2.
De violents cernes sous les yeux, épuisée, je m'écroulai sur le banc au petit-déjeuner, Harry n'était pas dans un meilleur état. C'était si évident que même Ron arrêta de manger.
-Merde, vous allez pas bien; nous informa-t-il avant de recommencer à dévorer son croissant.
-Si, si, ça va aller; murmurai-je devant ma tasse de thé.
Les volutes d'eau chaude montaient doucement, doucement… Ginny ne tarda pas à nous rejoindre, l'éclair de feu de ses cheveux me tira de mes pensées. Elle se pencha pour embrasser Harry et lui, ne le vit pas, il hocha la tête et retourna à ses tartines. Ginny resta bloquée, puis se tourna vers Hermione, vers moi.
-Euh… Vous devriez peut-être dormir un peu plus là.
Elle prit place sur le banc.
-Peut-être aller voir Mme Pomfresh; proposa Hermione. Elle aura des potions de Nuit-Sans-Rêve. Vous devriez en prendre, pour l'instant.
Harry secoua la tête, je grognai vaguement en avalant une gorgée de thé. Je ne prendrai pas de potions. Pas envie… Le thé avait un goût âpre dans ma bouche, mais je n'étais pas plus réveillée qu'avant. Mon cerveau était embrumé, je me rappelais juste de mes cauchemars, mais je n'avais pas envie de les raconter…
-Et voilà! Nos emplois du temps pour cette merveilleuse année; lança Dean soudain.
Je relevai la tête et tendis la main pour recevoir le mien. Au murmure désespéré de Ron j'en déduisis qu'il était horrible. Je le déroulai.
-Non mais regardez ça, regardez ça! Chaque année c'est pareil, on se retrouve avec Rogue, Rogue, le lundi. Et quand c'est pas en première heure, c'est en dernière heure! Histoire de bien nous achever!
-Ron; le réprimanda Mione.
Trop fatiguée pour ne serait-ce que froncer les sourcils. Je restai devant mon emploi du temps, à lire vaguement les cours, quand, quel enseignant. Mes mains tremblèrent sur le parchemin. Nous avions DCFM aujourd'hui, deux heures, de dix heures à midi. Je levai un regard hanté, qui rencontra celui d'Harry. Il était juste en face de moi. Il souleva la main pour me prendre le poignet. Il serra. Je fermai les yeux. Ce n'était rien. Je devais y aller. Ce n'était pas un mangemort, il ne l'avait jamais été. «Il est aussi inoffensif que n'importe quel sorcier d'Angleterre».
Severus… qui me rassurait en me mettant sur mes gardes…
Nous commencions par une heure de Sortilège avec le petit professeur Flitwick et Hermione ne tarda pas à fendre la foule des élèves devant nous, motivée. Nous la suivîmes en discutant un peu, Ron en pestant beaucoup… Bon cours…
Ensuite, au 3ème étage, pour DCFM. Nous entrâmes dans la salle de cours. Il était là. Debout. Un squelette de troll accroupi à sa gauche. Des étagères. Des livres.
-Hey, y ressemble à celui qu'on a assommé en première année; rigola Ron.
-Celui que tu as assommé; lança Harry. En sauvant Hermione d'ailleurs.
Il s'empourpra, Hermione se retourna, lui sourit.
-Ouais; il grommela.
Nous nous assîmes sur une rangée de cinq places. Ginny à l'autre bout des tables et Harry près de moi. Il nous fixait. Je n'écoutais plus ce que pouvait dire Ron. MacNair nous fixait. «Si c'est un de ces sales mangemorts on va lui faire sa fête !», Seamus et Dean n'étaient pas loin. Neville non plus. «Tu aimes ça, pas vrai?» «Tu en as besoin, hein? Supplie-moi! Supplie-moi! A genou!» «Regarde ça, déjà mouillée.» «Non, attends, ne fais pas… Non!».
J'hoquetai, la lumière, murs, Hermione, Harry, la… classe… Ma main dans ma poche, la broche chaude de Gryffondor.
