Chapitre 10
Il m'avait rejetée de ses appartements le soir-même, et refusé de m'adresser la parole les jours suivants. Je pouvais seulement lire dans son canapé tandis que lui restait bien à distance derrière son bureau et des montagnes de copies et de grimoires poussiéreux.
J'avais besoin de lui, Harry avait besoin de moi, lui, ces temps-ci. Ginny ne parvenait pas à comprendre les cauchemars, la douleur, elle préférait les éviter et pensait sûrement qu'en les ignorant assez longtemps ils finiraient par disparaître. Ginevra avait peur. Moi je connaissais.
Nous nous retrouvâmes souvent seul à seule avec Harry, nos amis comprenaient. Pas Rogue.
A chaque sourire, chaque rire, chaque regard confiant ou complice que je partageais avec mon meilleur ami, j'étais sûre que Rogue devenait un peu plus jaloux. La fureur explosait en coulée de lave onyx chaque fois que je m'aventurais à regarder dans sa direction. Mais c'était la seule manière qui me restait de le faire réagir alors je ne disais rien, je n'essayais pas de lui parler lorsque j'étais dans ses appartements, ni de le rassurer. Il se contrôlait de moins en moins, était parvenu à enlever cent points à Gryffondor en moins d'une journée. Et le professeur Mac Gonagal avait fini par débouler dans sa classe, nous avait rendus tous nos points, heureusement, avant de sermonner notre professeur de potion, l'obliger à se rendre chez le directeur. Ron avait ricané avec Dean et Seamus.
Harry avait fixé notre professeur de ses yeux verts voilés, Hermione avait froncé les sourcils, j'étais restée aussi impassible que devait l'être un Sang-pur.
Cela faisait presque une semaine que je jouais ce petit jeu, Rogue souffrait.
-C'est extraordinaire comme la cardamine bulbifera s'est acclimatée à l'emplacement que Mme Chourave m'a donné au nord des serres. Elle savait parfaitement pour le sol calcaire, l'eau alcaline, l'ensoleillement! Toutes mes notes sont dans ce carnet, prends-en soin! Lança Neville en me le tendant.
J'hochai la tête très solennelle malgré les bruits de mastication de Ronald et le fait qu'il engloutisse la moitié d'une cuisse de poulet à la fin de la tirade de notre futur botaniste. Harry jouait avec ses petits pois tout en discutant Quidditch, Hermione lisait la Gazette du sorcier, Ginny papotait avec ses amies plus loin tout en lançant souvent des coups d'oeil inquiets à son petit ami.
J'acceptai le prêt les yeux étincelants:
-Merci Neville, je te le rendrai dès que je l'aurai fini et sans aucune égratignure.
Et puis je regardai d'un peu plus près la tranche de de son carnet, écarquillai un peu les yeux.
-Et sans aucune... morsure supplémentaire.
J'haussai un sourcil vers Neville, à la manière de Rogue sans pouvoir m'en empêcher, celui-ci se mordit la lèvre un peu gêné.
-Plantes carnivores des serres ouest, je dois passer devant pour arriver jusqu'à la cardamine.
Je pouffai de rire alors que Neville s'empourprait, baragouinait que c'était pas drôle et qu'elles étaient pas assez nourries. Bien sûr je ne mis pas longtemps à le ranger précieusement dans mon sac, la conversation reprit sur ma dernière expérience et j'étais certaine que si Rogue ne m'ignorait pas je n'aurais pu résister à l'envie de lui en parler.
-On y va? Demanda Harry finalement après avoir réduit en charpie sa part de tarte à la mélasse.
Il se leva tandis que Ron se dépêchait de gober ses derniers abricots au sirop, Hermione de fermer son journal et de l'imiter dans un bel ensemble.
-Harry, il faut manger tu sais; chuchotai-je les sourcils froncés.
Il haussa les épaules avec un petit sourire qu'il voulait rassurant:
-J'ai pas tellement faim aujourd'hui, ça va passer.
