des paroles qui pour lui ne voulaient pas dire grand-chose.

-C'est gentil, remercia Dorea en lissant le tissu de sa robe sur ses hanches.

Le jeune homme se redressa puis s'approcha de quelques pas mesurés vers elle.

-Tu es extrêmement désirable, Dorea, dit-il en encrant son regard dans le sien. Chaque fois que je me retrouve dans la même pièce que toi, j'ai envie de – il tendit le bras, et effleura son épaule nue de ses longs doigts – de te toucher. De t'embrasser.

-Moi aussi, répondit-elle d'une demi-voix.

-Mais c'est impossible, ajouta-t-il plus froidement.

Dorea baissa les yeux, les joues rougissantes.

-Nous sommes dans la maison de tes parents, dit-elle alors. Bien évidemment que c'est impossible. Ce serait un manque total de respect.

-Parce que tu crois que c'est impossible à cause de ça ? dit Drago en haussant un sourcil condescendant.

Dorea releva le chef, quelque peu surprise.

-Pourquoi ? Ça ne t'a pas mis mal à l'aise, toi ?

-Je n'en ai rien à carrer que nous sommes sous le toit de mes parents. Je suis majeur, tu es sur le point de l'être, si j'ai envie de te faire l'amour, ce ne sont certainement pas deux vieux cons qui vont m'en empêcher.

La rousse fronça les sourcils et Drago poursuivit.

-C'est impossible parce que notre relation même est basée sur une couche épaisse de mensonges et de non-dits. Et j'en ai marre.

-Qu'est-ce que… qu'est-ce que tu veux ? bredouilla la jeune femme.

-Je veux la vérité Dorea, rétorqua Drago. Je veux que tu me dises pourquoi tu es ici.

-Non…

-Alors je ferme les vannes, jusqu'à ce que tu te mettes à parler. Je ne peux envisager une relation avec toi, sans que tu aies un minimum d'honnêteté à mon égard.

-Ferme les vannes si ça te fait plaisir. Mais je trouve que c'est le cracmol qui se fiche du moldu quand tu me parles d'honnêteté.

-Et puis-je savoir pourquoi tu dis cela ?

-Tu veux vraiment que je te fasse une liste ? N'oublie pas, que même si je n'ai pas eu la chance de te connaître avant, on m'a décrit un parfait portrait du petit con arrogant que tu étais avant que je ne débarque à Poudlard.

-Si tu tiens à glisser sur ce terrain-là, je peux te faire également un portrait de ton frère. Et crois-moi, il n'est pas vraiment à son avantage sous cet angle.

-Qui te dit que je parlais d'Harry. Je te signale que Théo, Blaise ou encore Daphné, se sont chargés de me mettre en garde avant que je ne tente quoi que ce soit avec toi.

-Et tu regrettes ? C'est ça que tu es en train de me dire ?!

Le ton commençait à s'éléver de nouveau entre eux. Dorea ferma les yeux et lâcha un soupir exaspérée. Ils ne pouvaient pas communiquer sans qu'ils ne se disputent à un moment ou un autre. Ça commençait franchement à l'agacer.

-Non, pas le moins du monde, reprit-elle plus calmement. S'il fallait recommencer, je recommencerais tout sans hésiter.

-Alors dis-moi ce qu'il t'a pris d'agir comme tu l'as fait sur cette Tour d'Astronomie ? demanda plus posément Drago. Je ne peux pas croire que tu aies retourné ta veste simplement pour sauver ma peau.

-Je ne te dirai rien. Moins tu en sais, mieux ce sera.

-Par conséquent je suppose que l'on n'a plus rien à se dire.

-Je crois en effet.

-Bien.

-Bien.

Dorea le contourna, puis se dirigea vers la sortie, ouvrit la porte et la referma brutalement.

0o0

Dorea se tourna une énième fois dans son lit, la chaleur nocturne la retenant de fermer l'œil. Ou bien était-ce le dîner de la veille au soir, qui en soit avait été une véritable épreuve à vivre, qui l'empêchait de dormir ?

Les Malefoy, ainsi que Bellatrix Lestrange, les Carrow, Rogue et bien pire encore, Lord Voldemort avaient été présents.

