En surface

Eddie regarda nerveusement sa montre alors qu'il se préparait à quitter la caserne.

Il avait hâte de rentrer à la maison pour passer du temps avec Buck. La journée avait été longue et épuisante, mais l'idée de retrouver son petit ami lui redonnait de l'énergie. Aujourd'hui, ses parents s'occupaient de Christopher, ce qui signifiait qu'ils auraient la maison pour eux seuls. Une rare occasion de profiter de moments d'intimité et de détente, même s'ils étaient limités par les blessures de Buck.

Il gara rapidement sa voiture devant la maison et entra silencieusement, au cas où Buck ferait une sieste. En avançant dans le couloir, il entendit des voix provenant du jardin. La voix de Taylor était clairement reconnaissable. Eddie savait que Taylor était une bonne amie de Buck et un soutien inestimable pendant sa convalescence. Il ne l'aimait pas mais il s'en accommodait parce qu'il ferait à peu près n'importe quoi pour Buck.

Il s'approcha discrètement, ne voulant pas interrompre leur conversation.

Cependant, lorsqu'il entendit la voix de Buck, il s'arrêta, écoutant malgré lui. La douleur et l'incertitude dans la voix de Buck le firent frissonner.

– Il le fera parce que… je ne suis pas prêt, je crois que je ne le serai jamais, entendit-il Buck dire.

Eddie sentit son cœur se serrer.

– Prêt à quoi ? demanda Taylor.

– Je ne pourrais jamais aller plus loin que les baisers ou les caresses et un jour il s'en lassera, répondit Buck, sa voix pleine de désespoir.

Eddie se sentit soudainement étouffé par un mélange de douleur et d'incompréhension. Comment Buck pouvait-il penser qu'il se lasserait ? Ne savait-il pas combien il l'aimait ?

– Il te pousse à aller plus loin ? Parce que si c'est le cas, je vais le démolir.

Eddie apprécia son côté protecteur mais le fait que Buck doute d'eux, de leur couple de son amour lui faisait plus de mal qu'il n'était prêt à l'accepter.

Il continua néanmoins d'écouter, son cœur battant à tout rompre.

– Non, il est adorable et patient, le défendit Buck. Mais ça ne pourra pas durer toute la vie. Avec mon bassin encore fragile, je ne peux pas faire grand-chose, et c'est l'excuse parfaite mais il me fait de l'effet, et j'ai peur qu'il s'en rende compte.

– Ok mais alors qu'est-ce qui te bloque, Buck ? demanda Taylor avec douceur. Tu viens de sous-entendre que la mécanique fonctionne, que tu l'aimes et que tu en as envie. Vous avez l'air si bien tous les deux alors qu'est-ce qui te retient ?

Buck prit une profonde inspiration avant de parler, et Eddie put entendre le tremblement dans sa voix.

– Je ne peux pas... c'est compliqué. J'essaie d'oublier.

– D'oublier quoi ? insista encore Taylor alors qu'il était caché derrière la porte écoutant silencieusement ce que son petit ami ne lui avait jamais dit.

– Je... Il... Je ne peux pas, bégaya-t-il. C'est... trop douloureux.

– Bon sang, Buck, mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? s'inquiéta-t-elle.

Les mots suivants frappèrent Eddie comme un coup de poing.

– Je ne voulais pas. J'étais trop petit. Je ne comprenais pas, je... J'avais que cinq ans, explosa Buck en larmes. Et ensuite, je… mon Dieu ça a duré des années, il m'a brisé.

Eddie se laissa glisser contre le mur, ses jambes ne le soutenant plus.

Les larmes commencèrent à couler librement sur ses joues alors qu'il réalisait l'ampleur de ce que Buck avait vécu. L'homme qu'il aimait plus que tout avait enduré l'enfer, et Eddie se sentait impuissant, incapable de réparer la douleur passée.

– Bon sang Buck, c'est pour ça que tu n'as jamais voulu que je te touche quand on était ensemble ? demanda-t-elle doucement, sa voix lui parvenant à peine au-dessus les battements frénétiques de son cœur.

– Je suis tellement désolé, pleura-t-il, ses mots entrecoupés par des sanglots. Je ne savais pas comment te le dire. Je ne savais pas comment expliquer ce que j'avais vécu.

