Chapitre 8
A un moment, peu avant que Severus ne vienne la chercher pour le dîner, une révélation la frappa de plein fouet.
Elle était libre!
Elle n'avait plus à obéir, à aucun de ses ordres, elle pouvait lui mentir, elle pouvait passer un message à Finch! Elle pouvait contacter l'Ordre! Un cri de joie lui échappa et elle se retrouva bientôt à faire les cent pas dans le salon, un feu nouveau dans le regard. Elle préviendrait l'Ordre! Elle ne serait pas seule!
Khorine s'empara de sa plume et d'un parchemin et écrivit une courte missive qu'elle glissa dans sa poche. Au moment où elle entra dans la Grande Salle, elle fit mine de trébucher derrière le fauteuil du professeur Finch et lui glissa discrètement son message dans la main. Leurs regards se rencontrèrent. Celui de Khorine scintillait. Il avait été brumeux depuis si longtemps que cela fit un choc à son professeur.
-Oh, je suis désolée; babilla Khorine.
Elle savoura une seconde encore sa proximité avec l'aura verte bienfaisante, puis se concentra pour effacer les émotions de son visage et se détourna. Personne n'avait fait attention à elle. Pas même Severus.
Après dîner, elle s'enferma dans sa chambre et y resta seule, faisant les cent pas, trop excitée pour le cacher. L'Ordre viendrait, elle en était sûre!
Pourtant le lendemain, elle ne reçut aucune réponse. Que se passait-il? Avaient-ils toujours un quartier général où se réunir? Combien luttaient encore? Est-ce qu'… ils pouvaient douter d'elle? Après tout ce temps?
Le surlendemain, aucun message. Elle ne parvint pas à croiser le regard de Finch. Quelque chose n'allait pas… Ne viendraient-ils pas? La laisseraient-ils mourir seule? Non cela ne faisait que deux jours, elle ne pouvait pas perdre espoir, ils viendraient. Elle ne devait pas perdre espoir!
Un cauchemar l'arracha au sommeil et elle se trouva, haletante, le regard flou, tordue dans son fauteuil du salon, l'écho des gouttes de sang résonnant encore à ses oreilles. La porte de la chambre de Rogue s'ouvrit et celui-ci apparut. Il était en pyjama, le premier bouton ouvert.
-Lumare?
-Ah… j'ai dû crier…
Le sorcier s'approcha, pieds nus, et quelque part sa présence la calma, c'était instinctif, sa respiration s'apaisa et elle desserra sa prise sur les accoudoirs du fauteuil.
-Est-ce que… Est-ce que je peux dormir avec vous cette nuit? J'essaierai de ne pas faire de bruit; demanda la sorcière.
Il hocha la tête:
-Prenez votre temps, ma porte vous est ouverte.
Il rentra dans sa chambre et Khorine ne tarda pas à se lever sur des jambes flageolantes. Elle partit se doucher, enfila son pyjama, se brossa les dents, puis sans plus penser à rien entra dans la chambre du sorcier et le rejoignit dans son lit. Aussitôt, la chaleur la pénétra jusque dans ses os et elle se pelotonna tout contre son corps. Severus ne protesta pas.
-Merci; murmura Khorine d'une voix ensommeillée.
En fait, elle était épuisée et malgré son cauchemar ses yeux se fermèrent tous seuls. Elle était si bien ici… Elle soupira et ne tarda pas à s'endormir pour tomber dans un sommeil profond et apaisé.
Le lendemain, elle se réveilla prise dans l'étreinte de Severus. Elle était chaude, possessive, réconfortante… Elle se pelotonna un peu plus contre son cou. La pression de ses bras se relâcha un peu, pas de beaucoup… Il était réveillé…
-Bonjour; marmonna-t-elle.
-Bonjour Khorine; et elle entendit le grondement rauque au-dessus de sa tête.
-… J'ai fait un rêve…; avoua-t-elle sans même y penser. Je mangeais des crumpets, avec du beurre fondu, des myrtilles et des morceaux de banane, il y avait du thé, et j'étais dans une maison avec des grosses pierres. Le soleil me réchauffait par les fenêtres, et dehors je savais que si je me retournais pour regarder, je verrais la mer… J'entendais le bruit des vagues… C'était comme un grondement sourd.
-… Pour les crumpets cela peut s'arranger; marmonna Severus.
Elle exhala ce qui se rapprochait le plus d'un rire puis murmura que oui, cela lui plairait. Pourtant ils ne firent pas mine de se lever, ni l'un ni l'autre… Il lui restait deux mois avant le Marquage et, en attendant, Severus veillait sur elle.
Ils restèrent un long moment dans le lit, enlacés, avant de commencer la journée, Khorine à sa potion, Rogue à ses tâches administratives. Il ne manquait que deux étapes à l'anti-Douleur, notamment l'ajout synergique du pavot somnifère et du café. Elle devait réussir à anesthésier ses récepteurs à la douleur sans entraîner de somnolence, cela se jouait à un centième de milligramme…
Les jours passèrent. Elle testa une cinquantaine de variantes différentes sur homonculus, modifia encore les concentrations, recommença… Elle y était presque. Et le soir, elle venait se blottir dans le lit de Rogue et dormait d'un sommeil sans cauchemar.
Un jour, elle trouva sur la table du salon un petit écrin à son intention. Dedans reposait une bague polie en bois de sureau. Elle respectait le mouvement naturel du bois et avait différents bords, se mouvant comme une vague de lignine. Khorine l'enfila à son pouce et fut envahie d'une vague de bien-être… Le soir-même, elle sentit un message être glissé dans sa poche. Elle parvint à grand peine à attendre d'être seule dans sa chambre avant d'ouvrir celui-ci. C'était l'Ordre. Ils viendraient.
Son cœur manqua de se déchirer sous l'émotion.
Ils viendraient.
Un Gallion tomba dans sa main; pour leur indiquer où attaquer, et quand.
Ils…
…viendraient…
Des larmes d'émotion brisèrent la barrière de ses paupières. Elle sanglota silencieusement, le corps pliant petit à petit, jusqu'à ce qu'elle s'agenouille au milieu de sa chambre, serrant contre son cœur le Gallion de l'Ordre.
-Merci; chuchota-t-elle dans le vide.
Cette nuit-là, elle tenta de dormir dans sa chambre. Mais elle était surexcitée, et elle avait froid sans lui. Vers une heure du matin elle capitula, toqua doucement mais ne reçut pas de réponse, actionna la poignée de la porte qui s'ouvrit. Rogue lisait encore. Elle lui fit un petit sourire penaud, puis le rejoignit au lit, il éteignit la lumière et dès que sa tête eut touché l'oreiller, Khorine s'endormit.
Les jours passèrent, Khorine réussit enfin à trouver le bon dosage, elle la testa sur un homonculus qui ne cilla même pas sous le doloris.
Il ne restait plus que deux semaines avant le Marquage.
