Suiveur jusqu'au bout
Harry se réveilla, totalement groggy, mais ne mit pas longtemps à se rendre compte qu'il ne se trouvait pas là où il devrait être. En fait, c'étaient les bruits de tiroirs qu'on refermait brutalement qui l'avait mis sur la piste puisque l'un des seuls points où il avait tenu tête à Ron pour leur voyage était des chambres séparées, ses cauchemars ayant continués et le roux ronflant toujours comme un sonneur, sans compter toutes ses «visiteuses». Le brun se redressa doucement tout en observant autour de lui et reconnut sans peine sa chambre à Godric's Hollow ou du moins, telle qu'il se l'imaginait si ses parents avaient été encore en vie.
-Qui êtes-vous? demanda Harry. Et où sommes-nous?
-Tu ne demandes pas où se trouve ton crétin d'ami? railla la silhouette
Harry tiqua. Visiblement, la personne n'appréciait pas son meilleur ami.
En même temps, il devait bien être le seul à le supporter depuis la bataille finale …
En posant son regard sur son corps, Harry se rendit compte de ses blessures fraîches, même si la douleur ne les accompagnait pas.
-Je suis blessé?! sursauta Harry
-Tu es même quasiment mort, assura la silhouette en se tournant vers lui.
-Alors pourquoi je ne suis pas à King's Cross? s'étonna Harry
-Est-ce que cette gare a vraiment été un lieu de changement pour toi? railla la silhouette
Avec une vitesse qui le rendit nerveux, Harry s'avoua que non. S'il avait dû déterminer un lieu pour choisir s'il voulait continuer à vivre ou rejoindre ses parents, ça aurait été la maison de Godric's Hollow décorée pour Samain, comme elle aurait dû l'être le soir où Voldemort était arrivé chez eux, qu'il aurait choisi au plus profond de lui-même. Quand il avait eu le temps d'y penser, ça l'avait toujours un peu dérangé.
Le brun eut une illumination.
-Vous êtes la Mort? haleta Harry
-J'en suis l'incarnation, oui, souffla la silhouette en prenant place dans un fauteuil qui venait d'apparaître.
-Mais pourquoi ce n'est pas le professeur Dumbledore qui est venu? s'étonna Harry
-Ça, je peux te l'expliquer, ricana Mort. J'imagine que tu te souviens que ton cher mentor était obsédé par les reliques de la Mort, hum? Il s'avère qu'il en a déduit tout seul comme un grand que les reliques pouvaient défier la mort parce qu'elles étaient des horcruxes.
Le regard d'Harry s'écarquilla d'ahurissement.
-Pour vérifier sa théorie, il a donc ensorcelé l'un des élèves qu'il détestait le plus parce qu'il était bien plus puissant que lui à onze ans et l'a poussé à en créer, continua Mort. Il a même poussé le vice à le «convaincre» d'en laisser un au cœur de Poudlard pour vérifier que l'artefact devenait de plus en plus puissant. Quand lui-même avait été «convaincu» que c'était bien ça et que pour le plus grand Bien, il devait pouvoir délivrer sa bonne parole jusqu'à la fin des temps, il a déchiré son âme en se servant de la mort de James Potter pour mettre son horcruxe dans la baguette de sureau.
Le brun était maintenant horrifié.
-Le seul hic, c'était qu'il ne savait pas qu'en même temps qu'il t'embobinait pour faire croire que le monde sorcier aurait toujours besoin de sa brebis sacrificielle, son horcruxe était en position de faiblesse, ricana Mort. Alors quand le train est parti pour de nouvelles aventures avec l'horcruxe de Riddle et qu'il a voulu faire semblant de monter aussi, je l'ai bloqué dedans et il a aussi pris son aller simple. Sache que si tu avais décidé de rejoindre tes parents, c'est son âme qui aurait pris ta place dans ton corps et il aurait pu utiliser toutes les ressources du Sauveur pour enfin instaurer son plus grand Bien. Mais ne parlons plus de ce bon vieux Dumby, la Vie est en train de lui faire payer toutes ses mauvaises actions. Est-ce que tu te souviens pour quelle raison tu es ici?
Harry réfléchit quelques instants avant de rougir violemment.
