- Severus? Demanda Dumbledore d'un voix calme mais qui trahissait une certaine inquiétude. Êtes-vous en difficulté?
- C'est une affaire privée, se crispa Rogue qui avait baissé d'un ton. Ne vous en mêlez pas.
Dumbledore observa Rogue de la tête aux pieds, posant également son regard averti sur sa Marque des Ténèbres. Ce n'était pas son seul tatouage ; Chouta avait remarqué qu'il arborait également le symbole des Reliques de la Mort sur l'autre avant-bras...
D'un geste de baguette magique, le maître des potions ajusta une chemise blanche légèrement froissée. Pendant ce temps, le directeur de Poudlard se tenait là, impuissant, regardant Chouta par-dessus les verres de ses lunettes, ses yeux bleus toujours aussi perçants. On aurait dit qu'il attendait qu'elle prenne la parole, qu'elle s'explique, mais Chouta était simplement muette après cette énième confrontation... Ses rencontres avec Rogue avaient toujours une certaine forme de violence, ça devait toujours tourner au vinaigre.
- Tant que je serais encore le directeur de cette école, il restera de mon devoir de m'assurer que tout va bien. Le jour de Noël n'est jamais un bon moment pour se disputer...
- Au cas où cela vous aurais échappé, je n'ai pas l'esprit de Noël, rétorqua Rogue.
Le directeur sourit avec bienveillance malgré le comportement odieux de son collaborateur.
- Oh non, cela ne m'a pas échappé, je sais cependant que vous avez gardé toutes les lettres de Noëls que je vous aient écrites. Vous devriez profiter de Noël, Severus, surtout à votre jeune âge...
Elle pouvait parfaitement imaginer Dumbledore écrire des lettres excessivement niaises, ornées de carton kitsch, de cœurs scintillants, de paillettes et peut-être même accompagnées de petits cadeaux et de bonnets rouges...Sans oublier une petite mélodie attachée, pourquoi pas. Elle ne put s'empêcher de se moquer intérieurement devant cette image qu'elle se faisait dans sa tête...
Mais comme s'il avait lu dans ses pensées, Rogue balaya Chouta du regard avec une lueur de contrariété dans les yeux.
- Je suppose que vous avez raison, Dumbledore, dit-il d'une voix fausse.
Vous vouliez me voir?
- Oui, oui, répond-t-il simplement en passant sa main ridée dans sa longue barbre argentée. Je voulais vous voir seul à seul, mais dans un premier temps, la présence de mademoiselle Chouta ne sera pas de refus. Si bien entendu elle est d'accord...
- Je le suis, professeur Dumbledore, dit Chouta, mi curieuse, mi étonnée, mais aussi bien contente de partir des griffes de Rogue.
Dumbledore leur fit un signe d'invitation à le suivre, il ressemblait à un roi, avec cette robe si chatoyante.
- Est-ce vraiment une bonne idée d'inclure une élève dans un entretien privé? Demanda Rogue alors qu'ils étaient tout les trois dans les escaliers tournant.
- Ce n'est, je le reconnais, pas une sage idée. Mais elle en sait déjà tellement...
- Au point où elle en est, vous avez raison, rajoutez-en une couche supplémentaire, en conclu Rogue de sa voix glaciale.
C'est ainsi que Rogue et Chouta se retrouvèrent assis en face de Dumbledore, dans l'antique bureau directirial de Poudlard. Contrairement aux couloirs, la pièce était chauffée d'une grande cheminée...
Tout d'abord, le professeur Dumbledore demanda à Chouta de lui raconter avec le plus de précision possible ce qui s'était passé durant la nuit où elle et Viktor Krum avaient ramassé Monsieur Croupton dans la forêt interdite.
Ses explications semblaient laisser Dumbledore perplexe, non pas parce qu'il ne la croyait pas, mais parce qu'il ne comprenait pas pourquoi et comment Croupton s'était retrouvé là-bas alors qu'hormis durant les trois épreuves du tournoi, il n'était pas prévu qu'il vienne à Poudlard...
Pendant ce temps, les sourcils de Rogue se fronçaient dans une expression de désapprobation évidente. Ce dernier n'en revenait pas que les élèves de Durmstrang soient à ce point sans fois ni lois depuis le déclin de Karkaroff, insistant au moins une dizaine de fois sur le fait que Chouta et Viktor n'avaient aucun droit de se balader dehors au clair de lune sans un professeur.
- Il est vrai vous avez été chanceux, Viktor et vous, cette nuit-là, approuva Dumbledore après les remontances de Rogue. Il s'agit de sécurité. Ces règles, que j'ai moi-même établies, sont la pour assurer la protection, vous ne devez pas voir ça comme une punition. La forêt interdite est un lieu dangereux, surtout la nuit.
Le regard de Chouta se baissa légèrement...Dumbledore était un sorcier qu'elle respectait beaucoup depuis la fois où il l'avait trouvé devant le miroir de Riséd.