Elle avait fini par dormir tous les soirs avec Severus; autrement, les cauchemars l'étouffaient. L'impatience et la peur s'affrontaient dans son cœur, mêlées à de la haine, de la rage, de la douleur. Elle avait si peur d'échouer… De mourir sans atteindre Nagini…
Durant le jour, elle s'échinait à cacher tout ce qu'elle ressentait derrière ses barrières mentales et la nuit, dès que Rogue l'entourait de ses bras, son corps se relaxait et elle tombait dans un sommeil sans rêve… Sa chaleur l'apaisait…
Khorine avait froid. Elle gémit faiblement, les paupières closes, et tâtonna près d'elle. Les draps étaient froids. Elle s'éveilla aussitôt. Severus n'était plus là. Il n'était pas non plus dans la chambre, baignée par quelques rayons de lune. Que se passait-il? Inquiète, Khorine s'empara de sa baguette et quitta les draps. Ses pieds nus se posèrent sur le tapis moelleux au pied du lit. Elle se leva, et quitta la chambre. Personne dans le couloir, ni dans le salon, mais, soudain, elle entendit sa voix, venant du bureau directorial. Elle s'approcha à pas de loup et rejoignit la porte entrebâillée. Seule la lumière de la lune éclairait la pièce, tombant sur quelques objets, plongeant le reste de la pièce dans le noir; mais elle voyait distinctement Severus qui faisait les cent pas, les mains dans le dos.
-Ce n'est pas assez; siffla-t-il à voix basse et elle tendit l'oreille pour l'entendre. Qu'est-ce que cela signifie «un plan de grande envergure»? Faîtes parler Minerva, que vont-ils attaquer? Combien seront-ils? Quel sera leur objectif? Que voulez-vous que je fasse de si peu d'information, Albus?
Khorine tressaillit violemment et dut se retenir au mur. La tête lui tournait.
-Minerva a pris ses précautions cette fois-ci…
C'était la voix de Dumbledore, un peu rauque et sèche comme du parchemin. Il parlait doucement à son meurtrier. Khorine n'entendit pas le reste, le cerveau comme gelé, elle ne respirait plus, tout bourdonnait à ses oreilles.
-… même les Weasley…
Elle fit un effort monumental pour revenir à la réalité.
-Personne d'autre ne connaît les détails de l'opération, mon garçon.
-Faîtes… parler… Minerva; siffla-t-il en hachant chaque mot.
Pouvait-il être sous Impero? Non, c'était un tableau, c'était impossible… Le silence tout à coup était assourdissant, Khorine releva la tête. Severus haletait, face au portrait, le poing écrasé contre le mur de pierre. Dumbledore n'y était plus. Il n'y avait que la respiration de Rogue qui s'entendait dans ce bureau. Il ne tarderait pas à revenir dans le salon, vers elle. Elle devait réfléchir, elle devait… Elle se détourna, se lança un Silencio, puis retourna au lit. Ses pieds étaient gelés… Elle se lança un sortilège pour se réchauffer et eut juste le temps de ranger sa baguette et de fermer les yeux avant que la porte de la chambre ne s'ouvre de nouveau. Elle entendit le froissement du pyjama de Severus alors qu'il s'approchait. Il la rejoignit au lit et l'enserra dans ses bras. Khorine gémit un peu puis vint se blottir contre son torse. Les longs doigts fins de Rogue se mirent à caresser ses cheveux… Il était de leur côté… Depuis tout ce temps…
Des larmes s'amoncelèrent derrière ses paupières closes et tombèrent goutte à goutte sur son oreiller. Severus ne s'en rendit pas compte. Quant à Khorine, elle aurait dû rester éveillée toute la nuit à réfléchir à ce que cela impliquait, mais elle était si bien dans ses bras que le sommeil la prit et l'emporta jusqu'au petit matin.
Lorsque ses paupières papillonnèrent le soleil brillait juste au-dessus des montagnes à l'Est. Elle se trouvait prise dans l'étreinte de Rogue qui ne l'avait pas lâchée de la nuit. Il s'écarta un peu en la sentant s'éveiller et ses yeux d'un noir de nuit se posèrent sur elle.
-Bien dormi? Grogna-t-il de sa voix gutturale du matin.
-Oui; murmura Khorine en venant se pelotonner tout contre lui.
Son torse était chaud et elle sentait son cœur battre contre la paume de sa main.
Il était de leur côté. Qu'attendait-elle pour tout lui révéler?
Mais accepterait-il son plan? Et que se passerait-il après? Si elle survivait, s'il survivait? Devait-elle… Merlin, elle avait besoin de temps pour réfléchir.
L'étreinte de Rogue se resserra et Khorine y répondit sans même hésiter; et puis ses lèvres rejoignirent la peau si fragile à sa carotide et entreprit de l'embrasser, puis elle la mordilla, la lécha et remonta jusqu'à sa mâchoire, sa joue, ses lèvres. Elle n'avait jamais été si tendre dans ses gestes, dans ses baisers, avec qui que ce soit, surtout pas Rogue, et celui-ci la laissa faire, choqué. Ses lèvres se lovaient contre les siennes et les mains de Khorine caressèrent un par un les boutons de sa chemise. Elle sentait dans son cœur une douceur infinie qui lui échappait tandis qu'elle ne pensait plus ni à Voldemort, ni à Nagini, ni à ses amis, ni à l'Ordre. Dans ce lit il n'y avait qu'elle et Severus, et en ce moment, elle voulait désespérément lui prouver qu'il n'était pas seul au monde. Elle quémanda l'entrée de sa bouche du bout de la langue, puis vint caresser la sienne, la frôler, la sucer gentiment, s'enrouler autour d'elle en prenant son temps, avec une certaine délectation. Rogue gémissait contre sa bouche et ses poings étaient serrés dans les draps. Khorine s'en rendit compte et rompit le baiser. Ils haletaient tous deux, les yeux dans les yeux. L'iris d'un noir de nuit engloutissait ceux d'océan, il y avait de la souffrance dans ce regard. Khorine descendit sa main le long du bras de son côté pour doucement arriver à son poing, elle l'ouvrit pour lui et entrelaça ses doigts aux siens.
-Tu ne me feras pas mal Severus… Laisse-toi aller; lui murmura-t-elle à l'oreille.
-Et si je te blessais petite sorcière? Lâcha-t-il dans un souffle.
-Tu ne m'as pas blessée jusque-là.
Ses yeux, océan limpide, étaient chaleureux et ne quittaient pas les siens. Elle lui faisait confiance. Elle lui souriait doucement et caressait du pouce le dos de sa main.
-Est-ce que…; la Gryffondor se mit à rougir délicieusement, est-ce que tu peux me toucher? S'il te plaît?
Leurs mains se défirent l'une de l'autre et celle de Severus vint se mêler aux cheveux de la sorcière. Elle en ferma les yeux.
-Où souhaites-tu être touchée? Lui susurra-t-il à l'oreille de sa voix roulante si particulière.