J'hochai la tête, pas convaincue et préoccupée mais me levai pour les rejoindre. Harry me regardait d'une manière indéchiffrable, je pris mon sac, passai une jambe par-dessus le banc et... Neville s'emmêla les pinceaux, tombant par terre en faisant basculer le banc avec lui. Déséquilibrée je me retins à la seule personne que je pus, Harry, qui me rattrapa dans ses bras, s'empressa de ramener mon corps vers lui par réflexe. Neville gémissait à terre, les orbes lagon de Harry ne quittaient pas les miens.
-Ça va?
-Oui je... Juste une égratignure; murmurai-je pour la brûlure à mon genou.
Ses bras qui soutenaient mes coudes me rapprochèrent un peu plus de lui, pour m'aider à me redresser. Nous étions très proches, je... Un verre explosa soudain derrière nous. Je me retournai, pour apercevoir mon professeur de potion ivre de rage, le poing serré sur son verre brisé. Du sang coulait, ses orbes emplis de ténèbres étaient rivés au sol. Il n'y eut plus un bruit dans la grande salle. Tout le monde fixait Rogue.
-Vous allez bien, mon garçon? Demanda le professeur Dumbledore depuis le milieu de leur table.
Il ne desserra pas sa poigne mais renversa sa chaise en arrière. Elle claqua sèchement contre le sol, et Rogue se dépêcha de disparaître de la grande salle dans un envol de cape.
... Hermione nous sauta dessus sans attendre, pour nous demander si nous avions vu ce qu'elle avait vu?! Le professeur Rogue était tellement bizarre ces temps-ci! Ron lui assura qu'il avait toujours été bizarre tandis qu'Harry et moi aidions Neville à se remettre debout. Il n'avait rien heureusement.
Nous reprîmes notre route vers la salle commune des Gryffondor, Hermione élaborant des théories entraînant Neville et Ron dans ses élucubrations, Harry et moi écoutions en nous moquant.
Et je ne me préoccupai pas le moins du monde de mon professeur de Potion avant que ne sonne les vingt-deux heures du couvre-feu.
-Tu vas retrouver ton mystérieux petit-ami? Demanda Harry alors que je me levais...
Je lui adressai un petit clin d'oeil secret, avant de quitter notre salle commune. Quelque fois j'étais contente que ce soit Remus qui ait récupéré la carte des Maraudeurs.
Je montai discrètement jusqu'au deuxième étage, trouvai le passage secret derrière la tapisserie puis empruntai les corridors sombres menant jusqu'à la bibliothèque de Rogue.
... Devant le panneau de bois je m'arrêtai un instant, inspirai en fermant les yeux. Severus, parlez-moi... je vous en prie... Pardonnez-moi...
Il n'y avait pas un bruit dans le salon, pas de conversation ou de Dumbledore aux propositions abracadabrantes faisant les cent pas. Alors je murmurai un Alohomora, et la bibliothèque pivota devant moi. J'entrai doucement.
Rogue se trouvait à son bureau, comme toujours ces temps-ci, écrivant d'une main, l'autre serrée en poing d'où s'écoulait un liquide vermeil. Le sang devait goutter depuis plus d'une heure j'apercevais une flaque sur son bureau et ses doigts qui se resserraient convulsivement.
Mon professeur ne leva pas la tête vers moi.
Je m'approchai sans un mot, jusqu'au coin droit de son bureau où il gardait sa main ensanglantée. D'un informulé je fis venir une chaise à moi, m'y assis, puis doucement amenai mes doigts vers les siens. Il tressaillit au contact, mais se laissa faire. Je pus les déplier et aviser les morceaux de verre qui étaient restés dans sa peau, les blessures profondes qu'il s'était infligées.
Mes lèvres restèrent closes, j'entrepris seulement d'enlever tous les débris tranchants et tachés de rouge tandis que Severus arrêtait progressivement d'écrire.
La peau que je touchais était glacée, elle tremblait et Rogue ne me regardait pas. Il devait fixer un point sur son bureau, le visage et chacune de ses expressions cachés par un rideau de cheveux graisseux. Le crépitement des flammes et les tintements des bouts de verre sur son bureau étaient les seuls sons audibles dans la pièce...
