Hey !

lors vous devinerez jamais ! J'ai relus cette fanfiction et... J'ai eus comme qui dirait un haut le coeur... Et un immense sentiment de honte... J'aime toujours autant l'histoire que j'ai construite, et j'aime toujours éperduement Tybalt... (mon Tybalt). Mais l'histoire était si mal écrite ! Et j'ai fais tant de progrès depuis cette époque... Que j'ai décidé d'entièrement la réécrire (encore...) !

Et là, je suis très fière de ce que je vais vous présentez. Alors pas de surprise ~ L'histoire est toujours la même, mais bien mieux retravaillé, on creuse un peu plus le personnage de Tybalt, mais aussi légèrement plus celui de Juliette.

La fiction est courte, elle ressemble plus à une nouvelle. On est environs à 28 000 mots (un peu plus) et 5 chapitres + 1 prologue. [pas d'épilogue].

Donc je vous propose de vous donner rendez-vous tous les soirs de la semaine ? Pour un petit moment dans les rues de Vérone en ma compagnie !

Bonne lecture ~~


Prologue ~ Un Jour

L'aube baignait le ciel d'un doux jaune pastel, une promesse de chaleur et de réconfort. Les premiers rayons du soleil perçaient à travers les rideaux fermés, glissant avec délicatesse sur son visage endormi, comme une caresse qui éveille doucement.

Allongé dans son lit, les yeux perdus dans les méandres du plafond, il laissait ses pensées s'égarer, son regard hazel voilé d'une mélancolie sourde. Depuis une semaine déjà, chaque matin ramenait avec lui cette même torture, ce même flot de questions sans réponse. Un soupir, long et las, s'échappa de ses lèvres tandis qu'il se redressait, une main fatiguée passant dans ses boucles dorées.

Qu'est-ce qui était le plus cruel dans cet amour silencieux ? Était-ce la barrière infranchissable de leur sang mêlé, ou bien la certitude que jamais elle ne répondrait à ses sentiments ?

Elle atteindrait bientôt ses seize ans… Un âge à la fois tant attendu et profondément injuste. Elle devenait une femme aux yeux du monde, aux yeux des hommes. Mais à ses yeux, à lui, elle restait encore une enfant, une fleur fragile au seuil de son éclat. Lui, de quatre années son aîné, savait que seize ans n'apportaient pas la sagesse qu'on prétendait. On croit à cet âge-là que le monde nous appartient, alors qu'on n'est encore qu'un pauvre idiot, un enfant déguisé en adulte, qui cherche le soutien de ses parents dans l'ombre.

Et les jeunes filles… À seize ans, elles étaient encore si pures, si malléables. Il en savait quelque chose. Combien de fois avait-il lui-même profité de cette innocence crédule ?

Mais Juliette…

Elle ignorait encore les pièges des hommes, la douceur empoisonnée de leurs mensonges, la violence cachée sous leur désir. Rien que de l'imaginer, elle, dans les bras de ces misérables, suffoquée par leurs gestes, lui donnait la nausée.

Et Pâris… Pâris arriverait bientôt.

Son poing s'écrasa avec fureur contre l'une des colonnes de bois encerclant son lit, la douleur éclatant dans ses os comme un feu qu'il connaissait trop bien. Mais il l'ignora. La souffrance physique n'était plus qu'une vieille amie. Il avait grandi avec elle, sous la rigueur d'un père qui maniait le fouet et le bâton comme d'autres manient des mots. Depuis longtemps, la douleur des coups ne signifiait plus rien. La seule qui comptait encore était celle de cet amour impossible, celle qui le rongeait de l'intérieur, silencieusement.

Pourquoi l'amour devait-il faire si mal ?

Déglutissant, il se leva enfin, repoussant distraitement ses mèches en arrière. Il venait à peine de saisir la chemise abandonnée sur une chaise quand un coup léger retentit à la porte. Il enfila rapidement le vêtement, négligeant de le boutonner, avant d'ouvrir le panneau de bois sans se presser.

« Tybalt ! »

Elle entra dans la pièce comme une bourrasque lumineuse, son rire et son éclat précédant chacun de ses pas. Ses cheveux blonds brillaient sous la lumière du matin, et sa robe vaporeuse, d'un rose pâle, dansait autour d'elle avec une grâce insouciante.

Elle se précipita vers la fenêtre avec enthousiasme, tirant les rideaux d'un coup sec. Les rayons du soleil s'invitèrent alors, piquant ses yeux encore ensommeillés. Un grognement lui échappa tandis que la jeune fille poursuivait son petit rituel, ouvrant grand la fenêtre pour laisser entrer la fraîcheur du matin, cette fraîcheur qui, il le savait, s'étoufferait bien vite sous la chaleur écrasante du jour à venir.

La lumière du soleil dansait dans ses cheveux tandis qu'elle se tournait vers lui, son regard océan plongeant dans le sien. Un air faussement contrarié se peignit sur son visage délicat, les poings posés sur ses hanches dans une attitude d'autorité enfantine. Il faillit sourire. Elle avait toujours fait cela, croyant qu'elle pouvait l'intimider.

