Pattenrond avait tout essayé pour faire céder Drago Malfoy. Il l'avait fait chuter dans les escaliers à trois reprises, l'envoyant à l'infirmerie à chaque fois. Il avait vomi si souvent sur son lit, dans ses chaussures, sur son bureau, dans son sac de cours, qu'il en avait mal à la gorge. Il avait ruiné toutes ses affaires à coups de griffes et quand celles-ci n'avaient pas été assez solides (ça arrivait rarement, Pattenrond avait d'excellentes griffes), il avait balancé lesdites affaires dans le feu ou le lac.
Drago Malfoy n'avait rien avoué.
Pattenrond abandonnait.
Il n'abandonnait pas par fatigue, par paresse ou par faiblesse, bien sûr : il abandonnait par fierté, pour prouver au Sorcier que lui avait l'humilité suprême d'un Chat et la sagesse nécessaire pour discuter et négocier.
Il avait ramené une offrande pour prouver sa bonne foi : sur l'oreiller de Drago Malfoy trônait un gros rat décapité.
Quand le Sorcier pénétra dans sa chambre, ses yeux se fixèrent immédiatement sur le cadeau et s'écarquillèrent de convoitise. Sa bouche béat, gourmande, pleine de salive.
Pattenrond était assez fier de son effet.
– Mais par Salazar, tu veux quoi à la fin ?!
Pattenrond ronronna. Enfin, on avançait.
·
– Je regrette, d'accord ?! J'ai agi comme un crétin. C'est ça que tu veux entendre ?!
Drago se sentait devenir fou. Il perdait pied. Toutes ses barrières mentales cédaient les unes après les autres. Toutes les briques de certitude et de fierté qu'il avait patiemment empilées pour se construire une personnalité digne de sa lignée s'effritaient.
Il avait lutté contre lui-même pour se convaincre qu'il prenait la bonne décision.
– J'abandonne !
Il avait pris la mauvaise décision.
Il avait lutté contre lui-même pour se convaincre qu'il n'était pas responsable.
– J'abandonne !
Il était responsable.
Il avait lutté contre lui-même pour se convaincre qu'il ne pouvait plus rien y faire.
– J'abandonne !
Il pouvait y faire quelque-chose.
Le chat sur son lit ronronnait en le regardant s'effondrer.
– J'abandonne… Je vais… Je dois agir. J'ai compris. Je vais… Je dois prononcer son nom, n'est-ce pas ? C'est ça que tu veux ?
Il le pouvait. Il ne risquait rien à le faire devant un chat stupide. Il le devait. Pour avancer. Pour parvenir à nouveau à supporter son reflet dans la glace. Il inspira.
– Lord Voldemort.
Pattenrond cessa son ronronnement : Lord Voldemort ? Que venait-il faire dans cette histoire, celui-là ?