-Vous aimez Potter? Lâcha mon professeur d'une voix rauque.
Il ne me regardait toujours pas...
-Oui.
Ses doigts se crispèrent dans les miens, je l'obligeai à desserrer pour pouvoir enlever les deux débris de verre qui restaient.
-Vous auriez préféré que ce soit lui qui vous rejoigne en haut de la tour d'Astronomie, plutôt que moi?
Je délogeai le dernier morceau qui le blessait sans répondre, puis sortis ma baguette... Vulnera sanentur... vulnera sanentur... vulnera... Les profondes entailles se résorbaient petit à petit, absorbant la chaleur et la magie de mon sortilège... Je m'arrêtai lorsque la main de Rogue sembla intacte. Je ne voyais aucune trace de cicatrices.
-Non.
Je fis disparaître le sang et le verre sur le bureau de deux informulés puis rangeai ma baguette.
-Vous mentez; siffla-t-il son regard fiévreux soudain à percuter le mien.
-Non; répliquai-je aussitôt.
L'océan de mes yeux était clair, calme, calme... Rogue se détourna, ses cheveux graisseux le cachant de nouveau. Il ne retirait pas sa main de la mienne.
-Je pourrais vous blesser; sa voix s'écorcha sur ces derniers mots.
... J'étais... censée... résister encore. Mais je ne pouvais supporter de voir Rogue ainsi, je me levai lentement de ma chaise pour ne pas l'effrayer, me rapprochai, m'assis sur ses genoux et me lovai contre lui, la tête dans le creux de son cou. Tout son corps tremblait, était crispé, ses bras levés, écartés de moi.
Le col de sa robe de sorcier remontait très haut sur son cou, je ne pus qu'embrasser l'angle de sa mâchoire avant de reposer ma joue contre son épaule.
-Vous ne savez pas à quoi ressemblaient les petites "fêtes" qu'organisaient le seigneur des Ténèbres; siffla-t-il. Et vous n'avez même pas idée de ce qu'un Mangemort devait exécuter pour lui prouver sa loyauté...
-J'imagine; murmurai-je contre sa gorge. C'est bien assez... Mon oncle n'oubliait de me montrer aucune des tortures que Vol... le Lord noir pouvait apprécier.
...
Je n'aperçus pas ses bras se rapprocher mais sentis bientôt leur étreinte aérienne. Rogue ne m'avait jamais tenue ainsi, si tendrement, sans douleur ni souffrance. Cela ne dura pas. Il resserra son étreinte presque aussitôt, s'agrippant à ma nuque, ma taille pour me plaquer contre lui. Je fermai plus fort les yeux, mes poings serrés sur sa robe noire.
-Potter vous rendrait plus heureuse; lâcha-t-il comme à regret sans pour autant relâcher sa poigne.
-Non.
Son nez vint se frotter contre mes longs cheveux sombres.
-N'importe lequel de vos amis...; insista-t-il.
-Non; répétai-je d'une voix rauque. Il n'y a que vous.
Il se crispa, et je savais qu'il ne voulait pas me croire.
-Vous mentez.
-Je ne vous mens pas...; chuchotai-je.
Je ne pouvais exprimer combien j'étais apaisée, combien je me sentais à ma place dans ses bras. Je n'arrivais pas à bouger, relever la tête pour contrer ses orbes onyx. Il m'avait manqué. Cela faisait... presque deux semaines qu'il ne m'avait pas serrée contre lui, qu'il ne m'avait parlé aussi longtemps, avec autant de calme... J'étais fatiguée de me battre.
Rogue ne me répondit rien et nous restâmes silencieux blottis l'un contre l'autre. Sa main glacée finit par se perdre dans mes cheveux, avec douceur, caresser mes mèches ondulées. Je refermai les yeux. J'étais fatiguée, en sécurité, dans ses bras... Ma respiration se faisait de plus en plus profonde, mes poings desserraient petit à petit leur étreinte. Ils finirent par retomber entre nos deux corps et l'instant d'après, je m'endormais.
