2 Octobre : Apaisement

Zhong Xing n'avait pas bougé depuis plus de deux heures.

Le Maître du Yin Yang craignait de réveiller sa petite charge.
L'enfant dormait dans ses bras du sommeil de l'épuisement. Zhong Xing l'avait trouvé couvert de boue et qui tentait de se cacher de villageois possédé par un démon de colère. Ils avaient déjà tué sa mère sous l'excuse qu'elle était un renard-démon et voulaient se débarrasser de son fils pour la même chose. Les renards du nord n'étaient pas dangereux. Au contraire, ils étaient certes joueurs mais en avoir un à la bonne était toujours la certitude de voir son village prospérer. Alors tuer une mère et son petit ? C'était inacceptable.

Zhong Xing avait exorcisé les villageois puis retrouvé le petit garçon. Roulé en boule dans ses deux queues, couvert de boue, le village noyé de larmes, il l'avait menacé lorsque Zhong Xing s'était approché. Comme si ses petites dents pouvaient représenter un quelconque danger pour le vieux maître.

Zhong Xing aurait presque pu sourire lorsque les petits crocs de la taille de petites aiguilles s'étaient enfoncées dans son poignet. Il l'avait laissé faire. Il était normal que le petit garçon puisse recevoir une vengeance envers les humains, même si elle se limitait à une gorgée ou deux du sang d'un maître. Zhong Xing en avait profité pour le lier à lui et l'adopter par le sang comme sien. Cela aiderait le petit à mieux contrôler sa forme humaine le temps que ses pouvoirs soient plus matures.

Il l'avait emporté avec lui jusqu'à une auberge. Il l'avait lavé, habillé, nourris tout en le rassurant à chaque fois.
Petit à petit, le petit animal terrifié s'était un calmé. Il avait cessé de le mordre et de hurler. Il avait arrêté d'essayer de le griffer et de siffler de colère. La voix douce de Zhong Xing était devenue un son apaisant pour l'enfant qui ne cherchait plus à l'éviter mais venait se cacher dans ses bras quand un mouvement brusque de quelqu'un ou qu'un bruit inattendu lui faisait peur. Le petit n'avait pas encore parlé. Zhong Xing ne connaissait pas encore son nom.

Pour l'instant, le petit était juste xiao ying.

Ils étaient arrivé au temple la veille. La présence du petit garçon avait été prise froidement par les autres maitres jusqu'à ce que Zhong Xing leur arrache la tête verbalement pour avoir méprisé le bambin en face.
Zhong Xing en avait un peu honte bien sur. Mais il avait été apathique depuis si longtemps, depuis son retour de la Capitale en fait, que son éclat avait été inattendu de tous, même de lui. Cet éclat avait fait sourire ses frères une fois la surprise passée. Ils avaient été bien plus concilient avec la présence du petit après sa colère. Ils étaient heureux que Zhong Xing se soit extrait de sa dépression.

Le vieux maître aurait pu protester si ca n'avait pas été tout à fait juste.

Quelqu'un avait besoin de lui. Quelqu'un qu'il pouvait aimer sans risque. Quelqu'un qui ne l'abandonnerait pas et à qui il pourrait transmettre tout ce qu'il avait, tout ce qu'il était.

Ce petit enfant encore sans nom était son fils.

Un fils qui pour l'instant dormait roulé en boule sur son ventre, la tête sur son torse et avait prit le bord de sa robe comme doudou et le mâchouillait dans son sommeil pour s'apaiser. Ses petits crocs allaient faire des trous dans la soie, mais Zhong Xing s'en fichait comme de ses premiers langes.
C'était la première fois que le petit venait de lui-même dans ses bras pour réclamer chaleur et protection.

"- Zhong Xing, je…"

"- Shhhh…"

Le maître qui venait de débarquer se tut immédiatement avant de sourire. Il reprit à voix basse.

"- Zongzhu veut vous voir. Je vais lui dire que vous viendrez dès que possible. Et venez avec votre petit élève."

Le vieux maître hocha la tête. Il effleura une oreille de l'enfant du bout du doigt. L'appendice blanc s'agita un instant pour chasser la mouche qui l'ennuyait.

"- Il a besoin de sa sieste."

"- Il n'est pas le seul." S'amusait l'autre maître.

Les yeux de Zhong Xing se fermaient tout seul.

"- Prenez votre temps."

Il referma la porte des appartements de Zhong Xing pour le laisser à sa sieste avec son élève. Ils avaient le temps.

Même si le reste de la secte n'appréciait pas l'enfant, il leur avait rendu leur frère. Avec le temps, ils apprendraient sans doute à l'accepter. Surtout s'il restait aussi adorable qu'il l'était pendant sa sieste. Il était juste tellement agité et bruyant en général… Enfin… Sans doute pouvaient-ils comprendre son traumatisme. Qu'étaient quelques mois d'ennuis en échange d'une âme et d'un cœur apaisés.