Khorine en rougit un peu plus et lui avoua:
-… Partout…
Severus la prit par les hanches pour la faire rouler sur le dos et fut bientôt à son côté, ses mains occupées à déboutonner sa chemise de pyjama, caresser son corps, ses lèvres à effleurer chaque centimètre de peau qui s'offrait à elles, à respirer son odeur dans le creux de son cou, à mordiller chacun de ses points sensibles pour lui arracher des halètements, à effleurer son entrejambe sous le pantalon sans jamais la toucher vraiment. Khorine se laissait faire, offerte et gémissant de volupté. C'était si bon, elle se sentait s'enfoncer dans un nuage de bien-être et aurait été au paradis sans cette pulsation entre ses cuisses, ce besoin… Ses hanches se soulevèrent malgré elle.
-Si sensible; murmura Severus à son oreille.
Dans un grognement Khorine se redressa, retira pantalon et culotte, et renversa la situation en s'asseyant à califourchon sur le sorcier.
-Vengeance; marmonna-t-elle avant d'entreprendre de défaire le pyjama de Severus.
Celui-ci se laissa faire, un petit rictus aux lèvres, en la tenant par les hanches. Son sexe dur se trouvait juste en-dessous de son entrejambe trempé. Elle avait du mal à se concentrer. Puis le dernier bouton céda enfin et elle put ouvrir les pans de sa chemise et accéder à son torse, son ventre, sa peau blanche et frissonnante. Elle s'inclina vers lui pour embrasser la peau dénudée et roula des hanches, lui arrachant un gémissement.
-Oui? Questionna-t-elle gentiment avant d'embrasser le creux de son cou.
-Penses-tu… avoir l'avantage… petite sorcière?
-Evidemment; lui murmura-t-elle à l'oreille, je suis au-dessus.
Elle ne s'attendait pas au rire qui roula comme un grondement dans le torse sous ses mains. Et puis, elle le sentit remonter ses doigts le long de son corps, effleurer ses flancs avant d'atteindre ses seins, elle en gémit, se tendit en avant, et son téton gauche fut happée par la bouche qui se trouvait en-dessous. Un son étranglé lui échappa et Severus murmura, la bouche pleine:
-Hmm-oui?
Elle était piégée, les seins dans la bouche et la main de Rogue, l'entrejambe tout contre son érection et elle ne pouvait que se retenir au matelas de ses deux mains pour ne pas tomber sur lui. Elle se vengea en bougeant de nouveau les hanches, arrachant un halètement à l'espion qui réchauffa le bout de son téton. Oh… son entrejambe en vibra. Elle se mordit les lèvres, elle… Elle se retint sur une main, et de l'autre entreprit de retirer le pantalon de pyjama et le boxer de Severus. Il l'aida, délaissant momentanément sa poitrine. Elle en profita pour empoigner à pleine main son érection dressée, il rejeta la tête en arrière. Son gland violacé était mouillé de précum et sa verge gonflée pulsait sous ses doigts fins. Elle fit un mouvement de va-et-vient sur son prisonnier de guerre ce qui lui valut un grognement venant de Severus.
-Oui? Quelque chose à redire? Haleta-t-elle à son oreille.
Et avant qu'il ne puisse répondre, elle reprit son lent mouvement autour du sexe du sorcier. Sa peau était douce, fragile, et roulait doucement sous ses doigts. Les mains de Severus finirent par quitter ses seins pour se retenir au matelas mais Khorine ne le laissa pas faire, elle prit ses poignets et les ramena vers elle.
-Ne te retiens pas; lui murmura-t-elle à l'oreille.
Les paupières de Severus s'ouvrirent sur de la lave onyx en fusion. Un sourire, en réponse, apparut sur les lèvres de la sorcière; tout petit et très doux. Puis elle se rapprocha de Rogue et déposa un léger baiser sur ses lèvres tout en prenant sa baguette sous l'oreiller. La baguette d'ébène lui donna une curieuse sensation, c'était comme un liquide épais et glacé qui la caressait et s'enroulait autour de sa main. La surprise un instant troubla ses traits, avant qu'elle ne rende sa baguette à son amant.
-Peux-tu…?
Severus fit apparaître une protection translucide autour de son sexe et mit sa baguette de côté. Puis il contempla la jeune femme nue au-dessus de lui, occupée à caresser son ventre du bout des doigts; ses longs cheveux noirs cascadaient sur ses épaules et sa peau laiteuse était éclairée par les premières lueurs du petit matin. Ses yeux océan scintillaient avec douceur au-dessus de deux joues rosées, d'un petit nez et d'un sourire.
Il ne la méritait pas.
Khorine vit quelque chose disparaître dans les yeux du sorcier. Pour la faire reparaître, elle se pencha, et leurs lèvres se retrouvèrent. Elle caressa des siennes ces lèvres fines et chaudes, les goûta, les malaxa avant qu'il ne les écrase contre sa bouche et la prenne violemment dans ses bras. Leur baiser devint plus passionné, leurs langues se pressèrent l'une contre l'autre en cherchant toujours plus de contact, se tournant autour désespérément, se léchant, s'étreignant, s'écrasant, presque à se fondre l'une dans l'autre. Et le sexe de Severus buta contre l'entrejambe de son amante. Elle gémit dans sa bouche. Oui! Sa petite main s'aventura entre leurs deux corps pour venir chercher son pénis et le guider de nouveau jusqu'à son entrée. Le gland s'écrasa contre les grandes lèvres. Les deux amants rejetèrent la tête en arrière, la main de Khorine encore fermement ancrée autour de son sexe. Elle haleta, puis chercha le regard de Severus. Ses yeux remplis de lave noire trouvèrent alors les siens, océan noyé de désir. Elle lui sourit et, sans le lâcher du regard, s'empala sur sa verge. La sensation était… indescriptible... Il la remplissait pleinement, entièrement, et pulsait contre les parois de son vagin. Il était en elle, enfoui au cœur de sa chaleur moite. Khorine en ferma les yeux et commença à bouger des hanches. Il était… si profond… La main chaude de Rogue s'éleva jusqu'à sa joue et ses yeux s'ouvrirent. Il la fixait sans un mot et la chaleur de son regard la fit haleter. Ses doigts caressèrent sa joue, puis sa mâchoire avant de guider son menton vers lui. Khorine s'inclina et leurs lèvres se rejoignirent et leurs souffles se mêlèrent, alors que les hanches de Severus montaient vers celles de Khorine. Encore, et encore, pénétrant toujours plus profond en elle… Et son corps devenait brûlant et quelque chose montait en elle, électrisant chaque cellule de son être, pulsant de plus en plus, l'étourdissant, la grisant… Encore et encore… Et encore…
-Je…; haleta-t-elle… Severus!
Son vagin pulsa et l'orgasme explosa au cœur de son être. Des étoiles blanches obscurcirent sa vision et elle se tendit autour de Severus. Un râle rauque échappa à son amant qui perdit contrôle, s'enfonça en elle une dernière fois, les hanches pressées durement contre les siennes, avant d'éjaculer. Un grondement roula dans sa gorge. Khorine, les bras tremblants, tint encore quelques secondes avant de se laisser tomber à ses côtés. Severus remonta les draps sur eux deux, fit disparaître sperme et protection puis laissa Khorine se blottir contre lui. Il l'entoura ensuite de ses bras et la garda contre lui, fermant les yeux. Leurs respirations s'apaisèrent…
-Khorine; lâcha finalement Severus dans un souffle… La porte qui donne sur mon bureau est ouverte… Celle qui donne sur le couloir s'ouvre de l'intérieur, prends le passage de la sorcière borgne, rejoins Pré-au-Lard, de là tu pourras transplaner jusqu'à ton manoir. Tu y seras en sécurité.