- Je suis parfaitement consciente des dangers auxquels nous nous sommes exposé, admit Chouta. Mais professeur Dumbledore, sauf votre respect, si nous n'avions pas été dehors ce soir-là, seul Salazar sait ce que Monsieur Croupton serait devenu.
- Vous l'avez sortit d'un grave danger,
c'est pourquoi j'avais décidé de vous laissez partir sans faire plus d'histoires...Merci pour ton témoignage, cela met en lumière quelques coins sombre voir absent du témoignage que Monsieur Croupton m'avait livré ce soir-là. Son esprit était bien trop confu pour me laisser y pénétrer.
Rogue croisa les bras, les lèvres pincées.
- Malgré ses...Préoccupations, murmura-t-il d'un ton sombre, Igor doit revoir ses politiques de surveillance. Le manque de supervision semble être devenu un problème récurrent. Je lui en ai déjà fait part à maintes reprises, mais il semble considérer ses élèves comme des êtres invincibles. Il joue sur le fil du rasoir...Ce n'est qu'une question de temps avant qu'il se coupe.
Dumbledore acquiesça, prenant en considération l'avis de Rogue.
- C'est en effet une question que je vais devoir aborder avec le Professeur Karkaroff lors de notre prochaine réunion. Pour l'heure, Miss Chouta, j'aimerai éclaircir un point dernier point avec vous.
- Tout ce que vous voudrez, professeur, dit Chouta avec politesse.
- Comme vous me l'avez très bien souligné, Monsieur Croupton prétendait avoir été attaqué par un loup-garou.
Les traces de griffes retrouvées sur ses vêtements pourraient en effet correspondre...D'après vous, pourquoi a-t-il prétendu que cet agresseur n'était nul autre que le complice de son fils?
- C'est la partie la plus inexplicable pour moi aussi, répondit Chouta d'une voix perplexe. Viktor aussi avait bien du mal à saisir le sens de tout cela... J'ignore pourquoi il pense que son fils - surtout mort - voudrait envoyer un loup-garou pour essayer de le tuer. Il avait même dit que son fils voulait jouer à cache-cache avec lui dans la forêt.
Sa culpabilité d'avoir envoyé son fils unique mourir à Azkaban doit sûrement lui jouer de très mauvais tours.
- Démêler le vraisemblable de l'impensable est une entreprise bien difficile, songea Dumbledore. Quoi qu'il en soit, suffisamment de preuves ont été rassemblées pour en conclure qu'il y a bien en effet un ou plusieurs loup-garou dans la forêt.
- Je ne comprends pas comment c'est possible, dit Rogue d'une voix neutre. J'ai néanmoins remarqué ces empruntes sur la terre.
- J'en ait vue une également, fit remarquer Chouta.
- Je ne le comprends pas non plus, je sais qu'Hagrid fait un très bon travail, dit Dumbledore. Une telle chose n'est plus arrivée depuis bien longtemps, nous devons agir avec prudence, nous ne pouvons ignorer les signes que nous avons reçus. Je vais prendre des mesures pour assurer la sécurité de tous les élèves, quel que soit leur établissement d'origine. Vous devez savez, Miss Chouta, qu'une seule morsure suffit pour se transformer en loup à chaque pleine lune pour le restant de vos jours. Monsieur Croupton a été très chanceux...
- J'en ait conscience, je tacherai à l'avenir de ne plus m'approcher de la forêt, je ferais passer le message aux élèves de mon école.
Chouta se sentait responsable de ses camarades de Durmstrang, elle se promit de tout faire pour qu'ils soient en sécurité. Il était peut-être temps qu'elle s'inspire du caractère protecteur de Viktor.
- Bien, dit Dumbledore d'une voix douce.
Très bien...Un message sera envoyé aux directeurs de toutes les maisons et des écoles. Des Aurors feront des patrouilles régulières aux abords de la forêt les jours de pleine lune. Jusqu'à nouvel ordre, le couvre-feu aura lieu à dix-huit heure du soir jusqu'à la fin de l'heure d'hiver. J'espère ne pas avoir gâché votre matinée, Miss Chouta. Je vous libére, joyeux Noël.
- À vous aussi, professeur Dumbledore.
Sans même jeter un regard en direction de Rogue, Chouta quitta le bureau directorial, l'esprit de nouveau tourmenté par une multitude de questions irrésolues. Les deux hommes semblaient aborder un sujet encore plus grave alors qu'elle fermait la porte derrière elle, mais elle ne chercha même pas à écouter ce qui se disait. Le seul avantage dans cette situation était que personne dans le château n'était au courant de son lien de parenté avec Rogue, à l'exception des fantômes, bien sûr...
Et du professeur Karkaroff.
Elle comprenait mieux à présent certaines remarques qu'il lui avait faites dans le passé. Devait-elle lui en vouloir d'avoir tenté de la protéger de ce dangereux tyran aux allures de chauve-souris?
Les pensées dansaient à un rythme infernale dans sa tête, rendant la journée déjà difficile à supporter, et pourtant, elle n'en était qu'à ses débuts.
