Chapitre 3
-Ils auraient dû brûler les apothicaires moldus et leur mummy au lieu de s'en prendre aux sorciers! Sifflai-je en tournant une nouvelle page de mon grimoire de potions.
Je secouai la tête devant tant d'idiotie, ce qui ne m'empêcha pas d'intercepter le rictus sarcastique de Rogue. C'était presque un sourire et ses traits étaient presque détendus. Les ombres et les flammes dansaient à tour de rôle sur son visage, le feu de cheminée crépitait face à nous...
-Dîtes-vous qu'il y a eu pire que les excrétions des cadavres dans les remèdes du Moyen-Âge, Khorine; laissa-t-il entendre de sa voix traînante.
C'était écoeurant! Je grognai en me replongeant dans ma lecture. Cela faisait quatre jours que je m'étais réveillée, et dans moins de quarante-huit heures je pourrais prévenir mes amis, leur dire que j'étais en vie, et les retrouver! Je profitais sagement du temps de répit qu'il me restait dans le sous-sol de la maison, Impasse du Tisseur, tout en étant impatiente de retrouver mes meilleurs amis!
Je repris ma lecture, l'auteur -un certain Jean Marchand Molleteil- parlait de l'utilisation des cornes de narval dans ces remèdes moyennageux. Une folie, et un massacre certain d'animaux magnifiques.
Rogue lisait une revue de potionniste datant de quelques mois...
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-Plus fines et plus régulières ces découpes de feuilles de pissenlit! Je vous l'ai déjà dit, un centimètre exactement entre deux tranches! Recommencez!
Mes phalanges me brûlaient, je n'arrivais pas à contrôler les tremblements de mes doigts et j'avais déjà gaspillé trois feuilles de taraxacum officinalis. Mais je ne pouvais pas abandonner!
Je pris une nouvelle feuille dans le petit bocal devant ma paillasse et la lissai des doigts, apposai le couteau. Il tressautait. Je fermai les yeux, la respiration difficile.
Rogue risquait de perdre patience, il ne lui restait plus que deux oeufs de Runespoor à écailler avant d'avoir besoin du pissenlit.
-Allez vous allonger espèce d'incompétente! On ne demande pas à travailler sur une potion sans avoir le talent adéquat! Siffla-t-il.
La fureur obscurcit mon regard, je crispai les mâchoires en restant fixer sur mon ingrédient. Mon couteau siffla, trancha net la drogue végétale à un centimètre de son bord. Je déplaçai mes doigts, recommençai, plus concentrée et tendue que jamais. Un autre centimètre, encore un... J'arrivai ainsi à la moitié de la feuille mais la prise sur mon couteau était de plus en plus faible et ma tête bourdonnait, j'avais le goût du sang dans la bouche. Ma lame se plaça pour la prochaine découpe, vacillant, je... Sa main froide vint recouvrir la mienne soudain et la maintenir. Mon maître des potions se plaça juste derrière moi, ses lèvres si proches de mon oreille. Son souffle s'emmêla dans mes cheveux.
-Gryffondor bornée; murmura-t-il...
Un sourire m'échappa, qu'il ne put voir. Son autre main se plaça de même sur la mienne, celle qui maintenait la feuille en place. Ses bras m'entouraient, il y avait son torse contre mon dos. Je me sentais piégée... mais en sécurité et protégée. Je...
Il dirigea le couteau sur le pissenlit avant de couper avec maestria, à la distance qu'il fallait. Il continua sans me laisser le temps de réfléchir à ce qu'il faisait ou ce que je faisais ou pourquoi je ne m'écartais pas.
-Ainsi, passez l'index sur la tranche supérieure de votre lame, vous devez en avoir la maîtrise complète...
J'étirai mon doigt sous le sien, la différence était subtile mais réelle, sa peau devenait glacée... Vraiment...
-Votre main droite, repliez les doigts, vous ne devez laisser aucune accroche au couteau.
J'obéis et nous finîmes la première feuille. Il se pencha pour en prendre une autre, la positionna sous ma main puis la recouvrit de la sienne. Nous devions en découper cinq. Il m'aida et murmura à mon oreille sans me lâcher jusqu'à trancher le dernier morceau de la dernière feuille de pissenlit.
-Merci; murmurai-je assez choquée.
Il ne s'écartait toujours pas. La Régénération Sanguine bouillonnait doucement dans le chaudron d'à côté. Des volutes discrètes tournoyaient...
-Tout ce temps perdu à prendre soin de vos bêtises; grogna Rogue.