« Tybalt, cesse donc de t'enfermer dans cette…

- Cette quoi ? »

Un sourire en coin, ses yeux scrutant les siens.

« Dans cette chambre ! » reprit-elle, ses mains crispées sur sa robe. « Tu es cloîtré ici depuis une semaine entière. Il est temps de sortir, de respirer un peu. »

Un silence pesant s'étira entre eux avant qu'il ne réponde, d'un ton aussi tranchant qu'une lame.

« Le Prince m'a interdit de quitter la demeure des Capulet. »

Juliette resta un instant figé, son visage angélique troublé par une ombre fugace, une contrariété légère, mais palpable. Ses yeux, d'ordinaire si limpides, se plissèrent, comme si elle cherchait à comprendre les méandres qui troublaient l'âme de son cousin. Ses prunelles parcoururent la pièce, s'attardant sur les vêtements éparpillés au sol, sur la dague, solitaire, posée sur la table de chevet.

« Si tu cessais de te battre contre les Montaigu… » tenta-t-elle doucement.

« Ne parle pas de ce que tu ne comprends pas. »

Sa voix avait claqué comme un fouet. Elle recula légèrement, blessée, mais ne céda pas.

« C'est vrai, je ne comprends pas votre haine. Et je ne le souhaite pas. Je… »

- Juliette. »

Le nom de la jeune fille flotta dans l'air comme une plainte, suspendu entre eux, imprégné de sentiments qu'il ne pouvait, ou ne voulait, nommer. Elle tourna enfin son regard vers lui, détachant ses yeux de l'arme posée non loin. Ses prunelles, d'un bleu si pur, vacillèrent un instant, traversées par une lueur indéfinissable, était-ce de la peur ? De l'appréhension ? Tybalt n'aurait su le dire.

Sa main droite, comme par automatisme, vint se perdre dans ses boucles blondes tandis qu'un soupir lourd d'émotions non dites échappait à ses lèvres. Ce n'était pas la première fois que cette discussion revenait entre eux, et il savait combien Juliette méprisait cette haine ancestrale qui enchaînait Capulet et Montaigu. Il connaissait aussi cette peur qui la hantait, la crainte de le voir un jour blessé, ou pire, mort.

Cela le touchait, bien plus qu'il n'aurait voulu l'admettre, mais aussi l'agaçait.

Et alors qu'elle continuait à le fixer, son regard perçant, ses sourcils se fronçant légèrement sous le poids de ses émotions, Tybalt se sentit attiré vers elle, comme un papillon pris au piège par la lumière éblouissante de sa beauté.

Elle était si belle… une beauté presque irréelle, aussi fragile qu'un rêve. Ses cheveux blonds glissaient en une cascade d'or jusqu'à la chute de ses reins, et malgré sa petite taille, elle se tenait droite, farouche, toujours prête à prouver au monde qu'elle valait bien plus que ce que ses traits juvéniles laissaient paraître.

Elle était une tête, peut-être un peu plus, plus petite que lui, et cela l'avait toujours amusé. Depuis l'enfance, il n'avait cessé de se moquer affectueusement de cette différence, riant de ses colères soudaines et de ses bouderies charmantes.

Son visage, encore marqué par la douceur de l'enfance, ses traits arrondis, portait cette malice indomptable que même sa mère ne parvenait à éteindre. Elle était une flamme vive dans un monde terni par l'ombre. Un souffle d'air frais, pur, dans ses propres ténèbres.

Comment une colombe telle qu'elle pourrait-elle jamais comprendre le monde des crapauds où lui, Tybalt, évoluait chaque jour ?

D'un geste tendre, il leva la main et laissa ses doigts frôler délicatement la joue de Juliette. Sa voix, douce mais teintée d'une tristesse qu'il peinait à dissimuler, fendit le silence.

« Tu es bien trop innocente pour ce monde. »

Juliette, comme attirée par cette caresse, vint instinctivement appuyer un peu plus son visage contre sa paume, ses yeux se fermant sous l'effet du réconfort. Un léger frisson courut le long de la colonne vertébrale de Tybalt, qu'il s'efforça de réprimer.

« Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose, Tybalt. Ça me détruirait. »

Ces mots, simples mais lourds de sens, percutèrent le cœur du jeune homme comme un coup de poignard. Il sentit sa poitrine se contracter douloureusement, un torrent de pensées déferlant dans son esprit. Ils perdaient tous deux tant dans cette guerre absurde entre Capulet et Montaigu. Amis, proches, cousins… un à un, tous tombaient sous les coups de leurs ennemis de toujours. Et pourtant, il aurait suffi de trois mots. Trois petits mots prononcés par elle, et toute la haine qu'il nourrissait depuis si longtemps se serait instantanément muée en amour.

Lorsqu'elle se détacha de sa caresse, une douleur intense traversa son être, comme si elle venait de lui arracher le cœur d'un simple mouvement de joue. Mais avant qu'il ne puisse réagir, Juliette, d'un sourire innocent, reprit, son ton redevenu léger, presque enjoué :

« Il y a tant de choses à faire dans ce château ! Viens avec moi ! Nous pourrions aider en cuisine ou bien aux décorations pour la fête !