Tout... s'assombrissait... Il faisait plus froid, j'étais retenue de force, je ne retrouvais plus Severus. Je ne savais pas... où... Où suis-je?
"Il me balança dans ma chambre et mon dos alla s'exploser contre le pied de mon bureau en chêne. Je glapis de douleur. Pourquoi?
-Tu es faible; cracha mon oncle. De cette faiblesse qui te tuera et entachera à jamais le nom de notre famille. Si je ne fais rien... Non...
Ses yeux luisirent d'une étincelle vicieuse particulière, mon coeur se serra, je savais qu'il allait aimer ce qu'il s'apprêtait à me faire.
-Je vais détruire ta chair en même temps que ton petit coeur de lâche et j'ose espérer que lorsque tu reparaîtras devant moi tu les auras tous deux changés en pierre. Je veux de la pierre Khorine Lumare! De la pierre!
Il appela plusieurs fouets, d'un Accio, qui tombèrent dans sa main. Alors mon oncle s'avança, je reculai en rampant douloureusement. J'étais... faible... Ses instruments de torture claquèrent contre mon bureau, les rayons de soleil de cette fin d'après-midi les éclairaient avec trop de précision. Je voyais tout, les lanières de cuir tranchantes, les deux qui supportaient des piques, la différence de longueur, je savais la différence de poids.
Mon oncle choisit le fouet le plus lourd de ceux qu'il avait appelé, aux bords les plus tranchants aussi.
-Tu compteras les coups à haute voix! Siffla-t-il. Et pour chaque coup oublié tu en auras deux de plus.
-Oui mon oncle; articulai-je avec difficulté, ma gorge était comprimée, j'avais même du mal à respirer.
Je n'aurais pas dû, je n'avais pas le droit... mais je l'avais fait. Je m'étais effondrée à genou sur les dalles d'une des cellules des oubliettes.
-Debout, retourne-toi, contre le mur!
Ses ordres claquaient dans l'air, j'obéis même si j'avais mal même si mes os craquèrent plusieurs fois. J'avais été faible. J'avais mérité la punition. Mon masque n'aurait jamais dû tomber, même devant le meurtre d'un bébé. Si petit, si fragile, innocent... Un enfant, il l'avait seulement laissé tombé par terre... Mes mains contre le mur et l'instant d'après le fouet tournoyait dans les airs. J'entendais le... Le premier coup me déchira le dos, je desserrai difficilement les mâchoires:
-U-un.
Les coups... se succédèrent... Je les comptais, les larmes coulaient sans que j'autorise un seul sanglot à m'échapper. Pourtant la douleur était atroce, atroce, ma peau se déchirait et ça brûlait, ça brûlait! Le sang chaud coulait dans mon dos. Je ne pouvais plus réfléchir, plus penser à rien d'autre qu'aux morsures du fouet, les unes après les autres.
-T-trente... -six...
Mon oncle grognait derrière, il s'essoufflait. Je comptais, comptais, juste, il fallait compter!
-Aaah! Q-q-quarante! Hurlai-je.
Trop mal, trop mal! Je suffoquais! Je suffoquais! Je suffoquais!"
-Khorine, réveille-toi!
J'ouvris les yeux en grand, ne trouvant pas d'air, ni la moindre trace de mon oncle dans les ombres. Mais il y était, il devait y être, il me frappait! Ses fouets, sur la table! Je tournai la tête vers la table près de moi, nous, son bureau. Des copies, plumes, encre, livres... Je... Ses mains froides agrippèrent chacune un côté de ma tête, et m'obligèrent à la relever vers lui. Severus... C'était...
Ses orbes noirs magnifiques à la lueur du feu mourant de la cheminée. J'y restai accrochée, revenant peu à peu à la réalité. Severus à Poudlard, dans les cachots, ses appartements loin derrière la réserve de la salle de classe... Moretro Rolando... Je tremblais moins, je n'en avais pas eu conscience jusqu'à ce que je me calme un peu. Juste, ses yeux, emplis d'inquiétude.