Il fit un pas en arrière, et sa chaleur s'évanouit aussitôt. Je ne me sentais pas bien, un peu nauséeuse. L'espion s'empara des morceaux de pissenlit et les ajouta par dix à quinze secondes d'intervalles. Ses longs doigts pâles et glacés dansaient au-dessus du chaudron. Il ne se tenait qu'à quatre pas de moi et je m'interrogeais...
-Occupez-vous de réduire ces opales en poudre au lieu de rester les bras ballants!
Je pris le mortier, le pilon en céramique tout près, les éclats d'opales, et m'attelai à la tâche sans faire la moindre remarque. J'étais épuisée, nous travaillions sur des potions depuis le début de l'après-midi, il était vingt heures, je pourrais envoyer un message à mes amis dès le lendemain!
Quant à Rogue, ses réactions, ses remarques brusques des dernières heures, ses rapprochements soudains, me déconcertaient.
Je me demandais ce qu'il ferait une fois que j'aurais retrouvé Harry, Hermione et Ron. J'espérais qu'avec mes informations la guerre prendrait fin, assez vite, que Rogue resterait caché jusqu'à la destruction du Seigneur des Ténèbres...
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-Vous n'êtes pas prête! Siffla Rogue.
-Je n'attendrai pas un jour de plus! Rétorquai-je le regard flamboyant.
Rogue abattit sa tasse de café des deux mains contre sa soucoupe, elle se fendilla. Je ne l'avais pas vu aussi furieux depuis notre deuxième année quand Harry, Ron et moi étions arrivés à Poudlard à bord de la Bentley volante, ou... quand j'avais parlé de modifier le passé dans le bureau de Dumbledore et qu'il m'avait agrippé par le col.
-Vous ferez ce que je vous dis Lumare! Il n'est pas question que vous détruisiez le travail de toute une semaine en quelques minutes!
-Mes amis sont fous d'inquiétude parce que je ne suis pas revenue, qu'ils n'ont pas de nouvelles et que la dernière fois qu'ils m'ont vue j'étais face à quatre mangemorts qui se demandaient de quelle manière ils allaient me torturer! Je me fiche d'être encore plus mal qu'il y a sept jours, il faut qu'ils sachent que je suis en vie!
Les croissants gisaient sur la table basse entre nous deux, mais l'anxiété et maintenant la fureur m'empêchaient d'en avoir une quelconque envie! Je le foudroyais des yeux depuis mon fauteuil, un océan déchaîné contre les courants de lave onyx dans son regard. Mais je ne cèderai pas!
Non, ce fut Rogue qui retrouva un masque neutre tout à coup. Il glissa sur son visage, recouvrant chacun de ses traits. Ses yeux noirs ne trahissaient plus rien.
-Bien.
Je cillai, surprise. Il abandonnait?
-Allez-y; ordonna-t-il d'une voix traînante et hautaine.
Soulagée, je ne cherchais pas à expliquer son revirement. Je finis mon thé, me calai dans le deuxième fauteuil que Rogue avait amené de ma chambre, puis sortis ma baguette d'orme noir. Je fermai les yeux, inspirai. Après sept jours interminables, j'allais enfin pouvoir leur révéler que j'étais vivante, que tout allait bien, et j'allais savoir s'ils étaient tous ensemble et en sécurité...
Harry... Hermione... Ron...
Je les revoyais près du Lac Noir, sous le grand chêne. Ron lançait une blague et Harry riait sans retenue, son regard émeraude scintillait. Hermione ne pouvait empêcher un sourire d'étirer ses lèvres tout en secouant la tête et sa touffe de cheveux embrouillés. Je les observais tous doucement...
-Excepto Patronum; murmurai-je.
Mes paupières se rouvrirent avec lenteur, ma concentration à son summum, ma magie s'écoulant petit à petit hors de mon corps. Son éclat d'un blanc pur illuminait le salon, l'énergie se rassemblait en une boule de plume. Elle grossissait, se transformait, ma puissance s'amenuisait... Je...
Une trille délicate soudain, et il déploya ses ailes. Ce fut magnifique. Puis le phenix vola jusqu'à l'accoudoir de mon fauteuil. J'étais épuisée, mais l'énergie coulait encore entre moi et mon Patronus et il fallait délivrer mon message.
Rogue observait sans un mot, sans faire un geste pour m'aider. Mon phenix vint tendre la tête jusqu'à ma main, je le caressai en souriant, la voix de Ron et leurs rires me parvenaient.
-Tu vas... faire parvenir ce message à mes amis. Assure-toi qu'ils sont seuls.
Son chant retentit encore, quelques notes magnifiques. Malgré mon état, mon sortilège était toujours aussi puissant.