- Juliette, ce n'est pas la place d'une dame… »

Elle roula des yeux, exaspérée par ses propos formels.

« Ô Tybalt ! S'il te plaît ! Tu es le seul à me traiter encore normalement, je…

- … Tu veux réellement passer ta journée d'anniversaire avec moi ? »

Elle marqua un temps d'arrêt, surprise, presque blessée qu'il puisse douter de la sincérité de ses intentions. Le voir ainsi remettre en question leur lien lui brisa un peu plus le cœur. Elle baissa la tête, ses épaules s'affaissant légèrement sous le poids de la tristesse.

« Je m'ennuie, et la muette n'est pas exactement la meilleure des compagnies, même si je l'apprécie beaucoup. Et puis… j'aime passer du temps avec toi. Même si, ces derniers temps, tu m'évites souvent. »

Ces derniers mots, murmurés avec une douceur mélancolique, frappèrent Tybalt en plein cœur. Il se crispa légèrement, incapable de soutenir plus longtemps son regard. Il la laissa quitter la pièce sans un mot, observant sa silhouette s'éloigner, sa robe ondulant autour d'elle comme si elle était faite de nuages. Pourtant, alors qu'elle s'apprêtait à descendre l'escalier en colimaçon, Juliette s'immobilisa, remarquant qu'il ne la suivait toujours pas. Elle revint sur ses pas, une expression de défi sur le visage.

« Tu ne viens vraiment pas?

- J'ai une condition.

- Laquelle ?

- Tu ne me feras pas porter de robe, n'est-ce pas ? »

Juliette fronça le nez d'un air curieux, comme si elle imaginait réellement son cousin habillé de l'une de ses tenues. Puis, secouant vigoureusement la tête, elle fit demi-tour sans répondre, ses cheveux bondissant sur ses épaules.

Venait-elle vraiment de prendre sa plaisanterie au sérieux ?

« Ça n'est arrivé qu'une fois ! » s'exclama-t-elle en rougissant furieusement, ramenant alors immédiatement l'esprit de Tybalt à un souvenir d'enfance.

Il se revoyait, à huit ans, contraint par sa cousine à enfiler une robe rouge carmin. En fait, il se souvenait surtout de la raclée mémorable qu'il avait reçue de son père par la suite.

« Je… » commença-t-il maladroitement.

« Pourtant, tu étais très séduisant dans cette tenue, » répliqua-t-elle, un sourire espiègle étirant ses lèvres.

Leurs regards se croisèrent à nouveau, et dans les prunelles pétillantes de Juliette, Tybalt vit toute la malice dont elle était capable. Bien sûr qu'elle avait compris sa plaisanterie. Elle s'amusait simplement de lui. Tybalt soupira, s'appuyant contre l'encadrement de la porte.

« Je te rejoins au jardin suspendu. Il faut que… je me change avant. »

Juliette le dévisagea enfin, réalisant soudain sa tenue peu appropriée. Le rouge lui monta instantanément aux joues.

« Dé… Dépêche-toi. J'ai quelque chose à te montrer. »

Elle se détourna rapidement, ses joues toujours rosées, et disparut dans les escaliers en colimaçon, son rire flottant dans l'air. Un sourire effleura alors les lèvres de Tybalt tandis qu'il refermait la porte de sa chambre derrière lui.

Elle allait définitivement le rendre fou. À chaque instant passé en sa compagnie, réclamant son attention, il ne pouvait s'empêcher de rêver qu'un jour, peut-être, elle l'aimerait. Après tout, dans certaines familles d'Italie, il n'était pas rare que des cousins se marient… et son oncle comme sa tante l'adoraient.

Un rire sans joie s'échappa de ses lèvres. C'était insensé de croire que le Comte Capulet lui accorderait la main de Juliette. Tybalt n'avait rien. Ni fortune, ni pouvoir, ni terres. Il n'était qu'un orphelin, recueilli par le comte plus par devoir que par amour pour son défunt frère.

Chassant ces pensées sombres, il se déshabilla rapidement, abandonnant son pantalon et sa chemise de flanelle pour revêtir un pantalon de cuir noir et une chemise blanche fraîchement lavée. Par-dessus, il enroula un manteau bordeaux, ajustant à sa ceinture la dague, seul héritage laissé par ses parents. Enfin, il enfila ses bottes brillamment cirées avant de quitter la pièce, le cœur un peu plus léger à l'idée de ce que la journée pouvait lui réserver.

oOo

Ses pas martelaient presque les marches de pierre tandis qu'il gravit l'escalier menant au toit. Il jura entre ses dents, légèrement essoufflé par la montée, lorsqu'il atteignit enfin le sommet. L'air du matin lui parvint, mêlé à une brise subtilement brûlante, annonciatrice des chaleurs à venir. Il s'adossa un instant au mur, prenant le temps de reprendre son souffle, avant de s'aventurer dans les jardins suspendus.

Cet endroit… c'était un véritable paradis terrestre, une oasis de verdure où les colonnes de lierre se mêlaient harmonieusement aux arches de rosiers, chaque recoin débordant de plantes aux fleurs éclatantes et exotiques. Un espace façonné avec amour et soin, que Juliette chérissait plus que tout. Son père, le Comte Capulet, avait aménagé ce jardin à sa naissance, comme un présent pour sa fille unique, une sorte de sanctuaire. Depuis lors, Juliette l'avait fait sien, y trouvant refuge chaque fois que le monde extérieur lui semblait trop cruel ou incompréhensible.