Khorine se glaça dans ses bras. Qu'était-il en train de faire?
-Qu'est-ce que…
-Tu ne gagneras rien à prendre la Marque. Je te l'ai déjà dit. Enfuis-toi d'ici, ils ne passeront jamais les défenses de ton manoir, ils ne te retrouveront jamais; et sa voix rauque tombait dans son oreille.
-Mais… Pourquoi? Gémit Khorine le regard plein d'angoisse.
-Je ne les laisserai pas te tuer petite sorcière; lui répondit-il en baissant la tête vers elle.
Leurs regards se rencontrèrent. Celui de Severus était neutre, presque vide.
-Je… Je ne peux pas partir.
-Tu dois partir; siffla Rogue en resserrant son étreinte sur elle.
Quelque chose passa dans ses yeux noirs. Du désespoir? Khorine était toujours figée dans ses bras. La compréhension de ce qu'il venait de lui dire se faisait petit à petit dans son cerveau embrumé par l'orgasme. Il préférait la garder en vie, au détriment de sa vie, de l'Ordre, de sa mission.
-Je ne peux pas partir; répéta Khorine. Je… Je… J'ai été contactée par l'Ordre… quand tu as brisé m-mon serment d'obéissance.
Quelque chose de violent passa sur le visage de Rogue, il l'écarta de lui pour la fixer, lui serrant violemment les épaules:
-Non.
-J'ai reçu l'ordre de me rendre à la cérémonie de Marquage; continua Khorine. Je pense qu'il se prépare quelque chose…
-Non; siffla Rogue. Tu ne prendras pas la marque!
Sa poigne lui broyait les épaules.
-Tu me fais mal.
Severus tressaillit et lui lâcha les épaules. Il se redressa contre le montant du lit, blême; Khorine le fixait et s'assit, s'entourant du drap. Elle ne pouvait pas lui dire ce qu'elle préparait, il l'en empêcherait. Deux bleus commençaient à apparaître sur ses épaules.
-… Aide-moi… S'il te plaît; murmura Khorine la gorge nouée. Je recevrai… plus d'informations, le moment venu… Nous pouvons en finir. Ensemble. Personne ne se fera plus tuer, tu pourras partir d'ici, être libre. La guerre… sera finie…
-Je suis un mangemort, Khorine.
-Je témoignerai en ta faveur. Si tu te bats avec nous, tu seras pardonné.
Un sourire sinistre s'étira sur les lèvres de Severus. Et elle sut, que la remarque qui passerait ses lèvres allait lui déchirer le cœur ; alors elle lui ferma la bouche de sa main, piégea ses jambes entre les siennes et posa son front contre son front. Khorine ferma ses yeux mouillés de larme.
-S'il te plaît Severus… S'il te plaît. Ne m'empêche pas d'y aller. Aide-moi. J'ai besoin de toi.
Le silence qui s'étendit la glaça. Pourtant, il avait posé ses mains sur ses hanches. Il ne la rejetait pas.
-Tu étais prêt à te sacrifier pour me laisser m'échapper; murmura-t-elle en rouvrant les yeux pour tomber dans ceux d'un noir insondable.
-J'étais prêt; la contredit-il, à te garder en sécurité.
-Mais Severus, je ne veux pas être en sécurité, je veux être libre, en finir une fois pour toute… Et puis; tenta-t-elle en rougissant, tant que tu seras avec moi je serai en sécurité.
Elle lui lança un regard si confiant que Severus soupira et malgré lui, ses traits s'adoucirent imperceptiblement.
La mission que Minerva lui confierait devrait être d'un risque mesuré, ouvrir des portes pour l'Ordre, donner des informations ou un signal quelconque. Il pourrait la protéger. Peut-être qu'elle n'aurait pas même le temps d'avoir le bras souillé avant que l'Ordre n'intervienne.
-Très bien; finit-il par grogner.
Ce qui lui valut un sourire plein de chaleur et un regard scintillant.
Elle lui faisait confiance.
Depuis quand pouvait-il le voir dans ses yeux? Pourquoi? Il était toujours le traître et le meurtrier de Dumbledore. Les doigts fins de la sorcière lui caressèrent la joue avec tendresse. Était-ce depuis la réception des Malfoy? Ou bien depuis qu'elle dormait dans son lit? Depuis le sureau sentient? Mais pourquoi? Elle l'embrassa délicatement. Il soupira, puis ferma les yeux avant de grogner:
-Pourquoi me fais-tu confiance?
Khorine se tendit, et hésita…
-… Je vois… les auras; finit-elle par murmurer comme si cela répondait à sa question.
Ses beaux yeux bleus étaient rivés aux siens, son corps si proche qu'il en sentait la chaleur, et sa réponse ne faisait aucun sens. Il haussa un sourcil dubitatif et Khorine marmonna tout bas:
-La tienne est différente, elle ne ressemble pas aux autres mangemorts.
Toujours plus bas, Khorine continua :
-Celles des mangemorts sont toujours noires, ou ternes, celles de Pettigrow, de Croupton Junior, des Malfoy, de Lestrange, des raffleurs, des Carrow, Greyback, Dolohov, Greengrass, tous ceux que j'ai vu jusqu'ici. Elle est dérangeante… Pas la tienne.
Elle finit si bas qu'il dut tendre l'oreille pour l'entendre. La sorcière lui jeta un coup d'œil incertain; lui avait le regard dans le vide; pourtant il l'entendit clairement lâcher, la voix nouée:
-La tienne est iridescente…, pleine de lumière. Je… J'ai toujours su… que tu étais de… notre côté. Je ne voulais pas le croire. Mais… je le savais. Et… je t'ai entendu parler avec Dumbledore…
Il ne répondit rien.
-Severus? Appela-t-elle d'une toute petite voix.
Il ne la regarda pas.
-Je suis désolée… d'avoir mis si longtemps à comprendre…
Ses petits doigts, soudain froids, vinrent retrouver sa joue et ses yeux océan firent face aux siens. Ils étaient mouillés de larmes. Elle les ferma, puis, lentement, comme si elle s'attendait à ce qu'il la rejette, elle approcha son front du creux de son cou, se blottit là, et l'entoura de ses bras. Il sentait sa peau nue contre la sienne, sa poitrine, son ventre, son souffle contre son torse. Severus inclina la tête. L'instant d'après ses bras se refermaient sur la jeune femme. Khorine renifla et deux larmes lui échappèrent. Severus soupira. Une de ses mains vint se poser sur la tête de sa petite sorcière.
-Je suis désolée; murmura-t-elle encore.
-Je devrais t'Oublietter; lâcha-t-il dans le creux de son oreille.