Après la bataille finale, il avait cédé au désir de Ron de visiter toutes les places magiques où le Sauveur avait été invité et de profiter de tous les loisirs sur place. Hermione n'avait pas été invitée car elle avait préféré essayer de sauver la mémoire de ses parents et le roux, son fraîchement fiancé, avait montré tout son amour en refusant avec force de cris la proposition de l'accompagner. Quand les deux amis avaient quitté Londres pour toutes les capitales et grandes villes d'Europe, Ron n'avait laissé passer aucun excès, entraînant dans son sillage son meilleur ami qui acquiesçait à tout. Ce jour-là, le roux avait parié qu'Harry gagnerait une course de balais illégale en plein cœur d'une ville bavaroise quelconque et … il s'était loupé, se prenant un poids lourd moldu alors qu'il s'était imbibé de whisky pur feu soigneusement fourni par son meilleur ami.
Donc oui, il y avait de grandes chances qu'il en soit mort par sa stupidité.
-Visiblement, c'est le cas, constata Mort. Le fait d'avoir réuni les reliques n'a qu'une conséquence, te faire paraître devant moi à ta mort. Selon ce que je vois et selon mon humeur, je peux t'accorder des faveurs comme te torturer dans ta vie comme dans ta mort. Les derniers à avoir tenté l'aventure étaient avides de pouvoir et l'ont regretté amèrement. C'est la première fois que je vois un idiot dans ton genre.
-Je ne suis pas idiot! s'indigna Harry
-Effectivement, c'est peut-être un peu fort, concéda Mort. Alors disons un larbin? Parce que depuis la fin de la guerre, tu ne fais que suivre tous les ordres de l'imbécile que tu crois être ton meilleur ami.
-Ron n'est pas … protesta Harry.
-Tu es sûr? coupa Mort. Est-ce qu'il pense un seul instant à toi ou à ce que tu voudrais quand il t'entraîne dans ses folies? Est-ce que, de toi-même, tu aurais bu jusqu'à ne plus marcher droit parce que c'est «cool»? Est-ce que tu serais monté sur un balai en pleine ville si ce benêt n'avait pas parié sur toi?
Harry baissa la tête, embarrassé. Dans ses rares moments de lucidité, il se surprenait à rêver de calme et éventuellement de soigner correctement les douleurs qui parcouraient son corps régulièrement. La seule fois où il avait timidement demandé à Ron de faire ce qu'il voulait, le roux l'avait proprement ignoré. En revanche, quand il voulait refuser quelque chose, le roux entrait dans une colère noire et lui faisait du chantage affectif pour qu'il le suive dans ses délires.
-C'est mon meilleur ami, se justifia Harry.
-Et je pense qu'il y a assez de monde à t'avoir dit que ça ne voulait pas dire fermer les yeux sur ce qu'il fait, pointa Mort. Malgré ton comportement stupide, tu m'as l'air intéressant. Je peux faire en sorte que ta magie t'emmène autre part, puisque tu as la bonne idée de garder toutes tes affaires avec toi.
D'un geste distrait, le brun frotta la bourse sans fond qui datait de la quête des horcruxes dont il n'arrivait pas à se défaire.
-Si je le fais, déclara Mort, c'est pour que tu puisses prendre ta vie en main et que tu arrêtes de suivre la première personne qui t'a témoigné de la simple amabilité de base. Donc si ce rouquin de mes deux revient dans ton entourage, ce n'est pas pour faire sa loi dans ta vie.
-Et si je ne le fais pas? hésita Harry
-Je te laisserai mourir à la prochaine incartade et je te montrerai tout ce que tu as manqué en suivant comme un toutou un sorcier qui ne te respecte même pas, répondit Mort en haussant des épaules. Qu'est-ce que tu en dis?
Harry réfléchit quelques instants. Il était vrai que depuis que ses parents étaient morts, il n'avait fait que suivre les ordres de quelqu'un, d'abord les Dursley puis le professeur Dumbledore et Ron ces derniers temps. Personne n'avait pris la peine de lui demander ce qu'il voulait, la plupart de son entourage lui imposait leur volonté et lui n'avait qu'à s'exécuter. Il était jeté au-devant des combats mais quand il parvenait à les éviter, on s'en prenait à lui, encore plus quand il n'était ni responsable ni même présent. Alors pourquoi ne pas essayer de prendre ses propres décisions? Au moins, s'il se plantait, il ne pourrait accuser les autres.
-D'accord, accepta Harry.
-Bien, sourit Mort. Je vais t'envoyer là où je suis sûr que tu auras de l'aide …
Fin