Alors qu'il avançait entre les feuillages luxuriants et les sentiers cachés, Tybalt ne pouvait s'empêcher de se perdre dans ses souvenirs d'enfance. Il se rappelait les jeux innocents qu'ils partageaient ici, sous l'œil bienveillant de la Nourrice. Des parties interminables de cache-cache, de chat, ou ces moments suspendus où ils s'allongeaient côte à côte dans l'herbe douce, les yeux levés vers le ciel, à observer les formes étranges que prenaient les nuages.

Il n'avait qu'à fermer les yeux pour entendre encore le rire cristallin de Juliette résonner dans l'air, aussi léger qu'une brise d'été. Ce son avait toujours eu le pouvoir de réchauffer son cœur, de chasser les ombres qui l'envahissaient trop souvent. Sa Juliette…

Un sourire se dessina sur ses lèvres à cette pensée. Oui, sa Juliette, car dans ses rêves les plus secrets, elle lui appartenait. Pourtant, au fond de lui, il savait que cette illusion était fragile, éphémère, tout comme ces fleurs qui, en cet instant, s'épanouissaient sous le soleil, mais finiraient par faner sous le poids des saisons.

Tybalt inspira profondément, laissant le parfum des roses envahir ses sens. Puis, il continua d'avancer, guidé par cette même lueur d'espoir qui brillait dans le fond de son cœur. Juliette l'attendait sûrement quelque part parmi ces merveilles, prête à lui montrer ce qu'elle avait promis. Et pour un moment, aussi court soit-il, il se permettrait d'oublier la guerre, la haine, et tout ce qui les séparait.

«Dans le verger où s'épanouissent les fleurs,
Là où l'aube danse et berce les heures,
Deux oiseaux, en vol, se cherchent, s'effleurent,
Leurs chants d'amour résonnent, doux chanteurs.
»

Se stoppant entre deux grandes arches de roses, Tybalt la vit enfin. Juliette était là, assise gracieusement sur le rebord de la fontaine, l'air rêveur, ses doigts effleurant distraitement la surface scintillante de l'eau. Le doux clapotis des gouttes rebondissant sur la pierre résonnait en harmonie avec sa posture sereine. Elle écoutait avec une attention ravie les vers que déclamait son ami poète, un jeune homme frêle et passionné, dont les mots cherchaient à capturer l'éclat du monde.

Le visage de Juliette, baigné par la lumière dorée du matin, semblait plus angélique que jamais. Ses yeux, fixés sur un point imaginaire, étaient remplis de cette lueur de fascination innocente qu'elle réservait à tout ce qui touchait à l'art et à la beauté. Chaque fois qu'il la voyait ainsi, perdue dans ses pensées, Tybalt sentait son cœur se serrer d'une manière inexplicable, comme si le monde autour de lui s'effaçait pour ne laisser place qu'à elle.

Elle portait aujourd'hui une robe légère aux teintes pastel, qui dansait délicatement autour de ses jambes sous l'effet de la brise. Le contraste entre sa beauté sereine et l'intensité de ses propres émotions devenait presque insoutenable. Elle était là, à quelques mètres de lui, et pourtant elle semblait si lointaine, comme une étoile dans le ciel. Une étoile qu'il ne pourrait jamais atteindre, peu importe à quel point il tendait la main.

Tybalt resta immobile un instant, figé par l'émotion, regardant celle qu'il aimait sans pouvoir lui avouer. Elle lui apparaissait si loin de son monde, celui des duels, des rancœurs et des lames, et pourtant il la désirait ardemment. C'était pour elle, toujours pour elle, qu'il voulait être un homme meilleur, bien qu'il se sente prisonnier de ce rôle qu'on lui imposait depuis sa naissance.

La voix mélodieuse du poète s'éleva de nouveau, mais pour Tybalt, ce n'était qu'un murmure lointain. Son regard ne quittait plus Juliette, et il savait que, même s'il venait de la retrouver, elle lui échapperait à nouveau, portée par des rêves auxquels il ne pouvait prétendre.

«Ô tendre amour, parfum de l'azur,
Tel un merle qui flatte l'aube claire,
Chaque pétale, en doux murmures,
S'éveille à l'étreinte d'une brise légère.
»

Il n'avait jamais compris l'utilité de telles chimères composées de mots et d'idiotie. Il aurait presque vomi ces mensonges et ces beaux discours faits à base de métaphores et de sous-entendus imbéciles. L'amour se vivait, se ressentait, aussi douloureusement que passionnément. Tybalt était de ceux qui aimaient avec sensualité et violence. Il aimait avec les gestes et non les mots, préférant l'éclat des regards échangés aux ballets langoureux des vers.