Khorine se tendit. Elle comprenait… Pourtant, Severus ne fit pas mine de bouger. Finalement, elle se détendit dans ses bras. Ils restèrent ainsi, l'un contre l'autre, tandis que le temps s'écoulait et Khorine ne pouvait plus penser à rien et Severus la serrait contre lui, le nez dans ses cheveux.
Ils prirent leur petit-déjeuner tard, puis Severus fut appelé dans son bureau et Khorine se retrouva seule. Elle partit se blottir dans son fauteuil, dos au feu, à fixer les montagnes dans le lointain.
… Lorsqu'il comprendrait… Lorsqu'il saurait qu'elle lui avait menti… Il ne lui ferait plus jamais confiance. Elle ne pouvait le trahir qu'une seule fois. Etait-ce une preuve qu'elle se méfiait encore de lui? Elle aurait dû tout lui révéler. Ils auraient pu réfléchir ensemble à un bon plan, un meilleur plan… Mais, il avait hésité, elle l'avait vu dans ses yeux. Il lui avait dit qu'il voulait la garder en sécurité et il avait semblé soulagé en apprenant qu'elle recevrait les informations au dernier moment. Elle était prête à parier qu'il pensait qu'elle ne serait pas en première ligne.
Avait-elle pris la bonne décision?
C'était assez. Elle pourrait s'estimer heureuse si elle réussissait à survivre, avec ou sans remord, quelle importance?
Elle n'avait plus le temps de penser à ça. Il lui fallait se préparer pour la cérémonie du Marquage et, plus que tout, renforcer ses barrières mentales, contrôler son esprit, être prête à faire face au Seigneur des Ténèbres.
Elle inspira, ferma les yeux puis se redressa dans son fauteuil et croisa les jambes. Toutes ces pensées l'empêchaient de garder ses barrières mentales en place. Elle avait deux semaines pour se préparer, pour faire le vide, pour tromper Voldemort une dernière fois. Son cœur s'emballait rien que de penser que tout serait bientôt fini. Il lui fallait se contenir, rester concentrée, des pensées parasites venaient bourdonner dans son esprit, des visages morts se gravaient sur ses paupières; elle inspirait, expirait, se concentrait pour faire le vide, pourtant des émotions violentes la foudroyaient dès qu'elle fermait les yeux. Son refoulement de toute émotion depuis plus d'un an avait endommagé son esprit. Il n'était plus censé ressentir quoi que ce soit, libérer le moindre sentiment, accéder au moindre souvenir. Tenter d'y avoir accès, tenter de les contrôler, était devenu impossible.
Le premier jour, elle eut trois attaques de panique. Recroquevillée, à genou au sol, s'agrippant à son fauteuil, cherchant désespérément de l'air pour ses poumons trop étroits, entendant ses propres halètements grinçants, se voyant submergée par l'effroi sans rien pouvoir faire, et la panique, la peur panique, glaçant chacune de ses veines… Quand la crise passait, elle se redressait sur des genoux tremblants, reprenait sa place sur son fauteuil, et fermait de nouveaux les yeux. Elle n'osait penser à ce qu'il se passerait si elle enlevait sa bague de sureau.
Vers le milieu de l'après-midi, vidée de ses forces, elle s'endormit dans son fauteuil. Et le lendemain, tout recommença. Les mécanismes de défense qui lui avaient permis de survivre jusqu'ici avaient brisé quelque chose dans son esprit. Pourtant, dans deux semaines, elle devrait le contrôler. Il ne devait y avoir aucune faille.
Elle comprenait avec horreur qu'elle n'avait survécu à son entrevue avec Voldemort à Noël que par pure chance. Une seule pensée parasite, une seule émotion hors de son contrôle, et elle aurait été exécutée.
Elle fermait les yeux et se concentrait et les cauchemars gonflaient devant ses yeux et la submergeaient. Elle montait dans le lit de Rogue le soir, épuisée, abattue et ne trouvait le sommeil que blottie contre le sorcier. Au bout d'une semaine sans amélioration, elle changea de tactique. Elle ne pouvait pas se réparer en une semaine, impossible, elle le voyait bien à présent, ce qu'elle devait réussir à faire, c'était trouver un mécanisme qui lui permettrait de contrôler ses émotions durant quelques minutes. Ses barrières mentales étaient assez puissantes pour bloquer toute pensée, mais lorsqu'elle les laisserait tomber, lorsqu'elle irait chercher la volonté de tuer Voldemort, il lui faudrait rester concentrée, ne pas hésiter, elle n'aurait que quelques secondes.
Alors elle se concentra sur sa haine, sur la rage qui bouillonnait en elle depuis si longtemps, et elle chercha à la canaliser. Elle s'y prépara, sans relâche, espérant que cela suffirait, priant pour que cela suffise.
Il n'y avait plus beaucoup de mots entre Severus et elle, ils se serraient juste l'un contre l'autre le soir et ne se lâchaient pas jusqu'au petit matin. Khorine refusait de penser que dans quelques jours elle n'y aurait peut-être plus jamais droit.
Les derniers jours passèrent trop vite et ce fut un choc quand Severus lui annonça qu'ils étaient le 5 mai.
-Où… aura lieu la cérémonie? Murmura Khorine les mains tremblantes.
-Dans la Grande Salle de Poudlard. Tous les étudiants seront enfermés dans leur Salle Commune après le déjeuner.
Khorine déglutit:
-Est-ce que… Est-ce que tu sais quand nous serons appelés?
-15 heures d'après mes derniers renseignements; répondit-il, le visage fermé.
Khorine soupira et serra ses mains l'une contre l'autre pour empêcher ses tremblements.
-Je vais… prévenir l'Ordre.
Elle était gelée. Prenant le Gallion dans sa poche, elle se rapprocha du feu de cheminée et les contacta. Elle reçut un signal de McGonagall. Ils se tiendraient prêts.
Il était neuf heures du matin.
Ils étaient tous deux dans le salon, se faisant face sans rien se dire…
-Severus; finit-elle par murmurer, j'ai peur.
-Contrôle cette peur et elle te sauvera la vie, laisse-la te contrôler et tu ne verras pas la fin de cette journée; lâcha-t-il les bras croisés.
-J'ai un peu froid, est-ce que tu peux me prendre dans tes bras une dernière fois?
Elle frissonnait à présent. Severus sortit sa baguette sans un mot et alimenta le feu dans la cheminée, la pièce se réchauffa de quelques degrés, puis il s'assit dans son fauteuil et laissa la jeune femme s'asseoir sur ses genoux et se blottir contre lui. Elle mit son petit nez froid dans le creux de son cou, juste au-dessus de son col.
-Tu es glacée, Khorine; grommela-t-il avant de leur faire apparaître une couverture.
-Désolée; marmonna-t-elle.
Elle ne tarda pas à fermer les yeux et les heures qui passèrent furent paisibles. Severus lisait un livre, sa respiration profonde la calmait, ainsi que le bruit des pages qui se tournaient à intervalles réguliers.