-Hermione, Ron, Harry... Je vais bien, je dois juste récupérer encore un peu d'énergie...
Mon souffle se coupa, mes réserves de magie s'épuisaient trop vite.
-Je suis en sécurité. Dîtes-moi que Hermione est guérie... Que vous êtes tous arrivés à la Chaumière... Je... Ai... obtenu des informations. Le cinquième Horcruxe est caché à Gringotts. Je pense qu'il est dans le coffre de Bellatrix Lestrange. Vous devez aller... à Gringotts. Lis le conte de la Fontaine Hermione, tu comprendras. Pour Gringotts c'est...
Du sang, un filet déjà qui quittait mes lèvres, la douleur grandissait.
-... mon oncle, sa marque était toujours active, même après 1981, parce qu'il travaillait à... Gringotts.
Une mare de sang, je crachai. Ma tête bourdonnait. Mon phénix l'évita heureusement, je ne voulais pas que mes amis voient ça.
-Allez! Lançai-je au Patronus qui s'envola aussitôt.
Je sentis Rogue ouvrir une brèche dans les défenses du sous-sol, et l'instant d'après, mon phénix disparaissait. Ma respiration était rauque, erratique, je ne voyais plus rien, je bavais mon sang sans aucune retenue. Je ne pouvais plus. Ma tête tomba contre le dossier du fauteuil, mon regard éteint s'illumina un bref instant, s'accrochant à celui de Rogue. Il reflétait de la peur, ses doigts étaient enfoncés dans ses accoudoirs, tout son corps tendu. Je tentai un sourire vers lui, puis la brume recouvrit mon regard, je perdis connaissance.
A mon réveil, j'avais une fiole de régénération sanguine contre les lèvres et j'étais obligée d'avaler. Les doigts froids de mon professeur de potion me maintenaient la nuque.
J'ouvris des yeux bleus voilés et bus les dernières gouttes avant de tenter de me redresser. Rogue me maintint contre le dossier.
-Ne vous avisez pas de bouger! Vous n'êtes qu'une gamine pourrie gâtée, inconsciente et...
-Croque-mort acétique; rétorquai-je dans un souffle.
-Comment? Siffla-t-il d'un ton tout à fait dangereux.
Mais j'étais encore trop groggy pour y déceler toutes les menaces. Un sourire absent m'échappa et nos regards se rencontrèrent de nouveau.
-C'était affectueux; précisai-je.
Le choc l'empêcha de s'exprimer ou de tenter quoi que ce soit, Rogue resta à me fixer interdit, je l'observais doucement. Il ne devait pas y être tellement habitué.
-Vous seriez morte si je n'avais pas été là; siffla-t-il en se reprenant soudain.
J'hochai la tête, le regard scintillant...
-Je sais, merci.
Ma gorge me faisait mal, tout comme à peu près l'ensemble de mon corps. Mon front était en feu.
-Merci professeur... Est-ce que mes amis ont reçu mon phénix? Est-ce... qu'ils ont répondu?
Rogue grogna, et pressa une nouvelle fiole contre mes lèvres. Pimentine modifiée, sa couleur et les arabesques tellement reconnaissables. La fièvre s'évanouit petit à petit, mais cela ne durerait pas.
-Ils ont répondu.
Je me tendis dans le fauteuil, Rogue me repoussa encore une fois le regard noir.
-Qu'est-ce qu'ils ont dit? S'il vous plaît! Est-ce que Hermione va bien? Et Ron? Je ne sais pas si mon bouclier l'a protégé de tous les sortilèges!
L'ex-mangemort me fit patienter quelques minutes encore et me bourra de potions aux goûts exécrables... Puis il créa une nouvelle brèche dans nos défenses, durant quelques secondes, et trois formes d'une pureté absolue apparurent dans le salon. Un cerf, une loutre, un chien, qui me sautèrent dessus! Les trois, en vie! Je m'esclaffai alors que le chien aboyait comme un fou, que le cerf bramait, que la loutre poussait des petits cris extraordinaires! Les larmes montaient, des larmes de joie.
-Khorine! Tu ne peux pas savoir comme on est heureux!
-On te croyait emprisonnée et torturée! On avait déjà un plan pour entrer au manoir Malfoy, si tu savais! Oh par Merlin!
J'entendais les sanglots dans la voix de Hermione et j'aurais tellement aimé être là et la serrer dans mes bras. Les larmes dévalaient le long de mes joues. Des mois, des mois que je ne les avais pas vu! Ils m'avaient tellement manqué, et leurs voix!
-T-tu vas bien! Eh, tu vas bien! Quand maman va apprendre ça! Elle voulait aller botter les fesses de tous ces mangemorts dans leur quartier général! Ça promettait!