Le poète poursuivait son récit, mais pour Tybalt, ses paroles n'étaient que du vent, emportées par le souffle léger de la brise. Sa colère sourde s'éveilla à chaque métaphore insipide, chaque image d'un amour idéalisé qui ne connaissait ni les cris ni les larmes. La réalité était bien plus complexe, bien plus cruelle. Il se souvenait des combats, des nuits passées à ruminer son désir, à déchirer l'espace entre eux comme une lanière de cuir. Il connaissait la douleur des promesses non tenues, des attentes qui s'évanouissaient au gré des rivalités.

Les doigts de Juliette glissèrent sur le bord de la fontaine, et il se demanda un instant si elle percevait la profondeur de son tourment. Si elle savait qu'il la voyait, elle, la colombe, virevoltant avec légèreté dans un monde où il se sentait piégé comme un faucon en cage. Son cœur battait dans sa poitrine, chaque pulsation résonnant comme un tambour de guerre.

«Les roses, parées de rosée en pleurs,
S'inclinent au souffle d'un doux frisson,
Les cœurs, entrelacés comme fleurs en fleurs,
S'unissent en chants, en douce fusion.
»

Mais Juliette… Il savait qu'elle tomberait dans les bras du premier venu qui lui raconterait ces mensonges poétiques, qui serait capable de dire des mots d'amour emplis de mal de vivre. Elle irait vers celui qui, avec des paroles envoûtantes, lui ferait croire que le monde était fait de douceurs et de promesses. Tybalt se sentait consumé par une rage sourde, conscient qu'elle valait le risque d'être sauvée, d'être aimée, d'être plongée dans un bonheur incandescent, au point de se brûler les ailes.

Cette pensée l'assaillait comme une marée montante, l'envahissant de son acide douleur. Il ne pourrait pas la sauver, il le savait. Son cœur battait à l'unisson de sa colère, une colère dirigée contre cette fragilité qu'il chérissait tant. La peur de la voir partir, de la perdre à jamais, était une torture qu'il ne pouvait plus supporter. Ses mains se contractèrent en poings, et il se sentait prêt à combattre non seulement pour lui-même, mais pour elle, pour la préserver de ces illusions.

«Quoique les vents soient rudes et cruels,
Rien ne saurait troubler ce bel accord,
Car l'amour, tel l'oiseau dans le ciel,
Vole librement, au-delà de la mort.
»

Alors que la jeune fille applaudissait sans ménagement son ami, Tybalt s'avança vers eux, aussi silencieusement qu'un chat s'approchant de sa proie. Ce ne fut que lorsque le poète le vit que le blond signala enfin sa présence d'une voix bien plus froide que celle de la matinée :

« Je suis là. »

Sans demander son reste, le troubadour salua son amie d'un baise-main avant de quitter prestement le toit, prétextant moultes choses à faire. La vérité étant que lui et Tybalt se haïssaient l'un l'autre, se considérant respectivement comme une brute et un lâche.

La jeune Capulet, elle, se leva avec joie et s'avança vers son cousin tout en s'exclamant :

« Te voilà enfin !

- Excuse-moi, je me suis légèrement perdu dans toute cette… verdure. »

À peine le poète avait-il franchi la porte menant aux escaliers que la voix de Tybalt s'était adoucie, ne devenant qu'un murmure rauque et tendre.

« Que voulais-tu me montrer ? »

Elle sembla hésitante, plongeant son regard dans la profondeur de ses yeux hazel. Elle se mordilla légèrement la lèvre inférieure, témoignant de sa gêne, avant de murmurer :

« Rien en particulier. En fait… je crois que je voulais simplement éveiller ta curiosité pour t'obliger à venir me rejoindre. Je voulais simplement passer du temps en ta compagnie, et pour m'assurer que ce soit le cas… j'ai menti. »

D'abord surpris, Tybalt ne put retenir un léger rire de franchir ses lèvres sous le regard mi-étonné, mi-soulagé de sa cousine. Puis, toujours sur le ton de la plaisanterie, il asséna :

« Plus sournoise que Mercutio.

- Tybalt !

- Excuse-moi, mais je ne te pensais pas capable de mentir ! »

La jeune fille, légèrement vexée, s'avança vers lui d'un pas souple, avant de poser son index contre son torse, ses joues légèrement rosies.

« Tu me sous-estimes beaucoup !

- Absolument pas ! Je sais que tu peux parfois être une vile sorcière ! »

Cette fois, Juliette écarquilla les yeux, surprise, avant de pousser son cousin et de lui asséner un léger coup sur l'épaule.

« Idiot ! »

Tybalt se mit à rire de bon cœur en fixant sa cousine, la voyant s'énerver légèrement sous ses yeux, ne la rendant que plus mignonne encore. Il aimait ces moments de légèreté, cette complicité qui semblait éclipser les ombres du monde extérieur.

« Je ne savais pas qu'une sorcière pouvait être si charmante, » lança-t-il, un sourire malicieux aux lèvres.

Juliette plissa les yeux, son sourire trahissant une malice naissante.

« Fais attention, je pourrais bien te jeter un sort !

- Je crains pour ma vie, » répliqua-t-il avec un clin d'œil.

Les éclats de rire résonnèrent dans le jardin suspendu, créant une bulle de bonheur dans laquelle le temps semblait s'arrêter. Pour un instant, loin des conflits et des obligations, ils n'étaient que Tybalt et Juliette, cousins, complices, et peut-être plus, enivrés par la douceur de leur lien.

