Hello !
Cet OS a été écrit dans le cadre de l'High Spic du serveur Potterfictions (rejoignez nous : /862aSNBDk6), un défi d'écriture célébrant les song fics !
Les moodboards tirés au sort qui ont inspirés l'histoire :
Couleur : Bleu
Core : Cottage Core
La chanson de l'histoire :
L'orage - PV Nova
Merci à mes Dahrma et Sybil pour leur travail sur mon texte et merci aux organisateurices de cet ASPIC pour leur travail au top !
Bonne lecture !
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L'orage
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Sauter à pieds joints dans la boue
User nos souliers dans la gadoue
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Une tasse de thé fumante à la main, Teddy sortit sur la terrasse de la maison pour profiter des derniers rayons du soleil. Il s'adossa à la balustrade et laissa son regard se perdre à la lisière de la forêt. Il observait ici, un écureuil et là, le renflement d'un hérisson. Le Métamorphomage pouvait passer des heures sur le palier du chalet, à profiter des sensations offertes par la nature. De sa position, il pouvait presque apercevoir la chevelure blonde de Victoire, assise sur la balancelle en contrebas.
Teddy esquissa un sourire et abandonna sa tasse désormais vide pour se diriger vers la balançoire, où il s'assit avec précaution. Sa femme – depuis deux ans maintenant – arborait comme à son habitude une robe bleue de la même teinte que ses yeux. Autour d'elle, le tissu du jupon se confondait avec celui de la balancelle, océan de lapis dont Victoire était la reine.
Son regard était fixé sur un moineau qui s'ébrouait dans une flaque, dernier vestige de l'orage de l'avant-veille. Teddy prit la parole et brisa le silence qui les entourait.
— Passionnée comme tu as l'air de l'être, tu ne veux pas le rejoindre ?
— Très drôle, répondit Victoire en levant les yeux au ciel. Je vais plutôt le laisser s'amuser, regarde comme il est mignon. Et puis je préfère un bain d'eau chaude à un bain de boue.
— J'ai pourtant des souvenirs qui me font dire l'exact inverse, répliqua Teddy avec une moue rieuse.
Victoire resta pensive l'espace de quelques secondes puis, lorsqu'elle comprit à quoi il faisait référence, tourna subitement la tête vers lui.
— Quoi ? Mais j'y crois pas, arrête avec cette histoire ! J'avais quatre ans, j'en ai vingt-trois, il y a prescription maintenant !
— Jamais ! Je te le rappellerai jusqu'à la fin des temps, mon ange, dans le seul but de t'embêter. Qu'est-ce qu'on s'était amusé ce jour-là…
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La pluie tombe Vicky est fatiguée
Le ciel gronde on va se faire disputer
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Sa femme prit une fausse mine boudeuse, qui disparut lorsque Teddy posa son bras sur le dossier de la balancelle. Il pouvait presque effleurer sa peau du bout de ses doigts et y tracer des arabesques, comme il en avait l'habitude.
— Je me souviens de l'expression de ta mère, quand on avait débarqué dans la cuisine. Trempés comme des souches, en dégoulinant de la tête aux pieds, de la boue à n'en plus finir. On pouvait nous suivre à la trace dans toute la maison…
— Et comme on avait réussi à monter dans les chambres pour mettre notre crapaud dans un bocal avant que les adultes nous voient, on avait vraiment tout sali. Je pense que Mamie Molly nous en veut encore un peu pour ça, le coupa Victoire un rire aux lèvres.
— Le crapaud ? Ah mais oui, c'est vrai, j'avais plongé dans l'étang pour aller le chercher. Comment on l'avait appelé déjà ?
— Hector, je crois. Il n'avait pas fait long feu le pauvre, ma mère s'en était débarrassé quelques jours après…
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Jouer à chercher les trésors
Chasser les dragons les piranhosaures
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Le silence retomba sur eux et les entoura de sa douce étreinte. Il n'avait jamais été pesant, ou inconfortable avec Victoire. Ce qui expliquait comment les années avaient glissé sur eux sans éroder la force de leur lien. Teddy renversa la tête en arrière pour observer le ciel se doter de rose et de pourpre.
— Ton père avait juste rigolé, lui. Comme à la plupart de nos bêtises d'ailleurs. Je ne me souviens pas l'avoir déjà vu en colère… Ah si, se reprit-il en grimaçant, il y a eu la fois où on était parti dans les collines chercher des dragons, tu te rappelles ?
Victoire grimaça à son tour alors que les souvenirs lui revenaient en mémoire.
— Je persiste à dire que c'est la faute d'oncle Charlie, s'insurgea-t-elle. Sans ses histoires, on ne serait jamais parti tout seuls à leur recherche !