C'était Ron, qui ricanait alors que sa voix tremblait. Les sanglots me compressaient la poitrine et le chien sautait sur mes genoux, la loutre sur mes épaules et le cerf qui pressait son front contre le mien. Je ne voyais plus Rogue, aveuglée par toute cette lumière.
-Je suis guérie, je vais bien! Un peu de Murlap et c'était réglé! Lançait Hermione presque aussitôt coupée par Ron.
-Il faut que tu reviennes vite! Et que tu nous racontes tout ce qui s'est passé! Et avec qui tu es! Comment tu t'es échappée de Poudlard? Luna a dit que les Carrow qui nous poursuivaient sont morts! Et Rogue aussi, ce bâtard graisseux!
Je tressaillis, tournai le regard vers Rogue malgré mes larmes mais ne pouvais rien voir. La voix de Harry m'appela cette fois, mon attention revint au cerf qui essuyait mes sillons de pleurs du museau:
-Hermione pourra te soigner et Bill et Fleur aussi, ils ont accès à tous les remèdes de l'Ordre... Retrouve-nous à la Chaumière, je t'en prie. On décidera ensuite quoi faire pour le horcruxe, la guerre, l'important c'est que tu reviennes...
-... Tu pourras pas échapper à l'énorme câlin d'Hermione, désolé!
-Ronald! Ne dis pas ça!
Ils se chamaillaient un peu ensuite et Hermione continuait à renifler, à parler par l'intermédiaire de sa petite loutre, Ron et Harry à me presser de revenir. J'étais fatiguée, les larmes s'étaient taries sous les caresse du cerf... Pour finir, les formes argentées prononcèrent leurs derniers mots, se dissipèrent, et mon coeur se serra...
J'essuyai mes yeux et mes joues mouillées de larmes puis retombai contre mon fauteuil. La fièvre devenait trop importante. Mais je ne pouvais pas penser à autre chose qu'aux trois patronus apparus devant moi. Je devais leur répondre! Ma baguette retrouva les doigts tremblants de ma main gauche et je...
-Suffit pour aujourd'hui! Siffla Rogue en attrapant ma baguette.
Elle m'échappa tout à coup, je n'eus même pas la force de la retenir. Des mèches de cheveux noirs étaient collées à mon front trempé de sueur, je tressautais le souffle court, écroulée dans mon fauteuil et incapable de tenter quoi que ce soit. Trop faible. Rogue était rigide et sévère devant moi.
-Vous êtes incapable de lancer le moindre sortilège, morveuse. Ou de réfléchir avant d'agir, ce qui semble bien être l'apanage de tout bon Gryffondor! Savez-vous seulement ce que vous allez faire une fois retrouvé vos précieux petits amis?
Il faisait tournoyer ma baguette entre ses longs doigts pâles et la fixait plutôt que moi.
-Trouver un moyen d'entrer à Gringotts et ensuite, la bataille finale, à Poudlard. Rendez-moi.. ma baguette!
Il ignora la dernière partie de mon merveilleux plan, et mon ordre.
-Et comment comptez-vous vous introduire dans la banque la plus protégée de l'Europe sorcière, si ce n'est du monde? Ricana-t-il en détaillant toujours l'orme noir.
-Je ne sais pas! Sûrement... la cape... mais elle ne pourra recouvrir qu'une seule personne. Il faudra que ce soit Harry. Les sortilèges d'Invisibilité ou de Désillusion ne sont pas assez puissants alors... Il nous faudrait du Polynectar; répondis-je essoufflée. C'est notre seule chance!
Rogue cessa de fixer ma baguette, je décelai quelque chose de triomphant au fin fond de ses orbes de ténèbres. Il me rendit ma baguette, je la rangeai... Ses cheveux graisseux pendaient le long de ses traits osseux, il était blafard. Je ne comprenais pas ce qui lui prenait.
-Et que comptez-vous faire? En trouver en vente au Chemin de traverse? Tout est dévasté; siffla-t-il en me criblant du regard et s'approchant. A l'allée des Embrumes? Vous vous feriez tuer bien plus sûrement qu'à Gringotts alors que ces fioles ne sont plus vendues qu'au marché noir.
Je fronçai les sourcils, les mains de Rogue accrochèrent les deux accoudoirs de mon fauteuil. C'était affolant. Son long nez busqué effleurait presque le mien, ses yeux si proches, ses lèvres et son souffle. Mon coeur battait trop vite.
-Un des premiers arrêtés du Ministère a concerné la vente de nombreuses potions jugées trop... dangereuses... pour l'ordre public; m'apprit-il dans un rictus narquois.