« Tybalt ! Cesse de te moquer de moi. »

L'homme tenta de se calmer et de reprendre son sérieux, et la jeune femme en profita pour toucher son torse de sa paume avant d'esquisser un sourire sournois.

« Et je parie d'ailleurs que tu es tellement lent que tu es incapable de me rattraper ! »

Relevant ses jupons et dévoilant ainsi ses pieds nus, Juliette se mit à courir dans le jardin, disparaissant sous le regard surpris de Tybalt. Il ne réalisa pas tout de suite ce qu'il se passait, et ce n'est qu'en entendant son rire enfantin qu'il sortit de sa torpeur. Se débarrassant de son manteau et de sa dague qu'il posa au pied de la fontaine, à côté des chaussures de Juliette, il se mit à son tour à courir dans les jardins, suivant le rire de la jeune femme.

Suivant l'ange blond à la trace, il finit par l'apercevoir vers ce qu'ils appelaient durant leur enfance « la porte enchantée ». C'était une arche enveloppée de glycine qui donnait au jardin un air enchanteur. Rapidement, il se cacha derrière le seul arbre qui avait poussé sur les toits du château, un magnifique saule pleureur que Juliette adorait et qui avait été témoin de bien des jeux. Tentant de calmer sa respiration, il tendit l'oreille en quête du moindre son, et il ne fallut pas longtemps pour que la jeune fille passe à côté de lui. Sans ménagement, Tybalt lui saisit le poignet, et elle se débattit en riant. Tout en reculant, elle ne fit pas attention où elle mettait les pieds et trébucha sur une racine, tombant ainsi en arrière, entraînant son cousin dans sa chute. Avec rapidité, Tybalt glissa l'une de ses mains sous la tête de sa cousine avant qu'elle ne percute le sol.

Lorsqu'ils rouvrirent les yeux, essoufflés, Tybalt se releva lentement, faisant attention au moindre signe de douleur dans son corps, mais il n'en était rien. Redressant alors son regard sur Juliette, il ne remarqua qu'à cet instant à quel point ils étaient proches. Leurs souffles s'entremêlant pour ensuite percuter le visage de l'autre.

« Je… Tu n'as rien ?

- Non, je vais bien. »

Tous deux étaient troublés, et alors que Juliette allait murmurer quelque chose, Tybalt, lui, se dégagea rapidement pour s'allonger à côté d'elle dans l'herbe tendre. Ils restèrent alors ainsi, à fixer le feuillage du saule voltiger dans l'air. La main de la jeune fille chercha celle de son cousin un instant avant qu'elle n'entrelace ses doigts aux siens avec tendresse. Le matin, bien entamé, s'était écoulé à une vitesse prodigieuse, et au vu du positionnement du soleil dans le ciel, l'heure du déjeuner approchait.

« Dis-moi, cousin ? »

« Oui ? »

Il haïssait lorsqu'elle lui renvoyait leur lien du sang en pleine face. Il haïssait encore plus ce simple tic de langage que les Montaigu eux-mêmes.

« Crois-tu que je trouverais l'amour un jour ? »

Il crut s'étouffer, son corps se raidissant. Il lâcha sans le vouloir la main de Juliette. Son regard restant pourtant fixé sur les feuillages dansant au gré du vent. Tybalt se sentait soudainement blêmir.

« L'amour ? »

Elle se mordilla encore une fois la lèvre avant de se tourner légèrement vers lui, les yeux brûlant de curiosité. Il poussa alors un soupir douloureux, ravalant son envie irrésistible de lui répondre :

« Tu sais, Juliette, tu l'as déjà trouvé, je t'aime depuis que j'ai quinze ans. » Mais il se retint, préférant planter ses prunelles hazel dans celles azur de celle qu'il aimait.

« Juliette…

- Je sais, c'était complètement idiot.

- Non ! »

La jeune femme, d'abord contrariée, releva alors ses yeux sur lui, réellement curieuse cette fois de connaître sa réponse.

« Si toi, tu ne trouves pas l'amour, alors personne au monde ne le trouvera jamais. »

Un silence les enveloppa, et Tybalt se releva, fuyant le regard perdu dans le vague de sa cousine. Elle semblait si innocente et perdue à la fois, une vision insoutenable pour son propre cœur, meurtri de la voir déjà rêver de le quitter. Puis, alors qu'il lui avait tourné le dos pour regarder l'horizon, sa voix fluette résonna à nouveau dans l'immensité fleurie.

« Est-ce un mensonge ? »

Il ne put réprimer un sourire qui naquit sur ses lèvres et il tourna son regard vers elle tandis que la jeune femme s'était mise à genoux et le fixait, crédule.

« Je suis incapable de te mentir, ma fleur. »

Elle lui esquissa alors un immense sourire, teinté d'une tendresse qui le fit frissonner. Puis, un murmure des plus tendres franchit ses lèvres, assénant le coup de grâce au cœur déjà bien abîmé de Tybalt.