A un moment il fallut déjeuner. Elle perdit sa chaleur et ses veines se gelèrent de nouveau. Elle se força à manger malgré son estomac noué, puis partit s'enfermer dans sa chambre. Avait-elle pensé à tout? Elle était passée par le laboratoire pour prendre deux fioles d'Anti-Douleur, ses barrières mentales tremblaient mais elle parvenait à les maintenir en place. Elle avait le Gallion dans sa poche… Elle ne pouvait plus penser, les minutes s'écoulaient… Severus vint toquer à sa porte:
-Il est l'heure.
Elle se figea… Elle ferma les yeux, inspira… Enfin.
Khorine s'assura que sa baguette était dans sa poche. Elle ouvrit une fiole d'Anti-Douleur et l'avala cul-sec. Sa respiration ralentit, son cœur aussi, un masque de glace vint geler ses traits. Un sourire sinistre écorcha ses lèvres.
Elle sortit de sa chambre et fit face à Severus.
-S'il m'arrivait quelque chose…; commença Khorine.
Elle fut tue par un baiser incongru. Severus laissa son regard s'adoucir un bref instant avant que ses traits ne se referment.
-Allons-y.
Khorine cilla et réussit à se ressaisir. Alors, elle lui mentit en disant que l'Ordre lui avait ordonné de prendre le Choixpeau avec elle. Severus fronça les sourcils à cela mais le cacha dans sa cape au moment où ils passèrent dans son bureau. Sans un mot ils continuèrent leur progression, toujours plus bas, descendant escaliers après escaliers. Ils arrivèrent au seuil de la Grande Salle.
Les grandes portes étaient ouvertes sur une marée de sorcières et sorciers à visage découvert. Le plafond ressemblait à un ciel de cimetière, morne et gris. Des murmures enflaient au-dessus de la foule. Severus et elle entrèrent et se frayèrent un chemin vers le devant de la Grande Salle, l'estrade des professeurs s'y dressait toujours mais la table avait disparu. Il ne restait que le grand fauteuil doré directorial. D'autres recrues attendaient déjà, transpirant la peur. La glace durcit sur les traits de Khorine. Elle attendit sans bouger, Severus à ses côtés.
Elle ne pensait plus rien, elle avait froid, elle respirait lentement.
Soudain, les conversations se turent.
Elle entendit le raclement des écailles avant même de relever les yeux pour voir Nagini. L'énorme serpent ondulait, ses yeux qui ne cillaient pas rivés sur les recrues. Voldemort marchait à sa droite, paré de robe de sorcier d'un noir riche, ses esclaves suivaient, différentes de celles de Noël avec cependant le même regard vide. Un craquement osseux commença à résonner dans la tête de Khorine. Elle était la seule à l'entendre, avec l'écoulement de gouttes de sang dans un flaque. Elle resta de glace. Pourtant, le bruit grandissait, gonflait, explosait contre la barrière de son crâne, jusqu'à être si fort qu'elle ne l'entendit plus. Elle vit Voldemort debout sur l'estrade, bouger ses lèvres, elle vit la première recrue monter sur l'estrade. Rien… Et puis, au-delà des craquements, un cri. Khorine cilla. Un hurlement. Et l'odeur de chair brûlée. Les pupilles rouges de Voldemort brillaient de cruauté. La recrue finit par tomber à genou et tous purent voir la Marque qui s'encrait et se contorsionnait sur son avant-bras. Lorsqu'elle fut entière, Voldemort lâcha le bras du sorcier et il s'effondra. Ce furent deux esclaves qui le tirèrent hors de l'estrade, et un autre nom fut appelé, puis les cris, l'odeur, un autre nom, encore un autre. Une par une les recrues rejoignaient Voldemort au sommet de cette estrade et Khorine se glaçait. Elle n'était pas appelée. Devait-elle risquer le tout pour le tout? Profiter du marquage d'un autre pour tenter de le tuer? Mais Nagini était trop loin, et c'était Severus qui avait l'épée. Une autre recrue fut appelée.
L'Ordre attendait son signal.
Elle ne pouvait pas attaquer.
Elle finit par se retrouver seule devant l'estrade, Severus derrière elle.
-Khorine Lumare!
Le sifflement de son nom fut une délivrance. Khorine inclina la tête subrepticement, puis la releva et ses barrières mentales étaient en place. Elle se dirigea vers les marches à gauche de l'estrade, puis s'avança vers Voldemort. Il y avait des murmures venant des ombres à ses pieds. Elle avançait vers le Seigneur des Ténèbres qui la fixait, le regard rouge, un sourire cruel aux lèvres. Les os craquaient, le sang gouttait mais elle continuait à marcher, un pas devant l'autre, jusqu'à s'agenouiller devant lui. Les mots qu'il prononça, ce qu'il dit à ses mangemorts, elle ne les comprit pas vraiment, ses sifflements de serpent lui écorchaient juste les oreilles. Ensuite il la fit se relever et elle tendit son bras gauche. Les doigts de Voldemort se refermèrent dessus, glacés, comme la Mort. Il enfonça sa baguette dans son avant-bras, une faible brûlure commença à poindre, une marque noire, et elle commença à crier. Le sourire de Voldemort s'agrandit.
Le crâne d'Harry qui explosait, son sang qui gouttait sur les dalles, les jambes de Ron qui dépassaient des piliers, la cervelle d'Hermione répandue sur le sol… Cela s'était passé à quelques pas d'ici, juste derrière les grandes portes… Cela faisait un an, jour pour jour. Elle allait lui faire payer.
D'un coup, ses barrières mentales tombèrent et la rage et la colère la submergèrent. Son cri se changea en râle et ses yeux écarquillés se troublèrent. Sa haine la prit à la gorge. Elle s'empara de sa baguette. Et pendant une infime seconde elle se vit face au Seigneur des Ténèbres, le bras souillé, dos à Severus et des centaines de Mangemorts, Nagini à sa droite. Ce moment fut marqué au fer rouge dans son esprit. Puis elle posa sa baguette sur la tempe de Voldemort, et avant qu'il n'ait même pu s'en rendre compte, cracha:
-Avada Kedavra.
Les yeux rouges se voilèrent aussitôt, la baguette de sureau tomba dans un claquement de tonnerre, puis le corps entier du Seigneur des Ténèbres. Il y eut un silence assourdissant, et puis un raclement d'écailles. L'instant d'après Khorine relevait la tête et deux yeux jaunes fondaient sur elle, les mâchoires béantes, les crochets plein de venin. Elle n'eut que le temps de lever son bras gauche pour se protéger avant que le serpent ne la projette hors de l'estrade, refermant sa gueule sur son bras. Le corps énorme s'enroula autour du sien alors qu'elle luttait pour maintenir les crocs du reptile fichés dans son bras.
-Severus! Appela-t-elle. Severus, l'épée!