-Bien… Nous allons commencer…
Il fixa les Serpentard d'un côté de la salle, nous les Gryffondor de l'autre. Ses yeux…
-Je ferai l'appel et lorsque votre nom sera cité je veux que vous me disiez «présent». Vous pourrez signifier à ceux qui ne sont pas là que les portes de ma classe sont magiquement fermées à 10h10 pile et que tout retardataire, pour manquer un cours entier, aura une retenue le soir-même.
Un murmure s'éleva, de protestations, des insultes aussi.
-Tête de boullu va; grogna Ron.
Je souris.
- Basile Theodore, de Serpentard ?
-Ouais, présent.
-Bunny Mildred de Serpentard?
-Présente.
Ensuite un Gryffondor, un Serpentard, la maison donnée à chaque fois.
-Présente; murmurai-je.
Il me fixa un peu plus longtemps que les autres. Et tout le sang eut le temps de disparaître de mon visage. Puis il passa à Harry.
-Harry? Harry Potter?
-Présent.
-Inutile de préciser à quelle maison vous appartenez…
Et son sourire, atroce, dents jaunes, serrées, quand il mordait ma peau. Harry enserra ma main qui tremblait. Il ne dit rien. L'autre reprit l'appel.
Ensuite le cours commença. De la théorie. Pendant deux heures. Je retenais chaque mot, je ne pouvais détourner mon attention, chaque mot de la voix glacée, je mourrais d'avoir détourné mon attention. Toutes ses intonations, ses questions, ses remarques, explications, descriptions. Deux heures. Je ne le regardais pas dans les yeux. Je ne voulais plus savoir que c'était lui, plus le voir, la voix suffisait, je ne voulais plus.
J'avais peur. Je me sentais faible… Pitoyable… J'avais peur. Les cris plus loin, les sanglots. Chaque mot comptait.
L'horloge de la tour Nord sonna. MacNair s'arrêta à la fin de sa phrase.
-La suite de ce cours pour demain,14 heures. Rappelez-vous, je ne tolèrerai aucun retard.
-Fils de troll…
-Ron!
-J'ai rien dit Mione.
-Vous avez intérêt à arriver avec cinq minutes d'avance; prévint-elle en rangeant ses parchemins et son encre, pour tous ses cours! Et non ce n'est pas négociable!
-On va pas en plus attendre devant sa classe comme si on avait envie d'aller à son cours! Hein Harry?
Vague hochement de la tête de sa part, Ron reprit de plus belle.
-C'est pas comme s'il était bon non plus, avec Remus par contre on l'aurait fait sans problème!
Hermione sursauta, comme nous tous, et Ron écarquilla les yeux en se rendant compte de ce qu'il venait de dire… Silence. Je me dépêchai de tout fourrer dans ma sacoche. Les élèves sortaient. MacNair, nous fixait.
-Bon c'est pas tout ça; lança Ginny, mais on va être en retard au déjeuner!
Et puis elle poussa son frère, attrapa les plumes qu'il lui restait encore à ranger pour les fourrer dans son sac, puis attrapa Mione par la main, je suivis avec Harry. La porte de la salle de cours se referma et il était resté à l'intérieur.
Je respirais un peu mieux. Harry restait perdu dans ses pensées tandis que devant nous Ginny babillait je ne sais quoi. Je préférai rester avec Harry.
Le déjeuner passa dans un brouillard. J'étais fatiguée. Mais je ne fis rien exploser en Métamorphose, ni pendant les deux heures de Potions de l'après-midi. Pourtant je tremblais à la fin, clairement, épuisée, complètement, vidée.
La cloche sonna.
-Lumare! Vous resterez ici, les autres sortez.
Je relevai les yeux de derrière mon chaudron, pour rencontrer ses iris noirs sans fond. J'avais oublié, depuis la veille, comme ils étaient hypnotiques. Des élèves passèrent entre nous pour vite déposer leur fiole d'extrait.
-On attend dehors?
J'hochai la tête. Mes amis partirent aussi. La porte se referma.
-Vous vouliez me voir professeur?