« Je suis heureuse de t'avoir comme cousin. »

Il poussa alors un soupir agacé et se détourna de sa cousine, ses poings se serrant en spasme distinct. Il se releva sans un mot, fit quelques pas dans le jardin, balayant du regard les différentes jardinières, lorsque son regard fut attiré par une fleur rouge au cœur noir. Un coquelicot ? C'était, et il le savait mieux que quiconque, la fleur préférée de Juliette. Il s'en approcha alors et la cueillit avec une délicatesse que seule Juliette lui connaissait, puis, il revint à elle. À peine eut-elle vu la fleur si fragile qu'elle esquissa un grand sourire.

Lentement, Tybalt s'accroupit face à elle et glissa son présent dans les cheveux blonds de la jeune femme, coinçant la tige derrière son oreille.

Rougissante de ce geste, Juliette le remercia d'un sourire, puis, elle se leva à son tour avant de venir plaquer son dos contre le tronc de l'arbre, regardant l'horizon. Tybalt, quant à lui, continua de fixer la jeune femme. Il le vit alors clairement, le changement opéré sur ses traits. La douceur et l'espièglerie quittèrent son regard pour ne laisser place qu'à la mélancolie. Elle semblait complètement ailleurs et ici à la fois. Son cœur lourd avait besoin de parler, mais les mots semblaient rester coincés dans sa gorge. Alors, comme pour l'encourager, Tybalt s'avança vers elle et caressa avec tendresse sa joue pâle. Ce simple geste la fit légèrement rougir, mais débloqua miraculeusement la parole à la jeune fille.

« Ce soir, on fête mon anniversaire. »

Il se détourna d'elle un instant avant de se laisser tomber dans l'herbe, se pinçant l'arête du nez tout en fermant les yeux, sachant pertinemment qu'il ne pourrait lui mentir. Il n'avait jamais menti à Juliette.

Après un moment de silence, il racla sa gorge, en quête de courage, avant de murmurer :

« Oui, j'étais heureux d'avoir seize ans. »

La jeune fille se rapprocha de lui et vint s'asseoir à ses côtés, ses jupons salis effleurant sa main dans une douce caresse.

« Pourquoi ? » demanda-t-elle, son regard brillant de curiosité.

« Car seize ans signifiaient que j'étais désormais libre. Que je pouvais faire ce que je voulais sans avoir à rendre de comptes à ton père. Seize ans signifiaient ma liberté, le début de ma vie. » Il marqua une pause, le poids de ses mots pesant lourdement dans l'air. « Mais pour toi, c'est différent… »

Juliette baissa les yeux, sa voix se faisant plus fragile.

« Et désormais… Seize ans signifie la fin ma liberté. »

Tybalt écarquilla légèrement les yeux avant de tourner son visage vers elle. Il la vit fixer l'horizon, perdue dans une pensée sombre.

« Juliette, non ! Tu as une vie merveilleuse devant toi !

- Nous savons tous deux que mes seize ans signifient que je suis en âge de me marier. »

Il voulut contester, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge. Il laissa échapper un soupir, le cœur lourd.

« Je… » commença-t-il, cherchant une échappatoire à cette conversation qui le déstabilisait.

« … As-tu déjà aimé une femme, Tybalt ? »

Elle leva enfin les yeux vers lui, et il ne put s'empêcher de remarquer qu'ils étaient légèrement rougis par les larmes qu'elle s'efforçait de retenir. Elle semblait si fragile, si douce, qu'il avait l'impression que sa simple présence à ses côtés menaçait de la briser. Ou de la contaminer par sa propre haine.

« Que… Eh bien… Oui. Oui. »

Il détourna son regard d'elle, fixant désormais l'horizon, ses joues rougissantes légèrement, tandis que la confession flottait dans l'air comme un spectre.

« J'aime la même femme depuis tellement de temps, Juliette. »

Le silence qui suivit était assourdissant, une promesse non dite qui s'accrochait entre eux. Il savait que l'aveu, bien que doux, avait un goût amer. Son cœur, déjà en lambeaux, menaçait de se briser complètement sous le poids de ce secret partagé.

Je t'aime depuis toujours, pensa-t-il, mais ces mots restèrent coincés, inaccessibles, alors qu'il observait, du coin de l'œil, les ombres jouer sur le visage de sa cousine. Dans cette réalité troublée, où l'amour était un luxe qu'ils ne pouvaient pas se permettre, Tybalt se demandait s'il ne pourrait jamais lui révéler l'intensité de ses sentiments, sans risquer de la perdre à jamais.

« Ah, qui est-elle donc ? Est-ce que je la connais ? »

L'homme écarquilla légèrement les yeux, troublé par l'intérêt soudain de sa cousine pour les méandres de sa vie amoureuse. Une pâleur fugace l'envahit alors qu'elle saisissait sa main avec une ferveur pressante. Comment allait-il se tirer de ce bourbier, qu'il avait lui-même creusé ?

« Je te trouve bien curieuse, jeune fille… »

Il aurait voulu revêtir un ton taquin, mais sa voix n'était qu'un souffle tremblant. En cet instant, son cœur battait la chamade, angoissé à l'idée que son secret ne soit exposé aux yeux du monde.

« Juliette ! »

À l'appel de la Nourrice, leurs yeux s'élargirent de surprise, et Juliette se teint d'un rouge vif, piquée de gêne.