— Sûrement, mais on a disparu plus de cinq heures Vic'. Cinq heures. Tout ça parce que tu refusais de faire demi-tour !
— Pardon ? s'offusqua sa femme. Je te rappelle que c'est toi qui étais venu me chercher parce que tu "connaissais le chemin", alors qu'on a tourné en rond sur des kilomètres !
— C'est vrai, reconnut Teddy d'un air contrit. En même temps, j'avais onze ans, je cherchais juste à t'impressionner et tu parlais sans cesse de ces dragons d'eau, alors forcément, j'ai saisi ma chance. Ce n'était peut-être pas la meilleure des idées, vu qu'on n'a pas eu le droit de se voir pendant un mois après ça…
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Compter jusqu'à cent et recommencer
Il y a tant d'histoires à se raconter
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— C'est un élément récurrent dans notre histoire, ça, ricana Victoire.
— De quoi, le fait que je cherche à t'impressionner ? demanda Teddy.
— Exactement ! Il y a eu la fois où tu es allé cueillir une fleur de coquelicot dans les orties pour me l'offrir, celle où tu as fini dans l'étang du Terrier quand t'es tombé de ton balai pendant une partie de Quidditch…
— Je proteste ! Cette fois-là, c'était pas pour t'impressionner toi ! Enfin, pas que toi, ajouta-t-il. Essaie d'avoir le vertige dans la famille Potter-Weasley et on en reparlera.
— Celle où t'as mangé le gâteau d'anniversaire que j'avais préparé alors que tu es allergique aux noix… Ah, et j'oublie la fois où t'as voulu nous accompagner, Olli et moi, dans la Forêt Interdite, soi-disant pour nous protéger mais que…
— J'ai trébuché sur une branche et je me suis fait une entorse, donc c'est vous qui avez dû me porter hors de la Forêt. Merci de me rappeler ce moment glorieux, grommela le jeune homme. En même temps, t'étais encore pire qu'oncle Harry, toujours au milieu des ennuis !
— Une vraie Gryffondor, sourit-elle de toutes ses dents.
— Une vraie tête brûlée surtout. Pas étonnant que tu sois partie à la conquête des océans sur un pauvre rafiot miteux…
— Eh, parle mieux de mon bateau, s'il te plaît ! répliqua Victoire en le bousculant avec son épaule.
Teddy lui tira la langue d'un air moqueur avant de se serrer contre elle pour se faire pardonner. Son parfum flottait dans les airs, mélange de jasmin et d'eau salée, ce qui le fit sourire avec amertume. Même maintenant, il sentait toujours l'odeur de la mer sur elle.
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Je te promets de rester sage
Comme une image en noir et blanc
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— Bref, je ne suis qu'un idiot dans l'histoire, mais uniquement par ta faute. Sans toi, j'aurais été beaucoup plus calme !
— Ose me dire que tu regrettes, le défia-t-elle avec un rictus taquin.
— Oh non, j'aurais trop peur de ce que tu me ferais, rétorqua-t-il.
— Pfff, fit-elle en levant les yeux au ciel, dis plutôt que tu m'aimes trop pour ça. Et puis, je te rappelle que je n'ai rien à voir avec ton premier acte de rébellion, celui de garder les cheveux bleus pour Poudlard. Pourtant, vu les regards noirs que te lançait Mamie Molly, tout le monde aurait abdiqué.
Teddy lui lança un regard stupéfait.
— Vic', vraiment ? J'étais déjà fou amoureux de toi à l'époque, et tu avais une fascination incompréhensible pour la couleur bleue. Tu penses vraiment que tu n'avais rien à voir avec ce choix ? questionna-t-il, abasourdi.
— Oh. Je crois que je ne l'ai jamais réalisé, avoua-t-elle. Moi j'étais juste contente parce que "Maman ! Papa ! Teddy, il a les cheveux de la même couleur que la mer ! Vous croyez qu'il viendra habiter avec moi sur mon bateau ? ", dit-elle avec la voix d'une enfant.
— Et c'est exactement pour ça que j'ai gardé les cheveux bleus, rit Teddy en l'enveloppant d'un regard amoureux.
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De ne jamais tourner la page
On dirait qu'on serait jamais grand
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— Tu sais, j'ai toujours admiré cette partie de toi, confessa Teddy. Cette volonté, depuis que t'es gamine, à croire à fond en tes rêves, et à tout faire pour les réaliser. Au lieu de… je sais pas… de faire comme tout le monde en mettant tes idées aux placards, de faire une croix dessus et d'abandonner, toi tu t'es vraiment dit : "si c'est ça, grandir, alors c'est pas pour moi. Je vais faire les choses à ma façon, comme j'en ai envie".