Il lança un sortilège de Silence du bout de sa baguette.
-Oui, comment s'est déroulée cette première journée?
Il restait derrière son bureau. Je ressentis violemment la distance, et la fatigue m'engouffra, je voulais être seule.
-Bien.
-Les cours de Défenses contre les Forces du mal?
-Bien…
Je le vis hausser un sourcil et crisper les poings, mais il restait derrière son bureau.
-Est-ce qu'il vous a parlé Lumare?
-Il a parlé à toute la classe, et j'en fais partie professeur.
Il tiqua. Il insista.
-En tête à tête?
-Non.
Il y eut un silence… Puis Rogue siffla:
-Partez.
Je ne restai pas, pris mon sac, ma cape, et me détournai de lui pour sortir de sa classe, je refermai doucement la porte. Mes amis m'attendaient à quelques pas. Je les rejoignis et nous quittâmes les cachots.
-Qu'est-ce qu'y te voulait en fait? Grogna Ron.
J'haussai les épaules et répondis:
-Savoir si tout c'était bien passé… aujourd'hui… je crois?
-Oh, c'est mignon!
Je fronçai les sourcils. Je ne comprenais vraiment pas pourquoi.
-D'accord, dans ce cas tout va bien. Bon, étant donné qu'il nous reste deux heures et demie avant le dîner, je propose que l'on commence nos devoirs.
-Mione! Protesta le rouquin. C'est la rentrée! On va pas faire nos devoirs le jour de la rentrée.
-Et pourquoi pas? Cela t'évitera peut-être d'être en retard constant comme en sixième année.
-J'étais occupé en sixième année; grommela Ron.
-Ah oui? Avec qui, avec Lavande?
Nous laissâmes Ron s'enfoncer dans ses explications tout en suivant à quelques pas sécuritaires le couple qui se disputait encore. Si Lavande était en vie elle en aurait été enchantée. Lavande…
Les sifflements de Nagini, les flammes, l'odeur immonde, les corps couverts de cloques et le feu toujours, on tirait le cadavre d'une blonde par les cheveux. Ce n'était pas Luna, et ce n'était pas Lavande…*
Harry se tenait la tête au dîner, j'étais extrêmement fatiguée et je finis par l'imiter. Ron parlait pour nous.
-Et l'équipe de Quidditch? L'équipe de Quidditch quand même! On peut pas les laisser tomber cette année, surtout maintenant qu'on est plus endurant, plus adroit, plus…
-T'as pas fini, un peu?
-Allez Ginny, tu t'inscris aussi de toute façon!
-C'est encore une bonne excuse pour ne pas faire tes devoirs ça, et ne compte pas sur moi pour t'aider. A dix-sept ans tu devrais tout de même être capable de te débrouiller seul.
-Mione!
Je me sentais nauséeuse. Harry me passa le pichet d'eau, je m'en servis et bus un peu. Les pulsations dans mon crâne s'estompèrent, quelques temps, elles recommencèrent une heure plus tard dans notre salle commune. Il était à peine vingt-et-une heure. Je m'étendis sur un des canapés, il y avait beaucoup d'élèves qui parlaient, ou travaillaient, Ginny et Ron jouaient aux échecs, Hermione lisait, Harry dormait déjà. Je fermai les yeux.
J'hoquetai, tressautai, suppliant, pitié Harry, pitié, par pitié… Sev…
Secouée, voix, des voix, l'odeur d'Hermione. Je rouvris les yeux, les yeux chocolat d'Hermione, des élèves qui nous fixaient.
-Tu devrais peut-être aller te reposer dans notre dortoir; proposa-t-elle.
-Oui… Merci…
Je montai au dortoir, aucune idée de ce que faisaient les autres, je m'écroulai. Silencio. Lourd sommeil, traînée écarlate, du sang et des sanglots. La nuit fut remplie de cauchemars.