– Tu n'as rien fait de mal, souffla-t-elle. Calme-toi. Est-ce que tu veux de l'eau ?

Taylor courut dans la cuisine, frôlant Eddie sans même le remarquer.

Ses mouvements étaient précipités, emportés par le besoin d'aider Buck. Eddie, cependant, était figé là, contre le mur, comme paralysé par la douleur et la confusion. Ses pensées tournaient en boucle, accablées par la révélation dévastatrice qu'il venait d'entendre.

Il était anéanti, son cœur lourd comme une pierre.

Le poids des révélations de Buck le broyait de l'intérieur, l'écrasant sous une vague de tristesse et de chagrin. Chaque mot prononcé par Buck résonnait dans son esprit, faisant écho à une douleur qu'il ne pouvait même pas imaginer. Eddie se sentait vidé, comme si une partie de lui-même avait été arrachée, laissant un vide béant qu'il ne savait comment combler.

Les larmes coulaient librement sur ses joues, mais il n'avait ni la force ni l'envie de les essuyer. Son regard était perdu dans le vide, les émotions si intenses qu'il avait du mal à les comprendre et encore plus à les exprimer. La vision de Buck, seul et vulnérable, subissant les horreurs de son passé, le brisait. Eddie se sentait impuissant, incapable de réparer ce qui était brisé et de soulager la souffrance de l'homme qu'il aimait.

Il était là, écrasé par un mélange de désespoir et de culpabilité, conscient de la fragilité de la situation. Chaque battement de son cœur semblait douloureux, comme une douloureuse résonance de la douleur que Buck avait endurée.

Il se sentait comme une épave, perdu dans un océan de sentiments confus, incapable de voir comment il pourrait être assez fort pour soutenir Buck à travers cette tempête.

Eddie avait besoin de rassembler ses forces, de se ressaisir, mais pour l'instant, il était simplement là, brisé et désemparé, incapable de faire autre chose que de laisser ses larmes couler et de contempler l'ampleur de la tâche qui l'attendait.

Quand Taylor revint avec le verre d'eau elle se figea quand elle le vit assis sur le sol, anéanti. Elle s'agenouilla à ses côtés, posant le verre d'eau entre ses mains.

– Il a besoin de toi, Eddie, dit-elle doucement. De ton amour et de ton soutien pour guérir. Il aura aussi besoin de thérapie, mais avant tout, il a besoin de toi. Ne le laisse pas tomber.

Eddie acquiesça, prenant une profonde inspiration pour se ressaisir.

Il se leva lentement, sa détermination renforcée par les mots de Taylor. Il entra dans le jardin, son cœur battant la chamade, et s'approcha de Buck.

– Hey, murmura-t-il doucement.

Buck leva les yeux, les larmes encore présentes sur ses joues. Il sembla surpris de voir Eddie, mais aussi soulagé.

– Eddie, je…

Eddie s'agenouilla devant lui, prenant ses mains dans les siennes.

– Tout ira bien, souffla-t-il. Je suis là pour toi, et je le serai toujours. Peu importe ce que tu as vécu, peu importe ce que tu ressens, je t'aime. Je t'aime plus que tout, et je ne te quitterai jamais.

Buck éclata en sanglots, et Eddie le prit dans ses bras, le serrant contre lui.

Les mots de Buck étaient entrecoupés de larmes, mais Eddie écouta chaque confession, chaque peur, chaque douleur.

– J'ai tellement peur que tu me quittes…, sanglota Buck. J'ai peur que tu finisses par me voir comme je suis.

Eddie secoua la tête, ses propres larmes se mêlant à celles de Buck.

– Jamais je ne quitterai, Buck. Tu es tout pour moi. Je resterai à tes côtés et je ferai tout ce qu'il faut pour t'aider à aller mieux. Tu n'es pas seul. Tu ne seras plus jamais seul.

Ils restèrent ainsi, enlacés, laissant leurs larmes couler, leurs cœurs battant à l'unisson.

Eddie savait que le chemin serait long et difficile, mais il était prêt à le parcourir avec Buck, à chaque étape. Parce que l'amour qu'il avait pour lui était plus fort que toutes les peurs et toutes les douleurs. Ensemble, ils affronteraient le passé et construiraient un avenir où Buck pourrait enfin trouver la paix et la guérison qu'il méritait.

Et un jour, il tuerait le monstre qui lui avait fait du mal.