— T'embellis un peu les choses Teddy, c'est pas vraiment comme ça que ça c'est passé. J'ai juste essayé de trouver un métier qui me plaisait, qui me permettait de gagner ma vie en lien avec mes passions, c'est tout.
— Non Vic', ça, c'est ce que disent les photographes ou les joueurs de Quidditch. Toi, t'as quitté Poudlard après les BUSES pour t'inscrire dans le cursus moldu parce que tu savais que le monde sorcier te servirait à rien. T'as fait des études super compliquées sur l'océanographie auxquelles personne n'a rien compris. Même Tante Hermione ! T'es allé te geler sur un voilier pendant six mois en Antarctique pour étudier une foutue algue. Je pense que c'est un niveau légèrement au-dessus que juste "je me suis réveillé ce matin pour aller taper dans un ballon avec un gros bâton sur un balai", s'enhardit le jeune homme.
Victoire éclata de rire et souffla un baiser dans sa direction.
— Je savais que t'étais mon plus grand fan, mais à ce point… s'esclaffa la jeune femme. J'aurais eu du mal à trouver une dédicace à la hauteur de ton soutien pour ma thèse, ajouta-t-elle d'un ton moqueur.
— Si seulement… Je donnerais tout pour l'avoir entre mes mains, cette thèse, se crispa Teddy d'un ton peu amène.
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Et si le temps tourne à l'orage
On ira danser dans le vent
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— Je sais. Je suis tellement désolée, Edward, regretta Victoire. Si j'avais pu faire autrement…
— Tu m'avais promis Vic'. Tu m'avais promis que quoiqu'il se passerait, tu reviendrais auprès de moi, que tu ne partirais pas plus de neuf mois. Qu'on fêterait nos trois ans de mariage ensemble, dans notre maison. Et maintenant… Et maintenant c'est fini, je vais devoir me contenter de mes souvenirs. C'est la seule chose qui me reste de toi maintenant, des foutus souvenirs.
Teddy enfouit sa tête dans ses genoux et appuya ses poings fermés sur ses yeux jusqu'à ce que ça lui fasse mal, comme s'il pouvait faire cesser l'orage qui hurlait dans sa tête. Des sanglots silencieux secouèrent ses épaules.
— Si tu savais comme je t'en veux Vic'... D'être parti comme ça, à l'autre bout des mers, pour rejoindre ton premier et seul amour, celui contre lequel je n'ai jamais pu rivaliser. Je t'admire pour tout ce que tu as fait, et en même temps, je t'en veux tellement ! Je t'en veux tellement de m'avoir abandonné, de me laisser seul ici, entouré de toutes ces choses qui me narguent, qui me rappellent sans cesse que je t'ai perdu pour toujours. Comment est-ce que je suis censé faire maintenant ? Hein ? Dis-moi Vic', comment est-ce que je suis censé faire ?
Les sanglots s'accentuèrent et s'intensifièrent, jusqu'à faire exploser la digue que Teddy avait soigneusement construite, celle qui l'empêchait de s'effondrer devant sa famille. Un ouragan d'émotions saccagea son esprit, son cœur enfin libre de hurler sa douleur, de pleurer la perte de sa moitié, tandis que la caresse d'une main fantôme agitait ses cheveux.
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Pour nous le temps est un mirage
On sera toujours des enfants
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Lorsque la tempête s'affaiblit bien longtemps après, l'esprit de Teddy s'apaisa peu à peu. Les sanglots s'espacèrent, les larmes se tarirent. Ses émotions, la douleur, la perte, l'abandon, étaient toujours présentes, mais s'effacèrent en arrière-plan. Comment avancer à présent ? C'était à lui, et à lui seul, de trouver la réponse à cette question. Victoire avait toujours été une constante dans sa vie, sa partenaire, sa meilleure amie, sa première amoureuse, sa femme. Les années avaient filé sur eux sans les impacter, le temps n'avait jamais été un ennemi mais au contraire un allié qui leur apportait surprises et merveilles. Comment avancer, comment se projeter à présent ? Pour la première fois, Teddy ressentit l'angoisse du temps peser sur lui.
Toute sa vie avait volé en éclats. À cause d'une fascination trop prononcée pour la couleur bleue, que ce soit l'azur de ses cheveux ou le turquoise de l'océan. À cause d'un caractère aventureux, explorateur qui l'avait menée par-delà les mers. À cause d'un stupide orage.
Une ultime larme, rescapée de la tempête, dévala la joue de Teddy quand il prit conscience du vide qu'il ressentait, dans son cœur comme à ses côtés. Un vide en forme de Victoire, qui ne laissait derrière elle que des souvenirs et une balancelle bleue, qui oscillait paisiblement au fond d'un jardin.