Je réussis à me lever, à descendre dans la Grande Salle, à aller en cours, cauchemars le soir-même, je suppliais et pleurais pour que ça cesse, ils revenaient, le sourire de MacNair, l'ombre derrière nous. Cauchemars après, une nuit complète, pour d'autres cauchemars ensuite. Je disais que j'allais bien. Mione s'énervait. Je n'avais pas le temps d'aller voir Severus. Pas le temps. Je ne le regardais pas. Il… me manquait… Tous les jours, chaque minute… J'étais trop loin, trop loin, plus assez de force. Hermione renversa son verre de jus de citrouille un matin, je m'assis, elle me força à me relever et, comme une furie, elle me traîna jusqu'à l'Infirmerie.
-De la nuit-Sans-Rêve! Plein! Il nous en faut Mme Pomfresh, s'il vous plaît!
Elle me fixa, je sentais le poids de son regard, à l'Infirmière. Puis elle parla de demi-dose, d'utilisation progressive, ne pas dépasser quatre semaines, diminuer la posologie.
-Revenez me voir ensuite et nous aviserons.
-Merci beaucoup Mme Pomfresh.
Elle me regarda partir, je n'avais pas dit le moindre mot. Mione tenait les fioles dans ses mains. Nous montâmes les déposer dans le dortoir, ma table de chevet.
Je ne savais pas quoi en penser. Je n'avais pas envie de penser.
Nous eûmes Défense Contre les Forces du Mal l'après-midi et je fixais le vide près du professeur, jamais lui, jamais dans les yeux. Toute l'heure, j'entendais chaque mot, distinctement.
Tout ce qu'il disait, était retenu, le seul, chaque mot.
Dîner dans la Grande Salle. J'allais dormir ce soir. J'empruntai sa cape d'invisibilité à Harry et je courus dans les couloirs encore remplis d'élèves, vers les cachots. Je faillis rentrer dans un groupe de Serpentard et en tanguant manquai de renverser un Serdaigle et sa pile de livres. Je ne me sentais pas bien. Pas très bien. J'haletais, je devais me tenir aux murs pour finir.
-Sev…; murmurai-je. Sev…
Je voulais le voir, juste un peu, quelques secondes, je voulais emporter son image dans mon sommeil. Mes jambes cédèrent, un genou s'écrasa au sol et j'haletais de douleur.
Les chaînes raclaient contre les dalles de pierre, cessaient soudainement lorsqu'elles trainaient dans une flaque de sang, recommençaient. J'avançais, pied, l'autre. Je cognais contre les murs, repartais, recommençais. Pas de lumière dans les cachots. Les chaînes raclaient. Aucune lumière.*
-Lumare!
Tressaillis. Je sentis de longs doigts se saisirent de ma cape, et l'arracher. Regard perdu, je le tournai vers… Severus. Ses robes noires, ses mains fines, sa peau pâle, son regard sombre si froid, si froid.
-Retournez à votre dortoir, vous êtes dans un état pitoyable. Et deux points en moins pour Gryffondor.
-Mais je…
-Levez-vous.
Son ordre claqua sèchement dans le couloir. Je pris appui au mur et me relevai sur des jambes tremblantes. Je devais être pitoyable. Il avait raison.
-Et faîtes un détour par l'Infirmerie, cela vaudra mieux.
-Hermione m'y a déjà emmenée, ce matin, j'ai… ce qu'il faut.
Il hocha sèchement la tête et puis me dépassa pour s'éloigner dans un envol de cape. Je n'eus pas le temps de dire quoi que ce soit d'autre. Je restai immobile, un temps, la respiration difficile. Puis je me baissai pour ramasser ma cape, je la remis et rentrai à ma tour. Severus… Je l'avais revu, au moins une fois.
-Tiens, tu n'en prends qu'une demi-fiole ce soir pour qu'on puisse te réveiller demain. Et demain soir on t'en donnera une entière comme ce sera le week end. Des questions?
-Tu as déjà pensé… à être Médicomage Mione?
Elle grogna un peu, puis me tendit la première fiole. Liquide bleu outre-mer, clapotant.
-La moitié seulement!
Je fis ce qu'elle m'avait demandé puis lui tendis la fiole à moitié remplie, elle la prit, je m'effondrai.