Le sorcier était pâle comme la Mort, à deux pas de la sorcière et du serpent, figé dans ce cauchemar irréel depuis que Khorine avait posé le pied sur l'estrade en bois. Il y eut une seconde où tout resta en suspens, où les mangemorts les plus proches reculaient avec égarement, le regard toujours rivé sur l'estrade, où Nagini relarguait son venin dans le sang de Khorine, où Severus comprit que ce cauchemar était une réalité. Alors il tira l'épée de Gryffondor du choixpeau et, d'un coup net, trancha le corps du serpent. Il cessa de tressauter et s'effondra en masse sur la sorcière… Une ombre noire quitta la carcasse du reptile…
C'était fini… Tout était fini… Un sortilège vert poison explosa contre le bouclier de Severus à deux centimètres de la tête de la sorcière.
Ah…
La cape noire de Severus flotta devant ses yeux, la protégeant de la marée de mangemorts qui sortaient leur baguette. Le sorcier avait sur le visage un masque haineux, dans la main gauche sa baguette d'ébène, dans la droite l'épée de Gryffondor. Une aura menaçante était crachée de son corps par vague et chacun pouvait le sentir. Certains sorciers reculèrent, d'autres tendirent la baguette vers lui, tous prirent de plein fouet son sortilège de magie noire. Leurs corps se desséchèrent et leurs âmes les quittèrent. Des cris d'horreur s'élevèrent, il y eut un mouvement de panique dans la masse des sorciers.
Khorine de son côté, ne voyait rien, cachée par sa cape. De sa main recouverte de sang elle fouilla dans sa poche et en sortit son Gallion. Son avant-bras commençait à se raidir. Elle posa sa baguette sur le Gallion, pria fort en fermant les yeux, puis envoya le signal… Elle garda les yeux fermés… Ses oreilles bourdonnaient…
Puis les Grandes Portes explosèrent.
Alors Khorine leva les yeux au ciel, et une larme lui échappa.
Il y eut plusieurs mouvements de foule chez les mangemorts, certains tentèrent de transplaner, d'autres se tournèrent vers l'Ordre pour lutter, d'autres se plaquèrent contre les murs, d'autres tentèrent de fuir par la sortie des professeurs et ceux-là montèrent sur l'estrade, piétinant le corps du Seigneur des Ténèbres. Mais la porte était fermée. Ils tentèrent de la détruire. Elle résista.
Le ciel de la Grande Salle se teintait d'un rouge sang.
Khorine se redressa, le bras gauche pendant et dégoulinant de sang, la baguette levée.
-Expelliarmus; murmura-t-elle.
Elle fit dos à Severus, et tous les Mangemorts qui avaient tenté de fuir se rapprochèrent. Il y avait de la panique dans leurs yeux. Ils se bousculaient pour tenter de détruire la porte, ou pour s'en écarter et tenter leur chance de l'autre côté; et certains avaient le regard qui tombait sur elle, et la haine surpassait la peur.
-Avad…
-Inflammare; cracha Khorine.
Un tourbillon de flamme sortit de sa baguette pour atteindre des sorciers de plein fouet. Ils n'avaient pas la place de reculer. Des hurlements s'élevèrent, l'odeur de chair brûlée.
-Inflammare.
La masse noire humaine se fendit pour s'écarter du feu et les cris devinrent déchirants.
Le poison remontait le long de son bras.
Soudain, les flammes disparurent, soufflées, et, de la fumée, sortirent deux silhouettes qui sautèrent au bas de l'estrade.
-Comme on se retrouve, Lumare; cracha Amycus Carrow.
La figure d'Alecto était une grande grimace de haine.
-Tu vas crever, traîtresse à ton sang!
Khorine se mit en position et eut juste le temps de créer un bouclier avant que leurs sorts ne s'explosent dessus. L'un après l'autre, sans lui laisser de répit, ils se mirent à lui envoyer des salves de maléfice. Leur puissance la faisait reculer. Elle ne pouvait pas lâcher son bouclier. Elle ne pouvait pas esquiver, au risque d'exposer le dos de Severus. Elle lisait la haine dans leurs yeux et son bras était froid et la fièvre commençait à lui voiler les yeux. Un halètement lui échappa.
Un violent maléfice fit exploser son bouclier, le prochain sort lui percuta la main droite, ses doigts se brisèrent et sa baguette lui échappa.
-Ah…
Sa main retomba, inutile et elle vacilla.
-A toi l'honneur; lâcha la sœur Carrow.
Son frère eut un rictus mauvais. Il leva sa baguette. L'instant fut comme en suspens. Les battements du cœur de Khorine résonnaient à ses oreilles, sa respiration était violente, la sueur lui coulait dans le dos. Elle était encore en vie; et soudain, elle comprit qu'elle voulait survivre à ce cauchemar, qu'elle le voulait de tous les fibres de son être, pour voir un nouveau jour se lever, une nouvelle aurore d'un rouge orangé.
Le sortilège de mort fusa de la baguette d'Amycus Carrow et l'éclat vert poison se refléta dans ses yeux. Il fonça vers elle.
-Protego; haleta Khorine, appelant désespérément ses pouvoirs, tentant une magie sans baguette.
Un bouclier se forma aussitôt devant elle, déviant l'Avada. Khorine ouvrit de grands yeux et les fit tomber sur ses mains pleines de sang, sur son pouce à la bague de sureau. Un rire écorché lui échappa.
-Comment est-ce possible? Cracha la sœur Carrow.
Khorine se mit aussitôt en position, appela sa baguette d'un Accio et se lança un maléfice de glu pour que ses doigts brisés tiennent autour du manche. Deux sortilèges foncèrent vers elle. Elle les dévia de sa bague; et commença à attaquer. Des éclairs rouges sortaient de sa baguette, fusant vers les deux mangemorts qui se mirent à reculer.
-Tue-la! Hurla la mangemorte.
Un Bombacta la projeta bien au-dessus de l'estrade et la fit s'écraser contre le mur du fond. Il y eut un craquement sec, elle tomba comme une masse.
Le dernier Carrow ne se retourna pas.
-Tu aurais dû m'appartenir; siffla-t-il tout en l'attaquant. Tu aurais été à moi! Je t'aurais brisée! Avada Kedavra!
Khorine para et… Un éclair vert fusa de derrière son épaule et se figea en plein dans la poitrine de Carrow. Ses yeux se vidèrent, il s'effondra. Khorine resta immobile, haletante, les jambes tremblantes. Les derniers combats cessaient, au loin, il n'y avait que le corps chaud de Severus juste derrière elle. Alors… c'était fini…
Ses genoux cédèrent sous elle. Tout bourdonnait. Elle n'entendait pas la voix de Severus. Elle finit allongée sur les dalles du sol. La sensation glacée était dans tout son bras gauche, son épaule et une partie de sa poitrine. Elle avait de plus en plus de mal à respirer.
Severus était agenouillé auprès d'elle, marmonnant une formule latine pour extraire le venin de sa blessure. Du sang noir glougloutait hors de la plaie et noyait les dalles sous eux.
-Severus Rogue, vous êtes en état d'arrestation, éloignez-vous immédiatement de Miss Lumare.
Il y eut de violents mouvements à la lisière des yeux de Khorine, et soudain, le visage du Professeur McGonagall. Il était clair et net parmi les ombres, et Khorine voulut la retenir de sa main droite, elle ne put qu'emmêler sa baguette dans la cape de son aînée.
