Those times you laughed brought out a strange new mystery,
Of unknown strength summoned from deep within me.
Snowing, you're holding your arms and trembling but,
I know the deep warming feeling would come if you could somehow find me,
Fairy, slowly,
But surely, you're walking your way,
Oh, Hang in there!
(Why?!)
Batman ne connaissait pas la peur, il était la peur incarnée, tel était le credo des malfrats de Gotham et d'une partie non-négligeable de la Ligue des Justiciers.
(c'est plutôt flatteur, quand on y pense, d'avoir réussi là où Brainiac et Lex Luthor et le Général Zod et tant d'autres ont échoué)
Bruce Wayne est bien placé pour savoir que c'est complètement faux.
Il a réalisé cela après avoir ramené un minuscule orphelin du cirque sous son toit, quand l'adrénaline est retombée et qu'il a pu entrer en mode Alfred qu'ai-je fait. Car prendre soin d'un enfant qui plus est traumatisé, c'est une autre paire de manches que d'aller décourager l'élément criminel de la ville à grands coups de poings dans la figure.
C'est si fragile, un être humain. C'est un constat haineusement satisfait chaque fois qu'un bandit succombe sous l'assaut de la Chauve-Souris, mais qui se charge d'un désespoir silencieux et impuissant chaque fois que Bruce pense à Dick Grayson – surtout au commencement, quand le gamin rieur et joueur en mouvement perpétuel n'était encore que cette petite ombre muette incapable de faire une nuit sans cauchemar.
(petite ombre muette si semblable à celle née dans cette allée à côté du cinéma, malgré un peu moins de trois décennies d'intervalle)
C'est le même constat qui le hante, alors qu'il revient d'avoir à nouveau mis au lit Anastasia. Alfred l'attend patiemment dans le salon, s'occupant à raconter sa tentative de faire carrière dans la tragédie shakespearienne à Alexis – Damian, il s'appelle Damian – qui arbore une moue d'un scepticisme troublant pour son âge, comme s'il soupçonnait une arnaque dans tous ces rebondissements de situation.
(il n'y a pas d'arnaque, c'est juste une vérité du Manoir qu'Alfred est proprement inexplicable)
« Ah, monsieur Bruce. Est-ce un signe que la crise est apaisée ? »
Bruce ne répond pas tout de suite. Il s'assoit d'abord, et se fait illico harponner par le regard vert du bambin perché sur les genoux du majordome. Damian ne semble pas vouloir qu'il le prenne dans ses bras, ni même son attention. Enfin, c'est ce qu'il pense. Bruce ne connaît rien aux enfants de cet âge-là, c'est tellement plus facile quand ils peuvent parler.
Au fait de parler.
« Anastasia a dit un nom. Tessa. Elle l'a répété à vingt-quatre reprises avant de se rendormir. »
La moustache d'Alfred est parcourue d'un frémissement. Invitation à poursuivre.
« Quand j'ai fouillé le sac à dos avec lequel sont arrivés les enfants, j'ai trouvé trois passeports. Dont un appartenant à une certaine Nyssa Raatko, domiciliée à Saint-Pétersbourg, prétendument née en 1981. »
« Vous ne croyez pas que le document soit authentique. »
« Les informations le sont, en fait. Il n'y a que la date qui soit fausse : Nyssa Raatko est bien née le vingt-six janvier, mais en 1775. Le nom refait surface à plusieurs reprises, en 1833, 1923, 1925, et 1945. »
« Il pourrait s'agir d'un simple alias » suggère Alfred non sans bon sens. « Ou de plusieurs femmes à travers les âges. »
« Avec la dynastie Al Ghul, c'est plus crédible de s'attendre à une seule et même femme » riposte Bruce. « Et Tessa est un prénom russe, un qui ressemble beaucoup à Nyssa. »
« Mais alors, où est cette femme ? »
Bruce rumine la question. Il remâche les éléments à sa disposition. Deux enfants sans surveillance. Un voyage méticuleusement organisé, sauf pour la dernière partie du trajet. Une absence alors que tout était prévu pour une présence. La politique des Ombres en ce qui concerne les traîtres et les démissions.
(le cri d'une gamine sous le plafond de la cuisine, tout comme un gamin a crié sous un chapiteau de cirque il y a neuf ans, tout comme un gamin a crié entre les murs d'une allée il y a trente-et-un ans)
« Je ne sais pas » dit-il, et le mensonge lui laisse un goût âcre dans la bouche, mais ça vaut mieux encore que le tambour étouffé dans son esprit, qui insiste pour qu'on le laisse entrer.
Pas encore. S'il vous plaît, pas encore.