Dorea revit Queudver balancer des bouts de chair à Nagini au pied de son maître et cette image lui donna aussitôt la nausée.

La jeune femme, tout comme le reste des convives, à l'excepter de Voldemort et Bellatrix, n'avait pas touché à leur assiette.

Ça avait été silencieux de bout en bout… Et dire qu'elle allait être contraint de revivre ça le lendemain et le surlendemain…

0o0

Lorsque Dorea descendit dans la salle à manger le lendemain matin, la boule au ventre, elle trouva uniquement les trois Malefoy assis autour de la table, Lucius ayant repris sa place en bout. L'atmosphère était radicalement différente de la veille. Elle ne dirait pas détendue, mais plutôt calme voir même délesté.

-Bonjour, salua timidement la rousse en s'avançant d'un pas hésitant vers la famille.

Lucius Malefoy ne se donna pas la peine de lever les yeux vers elle. Dorea nota qu'il s'était rasé et légèrement coupé les cheveux, recouvrant sa prestance et son flegme naturel, malgré son teint cireux et maladif.

Quant à Drago et sa mère, ils esquissèrent un léger signe de tête dans sa direction.

La jeune femme, s'avança, et prit place à côté du jeune blond.

-Euh… Il n'y a que… que nous ? balbutia-t-elle.

-Le maître et Bella sont partis tôt ce matin, répondit Narcissa en remuant son thé, d'un geste souple et élégant. Ils ne reviendront que dans deux semaines.

-Oh… Et les…

-Les Carrow ne descendent que pour le dîner, coupa-t-elle.

-D'accord, murmura Dorea.

Elle se mordilla nerveusement les lèvres, intimidée de se retrouver seule, face à ces gens qui la détestait tant. Au fond d'elle, elle se fichait de ce que pouvait bien penser Lucius Malefoy. Toutefois, Narcissa Malefoy était une autre paire de manche. Muée par elle ne savait quel désir, elle voulait faire bonne impression.

-Avez-vous faim ? s'enquit la femme face à elle.

Dorea, sachant qu'elle avait deux semaines de répit, elle éprouva une sensation de dénouement au creux de son estomac, prenant conscience que la faim la tiraillait depuis bien plus longtemps qu'elle ne le pensait.

-Oui, fit-elle avec un demi-sourire.

Narcissa lui désigna les mets présentés entre eux. Sans hésiter une seconde, elle prit deux croissants, du porridge, un bol de chocolat chaud, et quatre tartines de chaque confiture qui s'y trouvait.

Drago échangea un rapide coup d'œil avec sa mère, mais celui-ci lui signifia silencieusement de ne pas faire attention à l'appétit soudainement démesuré de la jeune femme.

Mais ce qui fut le plus étonnant, c'est de voir que cette même jeune femme mangeait avec toute la grâce d'une Lady, trois repas en un.

À la fin du repas, elle se tamponna le bout des lèvres de sa serviette, se leva, les remercia d'un sourire poli avant de sortir de la salle-à-manger.

-Drago, fit alors la mère quand la rousse fut hors d'écoute, elle ne mange pas autant habituellement ? Si ?

-D'aussi loin que je me souvienne, mère, Dorea a toujours eu un très bon appétit. C'est quand elle ne mange pas qu'il faut s'inquiéter.

La mère et le père échangèrent un regard éberlué, puis Lucius retourna à sa lecture de la Gazette du jour.

-Par Salazar et tous les autres, murmura-t-il dans un soupir las.

0o0

Dorea avait profité de l'accalmie qui régnait dans le Manoir, pour approfondir ses recherches dans la bibliothèque. Lucius fit ainsi son apparition en cette fin d'après-midi. Discrètement, Dorea dissimula le carnet sous un de ses grimoires, le cœur quelque peu battant.

-Que faites-vous ici ? demanda-t-il suspicieusement.

-Je me renseigne sur les maléfices qui peuvent m'être utiles, Monsieur Malefoy.

-Magie Noire ?

La jeune femme opina du chef alors qu'il s'avançait lentement vers la table de travail. Il consulta la couverture d'un livre et grigna soudainement le front.