-Il vous a battue; siffla Rogue entre l'inquiétude et la rage.
Je m'accrochai à sa robe de sorcier, sans répondre. Et puis ses mains quittèrent ma tête pour se diriger, vite, vers mes épaules, mes flancs puis mon dos. Il souleva mon pull d'uniforme et ma chemise, assez pour pouvoir les y passer. Elles étaient froides, contre ma peau.
Je gémis. Il pouvait sentir le léger renflement de chacune des cicatrices nacrées qui parsemaient mon dos. C'était la première fois qu'on me touchait là. Accrochée à lui, sur ses genoux, je me sentais en sécurité, et bien. Je fermai les yeux et cachai ma tête contre son cou, sous quelques unes de ses mèches graisseuses. Ses doigts me le traversaient et s'arrêtaient à chaque marque.
Je n'avais jamais cru que quelqu'un pourrait me faire autant de bien en caressant cet endroit.
-Vous me faîtes tout oublier; avouai-je dans un chuchotis.
Rogue en tressaillit, je crois. Puis avec une lenteur particulière arrêta tout mouvement tout effleurement de ses mains glacées. Il voulut les retirer de sous ma chemise.
-S'il vous plaît; murmurai-je. Ça fait tellement de bien...
Il se crispa sous moi, ce qui n'était pas mon intention. Merlin. Je souhaitais qu'il continue. Mais Rogue les enleva avant que je n'aie pu dire quoi que ce soit d'autre, préférant les ranger contre ma hanche. Pourquoi? Je voulus relever la tête de son épaule pour croiser son regard, qu'il m'explique; seulement en bougeant sur ses genoux j'en vins à sentir... une bosse... sous mes cuisses.
Je me redressai aussitôt, cherchant son regard très sombre, avisant ses mâchoires crispées.
-Ne bougez pas Lumare; gronda Rogue d'une voix rauque.
Je frissonnai d'une étrange façon dans ses bras, mais agréable. Je le trouvais magnifique parcouru d'ombres et de la lueur vacillante du feu de bois, ses cheveux noirs qui frôlaient ses épaules, son visage pâle aux traits tirés et crispés que je voulais détendu et apaisé. Je voulais tellement qu'il soit heureux. Ce fut plus fort que moi, je me mordis la lèvre et levai une main jusqu'à lui, effleurer quelques mèches qui lui tombaient devant les yeux, puis ses tempes, les reliefs osseux de son visage. Qu'il me fixe sans un mot et me laisse faire rendait tout cela encore plus intimidant. Rogue était connu pour être le bâtard graisseux, le professeur le plus partial et le plus froid de tout le Royaume-Unis, qu'il me laisse le toucher n'avait pas de prix...
Mon professeur leva les doigts pour recoiffer une mèche ondulant sur mon front. Je lui souris un peu, avant de me lancer soudain:
-Neville et moi avons trouvé une cardamine bulbifera croisée avec un mimbletonia près du Lac Noir. Elle contient des sulfamides imprégnés de magie, beaucoup plus stables. Alors j'ai repris les expériences de Bossuchaudron; avouai-je d'un trait. Toutes. Et j'en ai créée de nouvelles, j'ai testé une gamme d'antibactérien, les interactions entre les ingrédients...
L'océan de mon regard s'agitait avec passion alors que quelque chose comme une ébauche de sourire se dessinait sur le visage dur de mon professeur. Il n'avait pas l'air surpris pour autant.
-Je sais Lumare; susurra-t-il. Vous êtes la seule élève à utiliser le laboratoire près des escaliers menant à la tour Gryffondor.
Oh... Il savait... Une grimace m'échappa ce qui lui arracha un petit ricanement.
-Depuis quand est-ce que les Gryffondor sont discrets? Se moqua Rogue.
Je grognai vaguement quelque chose, puis retrouvai ma place lovée contre lui. Je ne m'étais jamais sentie aussi bien qu'à cet endroit. Surtout lorsqu'il reprenait ses caresses dans mes cheveux comme en ce moment...