-Navrée je n'ai pas vraiment eu le temps de lire les journaux ces temps-ci; ironisai-je malgré mon trouble et ma respiration saccadée.
-Laissez-moi vous apprendre alors, Lumare; reprit Rogue tout à fait neutre, qu'hormis la chance inestimable d'avoir un Mangemort à vos côtés vous ne pourrez jamais obtenir ne serait-ce que les ingrédients de base de cette potion.
Je blêmis et Rogue se redressa sans me quitter de son regard noir. Non...
-Oh si... Vous comprenez parfaitement. Mais la connection que votre précieux petit Potter entretient avec le Seigneur des Ténèbres est trop dangereuse pour que j'apparaisse devant lui, sans compter l'ennui mortel que m'apporterait la compagnie de quatre Gryffondor dans votre genre. Vous devrez rester avec moi durant les trente-et-un jours que durera la préparation du Polynectar.
Ce... C'était bien... ce que j'avais compris... Mais je voulais tellement retrouver Hermione, Ron et Harry. Ils m'avaient manqué, tous ces mois loin d'eux, même s'ils ne le savaient pas encore, même si j'appréciais d'être avec Rogue.
-Et Bill et Fleur? Peut-être que les membres de l'Ordre pourraient nous aider pour les ingrédients? Vous n'auriez plus rien à faire jusqu'à la bataille finale, professeur.
Rogue me fixa bizarrement, haussant un sourcil.
-Seul un mangemort peut avoir accès à ces ingrédients, êtes-vous sourde? Et je ne vois pas beaucoup de serviteurs du Seigneur des Ténèbres dans nos rangs; se moqua-t-il. Bien sûr vous pouvez aussi souhaiter envoyer un membre de l'Ordre à la mort pour chaque nouvelle étape de la préparation du Polynectar. M'est avis qu'il ne vous restera plus beaucoup d'alliés pour votre bataille finale.
-Vous ne...; tentai-je avant qu'il ne me coupe.
-Je ferai ce qu'il faudra jusqu'à la fin de cette guerre, même si cela signifie supporter votre exaspérante personne.
Il croisa les mains dans son dos sans que ne cesse le contact visuel. J'avais l'impression d'être en son pouvoir. J'étais incapable de sentir mes barrières d'Occlumencie, la fièvre consumait mon cerveau.
-Laissez-moi du temps; demandai-je en fermant les yeux essayant de me concentrer il devait bien exister une autre solution. Je vais y réfléchir et demander à...
-Je vous laisse dix secondes; siffla Rogue et j'écarquillai les yeux. Dix... neuf... huit...
Les morts, mes amis que je ne reverrai pas, mon égoïsme, Rogue à mes côtés, Harry et Hermione et Ron, leurs voix qui me suppliaient de revenir, les morts, l'Ordre.
-... quatre... trois...
Toutes ces victimes, le sang sur nos mains, Dumbledore...
-... deux... un...
-J'accepte! Merlin, j'accepte professeur!
Tempête dans mon regard, étincelles que je n'avais pas sentie autour de mon bras droit. Elles s'apaisèrent d'elles-même et je retombai contre le dossier de mon fauteuil. Les yeux du maître des potions ne reflétaient rien qu'une réserve sévère, il se tenait droit, plus près que tout à l'heure, et ses mâchoires restaient crispées.
-Que d'abnégation et de sacrifice; siffla-t-il narquois en piégeant mon menton entre ses doigts glacés.
Il m'amena à le relever sans quitter son regard. Il semblait que je l'irrite à vouloir sans cesse retrouver mes amis, et m'éloigner de lui. Rogue était trop fier pour l'avouer bien sûr.
Mais il laissait toujours entendre que chacune de ses actions était calculée pour servir au mieux ses intérêts ou nous permettre de prendre l'avantage dans cette guerre. Comment pouvais-je lui avouer qu'il avait pris de l'importance pour moi? Que je l'appréciais?
Ma peau devait brûler sous ses doigts et mon visage être rougi par la fièvre. J'étais fatiguée...
-Tout comme vous professeur, accepter de vivre durant encore... un mois avec... une morveuse de mon espèce. Vous êtes... courageux...
Un sourire insolent essaya de se faufiler sur mes lèvres, mais j'étais tellement fatiguée. Je voulais me reposer. Je levai la main jusqu'à enserrer celle qui me tenait le menton, chaud contre froid. Un tressaillement, qui se propagea entre nos deux corps, puis je fermai les paupières.
Mes forces s'étaient dissipées, je n'en pouvais plus... Je m'assoupis.