On me secouait. J'ouvris les yeux.
-Lève-toi, on va être en retard! Et on commence par Défense contre les Forces du Mal!
Je cillai… MacNair...
En courant jusqu'à la Grande Salle je pensais à MacNair, son regard froid. Rien comparé à l'œillade glaciale de Severus, la veille au soir. Je m'arrêtai brusquement, laissant Hermione disparaître dans un autre couloir. Severus… Je devais le rejoindre, dans ses appartements, je le ferai le soir-même. Je repris ma course.
Ginny grommela que j'avais l'air un peu mieux, je ne savais pas si c'était exact, Harry avait le nez dans son café, Ron dans la corbeille de viennoiserie.
-Il est quelle heure en fait? Marmonnai-je en me dépêchant de beurrer un toast.
-Hein? Euh, sept heures vingt.
Je grognai:
-Mione, tu m'avais dit qu'on était en retard!
Ma meilleure amie nuança sans scrupule qu'elle avait dit qu'on «allait être en retard». Puis elle croqua dans son pain au chocolat. Ginny ricana.
Nous étions en fait tellement en retard que Hermione eut le temps de lire la Gazette du Sorcier. Je cessai de lui en vouloir lorsqu'elle nous annonça la première bonne nouvelle de la journée:
-Regardez à la une, Bellatrix Lestrange et un réseau d'une dizaine de mangemorts viennent d'être arrêtés par le Ministère!
-Ça c'est cool; marmonna Ron la bouche pleine.
Harry secoua vivement la tête, puis grimaça ayant sûrement ravivé une migraine. Hermione nous lut l'article en entier, puis montra la photo de l'arrestation. Ron reconnut Schackelbot dans le fond.
-Et voilà, les membres de l'Ordre sont partout! Chuchota-t-il fièrement.
-Oui… vous ne trouvez pas ça bizarre d'ailleurs. Rappelez-vous ce que je vous avais dit sur la dernière réunion.
-A mon avis; rétorqua Ginny, ça veut seulement dire qu'il n'y a pas que des incompétents au ministère. Qu'est-ce que tu en penses Harry?
-Y'a plus aucun informateur dans l'Ordre.
-Sauf un; murmura Hermione le regard brillant.
Je bus un peu de mon thé, avant de m'apercevoir qu'elle me fixait.
-Quoi?
Ginny fut plus rapide:
-Quoi? Attends, Rogue?!
-Le professeur Rogue; insista Hermione. Oui, c'est exactement ce que je pense.
Je secouai la tête. Non, ce n'était pas lui.
-Il a dit qu'il ne risquerait pas sa vie, et qu'il n'aiderait pas le ministère.
-Il a dit qu'il n'aiderait pas Threwinckle et les autres aurors qui voulaient se servir de lui, il n'a jamais dit qu'il ne prêterait pas main forte à des aurors compétents comme Shackelbot.
-Il ne ferait pas ça, la guerre est finie! Protestai-je.
Elle me regarda bizarrement.
-Tu devrais peut-être aller lui parler.
Qu'est-ce qu'elle insinuait, que je ne comprenais pas Severus, qu'il aurait risqué sa vie sans me mettre au courant? J'étais encore très fatiguée, mais j'éprouvai une terrible colère, et elle aurait explosée si Harry n'avait pas lâché avant moi:
-Arrête un peu Mione avec tes théories du complot! Les aurors font leur job, la guerre est finie, l'Ordre est fini. C'était notre dernière réunion, Rogue n'a rien à voir avec ça. Il en a assez fait, et nous aussi!
Hermione blêmit et le silence s'abattit sur notre petit groupe. J'aperçus même du coin de l'œil certains Gryffondor se tourner vers nous. Le Survivant avait haussé la voix et ses yeux verts lançaient des éclairs.
-Harry… Ce n'est pas ce que… Je n'ai pas insinué quoi que ce soit.
Il crispa les mâchoires. Il y avait de tels cernes sous ses yeux. Ginny ne devrait vraiment pas tarder à l'emmener voir Mme Pomfresh. Nous reprîmes notre petit-déjeuner dans un silence tendu, Harry ne prit qu'une tasse de café, et Hermione ne s'aventura pas à le lui reprocher.