-« Dogme et Rituel de l'Ancienne Magie », lut-il mesurément. Vous ne trouverez rien qui vous sera utile là-dedans. Le ministère a saisi tous les livres qui auraient pu vous être profitables.

-Donc… j'aurais beau chercher dans cette bibliothèque…

-Vous ne trouverez que des ouvrages sur des rituels anciens qui ne sont plus d'actualité, ou bien d'autres sur l'Histoire Ténébreuse de notre magie à travers les événements majeurs qui ont parcouru les siècles du Moyen Âge, dit le père Malefoy avec condescendance.

-Bien, alors… je présume qu'il est inutile de chercher ici.

-Veuillez sortir de cette pièce, je vous prie, fit l'homme platement.

Il lui tourna le dos et Dorea en profita pour caler son carnet entre le revers de son pantalon et sa veste de tailleur. Elle se leva et d'un geste souple du poignet, les livres se refermèrent d'eux-mêmes et s'envolèrent vers leurs rangées initiales pour se glisser à leur place.

D'un pas prompt, elle se dirigea vers la porte, mais Lucius Malefoy l'interrompit de nouveau.

-J'ai eu vent de vos prouesses, Miss Artwood.

Elle se tourna vers lui.

-C'est Dorea, Monsieur Male…

-Je me fiche du nom que l'on vous donne ! siffla-t-il soudainement en colère. Vous avez souillé le nom de ma famille en faisant passer mon fils pour un faible.

-De nous deux, je crois que vous avez beaucoup plus à vous reprocher, Monsieur, rétorqua placidement la jeune femme en insistant sur le dernier mot.

-Ne vous approchez plus de lui, entendez-vous ? menaça-t-il en pointant un doigt vers elle.

Dorea lâcha la poignée et s'approcha de Lucius, maintenant son regard avec défi.

-De quoi avez-vous peur, Monsieur Malefoy ?

Ce dernier resta silencieux, mais empoigna sa canne avec force. La rousse sourit, l'air blasée.

-Rassurez-vous Monsieur Malefoy, je suis quasiment certaine que je ne deviendrai jamais votre brue.

-Pourtant, vous portez la bague…

Dorea leva sa main gauche devant son nez, dont son annulaire, dénudé de tout bijou, rendit perplexe le père.

-Je ne pourrais me résoudre à épouser un homme dont la famille me hait tellement qu'elle espère en secret ma mort.

-Vous avez changé de camp pour lui… Où n'est-ce que de l'esbroufe ?

-Je vous l'affirme, c'est principalement pour lui. Mais sachez que j'ai été utilisé par Dumbledore et par mon frère ou par l'Ordre même. Et pourquoi ? Pour m'entendre rétorquer que je ne suis qu'une petite chose fragile qui fait sans cesse les mauvais choix ? Je ne veux plus de cela. Je veux ma liberté. Je compte me battre pour elle ainsi que pour celle de Drago. Je veux, de toutes mes forces, gagner cette guerre. Et si par chance, je ne me retrouve pas morte ou bien à Azkaban, je déguerpirai aussi vite que possible de pays. Et votre fils m'oubliera la seconde d'après.

-Il est épris de vous. Il ne vous oubliera pas comme cela. Je connais l'entêtement de Drago.

Dorea eut un léger ricanement.

-Nous nous détestons Monsieur Malefoy. Je ne vois pas quelle autre solution serait possible. Car Drago, malgré ce qu'il peut en dire, tient à vous. Il aime plus que tout sa mère. Je ne pourrai, en aucune façon, me résoudre à ce qu'il vous renie pour moi. Je n'ai pas connu mes parents, ma mère est morte, j'avais à peine huit ans. Vous étiez à son enterrement. Et mon père… C'est l'homme qui m'a tout appris. C'était l'homme que j'estimais le plus au monde. Je sais ce que sait de perdre un parent. Et je ne veux certainement pas que Drago vive cela. Donc soyez certain que je ne me mettrai jamais en travers de cette famille.

La rousse fit volte-face et sortit de la pièce. Lucius Malefoy plissa les yeux, réfléchissant aux propos que venait de lui déclarer cette dernière.