Mes paupières se fermaient de bien être et un silence paisible n'aurait pas manqué de s'installer si je n'avais pas murmuré, presque malgré moi:
-Vous m'avez ignorée pendant deux semaines... Vous ne me touchiez même plus et vous ne m'adressiez que des "bonsoir" et "bonne nuit" du bout des lèvres. Je n'ai même pas eu le droit de savoir pourquoi...
Il resserra aussitôt sa prise sur moi, ce fut violent et douloureux. C'était comme si Rogue avait peur que je m'enfuis. Et puis il frotta une fois encore son long nez busqué contre mes cheveux. Je ne sais pas pourquoi toutes les émotions de ces dernières semaines remontèrent d'un coup, pourquoi les larmes me montèrent aux yeux.
-Je... ne voulais pas te blesser; lâcha-t-il d'une voix inégale.
-Vous m'avez abandonnée; murmurai-je en retour cachée contre son torse.
Severus haleta, et je pensai que j'aurais des hématomes le lendemain tant sa poigne se refermait sur moi.
-Plus jamais... Pardonnez-moi, je vous en prie Lumare.
Je croyais Severus, j'avais confiance en lui. Alors j'hochai la tête timidement, les poings revenus s'accrocher à son vêtement. J'avais eu peur qu'il se moque de moi, de ma faiblesse, qu'il me dise qu'il ne m'était pas indispensable comme lui pouvait très bien se passer de moi.
J'étais vraiment fatiguée maintenant, tout ce que je souhaitais c'était rester un peu plus longtemps auprès cet homme qui me retenait comme si j'étais sa raison de vivre.
-Professeur?
-Hmm; murmura-t-il en embrassant mes cheveux ondulés.
-Est-ce que je peux rester dormir ici ce soir?
L'acquiescement échappa aussitôt à Severus, qui ne semblait plus vouloir me lâcher.
Lorsqu'il se leva, il me garda dans ses bras. J'eus beau protester, il se dirigea vers la chambre en me portant contre lui, une main autour de mes épaules, l'autre sous mes genoux.
-Je sais marcher! Répétai-je après qu'il ait passé le pas de la porte.
Un étrange petit rictus ressemblant à s'y méprendre à un sourire éclaira ses traits sévères. Et puis il se pencha pour embrasser le coin de mes lèvres. Mon coeur en rata un battement.
Ensuite il retira ses chaussures sans me laisser retrouver pied, me porta jusqu'au lit. Je l'y attirai dès qu'il fit mine de s'écarter, entraînant un extraordinaire scintillement aux fonds de ses orbes onyx.
-Je peux vous débarrasser de votre robe, professeur; le provoquai-je.
-Miss Lumare; m'invita-t-il en se rapprochant sur le matelas.
Je me dépêchai d'enlever mes chaussures du bout des pieds et de les jeter plus loin avant de le rejoindre, m'occuper de son vêtement. Il m'observait de son étrange manière, la tête sur l'oreiller, ses cheveux sombres en auréole de ténèbres. J'appréciais qu'il ait déjà retiré sa cape mais marmonnai quelque chose à propos du nombre de boutons qui allaient du haut de son col jusqu'à sa taille, avant de m'y mettre avec sérieux. Je ne me laissai pas déconcentrer par son regard sombre, enlevant une à une les attaches de sa robe. C'était troublant, mais j'étais en sécurité, je savais qu'il ne me ferait rien.
Soudain, Rogue me rapprocha, et je retins mon souffle... mais ce fut pour déposer un baiser sur mon front avant de me garder serrée tout contre lui.
Lorsque j'eus fini, enfin, de détacher sa robe de sorcier nous dûmes nous écarter pour qu'il puisse l'enlever, la jeter plus loin, puis nous nous retrouvâmes et je m'attaquai à son gilet noir.
Les cinq boutons d'argent se défirent facilement et le vêtement ne tarda pas à rejoindre le sol. Je soupirai en me blotissant contre Rogue. Fatiguée...
-Bonne nuit, Lumare; murmura-t-il passant doucement la main dans mes cheveux.
-Bonne... nuit...