Mon sang se glaça, comme à chaque fois que j'entrai dans la salle de DCFM, mais je tins tout le cours stoïque, les yeux rivés à quelques centimètres à droite de la tête de MacNair.
Ensuite, les cours se succédèrent. Je parlai à Ginny, je passai un long moment avec Harry pendant la pause déjeuner. Les cours recommencèrent. Severus me manquait… Son ombre se dessinait sur les murs, sa voix glacée résonnait… Mon front était brûlant, j'avais de la fièvre, je ne me sentais pas bien, pas encore, pas tout à fait. Il fallait que je le voie.
Le soir, à vingt heures quarante, j'étais devant ses appartements. Le buste du fondateur des Serpentard face à moi. La porte s'ouvrit toute seule, soudain, puis se referma et la deuxième s'ouvrit. Severus était à son bureau, tout à droite, il corrigeait des posai la cape d'invisibilité sur le fauteuil le plus proche.
-Lumare; siffla-t-il et ce n'était pas très encourageant. Qu'est-ce que vous faîtes ici?
-Je… Je voulais vous voir; avouai-je.
-C'est fait. Vous pouvez quitter ces appartements. Maintenant.
Comme un coup, à l'estomac, j'avais un goût de métal dans la bouche. J'étais blême.
-B-bien.
Je tournai les talons, repartis vers la première porte et puis je me rappelai ce qu'avait dit Hermione le matin-même.
-Vous avez aidé Shackelbot à capturer Lestrange; accusai-je soudain.
-Cela ne vous regarde absolument pas, sortez d'ici; ordonna-t-il.
Non. Je ne pouvais pas. Je me retournai.
-Qu'est-ce que j'ai fait?
Severus crispa violemment les mâchoires. Puis il se leva, sifflant:
-Je vous demande de quitter mes appartements, Lumare. Ceci est un ordre.
Il approchait, et c'était effrayant. Mais je restai figée là où je me trouvais.
-Non.
-Vous pensez; fit-il les mâchoires serrées, que je vais vous permettre de rester dans mes quartiers après que vous m'ayez ignoré et moqué pendant deux semaines.
Il avançait lentement, son regard hypnotique rivé sur moi, comme un serpent. Je fronçai vaguement les sourcils quand ses mots firent sens.
-Mais je n'ai…
-Vos pitoyables excuses ne m'intéressent pas.
Il s'arrêta à cinq centimètres de moi, me surplombant, me dominant, m'effleurant presque.
-Je n'allais pas m'excuser. C'est de votre faute.
Il tiqua.
-Vous êtes resté derrière votre bureau le jour de la rentrée, vous êtes resté loin de moi. J'avais des cauchemars tous les soirs, j'aurais eu besoin de vous, et vous avez juste confortablement attendu que je vienne dans vos appartements. Qu'est-ce que vous croyez? Que c'est à sens unique? Que je suis celle qui s'immisce dans votre vie et que vous devez juste me supporter ?
Je me rendais compte de ma colère au fil des mots qui quittaient mes lèvres. Mais j'étais trop furieuse pour montrer combien j'en étais désorientée. Je lui en voulais.
Severus était muet. Immobile. Je serrai les poings et j'étais en train de penser qu'il avait cherché une excuse, juste une excuse pour se débarrasser d'une Gryffondor aussi faible que moi.
Alors je tournai les talons, récupérai ma cape et quittai ses appartements.
J'étais glacée, je me sentais déchirée. Mais j'eus la présence d'esprit de me draper dans la cape d'invisibilité avant d'arriver dans le couloir, et je me figeai bientôt.
MacNair rôdait. Juste là, à deux couloirs des appartements de Severus.
J'attendis qu'il m'ait dépassée pour continuer ma route et courir vers le dortoir des Gryffondor. Qu'est-ce que ce fils de mangemort faisait là?
… Et Severus… il ne voudrait plus jamais me revoir… Severus…