Tout de suite après avoir ramené les enfants au Manoir, Bruce a contacté Lucius pour l'informer qu'il prenait un congé de quelques jours et ne viendrait donc pas à Wayne Entreprises. Cette grippe qui traîne, c'est vraiment incommodant, n'est-ce pas ?
Lucius a accepté l'alibi sans broncher (pour une fois que ce n'est pas une histoire de sports extrêmes ou d'amourette torride), et Bruce se retrouve donc tranquille pour mener son enquête au sujet de la Ligue des Ombres.
Un mois auparavant, il avait noté que Talia et Ra's al Ghul s'étaient rendus tous les deux dans la même base en Europe de l'Est, mais il ne s'était pas concentré sur la base en elle-même. À la place, il avait renforcé les programmes de recherche chargés de surveiller la situation politique et économique en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est – des zones sensibles, où c'était aisé de déstabiliser les entreprises et de placer des hommes de paille dans le gouvernement.
Maintenant, il a sous les yeux une image satellite d'un manoir à demi calciné dans la campagne allemande, à quelques kilomètres à peine de la frontière polonaise. Ce qui est curieux, c'est que le feu semble avoir pris dans le garage ou tout près, et s'il y a bien un endroit où les mesures anti-incendie ne plaisantent pas, c'est bien là. En d'autres termes, ça ressemble à un crime.
Une base de la Ligue des Ombres brûlée, donc, et qui semble désertée. Et contre toutes attentes, les agents du Démon ont décidé de s'agiter en Europe, plus précisément en Allemagne et en France. Et dans le sac à dos d'Anastasia, Bruce a retrouvé des billets d'avion correspondant à deux aéroports situés dans ces pays-là.
Plus il y pense, plus il est convaincu que l'arrivée des enfants chez lui n'était pas prévue du tout. Pas alors qu'il ignorait tout d'eux
(parce que Talia a menti, elle a eu deux enfants de lui et elle les lui a cachés)
et que l'actuelle activité des Ombres prouve que celles-ci recherchent les petits, mais il n'a encore reçu aucun contact là-dessus. Non, quelqu'un a intercepté le trajet d'Anastasia et Damian. Quelqu'un les a délibérément placés dans la trajectoire de Batman, et il ne sait pas qui, il ne sait pas pourquoi.
Les enfants ne sont pas supposés se trouver à Gotham, et tôt ou tard, Ra's al Ghul et Talia vont s'en rendre compte, et ils exigeront des explications, une réponse que Bruce ignore. Peut-être qu'ils réclameront aussi les enfants.
La paume de Bruce l'élance subitement, et quand il baisse les yeux, il réalise qu'il a serré le poing si fort que ses ongles ont entamé sa paume. Il saigne un peu, de quatre demi-lunes alignées.
Il ferme les yeux et s'efforce d'expirer longuement par le nez. De se calmer. D'envisager la perspective avec détachement.
(perdre ses enfants qu'il vient à peine de rencontrer, dont les visages ne sont pas encore parfaitement, indélébilement inscrits dans sa mémoire)
Sa paume l'élance à nouveau. Son rythme cardiaque lui échappe, se livrant à une accélération frénétique digne des concoctions gazeuses de Jonathan Crane. L'espace d'un instant, le Chevalier Noir vacille, incapable de reprendre son souffle.
Bruce sait depuis toujours qu'il est perclus de défauts. Il voit des ennemis dans toutes les ombres. Il est trop abrupt. Il ne sait pas compromettre. Il ne communique pas assez.
Par dessus tout, Bruce est égocentrique. Il sait ça, il sait que c'est un défaut qu'il a toujours eu, encouragé par une enfance riche où il n'avait qu'à demander pour avoir, un nom de famille garantissant que le monde serait à ses pieds. Il sait que Batman, c'est un moyen de forcer Gotham à se rappeler la tragédie de Crime Alley, un moyen d'imposer à Gotham sa vision de ce que la ville devrait être.
Bruce n'a jamais été gracieux pour ce qui était de prêter, d'autoriser autrui à s'emparer de ce qui lui appartient sans permission ni conditions. Et il ne pense pas pouvoir partager ses enfants avec les Ombres.
(pas alors que leur mère les a eus à elle seule toutes ces années)
Alors que le Démon vienne. Qu'il essaie donc de reprendre ses petits-enfants.
La Chauve-Souris l'attend, et quelqu'un perdra à ce jeu de la garde, et il ne s'agira pas de Batman.
It's Snowing, keep going; be honest and smile as we're,
Approaching, evoking, the clock to keep repeating over, but,
Fairy, where are you going?
I'm holding, all the light on to your way and to a brand new bright day!
Pour ce chapitre, vous avez droit au premier générique de l'animé Fairy Tail. Pour les incultes, c'est Snow Fairy par le groupe Funkist, version longue.