« Mince ! »

Rapidement, la jeune fille se glissa derrière le tronc noueux du saule, entraînant son cousin dans une étreinte silencieuse. Ils se trouvèrent alors plaqués l'un contre l'autre, le souffle court, une envie presque maladive de rire les envahissant tandis qu'au loin résonnait l'appel de leur Nourrice.

« Qu'as-tu encore fait pour échapper ainsi à son regard ? » murmura Tybalt, la voix teintée de malice.

« Encore ? Mais je n'ai rien fait ! Je désirais simplement échapper à sa requête », répondit-elle, une lueur d'espièglerie dans les yeux.

Le blond éclata de rire, observant la petite silhouette qui se tenait sous lui, le visage empourpré par l'embarras. À peine son rire s'éleva-t-il dans l'air frais que la main fine de Juliette s'apposa sur ses lèvres, lui imposant le silence.

« Je n'ai rien fait ! Je… Elle va encore m'imposer ces interminables essayages de robes jusqu'à ce soir, et l'envie m'en fuit. Et puis, Mère ne tardera pas à arriver, à me parler de mariage, de mon Père et d'elle. Oh, tu ne peux imaginer à quel point je n'en ai aucune envie ! »

Avec délicatesse, Tybalt retira sa main de ses lèvres pour venir déposer un baiser sur la paume délicate de Juliette. Ce simple geste, à la fois doux et brûlant, enflamma ses lèvres tout autant qu'il teintait de rose le visage de la jeune femme. Si proches en ce moment suspendu, il pouvait sentir le souffle léger de Juliette caresser son torse. Elle était si petite… Il aurait pu poser son menton sur le sommet de son crâne. Alors qu'il l'attirait à lui, enserrant sa taille d'un bras protecteur, la voix de la Nourrice résonna derrière eux, les faisant sursauter comme deux enfants pris au piège dans un moment volé.

« Pensiez-vous vraiment pouvoir vous cacher de moi encore longtemps ? » Tous deux se retournèrent en un même mouvement, le regard figé sur la Nourrice, l'air hébété. À cet instant, elle revit devant elle ses deux chenapans de huit et quatre ans, insouciants et rieurs.

« Tybalt, tu es l'aîné ! Tu as la responsabilité de ta cousine. »

Le jeune homme esquissa un tendre sourire à l'adresse de la petite femme ronde, dont le visage rayonnait de tendresse. S'approchant d'elle, il déposa un baiser léger sur son front, dans un geste presque filial. Elle émanait une douceur infinie, un amour si pur qu'il ne pouvait la dissocier de l'essence même de la gentillesse et de la bienveillance.

« Bonjour, Nourrice. Je suis désolé, mais tu sais comme il est difficile de dire non à Juliette. »

« Tybalt ! »

Le blond se tourna vers sa cousine, la présence bienveillante de leur Nourrice lui permettant de retrouver contenance. Il lui adressa un sourire taquin avant d'enrouler un bras autour des épaules de celle qui lui avait donné le sein.

« Tu devrais un peu écouter Giovanna. Elle prend de l'âge, tu sais, il faut la ménager ! »

La Nourrice écarquilla les yeux, se tournant vers celui qu'elle avait chéri comme un fils. Elle commença à le frapper doucement, ses gestes empreints de tendresse, ce qui fit éclater de rire la jeune fille, à deux pas d'eux.

« Petit vaurien ! »

Leurs rires s'envolèrent dans les jardins suspendus, les projetant douze ans en arrière.

Giovanna avait été engagée par le Comte et la Comtesse Capulet pour l'enfant à naître, qui, hélas, fut un bébé mort-né. Tybalt vit le jour peu après, et elle l'éleva comme son propre enfant, les parents du blond étant bien trop engloutis par leur haine pour offrir un amour quelconque à leur fils. Giovanna était ainsi devenue l'incarnation de l'amour pour lui, et il lui rendait bien cette tendresse.

« Juliette, je te cherche depuis des heures, mon enfant. Tu ne peux pas fuir éternellement ! Dépêche-toi, nous devons achever ta robe pour ce soir et te préparer ! Par tous les cieux, ta mère est folle de rage ! »

La jeune femme leva les yeux au ciel, mais suivit sa Nourrice vers les escaliers, non sans jeter un dernier regard penaud à son cousin. Giovanna s'arrêta à mi-chemin, se tournant vers Tybalt :

« Quant à toi, jeune homme, hâte-toi aussi de te préparer, avant que je ne me sente obligée de venir t'aider. »

Il retint un faux hoquet de peur, ce qui fit sourire la femme avant qu'elle ne disparaisse dans les escaliers. Peu importait son âge, cette femme aux cheveux d'ébène continuerait toujours de le couvrir d'un regard protecteur. Alors qu'il se dirigeait vers la fontaine où il avait laissé ses affaires, Tybalt laissa échapper un énième soupir, douloureux. L'odeur de Juliette emplissait encore ses poumons, et son cœur battait à tout rompre.


Laissez moi une petite review, et je me ferais un plaisir de vous répondre dans le prochain chapitre ! :) A demain soir !

~R0manciere