-P… Professeur…
Le vieux visage était blême.
-Merci… d'être venue…
Au loin elle entendit Severus appeler Winky et demander des potions. Bientôt, des fioles étaient pressées contre ses lèvres. Quand elle put respirer de nouveau, ses yeux s'ancrèrent encore à ceux de son professeur. Ils étaient flous à présent.
-Professeur; murmura-t-elle dans un souffle et le professeur McGonagall dut se pencher pour l'entendre, Severus avait l'épée… Severus est… de notre côté… depuis toujours… Protégez-le.
Elle sentit le profond tressaillement de son professeur. Mais de si loin, son corps était glacé, sa main gauche, son avant-bras et son bras gauche, son épaule et sa poitrine qui se soulevait faiblement, une partie de son cou. Il n'y avait que sa main droite de brûlante. La sueur lui noyait le front. Elle respirait à peine… Ses paupières se fermaient, contre sa volonté, et elle était si fatiguée.
-Protégez-le; souffla-t-elle encore entre ses lèvres gelées… Il… est…
Son corps s'affaissa et ses yeux roulèrent à l'arrière de sa tête. Un gémissement déchirant passa les lèvres de Minerva.
-Elle s'est évanouie; siffla Rogue entre ses mâchoires crispées… Winky!
La petite elfe apparut de nouveau, ses grands yeux affolés rivés à ceux de son maître.
-Conduis-la à Ste Mangouste, immédiatement!
Avant que quiconque ait pu l'en empêcher, l'elfe prit l'épaule de la sorcière et claqua dans ses doigts. Il ne resta plus que Severus agenouillé dans une mare de sang, les mains d'un rouge noirâtre, face à Minerva, entouré d'une partie de l'Ordre, de la moitié du clan Weasley avec Arthur qui retenait Molly de s'approcher. Un silence violent les entourait. Severus ne s'en rendait pas compte, les yeux dans le vide. Et soudain, quelque chose se mit en place dans son regard, il enfonça sa baguette dans le cou de Minerva. Tous les autres le mirent en joue.
-Quel plan admirable, Minerva; siffla-t-il entre ses mâchoires crispées. Digne d'Albus lui-même. L'envoyer en première ligne, lui faire prendre la Marque, la faire tuer de sang-froid, la laisser seule face à Nagini, et attendre bien gentiment son signal derrière les portes!
Une colère formidable apparut sur le visage de l'enseignante.
-Comment? Comment oses-tu me donner des leçons? Toi qui as trahi et tué, qui a laissé mourir des enfants sous ta protection, qui…
Quelque chose troubla le regard de la sorcière, puis elle continua avec amertume:
-Penses-tu que ce plan venait de moi? Nous n'avions pas le choix. Miss Lumare nous a contacté quelques jours plus tôt, tout était déjà en place, nous ne connaissions pas les détails de son plan, seulement le jour, l'heure, le lieu.
-Vous auriez dû l'arrêter! Tonna Severus.
La baguette s'enfonça durement dans le cou ridé de la sorcière.
-Ah… Et que faisais-tu? Toi qui es «dans notre camp depuis toujours».
Le teint de Severus vira au grisâtre. Khorine ne lui avait rien révélé de ses plans. Elle n'avait pas eu confiance en lui. Ou alors, avait-elle su qu'il l'en empêcherait? Le plan était si risqué, il l'aurait retenue. Ils auraient trouvé autre chose, avec lui en première ligne, avec n'importe qui d'autre en première ligne. Elle l'avait trahi. Sa baguette trembla, finit par s'abaisser.
-Est-ce que; s'éleva la voix brisée de Molly, … est-ce qu'elle va vivre?
Le silence appesantit l'atmosphère. Severus ne montrait plus qu'un masque vide.
-Je ne sais pas; souffla-t-il.
A ces mots, la matriarche des Weasley fit volte-face et courut vers l'extérieur, vers Ste-Mangouste, suivie d'Arthur, de tous les Weasley, Ginny, George, Bill et Fleur, Charlie, de Neville et Luna. Les autres membres de l'Ordre s'écartèrent aussi. Il ne resta plus que Severus et Minerva, debout, les yeux vides, la tête basse. Autour, les derniers mangemorts se faisaient arrêtés, les morts étaient alignés contre les murs, des éclats de rire, de larmes ou des cris résonnaient dans la salle; le ciel restait rouge sang. A ce moment, les deux professeurs se comprenaient sans un mot. Un sourire triste et pincé apparut sur les lèvres de l'écossaise et elle posa sa main ridée sur celle plein de sang de Severus. Il ne broncha pas.
-Il est mort, Severus.
…
-Savez-vous ce que voit Khorine Lumare lorsqu'elle ferme les yeux? Demanda-t-il d'une voix atone. Non? Elle voit le crâne de Potter exploser entre les mains du Seigneur des Ténèbres, elle voit le sang et les membres déchirés de Weasley et le cerveau de Granger étalé sur le sol... Nous avons échoué. Nous devions les protéger.
Minerva ferma les yeux, la peine creusant ses rides. Sa main se referma sur celle de Severus.
-Elle survivra.
Le sorcier releva ses yeux vides. Minerva soutint son regard.
Une nouvelle délégation d'aurors entra au même moment, menée par leur chef, Theodora Wytt. Ses ordres claquèrent sèchement dans la salle. Les deux vétérans ne bronchèrent pas.
-Severus Rogue, au nom du nouveau ministère que je représente, vous êtes en état d'arrestation pour le meurtre d'Albus Dumbledore, pour participation au génocide de moldus et de sorciers et pour appartenance au groupe terroriste des mangemorts. Vous allez être conduit à Azkaban en attendant votre jugement.
Protégez-le…
-Il n'ira nulle part; annonça Minerva la baguette sortie.
-Voyons professeur, nous ne pouvons pas le tuer ici, bien que l'envie ne manque pas, il lui faut un procès; annonça Theodora Wytt avec un rictus hautain.
-Le professeur Rogue est de notre côté, je le tiens de source sûre.
Il y eut un instant de flottement, et quelques aurors derrière Wytt se mirent à chuchoter. Celle-ci claqua sa langue contre ses dents. Le silence se fit.
-Même s'il était de notre côté, Severus Rogue est coupable de nombreux crimes, il sera arrêté et jugé équitablement par le Conseil de Justice Magique.
Minerva pointa aussitôt sa baguette sur l'auror. Et pour l'amour de Merlin, elle était prête faire échapper Severus, mais celui-ci s'avança, les poignets relevés, vers les aurors. À Minerva, il lâcha d'une voix atone:
-Mes mains sont pleines de sang, Minerva. Laissez-les me juger.
Wytt eut un nouveau rictus avant de faire apparaître elle-même les chaines autour des poignets de Severus Rogue. Il fut emmené, sous bonne garde. Le professeur McGonagall eut les yeux fixés sur son dos jusqu'au bout, jusqu'à ce qu'il disparaisse derrière les restants de portes explosées. Alors, elle baissa la tête. La voix mourante de Khorine résonnant encore à ses oreilles.
Protégez-le…
